Motivé par le challenge "Bonne année, bonnes nouvelles" lancé par Doudoumatous (Je lis, je blogue), j'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) choisi, comme d'autres, de parler de 13 à table, le recueil annuel de nouvelles publié au profit des Restos du coeur depuis 2014 chez Pocket. Je ne me suis pas cantonné à une seule édition, mais je vous présente les trois que j'ai eues sous la main, 2022, 2023 et 2024. Les couvertures sont dues à Riad Sattouf (qui y met parfois en scène son héroïne Esther, sauf erreur de ma part?). Cela m'a donné l'occasion, aussi, de jeter un oeil sur la biographie des auteurs (wikip... est mon ami!).
13 à table! (de gauche à droite, les éditions 2022, 2023, 2024).
Le chat est celui du collègue que je remercie de m'avoir prêté les trois volumes (dasola m'avait questionné sur son chat...).
Je précise bien que ce n'est en aucun cas la notoriété des auteurs qui, moi, m'a amené vers ces recueils: je connaissais certes certains noms, mais rien de plus (je n'avais jamais rien lu d'eux).
2022: cette édition, vendue 5 euros, comporte 280 pages (imprimée en novembre 2021). La page de préface est signée seulement Les restos du coeur. Le thème, cette année là? Souvenirs de vacances. Le recueil comporte 15 nouvelles. Ci-dessus quelques mots sur chacune des nouvelles (dans l'ordre des pages, non dans celui de mon intérêt).
* Le fugitif (p.9): une histoire à tiroirs, de "job de vacances" immortalisé sur pellicule... et de sa redécouverte "en famille" (sans dévoiler la "péripétie secrète"). Je ne sais pas si Tonino Benacquista a juste brodé ou bien tout inventé... Mais si ce n'est pas vrai, c'est bien trouvé!
* Un faire-valoir (p.21): Françoise Bourdin nous réécrit Bonjour tristesse? Une gentille nouvelle.
* Souvenirs d'enfance (p.37): Marina Carrère d'Encausse aurait pu écrire pour les recueils Alfred Hitchcock présente, cette nouvelle "policière" m'en paraît largement digne (tout en respectant le thème imposé)!
* Dag Hammarskjöld (p.55): tonalité très sombre pour des vacances chez Jean-Paul Dubois... avec un zeste de mémoire politique.
* On ne joue plus (p.67): On retient la belle mort de l'oncle blagueur, capable de donner d'inoubliables souvenirs de vacances à ses jeunes neveux. Mais le récit peint par François d'Epenoux s'achève sur une touche plus sombre.
* L'ascension (p.85): un texte triste de Karine Giebel, initié avec un retour en arrière. Entre les deux frères, Théo et Vincent, il y a de l'oreille coupée un peu téléphonée.
* Les étés (p.121): fils unique versus fratrie, on s'observe de loin sans se parler. Marie-Hélène Lafon met en scène des étés campagnards, avec deux familles tellement différentes.
* L'abat-jour cramoisi du vieux Sémaphore (p.139): Alexandra Lapierre (dont je n'ai jamais rien lu) narre comment il peut arriver qu'on se fasse déposséder d'une "maison de famille" par une avocate spécialiste de l'immobilier... Grrr!
* Poulet rôti à l'origan frais et au citron (p.165): une "ancienne" recette de Cyril Lignac et deux pages de blabla (ce n'est pas une nouvelle).
* Le coup de folie des vacances (p.171): Agnès Martin-Lugand (encore une "signature" dont j'ignorais la plume!) pose ici une famille recomposée au milieu de nulle part (on ne capte même pas la G4, gémissent les ados). La location dans le Sud-Ouest finira par un achat.
* La nuit de juillet (p.191): durant l'été 1982, France et Allemagne ne sont pas uniquement rivaux sur le terrain du football, mais aussi dans le coeur d'Hélène, qui a plaisir à fréquenter tant Baptiste que Manfred. Mais à la fin, il ne doit en rester qu'un... nous rappelle Etienne de Montéty.
* Petite vacance (p.217): ceux qui ont lu Tsunami de Marc Dugain (paru en 2023) apprécieront sans doute la pochade estivale concoctée par François Morel en 2022.
* Martine (p.231): c'est un peu l'horreur... qui monte au fil des minutes. Je n'ai pas trop vu le rapport avec les vacances dans ce "speed-dating" dû à Romain Puértolas?
* Génie et Magnificent (p.247): Tatiana de Rosnay brouille les pistes, dans cette nouvelle qui commence comme un Agatha Christie et finit comme un téléfilm de Noël.
* La chambre verte (p.269): dans cette nouvelle amère de Leïla Slimani, le vert est la couleur du déni.
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Le "dépôt légal" de l'édition 2023 correspond à novembre 2022, cette édition a pour thème La planète et moi, avec une préface "exceptionnelle" de Thomas Pesquet (scoop: il y a eu jusqu'à 13 personnes dans l'ISS, en de rares occasions. Mangeaient-elles en un seul service, ou en plusieurs?).
* La binette (p.17): je ne savais pas que Françoise Bourdin (décédée le jour de Noël 2022) disait être le quatrième auteur français contemporain en terme de nombre de livres vendus, mais "passer" beaucoup moins dans les médias que les trois premiers... Sa nouvelle est en tout cas pleine de bons sentiments (quelque peu bobos sur les bords?).
* Les vertiges du vide (p.33): de Marina Carrère d'Encausse, joli conte sur la transmission de père à fille...
* La mèche est dite (p.47): quelle peut être, à votre avis, la seule raison pour laquelle Trump réélu pourrait décider de réintégrer les Accords de Paris (c'est bien trouvé par François d'Epenoux!)?
* Lobo (p.71): Karine Giebel m'a permis d'apprendre que "camote" est l'une des appelations de la patate douce... Cette nouvelle a résonné, pour moi, avec un opuscule que j'avais lu il y a quelques années et versé dans le système de prêt de livres de l'AMAP dont je fais partie, Chico Mendès, NON à la déforestation.
* La planète et moi et moi et moi (p.87): cette nouvelle m'a au début fait songer au manga Le Maître des livres (bibliothèque...), et puis, avec son titre, j'ai craint un moment le pire avec ce titre quelque peu égocentrique... Une jeune mère de famille de classe moyenne qui (re)découvre le débat, ou du moins l'écoute et l'ouverture aux autres? Je n'ai pas du tout vu venir la chute (et c'est un compliment!). Raphaëlle Giordano: encore une "signature" que j'avais dû voir sur les blogs, sans du tout y prêter attention jusqu'à aujourd'hui...
* Ma planète et moi (p.109): idem [j'ai commencé en craignant le pire]. Au moins, ces affres signées Alexandra Lapierre sont rigolotes... Je n'en retiens guère qu'une chose: internet, c'est abominable. Et les applis, c'est traitre!
* Ne jetez rien, cuisinez tout! (p.135): dans la recette de Cyril Lignac (chef), je n'ai pas bien compris si on doit les manger ou non, les épluchures de légumes...
* Le Choix du monde (p.145): j'ai trouvé cette nouvelle d'Agnès Martin-Lugand, plus profonde qu'on pourrait le croire à première lecture. Au-delà de la présentation neutre d'une famille recomposée et des tendres relations entre "quasis", elle m'a fait songer avec crainte à Voyage au bout de la solitude de Jon Krakauer...
* Les Encapuchonnés (p.163): vraiment bien apprécié la chute de cette nouvelle de Romain Puertolas... Mon frère!
* C'est ainsi que l'orange continue de bleuir (p.177): une nouvelle de Mohamed Mbougar Sarr, que j'ai trouvée désespérante, dans la lignée d'Interstellar, d'un monde à l'agonie, de La mort de la terre... Magnifique à lire, donc. En espérant ne jamais la vivre.
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2024: pour cette édition (imprimée en octobre 2023, 253 pages), le prix d'achat du livre neuf (6 euros) finance désormais 5 repas (et non plus 4). Le thème en est: j'ai dix ans (avec l'aimable autorisation d'Alain Souchon et Laurent Voulzy!). Préface de Romain Colucci (le fils aîné de...). 15 auteurs ont planché.
*La fin de l'enfance : une nouvelle emplie d'éléments autobiographiques de Philippe Besson (mais, pour les lecteurs et les restos, fallait-il tuer le père?).
*J'ai dix ans... demain : un coup vrai de poing dans la gueule, signé Michel Bussi. Y en a qui ont pas de chance. Aucune chance, même!
* 22 : cette nouvelle de Maxime Chattam n'est pas non plus excessivement optimiste.
* 69, année fatidique : François d'Epenoux signe sans conteste la meilleure nouvelle de ce recueil, à mon avis (qui n'engage que moi!). Un zeste de Plan 75 (le film), transposé en France avec juste quelques années d'anticipation (10 ans, vous croyez?). En tout cas, c'est merveilleux, la télépathie. Jusque-là, je grommelais... et puis je me suis mis à afficher bêtement un sourire de plus en plus grand, vers la fin!
* Ceci est mon journal intime : de l'utopie à l'uchronie, avec des décennies multipliées... Lorraine Fouchet nous invente une jolie saga familiale sur la transmission.
* Chloé : de Karine Giebel, une nouvelle d'enfant (comme on dit "un livre d'enfant"), avec des héroïnes très identificatoires (diront des mamans lectrices)?
* "On n'est pas des machines..." : on n'imagine pas la vie trépidante... d'un lave-linge, menacé d'obsolescence programmée. Un gentil conte de Raphaëlle Giordano!
* Garçon crépon : un mauvais souvenir du catéchisme... Mais non, ce n'est pas ce que vous pensez, Philippe Jaenada ne nous parle pas d'attouchements indus!
* Les Escarpins, un conte de Noël : Alexandra Lapierre nous émeut avec une version enfantine de La parure... même si le drame est moindre.
* Cake marbré au chocolat : la recette de Cyril Lignac met l'eau à la bouche... mais ce n'est toujours pas une nouvelle, pour moi.
* Où en serions-nous aujourd'hui? : c'est marrant, on retrouve la même famille recomposée que dans l'édition précédente (2023), dans cette nouvelle "rétrospective" d'Agnès Martin-Lugand. L'autrice en tirera-t-elle un recueil indépendant voire un roman entier au final? Cela me fait songer à ces profs de fac qui "testaient" sur les étudiants, durant leurs cours de l'année, le livre qu'ils publieraient l'année suivante...
* L'appartement : une gentille bluette de Romain Puértolas. Ça peut faire rêver...
* Aranéide : une haine enfantine, ça peut laisser une marque sur le carreau. Tatiana de Rosnay dévoile d'abord comment, puis peu à peu pourquoi.
* Le portail : intéressante mise en perspective des deux faces d'une séparation. Je n'avais pas senti venir la chute (amère), bravo Leïla Slimani!
* Le miroir : Franck Thilliez renouvelle un jour / une histoire sans fin.
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... et en voilà donc pour 40 nouvelles par 23 auteurs (cinq ont publié dans les trois recueils, six dans deux - pas toujours consécutifs -, et 13 écrivains n'ont eu qu'une seule publication sur les trois ans). Je reconnais ne pas avoir acheté les livres neufs pour ce qui me concerne, mais ils sont toujours disponibles si je vous ai ouvert l'appétit! Pour ma part, je fais chaque année (entre Noël et le jour de l'an) un don aux Restos du coeur depuis plusieurs décennies (la toute première fois, alors que j'étais étudiant, grâce à une "opération" que j'avais montée...).
Si vous voulez le relevé complet des auteurs pour toutes les éditions parus, ça figure bien entendu sur Wikipedia (consulté le 25 janvier 2024). Par contre, il est amusant de voir que toutes les biographies d'auteurs n'y intègrent pas (pas encore?) leurs nouvelles dans les derniers recueils 13 à table.
Avant chaque nouvelle, les présentations n'oublient pas de faire la promotion de la dernière oeuvre parue de chaque auteur. Si j'ai bien compris le principe de l'opération, il s'agit de contributions bénévoles. Apparemment, l'opération, en 10 ans, a généré des millions d'euros de chiffre d'affaires, et permis le financement d'à peu près autant de millions de repas... Des lectures parfaitement recommandables, donc.
Ma seule petite déception, c'est la recette "annuelle" de Cyril Lignac. Certes intéressante "en elle-même", je pense qu'elle n'a rien à faire dans un recueil de "nouvelles". Je ne sais pas qui le "sollicite" chaque année, mais... Que les Restos montent plutôt une autre opération, avec quelques chefs à la mode, "Chefs du coeur" (par exemple - j'ai pas vérifié si la marque n'était pas déjà déposée!), pour un recueil annuel de recettes qui fera... effet (produit)! Mais ce n'est que mon avis, qui n'engage que moi.
Pour l'édition 2024, on peut trouver d'autres avis et informations sur le blog Une bonne nouvelle par jour (!), chez Du calme Lucette, chez Les lectures d'Aziliz, ou chez Mara (liste non exhaustive)... Sans oublier Violette (qui m'avait "alléché" dès décembre 2023!). Nombre de blogs se contentent d'annoncer la sortie du recueil (ce qui est déjà quelque chose). Mais bien d'autres blogs ont parlé du contenu au fil des ans, voire chaque année: n'hésitez pas à signaler si vous avez pour votre part chroniqué ces trois éditions-là.