Ta d loi du cine m'a accompagnée pour voir La salle des profs, un film allemand réalisé par un cinéaste d'origine turque. J'avais vu la bande-annonce mais je n'avais rien lu à son sujet. De nos jours, dans un lycée (gymnasium) allemand, Carla Nowak (d'origine polonaise) vient d'être nommée professeur de mathématiques et de sport. Dans sa classe d'une trentaine d'élèves, il y a une mixité entre enfants issus de l'immigration et Allemands de souche. Depuis quelque temps, il y a des vols d'argent au sein du lycée et en particulier dans la grande salle des profs. Ali, un jeune immigré, est mis en cause mais l'accusation ne tient pas. Carla imagine un stratagème pour "coincer" la personne qui dérobe l'argent. Elle laisse une certaine somme dans son porte-monnaie rangé dans sa veste qu'elle laisse sans surveillance dans la salle des profs, tout en branchant la caméra de son ordinateur. Et le vol a lieu. Carla est très embêtée car elle voudrait que le ou la coupable se dénonce. Je ne vous dirai pas qui, ni quel lien professionnel il peut y avoir entre Carla et l'auteur du larcin. En tout cas, la vie du lycée est chamboulée, les autres professeurs deviennent presque hostiles envers Carla, tout comme les élèves de cette dernière. L'histoire monte en tension très vite et ce d'autant plus que l'on ne quitte guère l'enceinte du lycée. C'est un vrai huis-clos qui devient étouffant. Il faut noter que les acteurs sont tous excellents, en particulier les jeunes qui interprètent les élèves. Un film qui a été un succès mérité en Allemagne et qui a représenté ce pays aux derniers Oscars. Lire les billets de MHF, Le bleu du miroir, Pascale, Selenie, Chris, Shangols.
Comme un fils de Nicolas Boukhrief n'est déjà presque plus à l'affiche et c'est bien dommage. Jacques Romand (Vincent Lindon, très bien comme souvent) est un professeur qui vient de se mettre en retrait de l'enseignement suite à une rixe qui s'est mal terminée entre élèves. Il est désabusé et n'a plus la "niaque" pour enseigner. Ce veuf qui a une fille qui vit à Toronto est bien seul dans sa grande maison. Sa fille voudrait qu'il s'en sépare mais lui hésite encore. Un jour, il fait des courses dans un supermarché et il se trouve mêler à un vol à l'étalage dont lequel Victor, un jeune de 14 ans, est impliqué. Victor, qui est déscolarisé, est arrivé en France avec son oncle qui le bat comme plâtre au cas où le garçon ne ramène pas d'argent. Et par ailleurs, Victor qui est très intelligent et observateur, est mal considéré par ceux qui cohabitent avec lui car il est né d'un père Roumain et d'une mère Rom. Jacques et Victor vont se retrouver à différentes reprises car Jacques voudrait faire quelque chose pour sortir Victor de sa condition mais ce n'est pas facile car le garçon ne se laisse pas faire. J'ai trouvé l'histoire intéressante. Cela se laisse voir. Lire le billet de Pascale (qui en dit beaucoup).
C'est grâce à la première contribution de ClaudiaLucia au "challenge marsien" que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous présente à mon tour L'aube est bleue sur Mars. Je l'avais déjà noté parmi ce que je prévoyais de lire ou voir d'ici au 31 mars de l'an prochain (2025), mais son billet m'a amené à regarder s'il était disponible en bibliothèque: deux exemplaires sur Paris, dont l'un emprunté... je me suis rué vers l'autre! Voici donc ma deuxième participation au challenge, et mon premier livre. Attention, hein, je ne vais pas m'engager à lire tous les livres chroniqués par les participant(e)s: j'espère bien qu'ils seront en trop grand nombre pour cela! ;-)
L'aube est bleue sur Mars, Florence Hinckel, éd. Nathan, 2022. 17,95 euros.
J'ai donc lu ce pavé léger (504 pages avec les "sources") en moins d'un week-end. "Imprimé en juin 2022" mais avec un copyright indiquant "août 2022", L'Aube est bleue sur Mars tire pourtant davantage du côté de la dystopie que de l'anticipation de par son contenu rédactionnel. En effet, aucune allusion n'y est faite au conflit russo-ukrainien, et les Russes y sont présentés comme coopérant activement avec les Occidentaux dans le secteur spatial - au contraire des Chinois.
De quoi s'agit-il? De la première expédition humaine vers la planète Mars, dans une coopération internationale impulsée par la Nasa qui, pour des raisons de communication, a souhaité embarquer, aux côtés de quatre astronautes "professionnel(le)s", trois "astronautes stagiaires" chargé(e)s de commenter l'expédition afin d'intéresser à l'aventure toute la jeunesse... Le "récit à la première personne" nous est raconté par Esther, jeune Française de 22 ans au départ, qui a pu être sélectionnée parmi les "happy fews".
Très maligne, à l'inverse des datations qui jalonnent les Chroniques martiennes (par exemple), l'autrice ne donne strictement aucune indication de date (d'année). Tout au plus peut-on spéculer, ce à quoi je me suis essayé, bien entendu. La covid-19 est encore un souvenir relativement récent lorsque survient un nouveau fléau, et puis 10 ans passent... avant que (re)commence véritablement l'action, ce qui amène la suite de l'histoire, je dirais, dans les années 2040, mais sans qu'aient eu lieu de véritables "ruptures" géopolitiques, technologiques ni sociétales, juste le "prolongement" de notre société du début des années 2020. Un univers très classique, donc, un peu comme Seul sur Mars auquel il est plusieurs fois fait allusion.
Avant son départ, Esther a eu une histoire avec un prénommé Hugo (j'ai beaucoup aimé l'histoire du "petit pas en arrière" lors de leur cheminement amoureux, p.77). J'ai apprécié à sa juste valeur une réflexion d'Esther qui se présente comme "athée" (p.281-282): "les Américains sont ainsi. Ils parlent pour tout le monde, mais en imposant leur point de vue. Et même leur dieu. On ne peut rien objecter, sur une mission à moitié financée par les Américains, mais je ne peux pas m'empêcher de penser que le dieu le plus puissant, dans une mission comme la nôtre, est celui de l'argent." [ce qui se confirmera d'ailleurs plus tard!]. p.407, on a une vision de ce qui aurait pu être un autre titre de l'ouvrage: "un coucher de soleil martien est bleu. Presque violet. Le bleu se disperse plus vite du fait de ses longueurs d'onde plus grandes. C'est pour cette raison que l'atmosphère martienne, composée de particules très fines, laisse passer la lumière bleue plus facilement que les autres couleurs".
À la différence de la plupart de ses "collègues", Esther revient sur terre après bien des péripéties (500 pages, même écrites gros et avec un large interligne, cela en permet). Elle nous a exposé son vécu mais aussi ses états d'âme durant l'expédition, y compris un moment plutôt gore - brrr! - qui m'a fait songer au massacre d'astronautes dans le film Life - Origine inconnue. Mais je ne veux surtout pas tout vous dévoiler (ce qui se passe sur terre "pendant ce temps-là" n'est pas non plus trop réjouissant...).
Pour moi, ce roman se situe dans la catégorie du "Young adult", avec une jeune héroïne peut-être identificatoire pour certaines lectrices? J'avais déjà lu et chroniqué de la 'littérature jeunesse" à l'occasion de la première édition ("challenge de la planète Mars"), mais les ouvrages que j'avais alors dénichés étaient nettement plus anciens... d'autant que L'aube... n'avait pas encore paru lors de sa clôture. Ca se laisse lire! L'histoire appellera-t-il une suite? La fin est quelque peu abrupte, et on aimerait connaître la suite tant du "vécu" d'Esther que de l'aventure martienne... et de la vie sur terre aussi, tout simplement! Il y a encore de quoi écrire.
Changeons de sujet: d'un point de vue matériel, je voudrais préciser que j'ai fait le constat, sur l'exemplaire que j'ai eu entre les mains, d'une "couture", pour renforcer la solidité du "dos collé" et éviter que les pages de cet ouvrage de bibliothèque se détachent. C'était la première fois que je remarquais cela. L'opération semble avoir été pratiqué à titre préventif et non curatif (sous la couverture plastifié autocollante). Je ne sais pas si cela a été fait avec ce qui pourrait être une grosse "machine à coudre" ou bien à la main. Je n'avais jamais vu cela je crois bien (ou n'y avais-je jamais prêté attention?). Ci-dessous, on peut apercevoir la "couture" côté 4e de couverture sur la droite.
Outre le billet de ClaudiaLucia, d'autres blogs en avaient parlé avant même le début du challenge, essentiellement au moment de la sortie du livre: Judith (du blog Les chasseuses de livres), Tampopo24 (Les blablas de Tachan), Joy Halt-Roen, Le nocher des livres, Ororia, Mylène, Tchatcho (Les lectures de Ju) - liste non exhaustive. À noter que l'auteure en répertorie la plupart sur son propre site internet. Depuis L'aube est bleue sur Mars, elle a déjà publié, ou s'apprête à publier, plusieurs ouvrages...
Edit du 28/03/2024: en ce qui concerne la couture de cet exemplaire, je me suis renseigné en le rendant à la bibliothèque. Voici ce que j'en ai retenu: ils ont un budget "réparation de livres", mais celui-ci est insuffisant. Du coup, ils font du "préventif" (et non du "curatif"), notamment pour les livres "jeunesse" qui "sortent" beaucoup, en interne. "Des collègues" ont été formées, elles ont un outil (une machine?) qui leur permet de faire les trous, puis elles passent le fil...
Après Le tabac Tresniek, Une vie entière et Le champ, je viens de terminer Le café sans nom de Robert Seethaler (Edition Sabine Wespieser, 246 pages, 2023). L'histoire se passe en 1966 à Vienne, Autriche. Robert Simon, 31 ans, travaille comme livreur dans les stands du marché dans le quartier du Prater. C'est son dernier jour de travail car il va réaliser son rêve de devenir gérant d'un café poussiéreux et à l'abandon depuis quelque temps. Ce café situé à côté du Prater n'aura pas d'enseigne, c'est un café sans nom mais pas sans clients. En effet, les commerçants et les passants prennent l'habitude de s'attabler pour manger (des tartines au saindoux, des oignons et des cornichons) ou pour boire de la bière. Robert s'adjoint l'aide de Mila, une jeune couturière récemment licenciée de l'usine où elle travaillait. Ils forment une bonne équipe. Cette aventure va durer 10 ans. Mila se mariera avec un boxeur. Robert, lui, perd trois doigts dans un accident et continuera sa vie solitaire. En attendant, pendant 10 ans, ils noueront des liens plus ou moins amicaux avec des habitués comme un boucher ou un artiste peintre. C'est un roman qui se lit assez vite et très agréablement mais il faudrait un plan de Vienne pour se repérer avec tous les noms de rues que Robert Seethaler énumère. Pour ceux qui ne connaissent pas la capitale de l'Autriche, on s'y perd un peu mais ce n'est pas très grave. Toujours est-il que pour moi, Le tabac Tresniek et Une vie entière restent mes deux romans préférés de l'écrivain.
Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) remercie le même collègue qui m'avait créé le logo de ce "challenge marsien (autour de la planète Mars) - 2e édition", pour m'avoir aussi fait connaître le DVD de la série TV tirée des Chroniques martiennes de Ray Bradbury, par lequel j'entame mes propres contributions à ce challenge réitéré.
Cette série en trois épisodes date de 1979-1980, du vivant de Ray Bradbury donc, et avant même la parution de l'édition ré-actualisée (avec recul des dates) des Chroniques martiennes (le livre). Je l'ai regardée avec intérêt. J'ai trouvé par moment le traitement de son "univers" quelque peu "kitsch" et proche de celui de la célèbre série TV Star Trek, mais la série lorgne aussi (à mon avis), par moment, vers Les envahisseurs. Le "livret" qui accompagne le DVD ne parle que du recueil de nouvelles et non de l'histoire de son adaptation à la télévision.
Les trois épisodes, qui durent une heure et demi chacun, condensent (ou font appel à) plusieurs nouvelles du recueil à chaque fois, et sont articulés autour du personnage qui ouvre et clôt le livre (mais que l'on n'y retrouve que dans deux ou trois nouvelles au total), qui apparaît ici à la fois comme témoin et "acteur", le colonel Wilder. C'est Rock Hudson qui incarne ce militaire que l'on apprécie pour l'humanisme (l'humanité?) dont il fait preuve.
L'introduction du premier épisode (titré Les expéditions) est astucieuse (1976 est déjà passé, à l'époque du tournage de cette série...). L'action commence véritablement en "janvier 1999" (comme dans l'édition de 1954 des Chroniques de Bradbury) avec des images d'un décollage de fusée plus authentiques que celles des films de James Bond. Bon, je n'en dirais pas autant des rendez-vous orbitaux. On peut apprécier à sa juste valeur le mélange de réalisme, et d'irréalisme, avec des opérations spatiales traitées sous forme quasi-poétique (durée du voyage vers Mars non précisé, communications radio qui semblent instantanées...). Les Martiens "dans leur état de nature" sont longilignes, chauves et évanescents. Ils ont des yeux impressionnants, et le même genre de relations de couple que les terriens. Et le sort de la première expédition est scellé à la 28e minute, cependant que le colonel Wilder et la salle de contrôle sur terre s'époumonent comme à la fin d'Objectif lune... Autre touche de réalisme "à l'américaine", entre deux expéditions, les dialogues entre officiers généraux, supérieurs ou subalternes sur le bien-fondé de leur mission (coloniser Mars)... Bref, nous sommes maintenant en avril 2000, et c'est au tour de la "deuxième" expédition de se poser... pour connaître la destinée de la troisième (dans le recueil de nouvelles), astucieusement traitée. A cette occasion, un Martien prend la parole, revendique la télépathie des siens et expose leur point de vue. Sans transition, nous sommes sur terre, à la veille de la troisième expédition (de la série), qui sera commandée par Wilder cette fois-ci. Lui et sa femme donnent d'ailleurs une soirée (on pense au "milieu" des astronautes américains d'Apollo, dont les familles se fréquentaient entre elles). En juin 2001, l'odyssée de la quatrième expédition (dans le livre) est donc transposée à cette expédition définitivement "victorieuse". Jeff Spender revient d'une exploration en autogyre et annonce "cette planète est morte, désormais" (varicelle, une maladie qui ne tue personne, sur terre). Même si quelques Martiens ont pu survivre en s'enfuyant dans les montagnes, leur civilisation qui avait évoluée durant un million d'années est anéantie. Et la lune luit toujours (selon le titre de la nouvelle originale, publiée en 1948). "Les Terriens sont doués pour détruire les choses"... Une ville martienne, même inhabitée, est impressionnante (très minérale). Spender (joué par Bernie Casey) prend parti contre les colonisateurs, jusqu'à la mort... au prix d'un petit western, et de débats philosophiques.
Le deuxième épisode est titré (en version française) Les colons. Nous sommes en février 2004, trois ans après l'expédition Wilder, c'est l'envol de la colonisation de masse en direction de Mars. Une voix off nous annonce que le colonel Wilder a été nommé coordinateur de la planète, pour sauver ce qui peut l'être de l'antique civilisation martienne face à l'avancée inexorable des humains, quelques mots condensent aussi une nouvelle (qui traite du renommage des lieux). Chacun des colons a sa propre motivation. En fait, cet épisode "entrecroise" plusieurs nouvelles, au lieu de les faire se succéder. Septembre 2006: un couple accueille sur Mars leur fils disparu sur Terre... mais ils ne sont pas les seuls à l'espérer. Dans le même temps, des missionnaires arrivent sur la planète, dont le Père Peregrine (Fritz Weaver), en quête de Dieu lui-même. Lui et son acolyte Stone ("Pierre"!) sont accueillis chez la famille Wilder, qui remarque que leurs 12 (!) communautés ont grand besoin de guides spirituels (c'est ici la nouvelle "Les ballons de feu" qui va être développée). Cet aspect "mysticisme-religieux", les tourments existentiels du Père Peregrine et leur traitement sont peut-être plus "corrosifs" pour la mentalité américaine que pour un mécréant comme moi. Les "anciens" qu'il rencontre (âmes? anges?) sont sans doute plus sages que lui - pour autant que son "dialogue" avec eux ne soit pas le seul produit de son imagination. Dans le même temps, on apprend incidemment, lors d'une visioconférence avec le général qui est le supérieur de Wilder sur terre, que la situation s'y aggrave, au point que les candidats à l'exil martien sont de plus en plus nombreux. Nous revenons ensuite chez le couple qui fête le retour de l'enfant prodigue. La mère ne saura malheureusement pas écouter celui-ci qui lui dit qu'il n'a pas envie d'aller en ville (lieu de perdition, comme chacun sait)... Celui qui a toutes les apparences de leur fils ne veut pas s'y faire "attraper"... Il s'y évapore pourtant très vite, cependant que le Père Peregrine rencontre le Christ dans son église (mieux que Don Camillo! - ou que l'oeuvre originale de Bradbury, pauvre Martien martyr!). L'aventure s'achève par un drame provoqué par la foule, sous les yeux de Wilder. Pendant ce temps-là, la guerre est prête à éclater sur terre. Les colons vont être évacués de Mars... au plus mauvais moment, pour certains (nouvelle "La morte saison"). On assiste à une sorte de course de chars à voile, assez onirique (et la musique est dans le ton). Puis la terre s'illumine...
Dans le troisième et dernier épisode (Les Martiens), fin 2006, "la terre est morte" dès le prologue. Wilder y fait un passage à la recherche de son frère, avec ce qui m'a paru des citations de Docteur Folamour comme du Prisonnier... Ensuite, le scénario s'appuie sur plusieurs des nouvelles les plus connues (j'ai été amusé de voir qu'il s'agissait de celles adaptées en BD). Dans "Les villes muettes", Dan Driscoll, qui pensait être seul sur Mars (depuis combien d'années?), entend le téléphone sonner dans une ville humaine désertée... ce qui l'amène à se lancer dans un long voyage en autogyre. Dans le même temps, alors que nous sommes dans "Les longues années", Peter Hathaway scrute le ciel. Il aperçoit une fusée dans le ciel étoilé, et entreprend de lui faire signe (La guerre des étoiles est passée par là!), en vain. De son côté, arrivé à destination, Driscoll a les yeux qui brillent autant que ceux d'un Martien. Puis il déchantera, jurant, mais un peu tard, que Geneviève Selsor ne l'y prendrait plus. Cependant, la fusée revient se poser à proximité de la maison d'Hathaway, à la grande joie de celui-ci. Wilder et le Père Stone en descendent. Mais quand ils font connaissance de la femme et de la fille d'Hathaway, quelque chose cloche... Mais tout est bien qui finit bien: Driscoll arrive! Nous sommes maintenant en mars 2007, et on revoit la belle "camionnette martienne" utilisée par Wilder dans les épisodes précédents. Il va enfin réussir à parler à un "véritable" Martien (comme dans la nouvelle "Rencontre nocturne"). Celui-ci lui donne une leçon de philosophie de vie, en lui parlant de sa propre planète, qu'il appelle non pas Mars, mais Tir... Finalement, Wilder emmène sa propre petite famille (femme et enfants) en pique-nique sur le canal (nouvelle "Pique-nique dans un million d'années"). A cette occasion, il entame un feu de joie en brûlant des paperasses inutiles (renvoyant ainsi dos à dos Le Capital et - il faut être très vigilant! - La richesse des Nations [d'Adam Smith]) et enfin "ses" (ou plutôt son) vaisseau(x).
Le troisième DVD contient un "bonus" de 28 minutes fort instructif. J'ai globalement bien apprécié ces visionnages.
De son côté, Rock07 s'était montré très critique, en 2015, sur cette série (édition DVD précédente).
Juste après Chroniques de Téhéran, j'ai enchaîné avec Scandaleusement vôtre de Thea Scharrock, un film délicieusement british qui se passe à Littlehampton, une petite ville d'Angleterre dans les années 20. Quand l'histoire commence (tirée de faits qui se sont vraiment déroulés), Edith Swan reçoit sa énième lettre anonyme d'injures. Edith est une "vieille fille" qui vit encore avec ses parents. Elle leur sert de factotum. Les lettres ont commencé à arriver juste après qu'Edith se soit brouillée avec Rose Gooding, leur jeune voisine, veuve de guerre et mère d'une petite fille appelée Nancy. Rose, une Irlandaise, parle dans un langage de charretier et bien entendu elle est suspectée d'avoir écrit ces lettres. Elle nie tout en bloc mais rien n'y fait. Pourtant, Gladys Moss, une femme, agent de police de la petite ville, est convaincue que Rose est innocente grâce à la graphologie qui n'est pourtant pas reconnue pour confondre un coupable. Je ne vous dirai pas qui est le "corbeau" mais on l'apprend sans surprise aux deux tiers du film. C'est très bien interprété par Olivia Colman (qui est co-productrice du film) et Jessie Buckley. On passe vraiment un bon moment. Je note avec plaisir que les spectateurs sont revenus dans les salles. Les derniers films que j'ai vus étaient projetés dans des salles presque pleines.
Voici un film que je vous conseille absolument : Chroniques de Téhéran d'Ali Asgari et Alireza Khatami qui est sorti le mercredi 13 mars 2024. Il s'agit de neuf saynètes avec des hommes et des femmes dans différentes situations à Téhéran aujourd'hui.
Le film commence avec un plan fixe de Téhéran, immense mégalopole et il se termine par un tremblement de terre qui fait s'écrouler des bâtiments
Un homme déclare la naissance de son fils David, un prénom occidental qui est proscrit en Iran.
Une mère dans un magasin habille sa fille pour la rentrée. Il faut voir la gamine Selena qui, au départ, danse avec un casque sur les oreilles et qui se retrouve presque voilée.
Une élève est convoquée par la directrice. Cette lycéenne a réponse à tout et surtout elle nie être venue sur une moto conduite par un jeune homme.
Une jeune femme chauffeur de taxi au crâne presque rasé conteste une contravention car son hijab aurait glissé pendant qu'elle conduisait.
Une jeune femme de trente ans pas encore mariée se présente à un entretien d'embauche dans une société privée dans le domaine du béton. Cette jeune femme a du courage et ne se laisse pas faire face à quelqu'un de très entreprenant et qui a la fin l'injurie.
Un homme tatoué sur les bras et le corps avec les vers d'un poème, vient retirer son permis de conduire. Il est délirant de constater que du fait d'être tatoué, on peut ne pas obtenir son permis.
Un homme au chômage depuis cinq mois qui vend des chaussettes sur un marché pour vivre, répond à une annonce. L'entretien est surréaliste puisque, étant musulman chiite, on lui demande des choses comme quels sont les piliers de l'Islam, ou s'il connaît par coeur des sourates. Et en fin de compte, il doit mimer sa manière de faire ses ablutions.
Un réalisateur demande une autorisation de tournage devant un fonctionnaire qui fait des remarques sur le scénario, c'est génial et d'une tristesse infinie car à la fin, il n'y a plus de scénario.
Une femme cherche à retrouver son chien (animal impur en Iran).
Il y a neuf saynètes pendant 1H15, j'en aurais voulu au moins neuf de plus.
Après La colèrequi m'avait emballée cet été, et avant Le sang des innocents que je ne manquerai pas de lire [chroniqué le 22/04/2024], j'ai terminé Les routes oubliées de S. A. Cosby (Edition Sonatine, 342 pages). S. A. Cosby est un écrivain qui monte, qui monte et c'est justifié. Dans Les routes oubliées dont l'histoire se passe en Virginie, Beauregard Montage (un nom qui ne s'invente pas) est un ancien jeune délinquant afro-américain qui a réussi à s'en sortir grâce à sa grande habilité dans la conduite de voitures et autres pick-up. Désormais, il dirige un garage avec son cousin Kelvin. Marié à Kia, il a deux garçons, une mère en maison de retraite qui coûte cher et une fille d'un premier lit qui voudrait faire des études universitaires en comptabilité. Il vit dans un mobile home avec sa femme et ses fils. Sa femme rêve d'habiter un jour une maison en "dur". Quand le roman commence, force est de constater que les affaires du garage ne vont pas fort car un concurrent qui s'est installé pas loin prend moins cher pour les révisions et réparations. Beauregard commence à avoir du mal à joindre les deux bouts et il accepte de participer en tant que chauffeur à un braquage d'une bijouterie, afin de régler les différentes dettes accumulées. Bien entendu, l'affaire tourne mal car la bijouterie appartient à un gangster nommé Lazy qui est entouré de vraies brutes. La tension monte rapidement et on se demande comme Beauregard va s'en sortir. Un roman très bien mené que je vous recommande.
Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) participe avec ma chronique du jour au challenge "Monde ouvrier & mondes du travail" proposé par Ingannmic. C'est dasola qui m'a procuré mon dix-huitième livre de la collection "Raconter la vie" que j'avais présentée naguère. Il s'agit d'un texte de Maylis de Karangal, auteure connue pour ses romans, mais dont je n'avais encore jamais lu aucune oeuvre.
Maylis de Kerangal, Un chemin de tables, Seuil (Coll. Raconter la vie), 2016, 102 p.
Dans ce livre, la romancière nous croque le parcours d'un certain Mauro, dont le lecteur ne saura jamais, faute de patronyme associé à ce prénom, s'il s'agit d'une personne réelle ou d'un personnage de fiction. L'auteure nous fait découvrir Mauro, jeune étudiant fraîchement diplômé (il possède un Master de sciences économiques) dans un train en route vers Berlin en 2005. On sait qu'il a fait un séjour Erasmus à Lisbonne durant ses années d'études et y a croisé une demoiselle Mia. Après une année de Master, il a séjourné chez une cousine par alliance à lui qui l'a initié aux produits bio et à leur cuisine. Retour en arrière: enfance, traditions familiales du bien-manger, début du plaisir à réaliser des gâteaux (grâce aux livres de recettes) dès l'âge de 10 ans, puis rôle de préposé à cuisiner pour sa bande de copains de collège puis de lycée... En 2004, c'est un un job d'été dans un restaurant - par relation - qui l'initie à la cuisine professionnelle. Mais en 2006, stagiaire atypique (pour un stage non rémunéré!), Mauro se montre moins enclin que les jeunes "alternants" en études professionnelles qu'il côtoie en cuisine à supporter d'éventuelles brimades, quand la "brigade" doit exécuter sans la moindre erreur les plats demandés, en répliquant "oui chef!" comme chez les Marine (Yes Sir! - ça fait songer à la scène de la cuisine des Tontons Flingueurs) sous peine de se prendre le plat rejeté en travers de la figure... Il tient seulement trois semaines. Immédiatement embauché en CDI dans un autre restaurant, il y découvre une bonne ambiance mais des horaires dingues pour un SMIC qui ne l'est pas (parfois 70 à 80 heures réellement travaillées par semaine, de 07 h du matin à pas d'heure le soir, dans la restauration?). Un autre restaurant encore, et c'est l'inscription au CAP (certificat d'aptitude professionnelle) "Cuisine", en candidat libre [bon, ici, je me dis que l'épreuve pratique a l'air infiniment plus difficile que les écrits ou oraux qu'il m'a juste fallu passer pour obtenir mes quatre Bac Pro...]. L'année 2008 voit Mauro se lancer dans son propre restaurant. Au bout de quatre ans, il s'aperçoit qu'il travaille comme un damné et que toute sa vie est désormais happée par son activité, alors même que gagner beaucoup l'argent n'est pas sa préoccupation première. Il part visiter les "cuisines du monde" (Bangkok, la Birmanie...), avant de revenir en France vagabonder dans d'autres métiers de la restauration. A la fin du livre, il annonce à la narratrice vouloir de nouveau ouvrir un restaurant... Car tout au long du livre, la narratrice croise régulièrement Mauro, dont l'âge le rend à peu près contemporain des propres enfants de l'autrice?
Le livre a été réédité en Folio en 2019, après l'arrêt de la collection "Raconter la vie". Je ne suis pas persuadé que cela ait pu être le cas de la totalité des titres de la collection (mais cela l'avait été pour Regarde les lumières mon amour écrit par Annie Ernaux).
Editpour répondre à celles qui se demandent si j'ai aimé ce livre: j'ai été intéressé par l'aspect sociologique qui nous est exposé, mais je ne raisonnerai pas en terme de "j'ai aimé" ou "je n'ai pas aimé". Le style (ou l'absence de style?) n'est pas un paramètre que je sais prendre en compte (j'étais nul en "commentaire composé"!).
Je vous conseille d'aller voir Inchallah un fils, un film (du réalisateur Amjad Al Rasheed) venu de Jordanie. L'histoire se passe de nos jours, à Amman la capitale. Un matin, Nawal, une femme dans la trentaine, prépare le petit déjeuner. Elle est mariée et a une fille, Noura. Le mari semble encore dormir. En réalité, il est décédé dans son sommeil. La vie de Nawal est chamboulée, elle a perdu un mari, un amant et elle n'est plus grand-chose. Tout de suite, la famille se manifeste, en particulier le frère de Nawal et son beau-frère. Ce dernier lui réclame assez vite la fin des paiements d'un pick-up appartenant au mari décédé et surtout, comme Nawal n'a pas de garçon, elle devra vendre l'appartement où elle habite et le montant obtenu sera partagé entre elle et la famille du beau-frère. Et elle risque de perdre la garde de sa fille Noura qui serait confiée à l'oncle Rifqi qui régente tout. Nawal travaille sans être déclarée comme aide-soignante dans une famille chrétienne. Elle s'occupe d'une femme impotente qui souffre de démence. Elle gagne très peu et ne peut évidemment pas rembourser les traites du pick-up, qu'elle ne veut pas vendre, même si elle ne sait pas conduire. Pour retarder l'inévitable, Nawal déclare qu'elle est enceinte. La tension monte de plus en plus. Le réalisateur ne perd jamais Nawal de vue. Elle est de tous les plans. Mouna Hawa qui interprète Nawal est formidable. Le réalisateur décrit bien la condition féminine dans un pays régi par le patriarcat. J'ai vu ce film le jour de la journée de la femme. Lire le billet de Pascale et celui de Selenie.
J'avais vu A man de Kei Ishikawa l'année dernière dans le cadre d'une semaine de cinéma japonais dans un grand multiplex parisien que je fréquente. J'avoue que l'histoire ne m'avait pas emballée, je n'avais pas compris les tenants et les aboutissants. Je pense que j'étais fatiguée à l'époque. Après avoir lu le billet de Pascale, je me suis décidée à le revoir cinq semaines après sa sortie en 2024. Bien m'en a pris. J'ai mieux apprécié cette histoire d'échange d'identité entre le fils d'un aubergiste et le fils d'un meurtrier et tout ce qui s'ensuit et les réactions des proches ainsi que l'enquête menée par un avocat tenace engagé par l'épouse d'un des protagonistes pour avoir la fin mot de l'histoire. Les spectateurs, dans la salle où je me trouvais, étaient plus attentifs que d'habitude. Un beau film avec des comédiens inspirés. Je recommande. Lire le billet de Carole Nipette.
Lorsque j'avais (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) rédigé mon billet sur Le droit d'emmerder Dieu de Richard Malka (billet paru il y a plus d'un an), j'avais prévu de publier à la suite de la première chronique le présent Traité sur l'intolérance, du même auteur. On avait renâclé. Depuis, une nouvelle guerre a éclaté au Moyen Orient... et on reparle antisémitisme en France. Voici donc ma chronique. Ce second livre est paru en janvier 2023, et je l'ai acquis début février 2023. Il reprend sa plaidoirie pour le procès en appel concernant les condamnations prononcées à l'issue de celui en première instance sur les attentats de janvier 2015, procès en appel qui s'est déroulé du 12 au 20 octobre 2022 (deux des 14 condamnés ayant fait appel).
Traité sur l'intolérance, Richard Malka, 96 pages, 2023
Bien sûr, comme les titres de ces livres, les extraits que j'ai choisi d'en citer sont provocateurs. Mais avant d'enfourcher de grands chevaux de bataille, lisez vous-même ces deux ouvrages.
Le second titre compte pratiquement le même nombre de pages que le premier, mais il est imprimé plus gros. La plaidoirie qui en représente la plus grande partie a été prononcée le 17 octobre 2022 au nom de Charlie Hebdo. Le texte rentre tout de suite dans le vif du sujet, en réagissant sur le fait que le procès en appel se déroule dans la salle Voltaire de la Cour d'assises au Palais de justice de Paris (sur l'île de la Cité). "Voltaire... Le pourfendeur des religions, l'esprit libre, révolutionnaire (...). Celui qui n'hésitait pas à affirmer, en un temps où cela entraînait la mort, l'enfermement ou l'exil, plus certainement qu'aujourd'hui, que le christianisme était la religion "la plus ridicule, la plus absurde et la plus sanguinaire qui ait jamais infecté le monde", ou encore "la superstition la plus infâme qui ait jamais abruti les hommes et désolé la terre". Ainsi osait-on parler des religions au XVIIIe siècle. Il est de ceux auxquels nous devons de vivre libres. Mais nous ne le savons plus, nous l'avons oublié."
Richard Malka ne souhaitait pas plaider "contre" les accusés, mais plutôt s'attaquer à l'essentiel: les causes des tueries perpétrées.
p.13: "l'action de ces terroristes est motivée par l'islam - ils le disent - et plus précisément, par une vision de l'islam. Je parle d'une croyance, pas des croyants. Je parle d'une vision de l'islam, pas des musulmans (...).
Bien sûr, il y en a d'autres, que partagent des centaines de millions de musulmans à travers le monde, qui aimeraient bien vivre tranquillement leur religion sans qu'on les renvoie toujours à la vision des Kouachi et surtout, sans les privations de liberté qu'elle induit. Mais ce n'est pas une vision marginale. C'est la plus militante, la plus organisée, la plus conquérante, la plus communicante, la plus opulente aussi grâce à ses bailleurs de fonds (...) (p.15).
(...) Il faut combattre cette vision car il en va de l'intérêt de tous et parce que, pour citer une dernière fois Voltaire, "il est honteux que les fanatiques aient du zèle et que les sages n'en aient pas" (p.16).
Richard Malka balaie ensuite longuement l'histoire de l'islam, expliquant les débats qui l'ont traversé aors qu'il avait à peine quelques siècles d'existence, entre l'école de pensée des mutazilites, qui considéraient la raison comme le premier fondement de l'islam, et les hanbalites, qui considéraient le Coran comme incréé, c'est-à-dire directement issu de Dieu.
Du coup, sur plus de 50 pages, l'avocat nous fait un magistral cours d'histoire de la religion musulmane, entrecoupée d'exemples d'excès liés à la vision de l'islam "littéral", tout en remettant dans leur contexte historique et sociologique tant le contenu des sourates que les "hadiths, c'est-à-dire des paroles ou des actes attribués au Prophète et rapportés par des chaînes de transmetteurs sur plusieurs siècles" (p.40). "Certains de ces hadiths légitiment effectivement la violence et sont largement invoqués par les fanatiques" (p.41). Mais il en existe 500 ou 600 000... "Chaque courant de l'islam a les siens et rejette ceux des autres" (p.42). Et surtout, le blasphème n'a pas toujours été puni de mort. Dans le livre, il est aussi question des rapports entre Mahomet et les Juifs. Ainsi que de la manière dont les siècles ont adouci tant le christianisme que le judaïsme. "Quant au judaïsme, il n'a heureusement plus grand-chose à voir avec celui des origines parce que la Torah est un texte bien plus guerrier encore que le Coran et souvent beaucoup plus clair et expéditif sur les châtiments, ce qui est normal puisqu'elle a été écrite mille ans plus tôt" (p.51). "Heureusement, ces textes ont été interprétés mille fois, en particulier dans le Talmud qui est une réécriture de la Torah. L'interprétation, la critique et même l'humour grinçant de Charlie Hebdo, sont une nécessité vitale pour les religions elles-mêmes et surtout pour les hommes" (p.52-53).
La partie finale du Traité sur l'intolérance, titrée "Pour aller plus loin", consiste en quatre pages, qui précèdent la chronologie des événements et une bibliographie citant les ouvrages utilisés par Richard Malka. A mon avis, ces quatre pages auraient pu figurer en début d'ouvrage: elles expliquent pourquoi ce plaidoyer-là, dont la religion est le sujet, a été prononcé à cette occasion-ci (2022), et ni lors du procès des caricatures en 2007, ni lors du procès de 2020.
Voici deux romans "historiques" qui se lisent agréablement et très vite.
Je commence par le troisième tome de la série Le bureau des affaires occultes sous-titré "Les nuits de la peur bleue" d'Eric Fouassier (Edition Albin Michel, 373 pages), dans lequel on retrouve l'inspecteur Valentin Verne et la femme dont il est épris, Aglaé Marceau, une ancienne actrice qui est devenue policière auprès de Valentin. Ils forment désormais une équipe avec un dénommé L'entourloupe, escroc repenti, et Tafik, ancien mamelouk des armées napoléoniennes, au sein du bureau des affaires occultes. Ils sont sous les ordres de Vidocq, le nouveau chef de la brigade de sûreté. L'histoire se passe en 1832. Louis Philippe, premier roi des Français est au pouvoir et le choléra (la mort bleue) commence à faire des ravages à Paris. C'est dans ce contexte que des hommes sont retrouvés morts du choléra mais surtout mutilés d'un organe: foie, poumon, rein. D'autres hommes, des scientifiques, vont être enlevés puis retrouvés morts, victimes du choléra et de la peste pulmonaire. Valentin suit des pistes qui ne sont pas les bonnes. Le mobile du ou des meurtriers ne nous sera révélé qu'à la toute fin. L'histoire est très bien menée. Un bon moment de lecture...
... Tout comme Le loup des ardents de Noémie Adenis (coll. La bête noire, Robert Laffont, 293 pages) qui nous ramène plus loin dans le temps, en 1561 (sous Charles IX) en Sologne à Ardeloup (village qui existait encore au XVIIème siècle mais qui est aujourd'hui disparu). On fait la connaissance de quelques-uns des 45 habitants du village solognot dont Guy le laboureur, sa femme Antoinette, leurs trois enfants, et Loïse, une petite fille de 10 ans que la famille a recueillie mais qui n'est pas aimée. Telle Cosette, elle est la laissée-pour-compte de la famille (on apprendra pourquoi par la suite). Il y a aussi Jehan, le couvreur et trésorier de la paroisse, Silvain le charretier, Gaston le boulanger, Léon le pêcheur et Eudes le potier. Peu de temps après l'arrivée d'un médecin, Aymar de Noilat, dans le village, un mal étrange se met à frapper les habitants, d'abord Sylvain et puis d'autres. Soit ils se mettent à avoir des hallucinations, soit ils se plaignent d'avoir les jambes qui brûlent alors que leurs membres sont glacés. Il fait très froid, il neige, il y a de la brume. Les habitants, sans être dans la misère, se restreignent pour la nourriture. Les terres ne sont pas bonnes pour les récoltes. Au fil des pages, on nous décrit l'évolution de la maladie, en particulier l'apparition de la gangrène aux membres inférieurs. ll s'agit du mal des ardents ou ergotisme. Je vous laisse chercher dans Wi**pe**a. A l'époque, on ne savait pas ce que c'était et on accusait (à tort) des sorcières de cette maladie et de tant d'autres choses. Il n'y a pas vraiment d'enquête mais un récit à propos d'une vengeance qui a attendu sept ans avant de se réaliser.
C'est grâce à Audrey (du blog Light And Smell) que j'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) eu connaissance du challenge "Mars au féminin - édition 2024" créé par l'instagrameuse Floandbox, qui invite à "ne lire que des autrices, sous toutes les formes de livres, roman, essai mais aussi graphiques, manga etc.". Son ancien blog paraît ne plus être alimenté depuis décembre 2023. N'étant pas sur Instagram, je n'ai pu consulter le règlement complet pour 2024. J'espère que cet intéressant challenge de "mise à l'honneur" d'autrices n'est pas exclusif mais bien inclusif (offrant la possibilité que des blogueurs, et pas seulement des blogueuses, participent; et acceptant que des blogs qui rédigent aussi, durant ce mois, des articles sur des auteurs, puissent participer...)! Je me rappelle avoir participé naguère au challenge "Chick Litt for men" organisé par Calepin en 2008-2009: si celui-ci était "réservé aux hommes", il était plaisamment ouvert aux "supportrices officielles"... mais je pense qu'on était moins chatouilleux sur "l'inclusion", à l'époque.
Bref, cela tombe bien: je souhaitais rédiger un petit article sur un manga (et on sait que beaucoup de "mangaka" sont des femmes) que le hasard m'a mis entre les mains. Il s'agit cette fois-ci non pas d'un tome d'une série mais de ce qu'on appelle un "one shot", de parution récente, Cocon.
Vers la fin de la Seconde guerre mondiale, à Okinawa, les élèves de "la meilleure école pour filles" de l'île sont réquisitionnées comme équipières d'un hôpital de campagne. Nous suivons San et ses camarades, dont l'insouciance initiale s'effrite au fur et à mesure de leurs confrontations à la violence. Mayu, aussi ambiguë que ses sentiments pour San, apparaît comme la personnalité la plus forte, en lui suggérant de se construire un "cocon mental" protecteur, tel celui d'où surgira finalement le papillon qu'est devenu la chenille initiale, "après".
Ici, pas de surnaturel, de monstres infernaux ni de meurtriers démoniaques à affronter en d'épiques combats. Juste la guerre qui touche désormais le territoire national du Japon, les bombes et les tirs de l'ennemi que la propagande leur a tellement appris à redouter que le suicide est la solution prévue en dernier recours. Horrible, non? Hé bien, le talent sensible de Machiko Kyô consiste à montrer comment cohabitent moments de douceur (retours dans le passé insouciant) et événements traumatisants. Mais le dessin suggère, plutôt que de montrer ceux-ci. Les jeunes héroïnes sont engagées corps et âmes dans la "protection civile". Les hommes (les soldats des deux camps) sont esquissés en silhouettes fantomatiques. Des pages entières peuvent rester muettes. Le style peut rappeler à certains moments le Myasaki de Nausicaa de la Vallée du Vent, à d'autres certains dessins de mouvement "au trait" tels qu'Hugo Pratt pouvait les pratiquer.
Je vous cite quelques pages, en espérant vous donner envie de découvrir cette oeuvre.
p.6-7 (ci-dessus) & 8 (ci-dessous): le cocon imaginé.
p.46 (ci-dessus) et p.29 (ci-dessous)
Ci-dessous (p.98-99 & 100), une scène terrible, et son explication. Est-ce que cela vous fait aussi songer à Hugo Pratt?
Edit du 10/03/2024:Tampopo24 (du blog "Les blablas de Tachan") en a aussi parlé. Et même une chronique en espagnol (de l'édition parue en cette langue en 2020) sur le blog de Rebecca (mais à part Colo, je ne connais aucun blog bilingue...).
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