Je n'ai pas résisté à l'envie de lire La liseuse de Paul Fournel (Editions P.O.L), repéré chez quelques blogueuses dont Aifelle, et je n'ai pas été déçue. Ce roman a une forme poétique particulière inventée au XIIème siècle: la sextine, dont la définition est donnée à la fin de l'ouvrage. Pour résumer, le roman-poème est composé de 180 000 signes et blancs. Robert Dubois, éditeur dans une maison d'édition germano-pratine, reçoit une liseuse de 730 gr où sont stockés les manuscrits qu'il doit lire. C'est la séparation du texte et du papier: une véritable révolution est en marche. Cette évocation du métier d'éditeur et de l'édition en général constitue une merveille d'écriture légère et fine. Paul Fournel est un écrivain que je ne connaissais pas. Je suis contente d'avoir réparé cet oubli. La liseuse est un joli hommage aux métiers du livre, aux éditeurs et aussi aux écrivains. Je voudrais vous donner quelques exemples du texte pour vous donner envie de le lire: "Mme Martin, la propriétaire du Tilbury, rue du Dragon, qui a exactement l'âge de Pauline Réage, est responsable de la bedaine d'une grosse moitié de l'édition française. Elle est du genre mitonneuse, une mère lyonnaise en exil germano-pratin... Il y avait deux ascètes notoires qui rehaussaient le tableau en se livrant à leurs célèbres solos d'Evian. Ils étaient les statues du Commandeur de la profession. Des Giacometti. J'ai plongé. Au final, je n'aurai pas fait fortune dans ce métier mais j'aurai bien mangé". "L'artichaut est un légume de solitude, difficile à manger en face de quelqu'un, divin lorsqu'on est seul. Un légume méditatif, réservé aux bricoleurs et aux gourmets. D'abord du dur, du charnu, puis, peu à peu, du plus mou, du plus fin, du moins vert...". Dernier paragraphe: "Lorsque j'aurais la lecture du dernier mot de la dernière phrase du dernier livre, je tournerai la dernière page et je déciderai seul si la vie devant moi vaut encore la peine d'être lue." Lisez-le.
Commentaires sur La liseuse - Paul Fournel
- je l'ai réservé à la biblio...
- Pas de souci avec ton billet! je l'ai réservé à ma bibli numéro 1, où je le crois booknappé par les bibliothécaires vu les dates de retour (grrr) et emprunté hier à ma bibli numéro 2.Résultat : lu dans le foulée, et ravie ravie!
Mais je n'ai pas détecté de forme particulière, faut-il beaucoup se creuser la tête??? - Ah oui, la sextine, j'ai oublié d'en parler dans ma note ... Mais il est vrai que comme souvent chez les romanciers oulipiens la contrainte ne se voit pas. Par contre, se voit ici une pertinente façon de conter ! J'ai adoré la série des expériences que le personnage fait avec sa liseuse et la façon dont il apprivoise cet engin de la modernité qui lui tombe dessus. Un joli moment de lecture.
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