Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Dasola
Le blog de Dasola
Archives
Derniers commentaires
Challenges terminés

Pour les challenges de l'année en cours, 
voir colonne de droite

28 juillet 2019

L'usurpateur - Jørn Lier Horst

P1110233

L'usurpateur (Gallimard, série noire, 444 pages) est le troisième roman que je lis de l'écrivain norvégien Jørn Lier Horst. L'intrigue est haletante. Viggo Hansen, un proche voisin de William Wisting, l'inspecteur de police dont on a suivi les enquêtes dans Chiens de chasse et Fermé pour l'hiver, est retrouvé mort momifié dans son fauteuil devant la télé allumée. On apprend que cela faisait quatre mois qu'il était décédé, et, n'ayant aucune famille, personne ne s'est inquiété de lui. On conclut à une mort naturelle. Line, la fille de Wisting, décide d'écrire un article au sujet d'Hansen pour le journal dans lequel elle travaille. Pour ce faire, elle interroge des personnes qui ont connu Hansen. En parallèle, William Wisting commence une enquête avec ses collègues sur une mort suspecte. Le corps d'un homme a été découvert sous des branches de sapin. Curieusement, il est décédé à peu près en même temps que Viggo Hansen. Le récit alterne entre l'enquête de police et l'enquête journalistique. Le rythme de l'histoire m'a fait un peu penser aux romans d'Indridason. On prend son temps, on interroge. On n'est pas dans la violence et les éclats de voix. Lire le billet d'Actu du noir.

**************************

Je profite de ce billet sur un roman policier pour rendre hommage à Claude Le Nocher, disparu en février 2019 et dont j'ai appris le décès tout récemment. Il écrivait un billet par jour et j'avais constaté que depuis le 19 février dernier, il ne publiait plus rien. J'espère que son blog restera en ligne un moment. C'était un passionné de littérature policière. Il va manquer.

5 juillet 2019

La ferme aux poupées - Wojciech Chmierlarz / Fermé pour l'hiver - Jørn Lier Horst

Voici deux romans policiers qui ont été des petites déceptions en ce qui me concerne.

P1110223

Fermé pour l'hiver (Folio policier, 434 pages) est le premier roman paru de Jørn Lier Horst dont j'avais lu Les Chiens de chasse (le deuxième paru). Autant ce roman-là m'avait plu avec une intrigue bien menée, autant Fermé pour l'hiver m'a laissée sur ma faim. C'est dans ce roman que l'on fait connaissance de l'inspecteur William Wisting et de sa fille, journaliste. Dans un chalet au sud de la Norvège, un cambrioleur est retrouvé assassiné. Avant qu'il ne soit autopsié, le corps est dérobé à la morgue, et ensuite retrouvé brûlé. Un second corps est retrouvé dans une barque par Line, la fille de Westing. J'ai trouvé l'intrigue un peu confuse. Il y a pratiquement deux histoires, dont l'une entraîne Westing jusqu'en Lituanie. J'espère que L'Usurpateur, qui m'attend dans ma Pal, me décevra moins. Lire les billets de Baz'art et Dominique.

P1110224

Je passe à La Ferme aux poupées (Edition Aguilo, 399 pages) du polonais Wojciech Chmierlaz. Son premier roman paru, Pyromane, m'avait emballée avec une intrigue originale, et je n'avais pas vu venir la fin. Dans La Ferme aux poupées, on retrouve l'inspecteur Mortka qui a été envoyé pour un certain temps dans une petite ville polonaise. C'est une sorte de sanction displinaire (lire Pyromane). Mortka va enquêter sur plusieurs disparitions de petites filles dont certaines sont membres de familles de gens du voyage. Elles sont les victimes d'un pédophile vite arrêté. Mais peu de temps après, une petite fille traumatisée est retrouvée dans une mine d'uranium où sont entreposés quelques corps sans vie de jeunes femmes. Mortka (dit Le Kub) investigue alors sur cette affaire avec un collège nommé Lupa. J'ai trouvé l'intrigue plus banale que dans Pyromane. Sinon, Mortka est peut-être victime d'un gros pépin de santé. On ne sait pas ce qu'il en sera quand le roman se termine. Lire les billets de Nelfe, de Sharon, d'Alex-mot-à-mots, d'Yv plus convaincus que moi.

29 juin 2019

Eleanor Oliphant va très bien - Gail Honeyman

 P1110207

Après de nombreuses autres blogueuses, voici mon billet positif sur un roman qui m'a plu même si je m'y suis reprise à deux fois pour le commencer. Je n'ai pas "accroché" au tout début de Eleanor Oliphant va très bien de Gail Honeyman (Editions 10/18, 452 pages), et puis le déclic s'est fait. Au fur et à mesure que l'histoire se déroule, on comprend qu'Eleanor, la trentaine, est une accidentée de la vie. Elle mène une vie sage, bien réglée, et aime faire des mots croisés. Elle tombe néanmoins amoureuse d'un chanteur de rock qu'elle n'a jamais rencontré en "vrai". Comptable, Eleanor fait la connaissance de Raymond Gibbons, le nouvel informaticien de l'entreprise où elle travaille. Raymond est un homme gentil qui va peu à peu devenir l'ami d'Eleanor. Il n'est pas rebuté par le visage très abîmé d'Eleanor, qui va peu à peu se métamorphoser. J'ai aimé la fin de l'histoire qui ne nous est pas racontée mais que l'on peut deviner. Un joli roman émouvant. En revanche, évitez de lire la 4ème de couverture qui ne donne pas envie de se plonger dans l'histoire d'Eleanor et cela serait dommage. Lire le billet d'Aifelle qui renvoie à d'autres blogs, ainsi que ceux d'Eva  et de Yueyin. Merci à elles pour m'avoir donné envie de lire ce roman.

22 juin 2019

La mort selon Turner - Tim Willocks / Masterclass - Christopher Walken

P1110204

La mort selon Turner de TIm Willocks (377 pages, Editions Sonatine) se passe au pays de la soif, en Afrique du Sud dans la région du Cap-Nord. Turner (on ne connait pas son prénom), expert en arts martiaux, est un flic noir de la Criminelle qui hait les flics, mais pour qui la notion du bien et du mal veut dire quelque chose. Il se retrouve à enquêter sur la mort d'une jeune fille noire des "townships" du Cap. Elle était en train d'essayer de prendre de la nourriture dans une poubelle quand elle a été écrasée contre le container par un Range Rover conduit par Dirk Le Roux, un jeune homme blanc, Afrikaner de bonne famille. Ce dernier était saoûl et ne s'est rendu compte de rien. La mère de Dirk, Margot Le Roux, est une femme impitoyable qui emploie de nombreuses personnes dans des mines du Cap. Elle fait vivre toute une région. Elle ne peut pas envisager que son fils chéri qui termine des études de droit puisse avoir son avenir ruiné pour une fille de rien du tout. Turner n'a de cesse de s'approcher de Dirk pour l'arrêter, mais dans l'entourage de la famille Le Roux, il y a quelques hommes de main qui font tout pour se débarrasser de lui et même le laisser mourir de soif sur un plateau de sel avec Rudy (un flic corrompu, à l'agonie). Si j'ai mis une bouteille d'eau à côté du livre, c'est en référence aux pages 259 à 269 qui donnent une "recette" peu ragoûtante pour savoir comment récupérer de l'eau grâce à un cadavre. Je vous laisse le découvrir. Mais quand on a soif, plus rien ne compte. J'ai lu ce roman d'une traite. C'est le premier roman de Tim Willocks que je lis, cela ne sera pas le dernier.

*******************************************************

Ceci n'ayant rien à voir avec cela, j'ai eu le plaisir d'assister à une "masterclass" exceptionnelle, hier soir, 21 juin 2019, dans le cadre du "Champs-Elysées Film Festival". Christopher Walken était à Paris, et pendant 1h30, il a répondu à des questions. Même s'il a 76 ans (!), il est toujours aussi impressionnant. Il marche avec peut-être plus de difficultés, mais il a toujours ce regard qui vous transperce. Il y a eu des extraits de ses films emblématiques comme The Deer Hunter (Voyage au bout de l'enfer), The Dead Zone, At close Range (Comme un chien enragé) ou Dangereusement vôtre où il jouait Zorin, le méchant face à James Bond. J'ai appris qu'il avait été dompteur de lions à 16 ans. Une rencontre très sympathique.

P1110203

P1110202

10 juin 2019

1793 - Niklas Natt och Dag

P1110167

1793 (Editions Sonatine, 436 pages haletantes) est un roman policier historique de belle facture qui est recommandé par plusieurs libraires. C'est le premier roman d'un écrivain suédois de 40 ans, descendant d'une des plus anciennes familles de la noblesse suédoise. Et son nom de famille se traduit littéralement par "Nuit et Jour".La construction de 1793 est astucieuse avec quatre parties.
L'écrivain a choisi l'année 1793 car à Stockholm, il y a eu plusieurs chefs de police qui se sont succédés cette année-là, dont un escroc. On est dans une période trouble. Le roi Gustav III de Suède vient d'être assassiné en 1792. La Révolution français souffle aussi sur les monarchies du Nord.
L'histoire commence en automne 1793 où Cardell, un vétéran de la guerre russo-suédoise qui a perdu un bras, repêche dans le lac Fatburen à Stockholm, un cadavre sans bras ni jambes avec la langue coupée et énucléé, mais à qui il reste des cheveux blonds. Cecil Winge, un homme de loi tuberculeux, est demandé pour enquêter sur cette mort. Il est connu pour avoir des principes et écouter les accusés jusqu'au bout en leur permettant de s'exprimer dans les tribunaux. Il s'adjoint l'aide de Cardell.
Retour en arrière : en été 1793, un jeune homme, Kristofer Blix, écrit plusieurs lettres à sa soeur en lui narrant ses mésaventures. Il est sans travail malgré des études d'aide chirurgien. Avec sa bonne mine, il arrive à se faire prêter de l'argent à droite, à gauche, qu'il met en jeu aussitôt avec un camarade lors de parties de cartes. Il va participer à la partie de trop contre des tricheurs. Il ne peut pas rembourser ses dettes qui sont rachetées par un homme inquiétant qui lui demande de faire quelque chose d'épouvantable. Après cela, il sera libre.
Encore un retour en arrière : au printemps 1793, on fait la connaissance d'une jeune fille, Anna Stina, qui, parce qu'elle a repoussé les avances d'un jeune homme, un ami d'enfance, passe pour une prostituée et est condamnée à travailler dans l'île de Langholmen (toujours à Stockholm), dans une filature où les conditions de vie sont épouvantables. Les femmes jeunes et moins jeunes meurent de faim et sont en butte aux châtiments corporels perpétrés par des soldats. Anna Stina fait tout pour s'évader de cet enfer. 
La quatrième partie se passe pendant l'hiver 1793, à la fin de l'année. On reprend le cours du temps. L'enquête menée par Winge (qui va de plus en plus mal) et Cardell se décante grâce à des lettres qui leur ont été confiées. Ils découvrent qui est l'auteur des mutilations sur le cadavre et le commanditaire.
J'ai trouvé le roman passionnant et l'intrigue s'articule bien. Un très bon thriller où les personnages de fiction côtoient des personnages ayant rééellement existés.
Lire le billet du Capharnaum éclairé.

7 juin 2019

Le procès Merah - Riss

Après la parution de mon billet mettant Riss à l'honneur, j'avais (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) découvert dans Charlie Hebdo du 27/03/2019 un encart signalant la ressortie du numéro Hors-série titré Le procès Merah paru en 2017 (il m'avait échappé!), de retour en kiosque en mars 2019 à l'occasion du procès en appel d'Abdelkhader Merah (le frère de l'autre), prévu du lundi 25 mars au vendredi 19 avril 2019.

P1110078 Je l'ai acheté (6 euros, 48 pages + la couverture, bichro noir & rouge [+ encart jaune dans une double page]), et en voici donc ma chronique.

P1110079   P1110166

Le texte en "quatrième de couv'" (ci-dessus) rappelle le contexte de ce procès. Si le parallèle avec Le procès Colonna dessiné par Tignous semble évident, Riss (qui signe seul l'album) a bien entendu sa propre manière de faire. Je remarquerais en tout cas que le dessin de cet ouvrage est extrèmement réaliste, ce n'est pas le style "humoristique" habituel de Riss, mais bien du dessin de reportage dessiné. A tel point que je ne reprendrai guère ici qu'un seul "portrait", celui de ce "personnage" qu'est l'avocat pénaliste Eric Dupont-Moretti (représenté une trentaine de fois dans l'album).

P1110165

Pour donner tout de même quelques détails sur les planches, je dirais que, si l'on compare avec les reportages dessinés de Tignous, on trouve moins de texte explicatif ou de "didascalies" en-dehors des "bulles" (paroles des personnages). Celles-ci sont en caractères d'imprimerie, et non lettrées "à la main".

Concernant le procès lui-même, Riss prend soin d'expliquer dans son "Edito" introductif que (je cite) "contrairement à ce qui a été dit, le procès d'Abdelkader Merah n'a pas été le procès par procuration de Mohamed Merah, auteur des attentats de Montauban et de Toulouse commis en mars 2012. Le procès d'Abdelkader Merah a été le procès d'Abdelkader Merah, et de lui seul." Il le conclut par "Après le procès, après les dernières paroles, il faudra affronter l'oubli. l'oubli est l'espoir des tueurs de demain. Grâce à lui, ils recommenceront encore et encore." La question posée était: quelle est la part de responsabilité d'Akdelkader, omniprésent (48 dessins le concernent, sauf erreur de ma part) dans les actes commis par son frère? Le procès visait aussi Fettah Malki (un dessin?), accusé pour avoir fourni les armes utilisées par Mohamed Merah lors de ses tueries (et son gilet pare-balle).

Page 26-27, j'ai constaté que, décidément, je ne vis pas dans le même univers que certains de ceux qui ne sont pas nés, comme moi, "dans le monde de la bourgeoisie et de certains notables", selon les mots mis dans la bouche d'Abdelkader. Il s'agit à ce moment-là de reconstituer l'épisode du vol du scooter (6 mars 2012), que Mohamed utilisera quelques jours plus tard pour commettre ses crimes (la question étant de savoir si cette utilisation criminelle était préméditée quand Abdelkader a donné l'occasion à son frère de voler le scooter). Je cite l'intégralité de la bulle: "Ce qu'il faut comprendre, monsieur le président, c'est que notre monde est différent du vôtre. J'ai quand même l'ADN de la rue. Dans le monde (etc.), c'est différent. Chez nous, ce n'est pas exceptionnel* Les gens de la bourgeoisie ne peuvent pas comprendre ça: mon petit frère était très excité par tout ça".
* de s'arrêter d'un coup pour descendre voler un scooter.

... Mais, malgré tout, j'ai encore tendance à considérer que ceux qui ont tort, ce sont ceux qui se conduisent ainsi (en volant un scooter sur un coup de tête): capables de tout? Dans la fratrie Merah (exposée à la barre), on parlait beaucoup de religion, mais les relations pouvaient être violentes, jusqu'aux coups de couteau (mais pour "tailler", hein, pas pour "planter").

Page 38-39, sur fonds jaune, on peut lire des extraits d'enregistrements audio islamistes, qu'Abdelkader Merah écoutait au travail pour, dit-il, améliorer son arabe littéraire.

Si je devais utiliser une image venant du monde de l'agriculture, pour décrire l'univers mental qui transparaît chez certains des membres de la famille Merah (dont la mère), je parlerais de "terreau" ou de "compost" sur lequel a pris racine et prospéré la graine de mauvaise herbe.

Les dessins rendent bien l'ambiance des audiences, je pense. Dans tout l'album, les extraits choisis des phrases des uns et des autres sont percutants et déstabilisants. Concernant Abdelkader, on sent en permanence que ses croyances restent à ses yeux infiniment plus importantes que tous les procès que peut lui faire la République française au nom de la loi et de la justice.

A l'issue de ce procès, le 2 novembre 2017, la cour rend sa décision: Abdelkader Merah est acquitté de l'accusation de complicité d'assassinat, mais est condamné à 20 ans de prison pour complicité d'association de malfaiteurs en lien avec une association terroriste. Fettah Malki est condamné à 14 ans de prison pour le même motif. Moins de 24 heures après, le parquet général fait appel pour renvoyer les deux hommes devant la justice. Le 18 avril 2019, le procès en appel a condamné cette fois Abdelkader à 30 ans de réclusion criminelle pour "association de malfaiteur" et "complicité d'assassinat". L'ami d'enfance de Mohamed, lui, est condamné à 10 ans de prison ferme pour association de malfaiteur. A l'énoncé du verdict, Eric Dupond-Moretti a réagi en disant qu'il y aurait sûrement pourvoi en cassation. Mais comme disait Pierre Dac, "on dit d'un accusé qu'il est cuit lorsque son avocat n'est pas cru".

Pour le moment, en ce mois de juin 2019, la presse commence à évoquer la tenue du procès d'assises, prévu d'avril à juillet 2020, qui jugera les complices des attentats de janvier 2015 (Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher).

Au 07/06/2019, en tout cas, j'ai constaté qu'on ne trouve pas le titre que j'ai chroniqué aujourd'hui sur wikipedia dans les bibliographies de la page consacrée à Riss ou de la page concernant Mohammed Merah, qui parle de sa famille et mentionne les procès de son frère.

*** Je suis Charlie ***

31 mai 2019

L'Etoile du Nord - D. B. John

 P1110135

Tout comme La Petite souris, je vous conseille L'Etoile du nord de D. B. John (Editions Equinox, Les Arènes, 611 pages haletantes qui nous emmènent en Corée du nord). Un des ressorts de l'intrigue m'a fait penser à Eclipses japonaise d'Eric Faye sur les enlèvements de personnes américaines, japonaises ou sud-coréennes par les services secrets nord-coréens, à partir des années 70 jusqu'à nos jours. L’écrivain, un Gallois, s’est beaucoup documenté sur ce pays où règne la dynastie des Kim depuis 70 ans. Jenna Williams, une afro-américaine par son père et coréenne par sa mère, est enseignante. Spécialiste de la Corée du Nord et des Kim, Jenna ou Jee-min (son prénom coréen) est enrôlée en 2010 par la CIA afin de vérifier ce qu’il en est des intentions militaires de Kim Jong-il. Cela va surtout permettre à la jeune femme de découvrir si sa sœur jumelle Soo-min, disparue mystérieusement en 1998 sur une plage de Corée de sud, serait encore en vie. En Corée du Nord, nous faisons la connaissance de Cho, un colonel, marié et père d’un petit garçon. Cho gravit les échelons qui le mènent à côtoyer la garde rapprochée du dirigeant coréen. Il a le privilège d’être envoyé à New-York avec une délégation pour représenter la Corée du nord et son Cher Dirigeant. Mais peu de temps après, les choses vont mal tourner pour Cho qui croise la route de Jenna. Sa chute sera plus rapide que son ascension. Et enfin il y a Moon, une vieille dame Nord-Coréenne qui vit dans une petite ville à la frontière avec la Chine. Très pauvre, Moon fait ce qu’elle peut pour survivre avec son mari. Elle est débrouillarde et risque de se faire prendre par la police à cause de ses activités au marché noir et pour une autre raison. Sous la plume de l’écrivain, la Corée du Nord est décrite comme un état concentrationnaire et totalitaire où tout le monde épie tout le monde, où les gens sont affamés pour être mieux contrôlés. Ce roman est plein de rebondissements avec quelques invraisemblances mais il permet de connaître ce qui se passe peut-être en Corée du nord (expériences sur des cobayes humains, eugénisme, le crime organisé, l’exportation de drogue, etc.). Le tout est assez oppressant. En revanche, on s’attache très vite aux personnages de Moon, Cho et Jenna. L’étoile du nord est le nom du train qui permet au Cher dirigeant (Kim Jong-il) de se déplacer quand il va en Chine par exemple. Décédé en décembre 2011, Kim Jong-il a été remplacé par son fils Kim Jong-un. Un roman à découvrir.

16 mai 2019

A la ligne (Feuillets d'usine) - Joseph Ponthus

P1110132

Ce premier roman m'a un peu décontenancée quand je l'ai commencé et puis, au fur et à mesure que j'ai avancé dans ma lecture, j'ai été conquise. En effet, A la ligne de Josph Ponthus (Edtion La Table Ronde, 263 pages) est une sorte de long poème en prose et parfois en vers qui évoque la vie à l'usine, les tâches harassantes et répétitives à la ligne. A Pôle Emploi, on propose au narrateur, qui a besoin de travailler, un emploi en intérim dans une usine bretonne de production, transformation et cuisson de poissons et de crevettes. Dans la pièce où il est travaille, il fait froid et l'odeur est forte. Quelque temps après, il travaillera dans un abattoir où il manie des carcasses de boeufs et de cochons. Toute la journée debout, il faut faire du rendement: jusqu'à traiter 670 (!) carcasses par jour à la ligne. Il ne parle pas de travail à la chaîne, mais cela revient au même. La langue est vraiment magnifique :
"Ca a débuté comme ça.
Moi j'avais rien demandé mais
Quand un chef à ma prise de poste me demande si j'ai déjà égoutté du tofu
Quand je vois le nombre de palettes et de palettes et de palettes que je vais avoir à égoutter seul et que je sais par avance que ce chantier m'occupera toute la nuit
Egoutter du tofu
Je me répète les mots sans trop y croire
Je vais égoutter du tofu cette nuit
Je me dis que je vais vivre une expérience parallèle
Dans ce monde déjà parallèle qu'est l'usine" (p. 45)  

"Il faut voir nos visages marqués
A la pause
Les traits tirés
Le regard perdu rivé au loin de la fumée des cigarettes
Nos gueules cassées
Si j'osais le parallèle avec la Grande Guerre
Nous
Petits troufions de l'usine
Attendant de remonter au front
Ou plutôt
Mercenaires...

La pause
Cette foutue pause
Espérée rêvée attendue dès la prise de poste
Et même si elle sera de toute façon trop courte
Si elle vient trop tôt
Que d'heures encore à tirer
Si elle vient trop tard
N'en plus pouvoir n'en plus pouvoir
Elle sera" (p.55-56)

"Parfois je hurle
Toutes les nuits je sais que je vais emporter
l'abattoir dans mes mauvais rêves
Et pourtant
A pousser mes quartiers de viande de cent kilos chacun
Je ne pense pas être le plus à plaindre
De quoi rêvent-ils
Toutes les siestes
Toutes les nuits
Ceux qui sont aux abats
Et qui
Tous les jours que l'abattoir fait
Voient tomber des têtes de vaches de l'étage supérieur
Prennent une tête par une
La calent entre des crocs d'acier sur machine idoine
Découpent les joues et les babines puis jettent les machoires et le reste du crâne
Huit heures par jour en tête à tête
" (pages 137-138)

Tout le roman est dans ce style que je trouve magnifique. Lire le billet d'Alex-mot-à-mots. Ce roman est un coup de coeur pour beaucoup de libraires et de biblothécaires et aussi pour moi.

7 mai 2019

Les pensées - Pierre Dac (illustrées par Cabu)

En ce mois de mai qui commence par célébrer le travail, j'ai eu (ta d loi du cine, squatter chez dasola) un peu la flemme de réfléchir par moi-même, alors j'ai adopté une solution de facilité pour mon hommage mensuel tournant autour de Charlie Hebdo: évoquer Cabu au travers de ses dessins sur Pierre Dac (1893-1975), dont un florilège a été assemblé pour illustrer une nouvelle édition des Pensées de celui-ci, parues à l'origine en 1972, et rééditée au Cherche-Midi en 2015. L'exemplaire que j'en possède a été réédité par les Editions retrouvées, spécialisée dans les livres en gros caractères.

P1110042

Les différents "Avant-propos", "Préface" (etc.) précisent que Cabu et Pierre Dac ne se sont rencontrés qu'une seule fois "dans la vraie vie", mais s'efforcent de trouver tels ou tels points de rattachement (Châlons...). Voici les trois phrases de la Quatrième de couv':

20190505_184022

Pour ma part, j'évoquerai une autre occasion de rapprocher les deux auteurs, trouvée dans le monumental Cabu, une vie de dessinateur de Jean-Luc Porquet (p.147). Lorsque Hara-Kiri avait fait l'objet, le 23 mai 1966, d'un nouvel arrêté ministériel (après celui de juillet 1961) l'interdisant à l'affichage (les NMPP refusant alors de le distribuer), Pierre Dac (parmi bien d'autres) avait signé une Lettre ouverte au Ministre de l'Intérieur, rédigée par Cavana et Choron, demandant la levée de cette interdiction et dénonçant "cette censure qui n'ose pas dire son nom".

On pourra juger cet ouvrage un peu périphérique dans ma rubrique, mais cela permet aussi de mettre en valeur Pierre Dac, dont certaines pensées valaient bien leur pesant de cacahouètes voire auraient mérité l'anathème ou d'être mises à l'index (si, si...). Rappelons aussi qu'il parlait à la radio de la France libre, à Londres, en 1943-44.

J'avoue tout de même ne pas être totalement "fan" du talent essentiellement nonsensesque de Pierre Dac. Je vais cependant extraire quelques-unes de ces "Pensées" qui m'ont fait réfléchir, quoi que j'en aie. Et puis, il y a les dessins de Cabu, qui ouvrent chacun des "chapitres" (regroupements de "pensées"). Je suppose que leurs choix en diront, encore, trop sur moi...

La bonne moyenne de la croyance s'établit par le total de ceux qui croyaient et qui ne croient plus et de ceux qui ne croyaient pas mais qui croient (p.28).

En quoi? En qui? Pour quoi? Voire contre qui? (tout contre?) P1110048 (mécréant!)

Quand on dit d'un artiste comique de grand talent qu'il n'a pas de prix, ce n'est pas une raison pour ne pas le payer sous prétexte qu'il est impayable (p.35, pensées en vrac).

P1110047 Yes, Sar! (il peut le faire!) P1110050 Du vécu?

Il faut une infinie patience pour attendre toujours ce qui n'arrive jamais (p.44).

Un rhume de cerveau, c'est un nez qui coule de source (p.45).

Le crétin prétentieux est celui qui se croit plus intelligent que ceux qui sont aussi bêtes que lui (p.55, Pensées choisies) 

P1110051 Pierre Dac croqué en bon observateur du genre humain?

C'est ce qui divise les hommes qui multiplie leurs différends (p.56).

Je n'ai, pour ma part, jamais été nourri par L'Os à Moëlle

P1110058

En entend-on un lointain écho dans les colonnes de droite de la Quatrième de couv' de Charlie chaque semaine? 

Et encore quelques dessins,

P1110052  anachronique... et contestataire  P1110057

P1110053 [ici, on est ici sur un blog en grande partie "cinéma", tout d'même!]

P1110055 Les élections européennes approchant, on peut finir par savourer quelques "Pensées sur la politique, l'Etat, le parlement et la Constitution" (p.171). Mieux vaut en rire?

Comme je l'ai dit plus haut, la première édition des Pensées remonte à 1972 (il y en a eu bien d'autres ensuite - 1978, 1979, 1989, ...). Pierre Dac est décédé à 82 ans en février 1975. Il y a eu des rééditions, mais il ne me semble pas qu'elles étaient illustrées par Cabu? Voici en tout cas la couverture de celle parue au Cherche-Midi (qui commémorait les 40 ans) le 22 janvier 2015, je suppose que Cabu en avait donc bien lui-même choisi ses dessins mettant en scène le Maître - et les 6 sur lesquels il ne figure pas.

Pensees_Pierre_Dac_Cabu

Je n'ai présenté dans mon billet que quelques clichés des textes et dessins, puisqu'il ne faut pas oublier que désormais, Cabu est une marque et une signature déposées: "double de titre, et pour chaque dessin à l'intérieur du livre, © V. Cabut". Sur les 21 dessins (dont celui repris aussi en couverture), six ne figurent pas le Maître (qui est éventuellement représenté deux fois dans d'autres). En tout cas, il vous en reste encore plus de la moitié à découvrir en lisant l'oeuvre à votre tour!

Voici maintenant quelques adresses extérieures concernant Pierre Dac (blogs ou sites en lien avec les Pensées): Tautavel en a sélectionné quelques-unes, il y en a d'autres ici. L’anthologie posthume Avec mes meilleures pensés est présentée par Fils à papa. Le blog Frogprod a consacré en février 2015 un article à Pierre Dac. J’ai enfin trouvé confirmation que Cabu avait bien travaillé en dernier sur ce livre .

PS: je viens de m'acheter Les années 70, de GéBé (avec Cabu et Willem), j'en parlerai une autre fois [chroniqué le 7 novembre 2019]. De même que je recaserai sans doute "On dit d'un accusé qu'il est cuit lorsque son avocat n'est pas cru" (p.149) quand je chroniquerai prochainement Le procès Merah de Riss. [chroniqué le 7 juin 2019]

*** Je suis Charlie ***

5 mai 2019

Je voyage seule - Samuel Bjørk / Les chiens de chasse - Jørn Lier Horst

Comme j'avais bien aimé Le hibou, j'ai terminé de lire, tout récemment, Je voyage seule, le roman précédent du norvégien Samuel Bjørk (Pocket, 559 pages prenantes). J'ai retrouvé avec plaisir le commissaire Holger Munch et sa collègue Mia Krüger. Une petite fille est retrouvée pendue à un arbre avec une corde à sauter. Autour de son cou, il y a aussi une pochette où est inscrit "Je voyage seule". D'autres fillettes vont subir le même sort. L'enquête va toucher de près Holger et Mia. Holger est d'autant plus impliqué que la suspecte présumée travaille dans la maison de retraite où sa mère est pensionnaire. Mia a deviné très vite que l'assassin était une femme mais chut... Je n'en dit pas plus. J'ai trouvé le récit aussi bien mené que dans Le hibou. Un écrivain à suivre...

P1110060

... Tout comme Jørn Lier Horst, un autre écrivain norvégien. C'est grâce à Dominique (que je remercie) que je me suis décidée à lire Les chiens de chasse (Folio Policier, 459 pages), le deuxième paru en français. J'ai donc fait la connaissance de l'inspecteur William Wisting et de sa fille Line, une très bonne journaliste d'investigation. Rudolph Haglund, un homme condamné 17 ans auparavant pour l'enlèvement et le meurtre d'une jeune femme, vient d'être libéré. Wisting, responsable de l'enquête à l'époque, était sûr et certain qu'Haglund était le coupable. Ce dernier, par l'intermédiaire de son avocat, remet en cause une preuve qui l'a fait condamner. Wisting et sa fille, chacun de son côté, mènent l'enquête. Il faut noter qu'une autre jeune femme est enlevée après la sortie de prison de Haglund. C'est un roman qui tient en haleine jusqu'au bout. Je dois maintenant lire le tome précédent paru aussi en Folio policier, Fermé pour l'hiver, en attendant de lire le troisième.

P1110059

Pour résumer, je conseille ces deux très bons romans bien menés avec des personnages auxquels on s'attache.

18 avril 2019

Pas dupe - Yves Ravey / Le dernier bain - Gwenaële Robert

P1110038

Le dernier bain (Les passe-murailles / Robert Laffont, 231 pages) de Gwenaële Robert évoque de manière romancée les trois derniers jours de la vie de Jean-Paul Marat, "l'Ami du peuple" assassiné par Charlotte Corday le 13 juillet 1793. Paris est assommée par la chaleur. Le roi a été guillotiné six mois auparavant et la Reine, ses enfants et sa belle-soeur vivent désormais dans la prison du Temple. Théodose, un moine qui a renié sa foi et qui est devenu écrivain public (il écrit surtout des lettres de délation), observe de loin Jane, une jeune Anglaise arrivée depuis peu à Paris afin d'approcher Marat. Elle y arrive en portant les fioles pleines de vinaigre ou de soufre pour soulager l'horrible maladie de peau dont souffre Marat, qui vit dans sa baignoire. Marthe Brisseau, la lingère de Marie-Antoinette au Temple, demande à Théodose d'écrire une lettre à Marat à qui elle exige réparation le jugeant responsable d'avoir mis sa fille enceinte après l'avoir soignée. Rappelons que Marat avait fait des études de médecine et avait même exercé en Angleterre.  Pendant ce temps-là, Charlotte fraîchement débarquée de Normandie, achète un couteau et s'apprête à commettre son crime. Il faut noter que Mme Robert n'a pas beaucoup de sympathie pour Marat. J'ai aimé ce roman pour l'histoire et la manière dont Mme Robert mélange la fiction et les faits historiques. Grâce à elle, j'ai donc appris que David (le peintre), grand ami de Marat, avait voté la mort du roi. La photo de la couverture représente le célèbre tableau de David, "Marat mort dans sa baignoire". Le tableau se trouve au musée des Beaux-Arts de Bruxelles. Et la baignoire-sabot de Marat se trouve au musée Grévin depuis 1886.

P1110037

Avec Pas dupe (Editions de Minuit), j'ai retrouvé avec plaisir le style d'Yves Ravey, qui, en 140 pages, nous narre l'histoire de Meyer, qui vient de perdre sa femme Tippi dans un accident de voiture. La voiture et Tippi se sont retrouvées au fond d'un ravin. Pour l'anecdote, Tippi avait un amant depuis longtemps. Cet accident amène de nombreuses interrogations. Meyer était l'employé de son beau-père, lui-même, le père de Tippi. Il est surprenant que cette jeune femme portant un très beau collier sorte à l'aube pour prendre sa voiture. L'inspecteur Costa Martin-Lopez, qui m'a beaucoup fait penser à l'inspecteur Columbo, n'arrête pas d'interroger Meyer, il pose des questions sur plusieurs détails. Bien entendu, on comprend vite que cet "accident" est un crime et on comprend dès le premier paragraphie qui est le coupable. On a toutes les explications dans les dernières pages. Un roman plaisant.

**************************

Sinon, depuis lundi, je suis toute "bouleversifiée" par l'incendie de Notre-Dame, la cathédrale de dentelle avec ses rosaces magnifiques. Je n'ai pas encore osé aller la voir et pourtant je ne travaille pas très loin à pied. Vivement qu'on la rebâtisse!

Une photo prise en août 2013 depuis le théâtre du Châtelet.

P1040466

7 avril 2019

L'avenir du capitalisme - Bernard Maris

Avec L'avenir du capitalisme, voici une quatrième chronique concernant Oncle Bernard dans le cadre des hommages que je (ta d loi du cine, squatter chez dasola) rends aux morts de Charlie Hebdo.

P1100924

Ce petit ouvrage (67 pages) est paru à titre posthume aux éditions LLL (Les Liens qui Libèrent) en 2016. Le texte de Bernard Maris commence p.15. Le livre reprend le texte d'une conférence prononcée par Bernard Maris, à Paris, le 11 janvier 2010, à l'Institut Diderot. Dominique Lecourt, qui dirige ce laboratoire d'idées français lancé le 19 octobre 2009, explique dans une émouvante préface les circonstances de la rédaction de ces quelques dizaines de pages. J'y relève une citation: "En l'écoutant [Bernard Maris] sur France Inter, on était frappé de ce qu'il ne coupait jamais la parole à ceux dont il ne partageait pas les opinions".

Concernant ce questionnement sur l'avenir du capitalisme, la réponse qu'il tente ici d'y apporter (comme on "tente" une performance, dirais-je) se place d'abord d'un point de vue économique, bien sûr, - puisqu'il était économiste -, mais aussi avec des références historiques, sociologiques et peut-être un petit peu philosophiques. Il en appelle à Karl Marx évidemment, mais aussi à Max Weber, et à [John Maynard] Keynes...

L'ouvrage est divisé en deux parties. D'abord, "le capitalisme est-il moderne"? Pour parler de l'avenir, il commence bien entendu par évoquer le passé et l'apparition de longue date d'éléments isolés (grand commerce [à longue distance], prédation, comptabilité...). Si j'ai bien compris, le capitalisme apparaît quand les "travailleurs" l'emportent sur les "guerriers" et les "prêtres"(pour reprendre les trois fonctions dont parle Georges Dumézil pour les épopées des sociétés indo-européennes), et lorsque apparaît la notion de "surplus" et d'accumulation.

Bernard Maris égrène et expose quatre éléments qui manquaient aux époques pré-capitalistiques et que ce "jeune homme" (le capitalisme) va amener. Puis sa démonstration respectera ces quatre parties annoncées p.23: le travail (et le marché du travail); le crédit (la taille des marchés et la production de masse); le machinisme (et la soumission de la technique à la science); le rapport au temps (le temps linéaire qui se substitue au temps cyclique). Je cite (p.24): "le capitalisme naît lorsque l'esprit du capitalisme habite la majorité des dirigeants, et bientôt la société tout entière, à travers le travail et la techno-science." Je mentionnerai que le sous-entendu que les paysans travaillaient moins, en 1914, qu'aujourd'hui, m'a d'abord fait sauter au plafond (p.45)... avant que je comprenne mon malentendu: Bernard Maris parlait bien de prise en compte du travail "marchand" (rémunéré), et non du travail en autarcie.

Pour ma part, autant j'adhère aux explications historiques, autant les explications du capitalisme en lien avec la psychanalyse (le bourgeois qui refuse de jouir...) me paraissent personnellement superflues (comme on le sait, ce n'est pas ma tasse de thé). Il me suffit que soit énoncé que le capitalisme est un système qui fonctionne sur la frustration et la servitude. Ne vaut-il pas mieux que les entrepreneurs capitalistes exercent leur tyrannie sur leur compte en banque que sur leurs compatriotes? La réponse ne me semble pas si évidente. Le capitalisme se présente aussi avec le masque d'un jeu où tout le monde serait gagnant: l'échange créant davantage de richesse(s) qu'il n'y en avait au départ. Le problème est que cette "richesse" est devenue, exclusivement, financière. La violence du capitalisme s'est aussi (re)portée sur l'environnement. Comment l'Homme s'en sortira-t-il?

Et l'avenir du capitalisme (abordé en seconde partie, p.49)? j'ai trouvé qu'aucune des différentes possibilités qu'il balaie n'incite à l'optimisme... Le verrons-nous avoir tort? Par exemple, la Chine verrait bien, d'un côté, les salaires de ses travailleurs augmenter; mais de l'autre, l'immensité de son propre marché intérieur lui garantirait des économies d'échelle, "ce qui fait qu'on [l'Europe?] est mal barrés". Le progrès technique n'est sans doute pas une solution en raison de l'impossibilité de la croissance dans un monde fini. La solution (en conclusion) pourrait venir de l'économie de l'altruisme, l'économie sociale et solidaire (j'adhère!).

Un rapide coup d'oeil sur la blogosphère ne m'a pas permis de trouver beaucoup de mentions de cet ouvrage, à part sur des blogs de librairies. Mention spéciale pour le blog de Ludovic (sous-titré "une opinion parmi d'autres"), qui a à la fois parlé du livre et mis en ligne la vidéo de la conférence

Au final, la version rédigée, construite, condensée, du livre, est bien évidemment différente de la version improvisée, semble-t-il, d'après quelques notes jetées sur des feuilles (improvisations touffues sur un sujet sur lequel il travaillait depuis des décennies, bien entendu). J'ai été un peu dérouté par le décalage entre le son et les mouvements des lèvres? Mais j'ai pioché des éléments pour le présent billet indifféremment dans l'un et dans l'autre, même s'il est difficile de résumer 56 minutes ou 52 pages en quelques lignes. Je vous invite donc à consulter les deux! En ce qui me concerne, j'ai apprécié le sens de la formule de Bernard Maris. Bizarrement, j'ai eu l'impression de connaître isolément beaucoup des éléments épars qu'il cite, mais sans jamais en avoir auparavant fait la synthèse, la "mise en relation", pour arriver à la démonstration qu'il apporte avec sa pensée construite. N'est-ce pas ce que l'on attend d'un érudit, d'un intellectuel, d'un "spécialiste" ou d'un "expert"?

Pour la suite, je pense que ma prochaine chronique d'un ouvrage d'Oncle Bernard portera, d'ici quelques mois, sur sa Lettre ouverte aux gourous de l'économie qui nous prennent pour des imbéciles [chroniqué le 07/08/2019].

*** Je suis Charlie ***

4 avril 2019

Le hibou - Samuel Bjørk / Art et décès - Sophie Henaff

Pour ceux qui ont lu et aimé Poulets grillés et Rester groupés, vous risquez d'être déçus, comme je le suis, par Art et Décès de Sophie Henaff (309 pages, Albin Michel). On retrouve la brigade de police commandée par le commissaire Anne Capestan, qui a accouché d'une petite Joséphine qui capte toute l'attention de sa maman. J'ai trouvé que l'intrigue ne cassait pas trois pattes à un canard. La capitaine de police Eva Rosière, un membre du groupe, a pu enfin vendre un de ses scénarios et un film est en train d'être tourné. Manque de chance, un jour, le réalisateur est retrouvé mort à l'heure du déjeuner, un poignard entre les omoplates. Bien entendu Capestan et son groupe vont mener l'enquête dans le studio où s'est déroulé le meurtre. Et Eva est la première suspecte pour diverses raisons. Moi qui avais souvent souri en lisant les deux précédents, je n'ai pas retrouvé l'humour des deux précédents. Les membres de la brigade manquent de relief. Et pour ceux qui n'ont pas lu les tomes précédents, on a dû mal à comprendre ce qui fait leur personnalité. Sophie Henaff, ou l'éditeur (?), y a d'ailleurs pensé car à la fin du volume, il y a des extraits choisis des deux volumes précédents sur les "poulets grillés".

P1100874

 Je passe à Le Hibou de Samuel Bjørk (Pocket, 470 pages), un excellent thriller norvégien qui m'a captivée de bout en bout (hi!). Une jeune fille est retrouvée assassinée dans un clairière. Son corps est recouvert de plumes d'oiseaux (de hibou). L'enquêteur criminel Holder Munch aidé par Mia Krüger, une jeune femme un peu traumatisée mais très intelligente, vont mener l'enquête ,dont une partie se déroule dans une exploitation horticole où vivent des jeunes en rupture avec leur famille. Les suspects sont nombreux mais le nom du ou la coupable ne nous est révélé qu'à la toute fin. J'ai trouvé que l'intrigue tenait debout et elle tient en haleine. J'ai tellement aimé que je compte lire le roman précédent de l'écrivain, Je voyage seule.                                                               

P1100873

26 mars 2019

La transparence du temps - Leonardo Padura

P1100869

Avant que j'évoque des polars plus ou moins réussis, je veux vous convaincre de lire le nouveau Leonardo Padura, La transparence du temps (428 pages, Editions Métailié) dans lequel on retrouve Mario Conde, l'ancien policier devenu un commerçant de livres anciens. Le roman se déroule entre le 4 septembre et le 9 octobre 2014 (le jour des 60 ans de Conde), et un épilogue se passe le 17 décembre 2014 (le jour où Obama et Raùl Castro ont entamé des négociations pour la normalisation des relations entre les USA et Cuba et la restauration des relations diplomatiques). Comme Keisha, j'ai eu beaucoup de plaisir à retrouver Conde qui rêve toujours de boire du bon café, qui fume des cigarettes et ne boit pas toujours du bon rhum. Entouré de ses amis fidèles et de son amoureuse Tamara, ainsi que son chien Basura II, Conde va reprendre son métier d'enquêteur pour rendre service à Bobby, un ancien camarade de lycée. Bobby, amateur d'art, s'est fait plaquer par son petit ami Raydel qui en a profité pour vider l'appartement qu'ils partageaient. lI a en particulier dérobé une très ancienne vierge noire en bois de grande valeur, importée d'Europe au moment de la guerre civile espagnole dans les années 30. Cette vierge va malheureusement provoquer quelques morts violentes. Pour Padura, ce roman est surtout l'occasion de faire une description de Cuba et de ses habitants en pleine décrépitude où la richesse côtoie la misère. Même pour Conde et ses proches, les produits de première nécessité manquent. Pour se déplacer, Conde prend les taxis collectifs ou marche longtemps. Il y a des descriptions de quartiers où les maisons sont des simples assemblages de tôles. Le récit est ponctué par l'histoire de la vierge noire et ses origines datant au moins de la chute de Saint-Jean d'Acre en 1291. Un magnifique roman avec un Conde un peu bougon qui n'est pas pressé de fêter ses 60 ans. Lire aussi le billet de Clara.

20 mars 2019

Salon du livre 2019 à Paris

Ayant eu une invitation par une collègue, je me suis décidée à aller au salon du livre de cette année. J'y suis restée relativement peu de temps: la foule et la chaleur m'incommodent assez vite. J'ai déambulé dans les allées. J'ai vu des files d'attente pour des dédicaces. J'ai aperçu Daniel Pennac conversant avec Guillaume Gallienne tandis que l'écrivain turc Orhan Pamuk quittait le stand Gallimard entouré de gardes du corps. J'ai aussi vu Bernard Minier, Jean-Louis Debré et Katherine Pancol. Point d'Amélie Nothomb, mais j'ai eu le plaisir d'avoir une gentille dédicace de Javier Cercas, un homme très sympathique. Lire le billet de Marilyne sur cet écrivain.

20190317_171639

Comme l'a mentionné Marilyne, cette année, c'était l'Europe qui était à l'honneur. J'ai trouvé l'initiative excellente.

J'ai acheté seulement trois livres: un de J.-H. Rosny Aîné, l'énigme de Givreuse et autres contes, collection Les orpailleurs science-fiction, édité par la BNF (j'ai été attirée par la couverture), Les Limousins à vol d'oiseau d'Onésime Reclus (le frère d'Elisée et Elie) et Les soldats de Salamine de Javier Cercas.

P1100858

Je ne regrette pas ma visite même si elle fut courte.

14 mars 2019

4 3 2 1 - Paul Auster

P1100855

Pour ce roman de 1015 pages, je ne vais pas en écrire trop long. J'ai mis presque un mois et demi à lire 4 3 2 1 (Edition Actes Sud) de l'Américain francophone Paul Auster. Ce n'est pas qu'il soit difficile, mais il est très dense. Il ne s'agit pas du genre de roman qu'on lit en diagonale. Il faut saluer le travail remarquable du traducteur. 4 3 2 1 met en scène Archie Ferguson, un "double" de Paul Auster. Pourquoi 4 3 2 1? Si vous êtes impatient de le savoir, vous le saurez en lisant les quatre dernières pages du roman. Après une introduction sur les grand-parents d'Archie Ferguson venus de Minsk, l'histoire se décompose en quatre variations de la vie d'Archie Ferguson, né en 1947, la même année que Paul Auster. Chaque Archie (diminutif d'Archibald, d'après Archibald Leach [le vrai nom de Cary Grant]) aura une vie courte mais intense grâce des rencontres et des amours diverses. En compagnie d'Archie, on côtoie beaucoup de personnages recurrents que l'on retrouve dans les récits, comme Amy Schneiderman, une cousine d'Archie, ou Rose, la mère de ce dernier. Chaque récit est exposé l'un après l'autre sans qu'ils soient toujours synchro dans le temps. Le roman permet une évocation de l'Amérique (et de la France) des années 60. Archie, qui est un fan de cinéma et de base-ball, deviendra écrivain après des études universitaires. Il va d'ailleurs jouer un rôle dans les mouvements étudiants de l'époque. Le personnage d'Archie auquel on s'attache tout de suite fait que le lecteur ne lâche pas le roman bien construit. On ne se perd pas dans les méandres des différents récits. Il faut noter qu'Auster a dédié son roman à sa femme, l'écrivain Siri Hustvedt. Si vous n'avez pas peur d'un roman de 1000 pages,  je le conseille.

Lire les billets de Krol, Papillon, Kathel, Keisha (qui a lu le roman en VO).

7 mars 2019

Mémé, femme pratique - Riss

Je me suis aperçu récemment, après une grosse trentaine de billets d'hommages publiés depuis 4 ans, que je (ta d loi du cine, "squatteur" chez dasola) n'ai pratiquement jamais mentionné Riss, à l'unique exception près d'un dessin dans Petits principes de langue de bois économique, de Bernard Maris. Or, non seulement Riss a été blessé (omoplate fracassée en petits morceaux par balle...) lors du massacre du 7 janvier 2015, mais encore il est, depuis, "Président [de la SAS Rotative], Directeur de la publication" de Charlie Hebdo, poste qui, vraisemblablement, ne lui donne guère le loisir de veiller à la publication d'albums ou de livres à partir de ses propres oeuvres. Riss avait été co-dirigeant de Charlie Hebdo avec Charb après le départ de Philippe Val, il en a été un temps, je crois, actionnaire largement majoritaire (sans minorité de blocage face à lui), je n'ai pas vérifié si c'est toujours le cas aujourd'hui. Comme Gotlib une fois que celui-ci a été à la tête de Fluide glacial, il ne publie plus guère d'albums - même s'il dessine, y compris régulièrement la couv' de l'hebdomadaire (selon wikipedia, dernier livre co-écrit en 2016, avant-dernier en 2014...).

Pour combler vite fait ce manque, j'ai choisi de disséquer l'un des anciens albums de lui que je possède (je pense que dasola se serait opposée à ce que je rédige un billet complet sur l'autre), acheté le 27/01/2015 dans une bouquinerie que je fréquente. Voici donc Mémé et ses pratiques infâmes.

P1100653 Le Cherche midi éditeur, 1999.

Telle une héroïne de cartoon, elle peut infliger les pires sévices à son entourage (ou en subir - il lui arrive de se voir arracher successivement les quatre membres - voire pire), avant de repartir, regonflée à neuf et à bloc, dans la planche suivante, comme si de rien n'était (aucun passage par la case "prison"!), vers de nouvelles aventures. J'ai choisi d'en citer quelques dessins "parlants" et en résonance avec l'actualité contemporaine (20 ans après).

P1100657 p.48: mais qui a eu cette idée folle un jour d'inventer... (un dessin qui avait dû peiner Luce Lapin)? L214 n'existait pas encore en 1999...

P1100660 p.40-41: nos amis les paysans... C'était bien après la découverte du trou dans la couche d'ozone, mais bien avant le Grenelle de l'environnement.

Et la page précédente, tout d'même: P1100661 (est-ce plus clair?)

P1100656 p.30: le bourreau n'aime pas les morpions? (il ne sait pas jouer...).

P1100655 p.15: Mémé chevalière du ciel à la guerre de 14-18 (!)? L'autre ne levait-il pas les bras au bout de son parachute? Quelle connerie la guerre...

P1100654 p.8: ça vaut bien les bagnoles électriques - même si la dictature de Mémé n'a rien à envier à celle du Bretzelberg!

P1100658 p.18-19: maison de retraite "comme son nom l'indique" Beauséjour (EHPAD, comme on ne disait sans doute pas encore au XXe s.?). 

P1100659_vaches p.26-27: vaches en chaleur (un gros manque en page de droite: aucune ne monte sur une autre! Personne n'est parfait...).

Enfin, un dessin relativement récent avec le personnage de Mémé: P1100684 (extrait de la double page centrale [p.8-9] titrée "Cahier de doléance des gilets jaunes" du N°1376 du 05/12/2018, p.9).

PS: et le second album de Riss que je possède, me direz-vous? Je l'avais acheté le 07/01/2015 (... après). En voici, tout de même, la couverture:

P1100686 Dépôt légal: novembre 2014

*** Je suis Charlie ***

27 février 2019

Qui a tué l'Homme-homard? - J.M. Erre

 P1100850                 

Après Clara, je conseille la lecture de Qui a tué l'Homme-homard? (Edition Buchet-Chastel, 354 pages savoureuses) le nouveau J.M. Erre qui a une fois de plus écrit un roman désopilant même si quelques meurtres émaillent le récit. Je n'ai pas hésité une minute à l'acheter sachant que je ne regretterai pas. De nos jours, dans un village perdu de Lozère, à Margoujols, l'un des bourgs les plus reculés du Gévaudan, un meurtre puis d'autres sont commis. Quatre gendarmes sont envoyés sur place pour mener l'enquête dont l'adjudant Pascalini. La première victime est donc un homme détesté par tout le monde que personne ne pleure, Joseph Zimm, l'homme-homard (né avec une ectrodactylie, une absence de plusieurs doigts), un ancien artiste d'un cirque de "freaks" dont les membres se sont installés depuis des années dans le village. Dans la troupe de ce cirque venu de Roumanie à la fin de la 2ème guerre mondiale, on trouve des octogénaires, dont une femme à barbe, un colosse, un lilluputien, un homme-éléphant et un homme-caoutchouc, ainsi que des soeurs siamoises. Mais une personne est plus monstrueuse que tous les autres, c'est Julie de Creyssels, la narratrice du récit. Fille du maire, Julie de Creyssels, âgée de 23 ans, est clouée dans un fauteuil roulant depuis la naissance. Elle est tétraplégique et ne peut bouger que le majeur gauche. Elle peut dialoguer grâce à lui et à un équipement informatique ultra-performant. Elle aussi mène l'enquête. D'une grande intelligence, elle fait montre d'un humour pince-sans-rire ravageur. Je vous laisse découvrir ce roman qui m'a fait souvent sourire. Si vous ne connaissez pas J.M. Erre, lisez aussi Le mystère Sherlock, Série Z, La fin du monde a du retard, Le grand n'importe quoi.

18 février 2019

La neuvième heure - Alice McDermott

P1100848

J'ai suivi les conseils de Dominique (que je remercie) sur ce roman. La neuvième heure d'Alice McDermott (Editions Quai Voltaire, 282 pages) a reçu le prix Fémina étranger en 2018. J'ai trouvé le contexte original: au début du XXème siècle à Brooklyn, un quartier de New-York (où est née l'écrivain), Jim, un homme d'une trentaine d'année (irlandais catholique) qui vient d'être licencié, se suicide au gaz dans l'appartement où il habite avec sa femme Annie. Il avait demandé à cette dernière d'aller faire des courses. Arrivée sur les lieux, la soeur Saint-Sauveur appartenant à une congrégation religieuse s'occupant des pauvres et des malades prend tout de suite Annie, enceinte de quelques mois, en affection. Malheureusement, la soeur n'arrivera pas à faire enterrer Jim en terre consacrée car il s'est suicidé. Qu'à cela ne tienne, les soeurs vont prendre soin d'Annie et lui donner un travail à la blanchisserie du couvent. C'est là que va naître Sally, une "enfant de couvent". Le roman se passe sur plusieurs années. Annie et Sally vont cotoyer quelques soeurs aux personnalités attachantes comme Soeur Illuminata ou Soeur Jeanne, qui sont toutes dévouées aux personnes malades qu'elles visitent, comme Mme Costello. L'histoire se termine sur un meurtre que je ne vous révélerai pas. C'est un roman qui se lit vite. J'ai aimé, même si je n'ai pas eu le coup de foudre.

7 février 2019

Le procès Colonna - Tignous & Dominique Paganelli

J'ai (ta d loi du cine, squatter chez dasola) déjà parlé, dans ma rubrique d'hommage aux victimes de l'attentat à Charlie Hebdo, du reportage dessiné effectué par Tignous sur les prisons françaises. Ce mois-ci (février 2019), je vais présenter un autre reportage produit à deux mains (par Tignous et Dominique Paganelli): Le procès Colonna.

P1100798

Il y a vingt-et-un ans et un jour, vendredi 6 février 1998 après 21 h, le préfet Claude Erignac était assassiné par un commando indépendantiste à Ajaccio (Corse). En 2003, Yvan Colonna, soupçonné d'être le tireur des coups mortels et qui avait "pris le maquis" le 23 mai 1998, était arrêté après 5 ans de cavale.

Extrait de l'avant-propos, signé Tignous et Paganelli, de cet album: "Du 12 novembre 2007 au 13 décembre 2007, la cour d'assises spécialement constituée a jugé Yvan Colonna, l'assassin présumé du préfet Claude Erignac... Le 13 décembre, elle a dit qu'il était coupable et l'a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Durant quatre semaines s'est déroulée devant nous qui étions dans la salle d'audience une tranche de vie, une sorte de comédie humaine tragique (...). Pour parler de la mort d'un homme, il y a eu de la vie. C'est ce que nous avons voulu raconter. Nous ne présentons pas ici les "minutes" ou "l'intégrale" du procès, mais ce qui nous a touché. En un mot nos impressions de ces trente-quatre journées d'audience."

J'ai acheté ce livre (daté de juin 2008) il y a quelques mois. Je n'avais pas lu en 2007 les reportages consacrés par Charlie Hebdo au procès. Je n'ai pas cherché à les retrouver (pour comparer). Si j'avais eu à faire un exposé dans un cadre universitaire, ou à écrire un article (rémunéré) dans la presse professionnelle, je l'aurais fait.

Je pense que les textes de l'album ont été rédigés par Dominique Paganelli. Ce journaliste a surtout réalisé des documentaires ou ouvrages sur le monde du football. Dans Charlie Hebdo, je crois que sa couverture du procès Colonna était illustrée par d'abondants croquis de Tignous. Dans l'album, beaucoup des textes commencent par la date du jour concerné, en bleu avec le jour en blanc sur un carré rouge. De son côté, Tignous a rédigé et lettré des textes abondants pour ses illustrations (reprises de phrases entendues, textes explicatifs...), mettant en scène témoins, policiers, avocats, juges, Corses divers, décors... J'ai compté 23 représentations d'Yvan Colonna (dont une fois avec seulement ses mains). Les multiples demandes de P à T "t'as dessiné Ulrike Weiss?" (magistrate en charge des relations avec les média, dont le visage apparaît seulement en dernière page de l'album) peuvent faire sourire.

Après la lecture de l'ouvrage, tout ce qu'on a comme certitude, c'est que le préfet Erignac a été assassiné, qu'Yvan Colonna a pris le maquis après une interview télévisée, a été désigné comme le tueur par les membres arrêtés du "commando" ou leurs épouses (qui se sont ensuite rétractés), a été arrêté, n'a jamais avoué (a protesté de son innocence durant le procès), a été reconnu coupable et condamné. Depuis la parution de l'album, il y a eu un procès en appel en 2009 (rajout d'une peine de sûreté de 22 ans), annulé par la Cour de Cassation en 2010, et un nouveau procès en juin 2011 (de nouveau perpétuité, sans peine de sûreté). La condamnation est désormais définitive. Yvan Colonna est en prison depuis 2003 (bientôt 16 ans).

Je vous mets juste quelques extraits des 120 pages de l'album.

P1100801  p.101, Tignous croqué par Pétillon, de passage durant le procès.

P1100799  p. 12bis (sic! Dans les albums publiés par cet éditeur, elle remplace la p.13), ou comment un "croquis d'attitude", un peu retravaillé, peut devenir un élément de composition d'une couverture d'album...

P1100797  p. 83 (une page avec coquille dans le texte, et un croquis "brut" [non travaillé, avec du "texte parasite"?]).

Je fais aussi le lien avec ce qui m'avait frappé en 2016, à savoir le "retour" de Renaud dans les pages de Charlie Hebdo. Rappelons que Renaud avait fait partie des premiers associés de la société (Kalachnikof) créée pour relancer Charlie en 1992 (il avait sauf erreur de ma part mis 200 000 F au pot, là où Cabu et Val en mettaient 50 000 chacun). Puis, quelques années plus tard, à l'occasion de la création des éditions Rotative, il était sorti du "tour de table". Bref, après avoir repris contact avec l'équipe suite au 7 janvier 2015, il a retrouvé une rubrique régulière à partir du 2 mars 2016. Je me rappelle avoir trouvé navrant, à l'époque, qu'il n'y parle guère que d'Yvan Colonna, au détriment de beaucoup d'autres sujets sur lesquels je pense qu'il aurait pu dire des choses intéressantes (à mon avis, du moins). Elle s'était en tout cas arrêtée assez vite. Ci-dessous 3 extraits (liste non exhaustive bien entendu!).  

P1100802  2 mars 2016, p.2

P1100804  18 mai 2016, p.3  P1100803  20 avril 2016, p.3

Enfin, en dernier "point d'actualité" liée à l'assassinat idéologique d'un Préfet de la République Française (par des "militants perdus"), on peut signaler qu'hier, 6 février 2019, a eu lieu dans le Grand amphithéâtre de la Sorbonne le "3e Colloque Claude Erignac", organisé par l'ACP (Association du Corps Préfectoral), sur le thème "L'intégration républicaine en péril: comment la refonder?". On pourrait relever qu'il avait lieu aussi 85 ans après les émeutes anti-républicaines du 6 février 1934 (manifestations des ligues d'extrême-droite)...

*** Je suis Charlie ***

<< < 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 30 40 > >>
Le blog de Dasola
  • CINEMA, LIVRES, DVD, SPECTACLES, TV - BILLETS DE BONNE ET (parfois) MAUVAISE HUMEUR. Critiques et opinions sur films, livres et spectacles. [Secrétaire de rédaction et statistiques: "ta d loi du cine" (215 commentaires, du 17/01/07 au 14/04/24)].
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Newsletter
83 abonnés
Liens (en cours de mise à jour)

** INDEX AUTEURS (LITTÉRATURE), FILMS & REALISATEURS (CINÉMA) **

*** CHALLENGES DE L'ANNEE EN COURS ***


** LE SITE DU STATISTICIEN **


*** LIENS ***
(BLOGUEURS COMMENTANT SOUVENT LE MIEN)

  • = Dix blogueuses et blogueurs ayant fait au moins 500 commentaires chez dasola se présentent =
  • On crée un lien lorsqu'un blogueur a commenté au moins cinq billets en venant à (au moins) deux dates différentes sur ce blog. 
  • Une adresse de mail (xxx@yyy.fr ou com...) [non publiée!] est exigée par Canalblog pour enregistrer votre commentaire. 
  • Vous ne voyez pas tout de suite apparaître votre commentaire, car je dois d'abord le valider (cela peut prendre quelques heures)
CINÉMA (22 blogs en activité)

DIVERS - CULTURE (58 blogs en activité)

LIVRES (70 blogs en activité)

QUELQUE TRISTESSE

QUELQUES BLOGS DÉSORMAIS EN PAUSE (À MON GRAND REGRET)

QUELQUES INFIDÈLES (NE ME RENDENT PLUS MES COMMENTAIRES...)

QUELQUES INTROUVABLES (BLOGS SUPPRIMÉS OU DISPARUS?)

SANS BLOG (COMMENTATEURS SUR LE MIEN)

STATISTIQUES, INFORMATIONS, RECORDS (DEPUIS LA CRÉATION DU BLOG)

  • * Blog créé le 09/01/2007, transféré sur Canalblog en juin 2007, migré à l'insu de son plein gré sur l'outil Overblog en février 2024 *
  • 2703 billets (au 19/04/24), dont tous ont eu au moins un commentaire
  • 33 123 commentaires (au 19/04/24 [+ 10 [anciennement 203] "égarés" lors de la migration"]) [dont 260 dasola] par au moins 1273 personnes, dont 101 (re)venues en 2024
  • 407 blogueurs [dont 156 actifs en 2024] m'ont fait au moins 5 et jusqu'à 1209 (au 16/04/2024) commentaires (voir ci-dessus)
  • Abonnés (être prévenu à chaque nouveau billet publié sur le blog): 77 au 07/03/2024 (via "Newsletter" ci-dessus)
  • Billet commenté par le plus de personnes: 77 commentaires par autant de commentateurs/trices (billet du 09/01/2014)
  • Billet comptant le plus de commentaires: 123, par 46 commentateurs/trices différent(e)s (billet du 10/06/2023)
  • Record de commentaires en 1 an de date à date par 1 même blogueur-euse: 146 par DocBird (du 15/07/22 au 14/07/23)
  • Record de commentaires en un mois: 355 en janvier 2014
  • Record de commentaires en une année civile (même blogueur-euse): 143 par Manou en 2023
  • Record de commentaires en une journée: 44 le 09/04/2009
  • Records de nouveaux commentateurs en un mois: 24 (dont 22 blogueurs) en mai 2008 et mars 2009
Pages