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Le blog de Dasola
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19 mars 2023

Le soleil rouge de l'Assam - Abir Mukherjee

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J'ai eu grand plaisir à lire le quatrième roman d'Abir Mukherjee qui vient de paraître. Après L'attaque du Calcutta-Darjeeling, Les Princes de Sambalpur et Avec la permission de Gandhi, j'ai retrouvé dans Le soleil rouge de l'Assam (Edition Liana Levi, 411 pages) le capitaine Wyndham en février 1922, résolu à se désintoxiquer de son addiction à l'opium. Pour cela, il part dans un ashram dans la province de l'Assam, à trois jours de train de Calcutta. Son fidèle sergent bengali Satyendra Banerjee est parti voir sa famille à Dacca. Dès que Wyndham arrive, il voit quelqu'un qui lui rappelle un passé londonien douloureux. A partir de là, le récit alterne deux périodes et deux intrigues qui vont se rejoindre. La première intrigue se passe en 1905 dans un quartier de l'East End de Londres. Wyndham est un tout jeune inspecteur. Une femme, Bessie, est retrouvée morte chez elle. Son voisin du dessus, Israel Vogel, va être accusé du meurtre, parce qu'il est juif, et on retrouve l'arme du crime chez lui. Bessie travaillait chez un certain Jeremiah Caine, un homme d'affaires quelque peu véreux dont la femme venait de décéder. Dix-sept ans plus tard, à Assam, la cure de désintoxication est dure à supporter. Wyndham est nourri de riz, de lentilles et de breuvages qui le font vomir. Il tient néanmoins le coup et quand il quitte l'ashram, il fréquente d'autres Britanniques dont Emily Carter, l'épouse de Ronald Carter, un homme d'affaires prospère de la région. Emily a la passion de la mécanique et elle aime réparer les moteurs d'automobiles. Il se trouve que Ronald Carter meurt une nuit dans sa chambre fermée à clé de l'intérieur (et il était seul). D'étranges marques sont apparues sur sa poitrine. Wyndham ne croit pas à un accident et demande qu'une enquête soit faite. C'est le sergent Banerjee, revenu de vacances, qui va en être chargé. J'ai trouvé une fois de plus que l'écrivain avait réussi à captiver le lecteur même pour une histoire plus classique. Je vous recommande chaudement ce 4ème tome, qui peut se lire sans avoir lu les trois premiers.

13 mars 2023

Le meurtrier - Patricia Highsmith

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J'ai écouté tout récemment, grâce à You Tube, plusieurs épisodes de l'émission "Les maîtres du mystères", une émission radiophonique diffusée sur France Inter dans les années 1950 et 60. A la fin de certains épisodes, les producteurs de l'émission, Pierre Billard (1921-2012) et Germaine Beaumont (1890-1983), faisaient une intervention pour parler d'un roman policier. Et j'ai retenu que Germaine Beaumont avait appprécié Le meurtrier de Patricia Highsmith (Livre de poche, 281 pages), dont je n'avais jamais entendu parler. C'est un roman qui a été écrit en 1954 mais est paru en français en 1960 et que je me suis procuré. En préambule, je dirais que j'ai apprécié les romans de Patricia Highsmith que j'ai lus, dont ceux avec Ripley. Je conseille aussi La rançon du chien ou Eaux profondes. Les romans de Patricia Highsmith (1921-1995) sont tous de qualité. Les histoires qu'elle raconte se finissent mal en général. Sous couvert d'histoires policières, ce sont surtout des romans sur la psychologie criminelle. L'histoire du Meurtrier se passe dans la région de New-York. Dès les premières pages, Melchior Kimmel, un libraire d'une quarantaine d'années, assassine sa femme Helen. Cette dernière prend un bus et au premier arrêt, son mari qui la suivit en voiture la tue derrière un fourré. Après quelques semaines, la police n'a toujours pas trouvé l'assassin. En revanche, Walter Stackhouse, un jeune avocat, devine qui a assassiné Helen Kimmel. Il aime lire  les comptes-rendus de faits divers dans les journaux. Walter a lui-même une vie de couple compliquée avec Clara, une jeune épouse tyrannique qui lui fait du chantage affectif. Sur un coup de tête, Walter rend visite à Kimmel pour lui commander un livre mais surtout pour savoir qui est Kimmel. Quelques semaines plus tard, Clara doit se rendre au chevet de sa mère mourante qu'elle n'aime pas. Elle prend le car pour se rendre à destination, mais, comme Helen Kimmel, elle est retrouvée morte lors d'un arrêt. Elle est tombée dans le vide et son mari Walter devient le seul suspect aux yeux de Corby, un policier tenace. Celui-ci commence à faire le rapprochement entre les deux décès et pourtant Walter n'est pas coupable de la mort de sa femme. Le meurtrier est un roman passionnant de bout en bout. 

7 mars 2023

Les Russkoffs - Cavanna

Ça débute avec une histoire de pénurie d'obus pour lutter contre les Russes. Et "les provinces, ça va, ça vient, surtout les frontalières" (p.13).

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) commente ce mois-ci Les Russkoffs, où François Cavanna raconte la suite (durant la seconde guerre mondiale) de son célèbre premier volume autobiographique Les Ritals, que je chroniquerai un mois ou l'autre [chroniqué le 7 novembre 2023]

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(Le livre de poche N°5505 ****, 410 p., 3e trim. 1981)

Alors, pourquoi ce titre-là et pourquoi maintenant? Le numéro 1596 de Charlie Hebdo daté du 22 février 2023 se présentait comme un numéro spécial Cavanna, qui aurait eu 100 ans (né en février 1923). Du coup, j'ai sorti de ma liste d'idées d'articles-hommages "Charlie" puis de ma pochothèque personnelle le livre, redevenu d'actualité, Les Russkoffs. Il est construit avec quelques retours en arrière, et se termine abruptement. En exergue de ce livre figurent comme dédicataires d'abord "[à] Maria Rossipova Tatartchenko, où qu'elle puisse être", puis 24 autres prénoms slaves féminins, suivis d'une vingtaine de gars français. "(...) et aussi / à tous ceux et à toutes celles dont j'oublie le nom mais pas le visage, / à tous ceux et à toutes celles qui ramenèrent leur peau, / à tous ceux qui l'y laissèrent, / et, en général, à tous les bons cons qui ne furent ni des héros, ni des traitres, ni des bourreaux, ni des martyrs, mais simplement, comme moi, des bon cons, / et aussi / à la vieille dame allemande qui a pleuré dans le tramway et m'a donné des tickets de pain."

Les Russkoffs du titre, pour ce que j'en ai donc compris, ce sont en premier lieu les femmes "de l'Est" (slaves) elles aussi réquisitionnés pour le travail en usine d'armement, ensuite les prisonniers de guerre russes - plus mal nourris que les Français? -, et en dernier lieu les soldats de l'armée rouge victorieuse, croisés en fin d'ouvrage quand ils vainquent, pillent, violent, et aussi exécutent sommairement ceux qu'on leur désigne comme "fascistes". Mais procédons par ordre.

Le premier chapitre (sur 17), titré "le marché aux esclaves" nous pose le jeune François en train de travailler sur une presse pour fabriquer des ersatzs de pointe d'obus, chacun des "vingt petit[s] Français pâlichon[s] maigrichon[s] étant flanqué de deux bonnes femme", et nous narre comment il (en) est arrivé là. Prisonniers de guerre français croisés durant le voyage (ne pas parler mal de Pétain!), interprète belge (flamand) à l'arrivée... et mise au boulot (en trois-huit à l'usine d'armement) dès la première nuit d'installation au camp.

Maria, c'est l'une de ses deux assistantes, qu'il prend d'abord pour une Allemande avant de comprendre (p.46) qu'elle est, non pas russe, mais ukrainienne (d'un pays qu'il situe très vaguement sur la carte). Et notre François va se montrer très motivé pour apprendre sa langue... 

Le troisième chapitre, titré "Pour le tsar!" (à la Michel Strogoff), revient en arrière en une soixantaine de pages (53-114) pour narrer l'exode de juin 1940, vécu par notre jeune Cavanna de 17 ans. Après avoir vainement attendu le car promis par l'administration des PTT, notre jeune vacataire part à vélo en direction de Bordeaux où l'ordre est de se replier (sous peine de sanctions pouvant aller jusqu'au licenciement!). Un voyage initiatique bien qu'inutile puisque les Allemands motorisés allaient plus vite que des réfugiés à pied ou même en vélo (notre François était parti avec son vélo de course tout neuf mais aux boyaux fragiles). N'ayant pas l'âge militaire, les Allemands le laissent revenir en région parisienne. Finis les PTT: voici Cavanna tireur de chariot pour aller sur les marchés, maçon... (court chapitre titré "Ma banlieue à l'heure allemande", p.203-221). Avant de se faire "piéger" dans l'entreprise où il venait d'entrer après une offre alléchante: et paf, requis pour le STO!

En Allemagne, Cavanna travaille donc d'abord pour l'industrie d'armement, puis est muté (par mesure disciplinaire) dans un Kommando des gravats, pour déblayer, jour après jour, Berlin bombardé quotidiennement. C'est entre autres sous les bombes alliées sur Berlin en 1944-45 qu'il s'est construit son opinion sur la guerre, de même que Cabu s'était forgé son propre antimilitarisme en tant qu'appelé en Algérie (entre mars 1958 et juin 1960). Il l'a vécue à hauteur d'homme. Il nous raconte une vie quotidienne de préoccupations alimentaires (à un moment, Maria refuse de manger un steack de cheval, contrairement au jeune Français habitué par sa mère), encadrée par des gardiens plus ou moins "peau de vache" ou "complaisants", une fragile survie de couple, de groupe, pour une histoire individuelle mais pleine d'anecdotes. Par exemple, p. 300-301, il raconte par suite de quel concours de circonstance il a été amené à casser la gueule à un gestapiste dans un tramway (sans conséquences, grâce à l'humanité d'un simple flic allemand pas spécialement pro-Gestapo). Il évoque la camionnette qui exhortait par haut-parleur les requis français à rejoindre la Waffen-SS... (p.310).

Mais je ne veux pas tout raconter (lisez le livre, écrit d'une langue drue, truculente et pressée). Fin février 1945 (p.317), le camp est évacué en train vers la Poméranie, pour aller y creuser de dérisoires fossés antichars dans le sable local. Puis ordre est donné de se diriger (à pied) vers "ailleurs". Et Maria et lui quittent la colonne malgré les risques, avant de rencontrer les "libérateurs" russes. Après quelques bivouacs, arrive la fin, ou comment un homme et une femme se perdent... Pendant que François était parti "au ravitaillement", Maria s'est fait rafler par les Russes malgré ses protestations. Et jamais Cavanna n'est arrivé à la retrouver, ni avant ni après son propre retour en France, dit le livre publié en 1979. Alors même que d'autres ont réussi à préserver leur "couple de guerre": qui a ramené "sa" Russkoff" (p.303: évasion, engagement dans la 2e DB, pour revenir en Allemagne chercher sa Klavdia), qui sa jeune Berlinoise brune (Ursula, p.308), qui envisageait de rester sur place (600 hectares de terre et la veuve allemande en prime, pour quelqu'un qui, au pays, ne possédait rien que ses deux bras, p.364). Le STO, finalement, ça aura donné les premières chansons de Brassens, mais aussi ces mémoires de Cavanna.

Pour les lecteurs et lectrices de 2023, je souhaite insister sur le fait qu'il ne s'agit pas là d'un roman, mais d'un témoignage de première main sur le quotidien vécu en particulier à deux et en général en groupe, dans un pays étranger où l'auteur n'est pas venu de son plein gré mais où il a vécu les horreurs de la guerre (y compris en assistant à des morts violentes).

J'ai trouvé peu de blogs en ayant parlé: Les plumes baroques (dernier billet en juillet 2020), Aspirant auteur (dernier billet en juin 2017). Je ne m'interdirai pas d'en rajouter "au fil de l'eau".

Et dans le numéro "centenaire" de Charlie que j'évoquais plus haut? En 16 pages, on trouve plus d'une douzaine de citations choisies par d'actuels rédacteurs ou dessinateurs (dont tous ne l'ont peut-être pas connu?), et quelques phrases à sa mémoire par rapport à Charlie dans la plupart des chroniques régulières. Jacques Littauer, notamment, évoquait Les Russkoffs (p.5). 

*** Je suis Charlie ***

6 mars 2023

Swinging Liverpool - Les aventures de Louise Petibouchon - Jean Depelley et Eric Albert

J'ai été très contente d'apprendre qu'un nouvel album était paru avec Louise Petibouchon, une policière limougeaude. Et j'ai eu le plaisir d'avoir une dédicace des deux auteurs. J'avais appelé la librairie qui avait invité les deux auteurs et, très gentiment, le vendeur m'a dit qu'il ferait son possible pour obtenir une dédicace. Dans cet album de 44 pages paru aux Editions Paquet intitulé Swinging Liverpool, les deux auteurs racontent deux histoires en parallèle, dans ce tome 3 qui se passe toujours au tout début des années 60. Celle avec l'inspecteur Plumier toujours bête comme ses pieds qui part en vacances à Royan pour rencontrer une association spécialiste de la vie extraterrestre. Plumier doit faire un exposé devant un public. De son côté, Louise Petibouchon, toujours aussi intelligente, va aller jusqu'en Angleterre à la recherche de son amie Roseline Poissard, une prostituée au grand coeur qui vient d'être enlevée en plein Limoges, sous les yeux de son souteneur, par un gang de Russes. J'ai trouvé cet album très sympa. Il y a même un clin d'oeil à Hergé quand Louise Petibouchon, arrivant à Calais, passe devant un cargo appelé "Kamasoutjan" en référence au "Karaboudjan" dans Le crabe aux pinces d'or.

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26 février 2023

Azincourt par temps de pluie - Jean Teulé

Profitant de son absence, j'ai (ta d loi du cine, "squatter") chipé ce livre sur la PAL de la maîtresse de blog (dasola). J'espère que cela ne la découragera pas de rédiger, le moment venu, son propre billet après lecture!

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Pour ma part, je n'avais encore jamais lu de romans de Jean Teulé (mais juste chroniqué une biographie de Charlie Schlingo dont il avait écrit le scénario pour Florence Cestac). Je ne sais donc pas comment il traite (de) la Grande Histoire ailleurs. Dans Azincourt par temps de pluie (éd. J'Ai lu n°13668, 220 p., imprimé en décembre 2022, pour l'édition que j'ai entre les mains), il nous la donne à voir sous un jour plutôt sanglant. 

Le livre se déroule sur deux ou trois jours (avant, pendant et près la bataille), du 24 au 26 octobre 1415. De manière très vivante (beaucoup de dialogues), Jean Teulé nous expose ces sacrés Français, grands seigneurs, en train de se disputer la peau du lion anglais avant de l'avoir tué, cependant que le souverrain anglais maintient une discipline de fer dans sa petite armée professionnelle. Il a fait le choix de nous présenter un rapport de 1 à 5 pour les forces en présence, alors que les chiffres varient y compris parmi les chroniqueurs de l'époque. Je n'oserai pas m'avancer sur le fait que la "fille à soldats" (surnommée "Fleur de Lys") qui se retrouve seule parmi les quelque 30 000 Français d'abord, parmi leurs cadavres ensuite est bien un personnage attesté sinon historique, ou non... mais elle sert de témoin (et, ma foi, si on l'avait écoutée - le bon sens féminin -, l'Histoire aurait pu en être changée). Mais Jean Teulé n'a pas écrit une uchronie. Il est amusant de noter que, plutôt que de présenter une bibliographie, il crédite avec humour ses "collaborateurs involontaires" (sic!) en fin de livre (de Michelet à Charles d'Orléans). Pour ma part, la description de l'entretien des arcs anglais p.26 m'a fait penser à l'Odyssée, lorsque les prétendants s'efforcent d'assouplir l'arc d'Ulysse avant que celui-ci les massacre... Ironie de l'Histoire: Jean Teulé n'a pas manqué de nous rappeler que l'armée anglaise était dans un sale état sanitaire (chiasse - même s'il parle courtoisement de dysenterie) pour avoir consommé des moules avariées en guise de pique-nique. Deux mille soldats anglais en étaient mort avant la bataille.

Comme dans La controverse de Valladolid ou dans La négociation, on a ici des antagonistes. Mais cette fois-ci, on finit par se battre, une fois le temps des échanges diplomatiques terminé. Et dans ce cas, le meilleur gagne. Jean Teulé et Wikipedia sont d'accord! Il nous a clairement été exposé les raisons pour lesquelles les faits se déroulent de telle manière. Le combat proprement dit débute p.119. C'est un massacre. En première ligne, les Français et leurs lourdes armures sont plantées dans la gadoue, reçoivent les flèches anglaises, n'y voient rien par les petits trous de leurs visières, et ne peuvent qu'attendre passivement de se faire massacrer lorsque les arcs sont abandonnés pour les haches et autres armes anti-armures. La première vague de prisonniers est éliminée: il faut bien continuer à se battre jusqu'à la déroute adverse.

Et, une fois que les combattants ont quitté les lieux, y abandonnant les monceaux de cadavres français, l'auteur n'oublie pas de nous montrer la récupération par la population locale des moindres bouts de tissu ou de métal dont ils auront l'usage, brut ou refondu... Ce roman de "vulgarisation historique" se lit vite et avec aisance.

J'ai trouvé plusieurs blogs qui en avaient parlé: A livre ouvertAu détour d'un livreLes lectures de Cannetille, PlumefilCanel

Philippe Dester n'a pas aimé. Nono a évoqué le livre pour rendre hommage à Jean Teulé (son blog cite encore un autre livre sur Azincourt). J'ai appris que Dominique Pinon lit la version audio grâce au blog Baz'Art.

Après coup, ce roman m'a fait penser au traitement que fait, en bande dessinée, Jean-Yves Delitte des grandes batailles navales. J'en ai lu quelques titres. Un billet à faire un mois ou l'autre?

17 février 2023

Une bibliothèque partagée en bas de chez soi

Manquant d'enthousiasme durant quelque temps pour aller au cinéma (aucun film ne me tentait), voici trois photos de l'entrée de mon immeuble.

En effet, un jour d'octobre 2021, une bibliothèque a été installée par un ou une anonyme à côté des boîtes aux lettres et quelques livres ont été mis tout de suite. Avec mon ami ta d loi du cine, on a trouvé que l'idée était très sympathique. Depuis, cette bibliothèque "vit", il y a beaucoup de mouvements avec même des BD et des DVD. En ce moment, c'est plus calme, le stock a diminué. On y trouve aujourd'hui aussi bien les derniers volumes du Trône de fer en grand format que de nombreux classiques en "Poche", des romans policiers comme des livres en anglais...

Et vous qui passez par ce blog, est-ce que vous avez connaissance de ce genre d'initiative?

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13 février 2023

Le disparu de Larvik - Jorn Lier Horst

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Le disparu de Larvik (Edition Folio, 471 pages) est le quatrième Jorn Lier Horst que je lis après Fermé pour l'hiver, Les chiens de chasse et L'usurpateur. J'ai eu du plaisir à retrouver l'inspecteur William Winsting et sa fille Line. Cette dernière qui est enceinte doit accoucher dans peu de temps. En attendant l'heureux événement, Line se lie d'amitié avec Sofie Lund qui vient d'emménager dans une maison voisine. Line apprend que Sofie Lund, jeune mère de famille, est la petite-fille d'un certain Frank Mandt décédé récemment. Il était chef d'un gang qui importait des amphétamines. Pendant ce temps, Winsting reprend une enquête sur la disparition six mois auparavant de Jens Hummel, un chauffeur de taxi, dont on ne sait pas ce qu'il est devenu. Sophie Lund fait ouvrir un coffre situé dans le sous-sol de sa maison. Dans ce coffre, il y a de l'argent, des papiers, des cassettes audio et surtout un revolver. Elle confie l'arme à feu à Line. Bien entendu, cette dernière fait passer l'arme à son père qui apprend que ce revolver a servi lors d'une fusillade au cours de laquelle une jeune femme a été tué, la nuit du jour de l'An. Ce meurtre a eu lieu peu de temps avant la disparition du chauffeur de taxi. L'arme n'avait jamais été retrouvée mais un suspect avait été très vite arrêté, et son procès est sur le point de démarrer, alors qu'il est peut-être innocent. Après avoir été déçue par Fermé pour l'hiver, j'ai trouvé l'intrigue du Disparu de Larvik plutôt complexe est bien menée mais l'ensemble m'a paru long. J'avais aimé Les chiens de chasse. Lire les billets d'Eva, Jean-Marc Laherrère, MAM & BMR

7 février 2023

Le droit d'emmerder Dieu - Richard Malka

J'aurais pu (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) écrire qu'on m'avait offert pour Noël 2022 ce livre, Le droit d'emmerder Dieu, de Richard Malka. Mais il vaut mieux conserver mon éthique et ne pas enjoliver la réalité: je me le suis simplement offert (à) moi-même mi-janvier. Mon exemplaire provient d'un nouveau tirage, daté décembre 2022, alors que la première édition du livre remonte à octobre 2021. 

Cet ouvrage correspond à la plaidoirie rédigée par Richard Malka, avocat de Charlie Hebdo, pour la fin du procès des attentats de janvier 2015, procès qui a eu lieu devant la cour d'assises spéciale de Paris du 20 septembre au 16 décembre 2020, pour juger 14 personnes accusées d'avoir été complices des trois attentats ayant causé 17 morts du 7 au 9 janvier 2015. 

P1150696Au début de ce petit livre (93 pages, rappel chronologique compris), l'avocat Richard Malka explique qu'il a l'habitude d'écrire ses plaidoiries. Le 4 décembre 2020, port du masque dans la salle d'audience et épuisement après trois mois d'une audience parsemée d'attentats et de morts l'ont amené à écourter, à l'oral. L'éditeur et l'auteur ont choisi de livrer ce texte dans sa version écrite, plus longue que celle effectivement prononcée.

p. 10: "le sens de ce procès, c'est aussi de démontrer que le droit prime sur la force. (...) Les attentats de Charlie et de l'Hyper Cacher ne sont pas seulement des crimes. Ils ont une signification, une portée politique, philosophique, métaphysique". Richard Malka explique que ce procès est l'occasion de parler, non seulement des accusés, mais aussi des idées que l'on a voulu assassiner et enterrer. Il souhaite parler pour répondre aux terroristes qui demandent que nous renoncions à nos libertés.

À partir de la page 21, le livre retrace la chronologie des événements qui se sont achevés par le massacre perpétré contre la rédaction le 7 janvier 2015, des années après l'affaire des caricatures de M*h*m*t. Il décortique scrupuleusement la chronologie (Danemark), avant même la publication en France par France Soir en janvier 2006. Il rappelle que ce sont des imams danois ("de la mouvance des frères musulmans essentiellement, avec quelques salafistes") qui ont constitué un dossier à destination du "monde arabe", et ont affabulé en rajoutant, aux caricatures effectivement publiées au Danemark puis en Egypte, deux dessins tirés d'un site suprémaciste de blancs américains, et une photo n'ayant aucun rapport avec l'islam: un masque de cochon, que nos imams ont légendé en prétendant que c'était ainsi que leur prophète était représenté en Occident! "Cette falsification a fait descendre dans la rue des dizaines de milliers de personnes qui n'ont pas vu les véritables caricatures publiées" (p.28).

L'avocat qu'est Richard Malka ne se prive bien entendu pas de quelques effets rhétoriques en fustigeant entre autres le Président turc: massacrer des milliers de musulmans, ce n'est pas islamophobe mais publier des dessins, ce serait islamophobe? "Et puis j'ai un scoop pour le président Erdogan puisqu'il reproche à Emmanuel Macron d'avoir permis la publication de Charlie Hebdo [qui le caricaturait en octobre 2020]: nous ne soumettons pas nos caricatures au président de la République avant publication. Et même s'il voulait les empêcher, il ne le pourrait pas et il ne trouverait pas un tribunal pour le suivre. Cela s'appelle la liberté de la presse et l'indépendance de la justice (...)".

L'auteur retrace également l'histoire du blasphème en France, en remontant jusqu'aux Encyclopédistes du XVIIIème siècle, alors que le pape a mis L'Encyclopédie à l'index pour hérésie. Il rappelle que la Révolution française a abouti entre autre à ce que soit supprimé du code pénal, en 1791, le délit de blasphème. En 1881, lors des débats pour la grande loi sur la presse de la Troisième république, quand il est question de l'offense à la religion, Clemenceau répond, à l'Assemblée, à l'évêque Angers invoquant la blessure des catholiques outragés: "Dieu se défendra bien lui-même, il n'a pas besoin pour cela de la Chambre des députés". Formule que Richard Malka met en parallèle avec celle du mufti de la mosquée de Marseille à propos des caricatures: "un musulman qui croit que Dieu n'est pas assez grand pour se défendre tout seul est un musulman qui doute de la toute-puissance divine et n'est pas un bon croyant". Conclusion: "ce n'est pas compliqué à comprendre. Dieu peut se défendre tout seul contre les pauvres mortels que nous sommes, ce n'est pas la peine de supprimer ses créatures" (p.42). Richard Malka plaide donc, en toute logique, contre tout renoncement de l'esprit critique, du droit de caricaturer... Ce serait renoncer à ce merveilleux droit d'emmerder Dieu. "Et ça, Cabu, tout gentil qu'il était, hé bien il ne pouvait pas" (p.44). Il faudrait citer l'intégralité du texte, qui a l'unité d'un discours... Lorsqu'il retrace l'histoire de Charlie Hebdo (première puis seconde série), avant puis après l'affaire des caricatures, Richard Malka insiste sur la dégradation de la situation de Charlie Hebdo entre 2006 et 2015, qui a inexorablement conduit à l'attentat, en fustigeant la responsabilité des intellectuels et des politiques, pour lesquels il faudrait, au contraire, renoncer à tout ce qui peut "faire des vagues".

Pour ma part, j'ai lu cet opuscule très vite, en à peine plus d'une heure. Je vous invite à vous en imprégner.

J'ai trouvé quelques blogs qui ont eu aussi le courage d'en parler, bien avant moi: Vagabondageautourdesoi, Sin City, Lintervalle. Chacun donne aussi un ou plusieurs autres liens.

Le droit d'emmerder Dieu a reçu le Prix du livre politique en 2022. P1010613 

Je n'ai toujours pas chroniqué le livre Janvier 2015 - Le procès de Yannick Haenel (texte) et François Boucq (dessin), ouvrage paru en janvier 2021 aux éditions Les échappée. Pour le compte de Charlie Hebdo, ils ont suivi au quotidien le procès (près de deux mois et demi), avec des chroniques publiées sur le site internet et dans l'hebdomadaire. J'en parlerai certainement un mois ou l'autre.

************** 

En utile complément contemporain, je souhaite citer la conclusion d'une interview de Riss dans le Journal du Dimanche (22/01/2023, p.23) à propos du soutien apporté par Charlie Hebdo, avec ses moyens que sont articles et caricatures, à la révolte des jeunes iraniens et iraniennes contre le théocrate qui verrouille tout le pouvoir politique de leur pays: "À Charlie, quand on choisit un dessin, il ne s'agit pas d'insulter ou d'injurier. Notre critère, c'est que ça fasse réfléchir les gens."

*** Je suis Charlie ***

23 janvier 2023

La république des faibles - Gwenaël Bulteau

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Pour une première oeuvre, j'ai trouvé que le roman La république des faibles de Gwenaël Bulteau (qui est professeur des écoles) était réussi (Edition 10/18, 328 pages prenantes). L'histoire se passe à Lyon, dans le quartier de la Croix-Rousse, début janvier 1898, en pleine affaire Dreyfus. Le "J'accuse" de Zola ne va pas tarder à paraître. Le corps d'un jeune garçon habillé en fille est retrouvé par un chiffonnier dans une décharge. Il a été décapité et on n'a pas retrouvé la tête. Le commissaire Jules Soubielle avec ses trois adjoints sont chargés de l'enquête. On entre dans l'intimité de chaque policier, le commissaire devrait être bientôt père de famille après plusieurs échecs. Avec sa femme Marie-Thérèse, ils sont les voisins des Genor, une étrange famille composée d'un couple (le mari est pharmacien) et de leurs six garçons. Cette famille va jouer un rôle non négligeable dans le déroulement de l'intrigue. Parmi les officiers qui aident Soubielle, il y a  le lieutenant Fernand Grimbert qui boit trop et a des relations houleuses avec sa fiancée Lucienne. Aurélien Caron, lui, est célibataire et cela lui convient; quant à Gabriel Silent, il est père de famille. En dehors de son métier de policier, Silent fait de la politique. Il compte se faire élire aux prochaines élections au côté de la Ligue contre les Dreyfusards. Au fur et à mesure que l'histoire avance, on apprend qu'il dissimule des choses de sa vie. Un deuxième enfant disparaît et on est témoin de son calvaire. C'est le fils du chiffonnier qui était chargé d'aider la police pour trouver qui avait tué la première victime. A la différence de Jean-Marc Laherrère, je ne me suis pas ennuyée une minute à la lecture de ce roman que j'ai lu en une journée. Cannibales Lecteurs et Baz-art ont aimé.

17 janvier 2023

Changer l'eau des fleurs - Valérie Perrin

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Quand j'ai lu le titre du roman, Changer l'eau des fleurs (Le Livre de poche), je m'attendais à un roman assez léger, mais j'ai été intriguée par le nombre de pages du livre: 663 pages. Je me suis demandée ce que Valérie Perrin allait nous raconter sur autant de pages. Et bien, j'ai été séduite par l'histoire pleine de gravité vécue par Violette née Trenet, devenue Violette Toussaint. Violette s'est laissée séduire par Philippe Toussaint quand elle a eu 18 ans. Cette femme née sous X a vécu dans plusieurs familles d'accueil. Elle savait à peine lire et écrire quand elle a connu Philippe, un beau gosse qui "tombait" toutes les filles. Violette est une jeune femme qui ne se laisse pas trop abattre et pourtant elle aurait de quoi, entre un mari cavaleur et des beaux-parents méprisants (surtout la mère). Après être devenus gardes-barrières, Violette et Philippe se sont reconvertis en gardiens de cimetière en Bourgogne. C'est surtout Violette qui s'en occupe. Elle connaît les noms sur les tombes par coeur et elle écrit tout sur un registre. Cet endroit l'apaise et elle devient une jardinière hors pair dans le carré de jardin qui lui est alloué autour de la maison qu'elle occupe. Philippe, lui, part souvent faire un tour. Et un jour, il ne revient plus. Entretemps, Violette est devenue maman d'une petite Léonine, mais une tragédie les frappe... et on n'est qu'au milieu du roman. Le récit alterne le passé et le présent. Il y a beaucoup de personnages auxquels on s'attache. Un joli roman que je conseille tout comme Violette et Docbird. Et moi aussi, j'aime l'atmosphère des cimetières que je trouve reposante et pas du tout triste. 

15 janvier 2023

François Mauriac en "lecture commune"

Il y a quelques mois, Ingannmic avait signalé à l'occasion de mon bilan d'un "mois Wells" que, lorsqu'elle avait co-organisé une "activité" bloguesque autour de François Mauriac, il y avait eu peu de participation à part les deux organisatrices. Lorsque j'ai vu annoncé un projet de "lecture commune" d'une oeuvre de Mauriac à programmer pour le 15 janvier 2023, je (ta d loi du cine, “squatter” chez dasola) me suis dit que c'était l'occasion de relire cet auteur! 

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Vérification faite dans ma pochothèque, je possède cinq livres de François Mauriac, entrés en ma possession entre 1980 et 1982... et que je suis certain de n'avoir jamais relus depuis. Ils prenaient donc depuis 40 ans la poussière entre Maupassant (une douzaine de volumes acquis pour la plupart plus récemment, certains relus plusieurs fois y compris il y a un ou deux ans) et Maurois (relu ou du moins feuilleté aussi plusieurs fois) - les livres de ma bibliothèque m'avaient suivi quand j'ai déménagé en 1988. Et j'aurais été incapable de parler du contenu de mes cinq volumes. Bref, j'ai affecté quelques heures de mon "budget-temps de lecture" des deux dernières semaines aux trois bouquins que je présente ci-dessous.

P1150627Destins, 191 p., copyright 1928, volume imprimé en 1980 et cadeau de Noël reçu en 1982 (191 p.). 

Ce livre présente les relations entre plusieurs générations d'au moins trois familles, dans la bourgoisie de la Gironde, dont certains membres sont "montés" à Paris tandis que d'autres continuent à habiter (voire à agrandir, en rachetant aux précédents) les domaines, la terre, la vigne, la forêt de pins des Landes proches... et à y vivre de leurs revenus. Chacun a ses centres d'intérêt, cloisonnés (les priorités de l'un étant antagonistes avec celles des autres). Famille Gornac: le patriarche a passé plusieurs décennies à acquérir la maîtrise du siège de député local (pas forcément pour l'occuper lui-même, mais au moins pour que l'élu serve ses intérêts). Sa belle-fille Elisabeth supporte bien son veuvage (Prudent Gornac n'était pas vraiment doué pour les affaires), et a peu d'atomes crochus avec son exalté de fils, Pierre, lequel n'a que la religion - catholique - à la bouche (conférences et sermons moralisateurs). Les voisins Lagave: pour la première génération, on ne parle guère du mari. Le vieux Gornac semble avoir veillé à ce que le fils, Augustin, fasse une bonne carrière dans la fonction publique, alors que sa mère servait la famille Gornac? Monté à Paris, Augustin s'y est marié, mais son fils, Robert, ne marche pas dans ses traces (s'élever par le travail, et ne penser qu'à cela - carrière). Robert (Bob) apparaît plutôt comme un esthète dont les moyens d'existence de jeune homme proviennent des services qu'il vend (au titre de ce que l'on appellerait aujourd'hui "décoration d'intérieur - sans parler d'autres "services" demeurés dans un pesant sous-entendu). S'entrelace pourtant avec Robert une demoiselle de la Sesque, Paule, "une jeune fille du vrai monde", descendant d'une famille d'anciens propriétaires des Landes qui a vendu ce qui lui restait de terres (notamment aux Gornac et apparentés?) pour "monter" à Paris. Lorsque Robert vient en convalescence chez sa grand-mère, un voyage l'amène, elle, dans la région. Cette jeune fille est suffisamment affranchie pour posséder sa propre auto (ce qui autorise tous les "coups de la panne") alors que les campagnards continuent à utiliser les voitures à chevaux. Mais c'est bien au mariage avec Robert qu'elle rêve. Pierre va se mêler de ce qui ne le regarde pas, avec des conséquences tragiques et au désespoir de sa mère.

J'ai souri lorsque Elisabeth, jadis parfaite femme d'intérieur veillant à tout dans la maison, constate "Je laisse tout aller" mais s'aperçoit que "tout allait aussi bien qu'au temps qu'elle surveillait les chais, le poulailler, la cuisine et la buanderie". Et aussi en lisant les remarques aigres sur les dépenses excessives générées par le lavage des chemises de notre esthète. 

En avaient parlé: Athalie (sur son nouveau blog), Ingannmic, Miss Sunalee.   

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P1150628Thérèse Desqueyroux (1927, exemplaire imprimé au 2e trim.1975, donné en 1981 par mon grand frère - 184 p.).

Juste quelques mots sur ce livre. Il fut un temps où il faisait partie des livres incontournables pour une culture littéraire "classique", une lecture recommandée au lycée. Il est l'un des plus connus de François Mauriac, et Claude Miller en a tiré un film en 2012 (je ne l'ai pas davantage vu que l'adaptation précédente de Franju, 50 ans auparavant avant - 1962, du vivant de Mauriac). Comme toute personne cultivée, disais-je, le sait, le roman s'ouvre sur l'acquittement de Thérèse. On découvre que, enfermée dans une vie tristement bourgeoise de mère au foyer, vie plutôt subie que choisie, elle a eu l'idée de "forcer la dose" sur les médicaments que devait avaler son mari, quitte à falsifier quelques ordonnances. Mais en province, pharmacien et médecin se parlaient, à l'époque (cependant que la "receveuse des postes" pouvait "bloquer" une lettre si une famille ayant suffisamment d'influence le lui demandait). Si Thérèse  a été acquittée, c'est bien parce que la famille (père, mari, belle-famille) a fait tout ce qu'il fallait pour "sauver les apparences". Thérèse se retrouve cloîtrée à la campagne, avec quelques livres qu'elle a tôt fait de connaître par coeur (affreuse, la séquence où le mari laisse sans réponse sa demande de commande au libraire!). Elle s'y laisse périr d'ennui. Mais le souci du qu'en dira-t-on et le souhait que sa belle-soeur fasse le mariage qui convient amène un marché: pas de scandale, et on la laissera partir à Paris. Ce qui advient à la fin. 

... Bon, j'ai l'air d'avoir tout dit, mais aujourd'hui, ce "fait divers" donnerait tout juste lieu à quelques articles de presse. Tout l'art de Mauriac est de restituer les pensées successives (ou leur absence) des différents antagonistes, et surtout de faire transparaître les mentalités de l'époque, du lieu, des milieux sociaux des protagonistes (maîtres et domestiques), via les interactions de Thérèse avec son entourage. 

J'ai trouvé une dizaine de blogs ayant chroniqué ce livre: Anis (Litterama) comparait livre et film de Claude Miller, Athalie (sur son nouveau blog), DonaSwannHélèneIngannmic, Lili GalipetteMiss Sunalee, Philisine cave, Sandrine, XL (m'a appris l'existence de deux nouvelles?). Apparemment, en 2012, plusieurs blogueuses littéraires avaient organisé des concours en vue de faire gagner des places de cinéma... Missionnées pour "faire le buzz" autour de ce film et de cette oeuvre? J'ai encore trouvé Des livres des livres!Le bouquineur, Les livres de George, Livrepoche, Pourquoi s'ennuyer (Gaëtane).

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P1150629La fin de la nuit (paru en 1935; mon exemplaire date de 1981 et m'a été offert à Noël 1982 - 253 p.)

Beaucoup moins connu que le précédent, ce roman en constitue la suite. Thérèse Desqueyroux vit à Paris une vie d'oisiveté (appartement, domestique, subsides versés par son mari sur les revenus de ses pins) depuis 15 ans. Lorsqu'elle voit débarquer sa fille Marie, 17 ans, elle est d'abord enchantée de "redécouvrir" une fille qu'elle n'a pas vue grandir, avant d'être atrocement désappointée lorsqu'elle comprend que la gamine n'est pas venue voir sa mère "pour ses beaux yeux" mais dans son propre intérêt... Il y a évidemment un garçon là-dessous, Georges Filhot, un voisin en Gironde, monté à Paris pour étudier à Sciences Po, et qui admire de son côté l'intellect d'un de ses condisciples. Ce qui va amener tout un jeu de "suis-moi, je te fuis / fuis-moi, je te suis" entre les trois ou quatre personnages. Cette fois-ci, il semble que Thérèse, hantée par son passé qui lui sert de "grille de lecture" pour ses rapports avec son entourage, ne s'en relèvera pas. J'ai noté quelques citations qui ont pimenté ma lecture.

p.84, Georges: "Nous ne sommes plus comme nos parents dont toute la vie tournait autour de ces problèmes de dot, d'héritages, de testaments. La crise a flanqué tout ça en l'air: ça ne nous intéresse plus".

p.32, Marie (la rebelle, parlant de son père). "Vous ne pouvez imaginer... Il faut les entendre, grand-mère et lui: "On ne peut plus mettre de côté, maintenant... ou ce que l'on met de côté se perd; et le reste va au percepteur. Tu devras travailler, ma petite,... Nous en arriverons là: il faudra que tu travailles!" Si vous voyiez leur tête quand je leur réponds: "Hé bien! Le beau malheur! Je travaillerai!..." Ils voudraient que je gémisse avec eux. Ils ne comprennent pas que j'accepte mon époque."

p.154, Georges à propos de Thérèse: "Il se souvenait d'un mot d'elle comme de tout ce qu'elle avait dit devant lui: que les jugements les plus opposés sur une même créature sont justes, que c'est une affaire d'éclairage, qu'aucun éclairage n'est plus révélateur qu'un autre...".

p.163, Thérèse songeant à Georges: "Pourquoi se résigne-t-il? Non plus par amour, ni même par pitié pour moi... afin de tenir sa parole, peut-être? Beaucoup d'hommes sont ainsi: ils croient qu'il faut tenir leur parole".

p.196: "Thérèse ne doutait pas d'être le point de mire au centre d'un complot immense et secret... Comment aurait-elle su qu'il n'y avait pas, à cette heure, dans le monde entier, une seule pensée qui lui fût dédiée, qu'il n'existait pas une créature humaine, durant cette nuit, pour se soucier de Thérèse Desqueyroux?"

Vous l'aurez compris avec ces extraits, j'ai trouvé que nos personnages, dans les trois romans, se préoccupent beaucoup trop de "ce que les autres vont penser de soi", tout en cherchant plus ou moins consciemment à les "manipuler" afin de pouvoir, justement, les amener à penser ceci ou cela... Et l'auteur nous donne parfois accès aux pensées d'une personne et de l'autre, chacune étant dans l'erreur par rapport à ce qui se pense en face d'elle. Disons que, si Mauriac en est évidemment resté sur le côté tragique, pour La fin de la nuit, en ce qui me concerne, j'ai eu idée, à cette lecture, qu'on pourrait en tirer une bonne pièce de boulevard!

Quoi qu'il en soit, sur ce dernier livre, je n'ai pu trouver que le billet de Praline.

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Je vais maintenant essayer, moi aussi, un brin d'introspection sur mon rapport à cette littérature mauriacienne. Il n'est pas impossible que, dès mes premières lectures, ce monde de bourgeoises corsetées par les conventions sociales m'ait non seulement paru suranné et futile, mais encore ait provoqué en moi un rejet parce que telle de mes aïeules, née avec le siècle dans une grande ville de province, faisait preuve d'une mentalité datant de sa jeunesse qui me paraissait en complet décalage avec la position sociale occupée dans les années 1980. On me souffle en tout cas que la grande bourgeoisie bordelaise, elle, est bien dans le "paraître" surtout.

Dans ces trois livres qui se déroulent, je pense, entre peu avant ou après la guerre de 1914 et les années 30, c'est un même milieu qui est présenté, celui des propriétaires de pinèdes dans les Landes. Les revenus annuels sont tirés de la résine (avec laquelle on fabrique de l'essence de térébenthine et de la colophane si l'on a l'esprit suffisamment industrieux pour installer une distillerie), cependant que les arbres abattus fournissent des poteaux pour les mines de charbon sinon des traverses de chemins de fer. Les personnages de Mauriac touchent des revenus et ont le souci de veiller à ce que leur patrimoine fructifie (y compris via des alliances matrimoniale et en limitant la descendance du couple). Ils craignent l'incendie pour leurs parcelles de pins. 

Par moment, chez Mauriac, la minutie de l'introspection peut faire songer à du Proust. Quatre-vingt-dix pour cent des pages de ces romans consistent en introspection minutieuse des personnages-clés, ou en l'observation commentée de leurs pensées, l'auteur pouvant savoir à tout moment ce que songe chacun des deux interlocuteurs (en général deux à deux)... "et gnagnagni et gnagnagna" (ajouterais-je méchamment). Leurs abominables turpitudes nous paraissent bien bénignes aujourd'hui. 

Cette "lecture commune" m'a permis en tout cas de m'introspecter suffisamment pour comprendre pourquoi je n'ai jamais non plus relu Proust (auquel La fin de la nuit, par exemple, m'a fait songer par moment) depuis ma jeunesse: trop "cérébral" pour moi... Ces relectures ont été pour moi l'occasion de consulter la liste des autres oeuvres de Mauriac (pas forcément romanesques). Et je me suis dit qu'il existe quelques titres que je découvrirais volontiers, si j'avais le temps et la motivation d'en prendre la peine... Je vais tâcher d'être en veille pour réagir en temps voulu si un autre "Challenge Mauriac" se lance, sur une durée plus importante qu'une "lecture commune" pour une seule journée!

Il semble en tout cas que les blogueuses rédigent peu de billets sur François Mauriac (cela ne veut pas dire qu'elles ne le lisent pas, bien sûr). Une quinzaine de titres étaient disponibles en "poche" dans les années 1980, je suppose qu'on peut encore plus facilement accéder à Mauriac aujourd'hui, si on le souhaite (même si, mort en 1970, il s'en faut encore de 18 ans qu'il soit dans le domaine public). J'ai pris la peine de faire une recherche dans les 70 blogs "Livres" classés comme "actifs" dans la colonne de droite, c'est de là que j'ai tiré les liens vers pas mal de billets sur Thérèse Desqueyroux, quelques-uns sur Destins, beaucoup moins sur La fin de la nuit. Il n'y avait guère que moins d'une demi-douzaine d'autres titres représentés par un ou plusieurs billets. 

P.S.: je rajouterai en "edit" ci-dessous les billets des autres participant(e)s à cette "lecture commune Mauriac du 15 janvier 2023" au fur et à mesure que je les identifierai!

* Le noeud de vipères: Ingannmic, Marilyne, Le bouquineurKeisha (dès le 14!), Passage à l'Est 
* Thérèse Desqueyroux: AnneNathalie (12 ans après un précédent billet). [Grominou a pour sa part attendu avril 2023 pour le lire]

P.S.2:  je rajoute ce 17 janvier 2023 le logo du challenge "2023 sera classique" co-organisé par Nathalie et Blandine.

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7 janvier 2023

Indélébiles - Luz

Alors que le massacre de l'équipe de Charlie Hebdo remonte aujourd'hui à huit ans, je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) choisis ce mois-ci de vous présenter comme "hommage du 7" un billet sur le livre de souvenirs que Luz a consacré à ses copains assassinés (parution en novembre 2018 chez Futuropolis). Je me le suis procuré courant 2022.

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Ça commence comme un rêve sinon comme un cauchemar: Luz, perdu dans le noir, arrive à la salle de rédaction pour un bouclage, mais personne ne voit qu'il est là, et Cabu, dernier à quitter la rédaction, l'y enferme en éteignant la lumière... Après cet épisode introductif, notre auteur réveillé se lève, va prendre une bière au frigo, la décapsule: occasion de commencer à se remémorer (sur plus de 300 pages) différentes séquences, des tranches de vie en noir & blanc. En tout premier lieu (p.15 à 26), comment il a rejoint les dessinateurs de La grosse Bertha, arrivant de sa province, à l'été 1991... un an avant le début de la re-fondation de Charlie Hebdo: l'histoire de sa rencontre avec Cabu qui sortait de l'imprimerie du Canard enchaîné lorsque lui s'y rendait, qu'il a osé abordé en bafouillant de nervosité et qui, ayant ri à son dessin d'actualité, l'emmène à La Grosse Bertha, l'introduit dans l'équipe, suggère de publier son dessin... Timidité du jeune provincial de pas même 20 ans! Il en conclut que, pour collaborer depuis chez lui, un fax lui est indispensable (pas d'internet à l'époque - j'ai connu). Des planche bleutées nous ramènent à la nuit d'insomnie, introduisant tels ou tels souvenirs et évocations... 

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L'un des premiers épisodes montre Charb en action, préparant des blagues pas forcément fines (mais parfois en flux circulaire). Le 21e anniversaire de Luz est fêté grâce à Charb (avec une semaine de retard) à la Rédaction de Charlie Hebdo en janvier 1993. Charb devenu un vrai copain "complice" via leur passion commune pour Les Simpson, à l'occasion d'un des Festivals "Scoop en Stock" de la presse lycéenne et étudiante à Poitiers en 1992 [je ne sais plus si c'était l'année où le petit canard dont je faisais partie à l'époque y a été primé dans la catégorie "journal étudiant", ou une autre...].

La séquence qui débute p. 44 montre la sortie des presses du premier numéro de Charlie, à l'imprimerie (après la scission d'avec La grosse Bertha). [Ces pages m'ont encore rappelé un épisode où toute notre rédaction, crevée par une nuit blanche de bouclage, attendait le retour de repas de notre imprimeur pour voir enfin nos exemplaires sortir à la chaîne (et chacun de se précipiter ensuite à la porte de la quinzaine de "centres périphériques" pour nos quatre facs afin d'y vendre à la criée le nouveau numéro...). Fin de cette seconde parenthèse personnelle].

Luz ne se prive pas de réflexions sur le travail du dessinateur. Sur huit pages, nous avons droit ensuite à une évocation de séance de gommage de crayonnés, sur table puis autour de la table... avec toute l'énergie rageuse de Riss (je crois?). Je ne sais pas si Luz possède effectivement des "chiures de gomme" pouvant être attribuées à chaque dessinateur selon sa méthode (comme évoqué p.60)...

L'ambiance dans la salle de rédaction, les "jours de bouclage", est mise en scène à de nombreuses reprises (avec l'indispensable Luce pour rappeler les délais à tenir), et montre bien l'engagement militant des dessinateurs-journalistes (à l'époque de la seconde cohabitation, notamment) en-dehors de leur salle de travail. On est plongé dans le bain d'une manif dans le contexte de l'époque, et un gnon qui vaut à Luz un point de suture sur le crâne (et une troisième mi-temps post-manif) refait surface. Dessinateur, c'est un métier!

Séquence pédagogique concernant l'académie de la grande Chaumière: Cabu y a emmené les "p'tits jeunes" (Charb, Riss, Luz) faire du dessin d'après modèle vivant... Je retrouve dans mon exemplaire une coupure d'un article paru dans Le Canard Enchaîné du 31/08/2022 (p.5): à ce moment-là, la Grande chaumière semblait sous la menace d'être expulsée de l'atelier où avaient lieu les séances depuis des décennies... Vérification faite ce jour, les activités continuent (même avec des horaires restreints pour raisons financières, depuis septembre 2022): https://www.academiegrandechaumiere.com/

Voici un exemple de séquence d'ambiance de rédac', ensuite (il faut lire chaque bulle, apprécier chaque détail et chacun des personnages croqués), qui commence par le dessin ci-dessous.

P1150624 p.95, une image magnifiquement construite, autour de la "figure tutélaire" (rayonnante?) de Cabu ("le mentor")... 

Vient ensuite un bel hommage à Gébé, accompagné en manif: est-ce une anecdote vécue, un souvenir de discussions qui ont réellement eu lieu, ou un regret de ne pas avoir assez parlé avec ce dessinateur et auteur complet de son vivant (il a été Directeur de la publication de Charlie jusqu'à sa mort en 2004)?

P1150623 L'auteur en lévitation après une couv' publiée et reprise par des manifestants... (p.118-119 - hommage à Gébé - "juste Gébé"). Les pages qui précèdent expliquent bien le processus contributif (itérations successives pour un dessin, sa légende, sa construction) qui pouvait régner au sein de la rédac'. Cette élaboration collective sera montrée à une autre occasion dans l'une des dernières séquences, lorsque Luz s'acharne à (re)travailler sa toute première couv'...

Mais il n'y avait pas seulement Charlie Hebdo dans la vie de dessinateur de Luz à l'époque. Il raconte ainsi une séance de dédicace à Angoulême pour un canard sans beaucoup de lecteurs (Chien méchant), où les dessinateurs boivent des coups en attendant le chaland, font passer de fausses annonces à la sono, et dessinent sans filtre... (à la plus ou moins grande satisfaction des dédicataires et de leurs "accompagnateurs"). On a droit plus loin à nn autre grand moment de dédicace, sur un support original, à la fête de l'Huma... 

Et puis retour au journal, pour de courtes évocations de séances de travail à la fois collectives et individuelles: chacun dans son dessin, mais en demandant parfois de l'aide pour croquer un personnage, pour trouver une photo sur laquelle s'appuyer (sans internet, encore)... séquences reliées les unes aux autres par ses réflexions nocturnes et colorées (les séquences, elles, sont en noir et blanc). "C'est vrai que, parfois, on était plus droles à faire le journal que dans le journal" (cf. dessin plus haut, de la p.142).

L'une des explications possibles du titre arrive peu avant la page 200: ayant pris de mauvaises habitudes en tenant feutre ou pinceau, Luz avait les doigts en permanence incrustés d'encre, ce qui n'était pas sans poser quelques soucis intimes... (séquence auto-dérisoire!).

Ma (courte) séquence préférée reste la série de réactions de Cabu devant la nouvelle photocopieuse (une jolie historiette, que j'avais découverte comme "bonnes feuilles" au moment de la sortie du bouquin, dans une publication de presse...).

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Côté avancées technologiques, on a aussi droit à l'arrivée de la "tablette graphique" utilisée par Tignous. Bah oui, mais si quelqu'un arrache le fil alors que le dessin n'était pas sauvegardé, il n'en reste rien... 

Luz nous partage encore ses souvenirs sur diverses aventures. Par exemple, en reportage dessiné lors d'une tournée musicale de Renaud et Val durant la guerre de Bosnie... On n'a pas envie d'être à sa place! La Bosnie, c'est compliqué. Chez les sado-masos (avec sa compagne), l'atmosphère est autre. En banlieue, c'est autre chose, un autre univers. Et son infiltration chez les Chiraquiens en 1995 a été l'occasion de tenter le "dessin dans la poche" dont Cabu maîtrisait la technique! Encore une séquence retraçant une visite à la prison d'Angola en Louisiane (lors d'un reportage avec Val, alors Directeur de la publication), qui enchaine sur l'art de dessiner pendant les concerts: cette fois-ci, c'est Luz qui (dé)montre une nouvelle technique à Cabu: la "perception rétinienne".

Finalement notre insomniaque se rendort (il est 4 h du matin), ...et une dernière séance en bichromie commence. C'est le jour de la mort de Johnny Hallyday. J'ai trouvé cette ultime séquence très belle. Elle est colorée avec discrétion. On y voit un bouclage à la rédaction, à l'occasion du décès de ce chanteur populaire en France (intervenu en décembre 2017...): tous les "anciens" croisés par Luz sont présents / se présentent pour l'occasion, notamment Cavanna, Gébé, Renaud bien sûr ("alors comme ça, on a éliminé la concurrence?")..., et cette fois-ci, contrairement au début du "roman autobiographique", ils lui parlent et entendent ses réponses (et ceux qui ne se sont jamais croisés en réalité interagissent aussi).    

P1150625 Une belle double-page colorée: le dialogue apaisé (p.302-303)

Et la couv' du numéro bouclé ce jour-là, bien sûr, c'est Cabu qui réussit à la dessiner (et tous de s'extasier). Je ne peux vous la montrer: il faut juste l'imaginer. Bel hommage.

Le 7 janvier 2015, Luz avait 43 ans. Du coup, il est arrivé en retard à la conférence de rédaction, ce qui lui a vraisemblablement sauvé la vie contrairement à tant de ses copains. Si vous songez toujours aux journalistes assassinés (au moins une fois par an, lorsque leurs proches pensent à eux tous les jours), si vous êtes toujours Charlie, alors lisez cet album.

Je suis certain d'avoir croisé ici ou là sur la blogosphère une chronique sur Indélébiles. Mais aujourd'hui, dans l'urgence, je n'ai pu en trouver que deux via moteur de recherche: The killer inside me et Collectif polar. Si je tombe directement sur d'autres par la suite, je les rajouterai en "post-scriptum".

 *** Je suis Charlie ***

3 janvier 2023

Le royaume désuni - Jonathan Coe

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J'ai terminé mon année de lecture 2022 avec le nouveau roman de Jonathan Coe, Le royaume désuni (Edition Gallimard, 484 pages). Je pense qu'il est assez autobiographique par certains aspects, même si, dans la postface, notre auteur dit bien que seule Mary Lamb, le personnage de la mère, s'inspire de la propre mère de Jonathan Coe et que les autres personnages sont de la pure fiction. Soit. En tout cas, l'histoire se passe à Birmingham (ville natale de l'écrivain) et dans sa région. Il s'agit d'une fresque familiale qui se déroule sur 75 an,s entre le 8 mai 1945 et mai 2020. Mary Lamb, qui a 10 ans en 1945, mourra 75 ans plus tard, toute seule et sans les soins auxquels elle aurait pu avoir droit s'il n'y avait pas eu le Covid 19. Le roman est découpé en sept grandes parties: 8 mai 45, le couronnement de la reine Elisabeth en 1953, la finale de coupe du monde de football en 1966 où l'Angleterre a gagné contre l'Allemagne de l'Ouest, l'investiture de Charles comme prince de Galles en 1969, le mariage de Charles et Diana en 1981, les funérailles de la princesse Diana en 1997 et enfin les 75 ans du Jour de la victoire, le 8 mai 2020. Pendant ces 75 ans, la famille Lamb aura vécu les aléas de la politique anglaise jusqu'au Brexit. Mary aura trois fils, dont Martin qui travaillera dans l'usine des chocolats Cadbury (fondé en 1826). Il est en effet pas mal question de chocolat dans le roman. Le chocolat anglais qui contient plus de graisse que de cacao aura beaucoup de mal à s'imposer dans l'Union européenne. Le troisième fils de Mary est un musicien doué passionné de la musique de Messiaen. Le premier fils, Jack, s'est spécialisé dans la vente de voitures de luxe. Jonathan Coe s'est surtout focalisé sur Mary Lamb, une femme qui aimait la vitesse et qui s'est beaucoup occupée de ses trois fils pendant que son mari Geoffrey est devenu directeur de banque. Lors du couronnement de la reine Elisabeth, la télévision est entrée dans les foyers. C'était une révolution. Selon les événements, les membres de la famille Lamb se disputent, car chaque événément ne passionne pas tout le monde, par exemple le football. En revanche, la mort de la "princesse du peuple" a beaucoup ému. La sortie des films de James Bond permet une sortie familiale. Jonathan Coe n'a évidemment pas évoqué le décès la reine Elizabeth. Il a écrit son roman avant. Cela aurait permis une vraie fin à ce roman qui se lit très agréablement. 

PS: en lisant les commentaires des blogueuses, je vois que je n'ai pas dû montrer assez mon enthousiame sur ce roman. Je l'écris haut et fort, c'est un très bon roman que je conseille. Jonathan Coe est un formidable narrateur qui met en lumière plein de personnages attachants. 

30 décembre 2022

Collection "Raconter la vie" / Le parlement des invisibles - Pierre Rosanvallon

J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) remis la main sur mon second exemplaire du livre Le parlement des invisibles de Pierre Rosanvallon, (ancien) directeur de la collection "Raconter la vie" aux éditions du Seuil. Je l'avais acheté en 2020, année de parution de cette seconde édition.

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Le parlement des invisibles, 142 pages, 3,50 euros, format 10 x 15 cm (contre 20,4 x 13,9 pour les livres de la collection "Raconter la vie" elle-même).  

J'ai aussi sous la main une bonne partie de tous ceux de la collection que j'ai achetés (d'autres sont actuellement prêtés via tel ou tel canal). Dasola m'en avait offert plusieurs. 

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En les feuilletant aujourd'hui, je m'aperçois que je les ai pour la plupart aussi vite oubliés que lus, et l'esprit du présent billet n'est pas de les relire. Encore heureux que j'aie pour habitude de noter quelques mots à la fin des "essais" que je lis... et vivent les 4e de couv' de chaque livre (reprises dans le bouquin de Pierre Rosenvallon!). Entre 2014 et 2015, format et prix ont changé (pour tenter de résoudre l'équation économique?): 5,90 euros pour moins de 80 pages, contre 7,90 et une centaine de pages par la suite. 

Voici quelques mots sur chacun des titres photographiés ci-dessus.

Un homme à la crèche, Thomas Grillot. Par un écrivain professionnel, une sorte d'immersion sociologique imaginant (?) un homme faisant un métier "normalement" (?) dévolu aux femmes... et les réactions des collègues, des parents. Pas simple.

La Barbe, Omar Benaala: 1995-1999, le temps pour l'auteur de faire le tour d'un "retour à la religion" pour un voyage au terme duquel il a fini par raser sa barbe et se ranger. C'est écrit avec style, à la première personne. Je l'avais acheté en 2015, quelques mois après publication.

Dans l'oeil du gardien, Jean-François Laé. L'auteur est sociologue. Le sujet d'étude? Le rôle du gardien dans un HLM. De la médiation, de la pédagogie... Beaucoup de plaintes, peu de merci. Quel métier! On y croise même des étudiants en socio. 

Sous mon voile, Fatimata Diallo. Je me rappelle avoir été "dérangé" par cette lecture. Dans mes notes, je comparais cette jeune Malienne à Bernadette Soubirous, tout autant convaincue que l'expression de sa foi était sans conteste le seul mode de vie possible et imaginable... (j'avais noté "se voiler la face"). 

Grand patron, films d'ouvrier, Jules Naudet. Cet ouvrage, l'un des premiers parus dans la collection, est encore un livre de sociologue. Le "patron" en question a souhaité rester anonyme. Il semble assumer sans état d'âme son changement de classe sociale, tout en restant imperméable à toute notion de "lutte des classes"? Citation (p.45) d'une citation: "Franck ne se retrouve donc pas dans l'affirmation d'Annie Ernaux selon laquelle "il était normal d'avoir honte, comme d'une conséquence inscrite dans le métier de mes parents, leurs difficultés d'argent, leur passé d'ouvriers, notre façon d'être"."

Au prêt sur gage, Pauline Peretz. Un des livres qui m'avait le plus intéressé (et je ne dis pas cela parce que l'auteur était la co-directrice de la collection!). Je connais le mécanisme des prêts du Mont-de-Piété. L'analyse sur les motivations des "clientes" (en majorité), leurs histoires de vie, leurs rapports aux objets mis en gage, sur la constitution d'une épargne en "objets de valeur" plutôt qu'à la bourse ou à la banque, le désintérêt, d'une certaine manière, du véritable "coût du crédit"... Tous cela représente un monde "à part", mais fascinant.

Business dans la cité, Rachid Santaki. L'auteur a publié une quinzaine de livre (essentiellement des polars?) entre 2008 et 2020. Cet ouvrage, publié en 2014, semble une oeuvre d'imagination, mais avec une connaissance de l'environnement du "9-3" qui, certainement, rend le récit à la première personne crédible (comme les "série noire" de la grande époque?). 

Les reins cassés, Lou Kapikian. A ce jour le dernier que j'ai acheté, d'occasion, en 2021 (y compris la dédicace de l'auteur). Ce témoignage sur la dialyse et la greffe du rein et les contraintes vécues par une malade (accompagnée dans l'écriture du livre par des "professionnels") m'a permis de mieux cerner ce que vit un de mes propres cousins. Brrr... 

La maison des vulnérables, Sylvia Zappi. Quelques portraits de résidents dans un genre de "foyer social". Des parcours de vie cassée et qui se reconstruisent dans ces murs où les personnes peuvent bénéficier d'un accompagnement à la vie quotidienne.

Les grandes villes n'existent pas, Cécile Coulon. Un témoignage sur une enfance dans un village à la campagne. Et sur la vie au village, au passage à l'âge adulte (symbolisé par le permis de conduire et la liberté qu'il apporte - y compris celle de mourir sur la route). Emma en avait parlé.

L'homme océan, Sylvie Caster. Un style bien journalistique (des phrases courtes: sujet, verbe, complément...) pour parler d'un homme, marin, pêcheur, ancien militaire, tatoué, père de famille... 

Moi, Anthony, ouvrier d'aujourd'hui (sans nom d'auteur). La vie entre petits boulots, enchaînements de CDD entrecoupés de chômage, l'absence d'envie de se retrouver "prisonnier" d'un emploi en CDI (alors que le quitter en démissionnant fermerait la porte des indemnités chômage), formation en alternance arrêtée parce qu'il ne supportait plus, la vingtaine passée, d'être mis sur le même pied que ses condisciples adolescents... En janvier 2014, Anthony avait 27 ans. Il doit donc en avoir 36 aujourd'hui? A la fin du livre, il envisageait de reprendre ses études, en passant le DAEU...

La députée du coin, Nathalie Nieson. Un témoignage intéressant. J'avais noté que cela recoupait un ou deux autres livres du même genre que j'avais lus (mais sans qu'ils s'inscrivent dans un tel cadre de "collection"). A l'époque, l'auteur était député PS. elle avait commencé par être maire, et l'est redevenue à l'issue de son mandat (en tenant sa parole de ne pas en briguer un second). En 2022, elle est devenue secrétaire générale déléguée de Renaissance (le parti de Macron). Comme quoi, avec des études de compta, on peut faire beaucoup de choses.

Je ne me sens pas capable, aujourd'hui, de faire une analyse très poussée de cette aventure éditoriale qui s'est achevée en soumission aux contraintes économiques. Je citerais seulement la préface de la seconde édition du Parlement des invisibles (p.10): "Sur les 26 titres publiés, trois seulement ont eu un fort impact sur les milieux concernés, ayant eu un effet miroir producteur de répercussions collectives (...). Les autres ouvrages, d'après les informations que nous avons pu recueillir, ont, malgré leur prix de vente très bas (6 euros) [sic!], été lus davantage par ceux qui s'intéressaient à la société que par la grande masse des Français d'en bas [re-sic!]. L'indéniable impact éditorial de l'entreprise (il y a eu 185 000 exemplaires vendus pour 26 titres) doit ainsi être modulé par cette considération sociologique".

Je concluerai juste en relevant que j'étais tombé, lorsque j'avais écrit précédemment quelques lignes à propos de la collection "Raconter la vie", sur un article de Frédéric Lordon, en février 2014, qui ne laissait même pas le bénéfice du doute à l'initiative lancée par Pierre Rosanvallon. 

20 décembre 2022

L'arche de Rantanplan - Achdé & Jul d'après Morris

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Après avoir cotoyé les cow-boys afro-américains dans Un cow-boy dans le coton, L'arche de Rantanplan (Lucky comics, 46 pages) nous permet de faire connaissance avec des personnes qui protégeaient les animaux dans l'ouest américain. En l'occurrence, en 1866, Henry Bergh (1813-1888) a fondé le mouvement de protection animale aux Etats-Unis. Dans l'album, Lucky Luke et Jolly Jumper croisent le chemin d'Ovide Byrde qui est près de se faire lyncher par les habitants d'une ville appelée Cattle Gulch qui deviendra plus tard Veggie Town. En effet, Ovide a eu le malheur de vouloir prendre la défense d'un pauvre cheval maltraité. Ovide est le président et le seul membre de la société protectrice des animaux du comté. Sa ferme est une véritable arche de Noé où vivent des animaux de la ferme qui sont remplis d'amour pour Ovide. Il y a même Rantanplan égaré par là qui dévore tout ce qui passe devant sa gueule par exemple des clés et qui va permettre à Ovide de s'enrichir très vite. Bien entendu un "méchant" fraîchement libéré de prison va mettre son grain de sel en obligeant les habitants de Cattle Gulch à adopter les animaux vivant chez Ovide. La vente de viande est abolie et les habitants de la ville deviennent végans (souvent contraints et forcés). Même les Indiens comanches, amis de Lucky Luke, voient leur vie chamboulée à cause d'un petit "papoose", le fils du chef qui change de nom de "Coyote affamé" en "Poireau agile" se convertit au véganisme. J'ai trouvé l'album très sympathique à lire.

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18 décembre 2022

Deux livres à offrir en cadeau à des jeunes d'âge scolaire

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vais vous offrir deux idées de petits cadeaux pédagogiques.

Lorsque nous étions retournés à Guédelon avec dasola il y a quelques mois, j'avais été très intéressé par une démonstration de géométrie appliquée à la construction, au travers de laquelle percolait la passion du "formateur". Ses instruments? Le compas et la règle. Mais nous n'avions pas été accueillis sur le site, comme en 2008, avec une "introduction à l'usage de la corde à 13 noeuds". Du coup, j'avais acheté à la librairie du site l'opuscule que je vous présente aujourd'hui.

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Mesurer et tracer au Moyen-Âge, Guédelon, 2022, 64 pages

Le livre donne des informations sur les différentes unités de mesure, en lien avec le corps humain (donc, bien entendu, variables d'un lieu à l'autre, même si leurs rapports respectifs étaient stables).

P1150602 p.7.

Guédelon a "standardisé" ces différentes unités... 

P1150599 p.10-11.

Page 13, est évoquée la "fameuse" corde à 13 noeuds, dont il est dit qu'elle a été inventée par les Egyptiens il y a plus de 4000 ans. Le titre général de la page est "Les instruments de mesure et de tracés sur un chantier au Moyen Âge".

P1150600 p.21.

Par contre, Wikipedia (consulté le 16 décembre 2022) fait état d'une controverse et insiste sur l'absence de preuve d'usage de la "corde à 13 noeuds" au Moyen-Âge (que ce soit dans l'iconographie ou dans les textes). Conclusion: selon les chercheurs cités, ce serait un "mythe néo-pédagogique" qui remonterait à 1966. Si ce n'est pas vrai, c'est bien trouvé! Le livre peut en tout cas constituer un bon "aide-mémoire" pour des notions de géométrie appliquée: la démonstration du théorème de Pythagore, la définition d'un carré, d'un triangle, d'un trapèze...

Bien entendu, cela n'empêche pas d'aller faire, en saison, une visite familiale au Château-fort.

Et, pour finir sur une anecdote concernant les mathématiques: je connais un professeur de maths qui me chante parfois les louanges du système duodécimal (12), pour multiplier les compétences en calcul mental aux gamins, notamment. Mais, à ma connaissance, il n'a pas encore écrit de livre sur le sujet... 

*

*          * 

Le second ouvrage, que je viens de "cueillir" dans une librairie de quartier dans laquelle mon actuel club CIGALES vient d'investir, est encore plus polémique. 

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Le nucléaire n'est pas bon pour le climat, Hervé Kempf, Seuil coll. Seuil libelle, septembre 2022 

Hervé Kempf est journaliste et fondateur du site Reporterre. Il est aussi l'auteur de plusieurs livres sur les thématiques environnementales et la critique du capitalisme (et des capitalistes). Dans ce récent ouvrage, il critique le "pari" fait sur la relance du nucléaire en France, non sans des arguments qui me paraissent solides, d'une part sur le problème des déchets nucléaires, et surtout, d'autre part, sur le risque d'accident d'une centrale nucléaire en France (en contradiction avec le discours officiel comme quoi un accident nucléaire, tel que Tchernobyl ou Fukushima, ne pourra jamais avoir lieu en France). Je pense que la lecture de cet opuscule (54 pages en gros caractères) peut aider à se construire un avis sur le sujet. 

Pour conclure sur ce sujet en donnant ma propre opinion: je suis intimement persuadé que, lorsque se sera produit, en France, l'inéluctable accident aux conséquences catastrophiques clairement annoncées dans ce livre (territoire plus ou moins étendu contaminé et inhabitable, morts par centaines sinon par milliers [y compris pour des causes collatérales: accidents de la circulation, stress...], coût se comptant en centaines de milliards d'euros)... Une fois l'accident advenu, disais-je, tous les experts du monde seront sans conteste capables de nous expliquer par le menu, minute par minute, comment il s'est produit, à la suite de quelle intervention humaine intempestive et/ou de quel événement imprévu parce que totalement imprévisible... alors qu'on nous a seriné depuis des décennies qu'un tel accident était impossible. La question n'est pas là. La question est que nous devrions, le plus rapidement possible, décider de nous passer totalement d'une technologie aussi dangereuse. J'ai dit (et écrit).

A part ça, bonnes fêtes à tous, nous y sommes presque, ce n'est plus qu'une affaire de jours (pour les Fêtes, je veux dire).

11 décembre 2022

Sa préférée - Sarah Jollien-Fardel

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Sa préférée (Sabine Wespieser Editeur, 200 pages), le premier roman de Sarah Jollien-Fardel née en Suisse en 1971, est une réussite. Il vient d'être récompensé par le prix du roman Fnac 2022 et il a été en lice pour le prix Goncourt. L'histoire se passe en Suisse, dans un village haut perché dans le Valais. Dès le début, Jeanne, la narratrice (le récit n'est fait que par une personne), nous fait entrer tout de suite dans le vif du sujet : la violence faite aux femmes. En l'occurence, Claire, la mère, et Emma, la soeur de Jeanne, sont maltraitées, battues, humiliées et (même violée pour Emma) par Louis, le père, un être fruste et frustré qui ne savait dire que des insanités. Jeanne, la plus jeune, est la seule à lui avoir tenu tête jusqu'au jour où il l'a tabassée à tel point qu'elle s'est retrouvée alitée. Dès qu'elle l'a pu, Jeanne est partie de la maison. Elle s'est rendue compte que les voisins et la famille savaient ce qui se passait, mais personne n'a levé le petit doigt pour aider ces trois femmes. Jeanne ne pardonnera jamais à son père pour ce qu'il a fait subir à sa soeur et à sa mère. Elle trouve refuge à Lausanne et éprouve de l'apaisement à nager dans le lac Léman. La nature tient une part importante dans l'histoire. Et Jeanne, malgré ses mauvais souvenirs d'enfance, revient souvent dans les montagnes valaisiennes. Par ailleurs, Jeanne a du mal à s'attacher profondément à quelques personnes comme Marine ou Paul, une femme et un homme dont elle tombera amoureuse. Un roman avec une écriture qui est tenue de bout en bout. Je conseille.

7 décembre 2022

Charlie Hebdo, 1992-2015 - Charb

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) ne vois aucune raison de m'énorgueillir pour le n-ième "hommage à Charlie Hebdo" que j'ai péniblement réussi à rédiger vaille que vaille. S'il y a a sujet à appréciation, c'est bien sur l'objet lui-même, une "somme" sobrement intitulée Charb, Charlie Hebdo 1992-2015

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Cette "compilation" en 333 pages est parue en novembre 2016. Je me suis acheté mon exemplaire en août 2019. Je me rappelle avoir remarqué en début d'année 2022, au moment où ce recueil constituait le cadeau offert aux nouveaux abonnés à Charlie Hebdo, que l'"offre [était] valable jusqu'au 31/01/2022"... y compris dans le N°1541 paru mercredi 2 février! Comme quoi il peut arriver qu'une publication prenne un certain retard. 

Le livre commence par trois pages de préface où Luz s'adresse au lecteur (il y précise bien que le livre ne couvre pas toute la production de Charb, mais seulement celle publiée dans Charlie). Les dessins sont classés par année (de 28 [en 1992!] à jusqu'à 60 dessins par année): je suppose qu'il s'agit plutôt d'un recueil exhaustif que d'une sélection? A l'époque où je l'avais acquis, j'avais moi-même consulté les deux premières années de Charlie Hebdo nouvelle série, et il me semble que la plupart des dessins aperçus au fil des pages du journal se retrouvent dans les années concernées du livre (à l'époque, j'avais fait en bibliothèque un relevé des dessins "intemporels" dont je pensais suggérer à Charlie la "repasse" à raison d'un par semaine pour les numéros de ce XXIe siècle, dans une rubrique dédiée). Charlie Hebdo "seconde série" a désormais plus de 30 ans, depuis cette "refondation" en juillet 1992 où Charb - entre autres jeunes dessinateurs - a rejoint les "historiques" de la 1ère série!

Pour en revenir au recueil, on y trouve jusqu'à 6 dessins par page (mais c'est rare), et au total plus de 1000 dessins (en faisant le total des 24 années, j'en ai compté exactement 1055 - avec les habituelles approximations de comptage, entre une double-page foisonnante et un minuscule crobard, qui comptent tous deux pour "1"...). Chaque année s'ouvre souvent sur une couverture de Charb emblématique de cette année-là. Bien entendu, les couv' figurent dans le recueil "Les 1000 Unes 1992-2011" qu'il faudra bien que je finisse par présenter un jour.

J'ai décidé de vous présenter en "citations" uniquement ma propre sélection parmi les dix premières années (1992-2001). Du coup, voilà une bonne raison pour (vous) offrir ce recueil, un beau cadeau pour garder la mémoire!

P1150570 p.10, l'un des tout premiers dessins, en 1992 (n'apparaît-il pas daté aujourd'hui?).

P1150572 p.55, dessin de 1995.

P1150571 p.22, reprise de la couv' du N°40 (31 mars 1993).

P1150573 p.48, dessin de 1995 (en 2022, il ne s'agit plus des mêmes personnes, mais...?).

P1150574 p.63, dessin de 1996 (encore un dessin intemporel?).

P1150575 p.67, dessin de 1996 (avant qu'on parle d'économie circulaire?).

P1150576 p.80, dessin de 1997.

P1150577 p.94, est-ce que la situation s'est améliorée depuis 1998? On pourra bientôt passer un coup de fil à la machine pour qu'elle se mette en marche - et, après-demain, pour qu'un drone nous fasse boire la tasse?

P1150578 p.102 (dessin de 1998, bien sûr...).

P1150579 p.114 (1999): COP, COP, COP... Cocorico?

P1150580 p.136 (dessin de 2000).

P1150581 p.136 encore (2000 toujours). Points de vue et images du grand monde. 

P1150582 p.145: nous y voilà bientôt (2001).

*****

P.S.: dans Charlie Hebdo N°1585 de ce mercredi 7 décembre 2022, je me trouve particulièrement en accord avec l'édito signé par Riss p. 3, titré "Conseil d'ami pour le XXIe siècle", qui commence par "Vivre sans électricité, c'est le défi de la semaine". Je vous cite encore une phrase (vers la fin de la colonne): "En réalité, notre niveau de consommation d'énergie n'a pas été conçu pour satisfaire nos besoins vitaux, mais ceux du marché, qui a besoin de millions de consommateurs pour exister." Vous pouvez lire le texte complet sur le site du journal.

*** Je suis Charlie ***

5 décembre 2022

Nos vies en flammes - David Joy

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Ayant beaucoup entendu parler de ce roman en bien, je me le suis procuré. Nos vies en flammes (Edition Sonatine, 324 pages poignantes) est un roman assez noir qui se passe de nos jours dans les Appalaches où vit une importante communauté amérindienne. Malgré que l'on soit à la fin de l'automne, des incendies ravagent le paysage. Ray Mathis qui travaillait au département des forêts est désormais retraité. Il est veuf, il a une chienne et un fils, Ricky, un jeune drogué qui ne fait rien pour s'en sortir. Un jour, Ricky appelle son père à l'aide car il doit 10 000 dollars à un homme dont on ne connaît pas tout de suite le nom. Ricky est salement amoché quand Ray le récupère après avoir donné ses dernières économies pour éponger la dette. Mais peu de temps après, Ricky meurt d'une overdose provoquée par un opioïde de synthèse. Et Ray Mathis va partir en croisade contre Walter Freeman, le dealer responsable de la mort de Ricky au yeux de Ray. Il va être plus ou moins aidé dans son entreprise par un certain Denny qui a assisté à la mort de Ricky. Vous me direz que tout cela n'est pas bien gai. Et bien non. Et je ne vois pas beaucoup d'espoir quand le roman se termine. Mais cela n'empèche pas que j'ai aimé ce roman qui se lit bien. Le personnage de Ray Mathis y est pour beaucoup. David Joy, avant d'écrire Nos vies en flammes, a fait publier un article en 2020 dans la revue trimestrielle America. L'article est repris en postface du roman. Il dénonce les milliers de morts à cause des opioïdes de synthèse, comme l'OxyContin fabriqué par le laboratoire Purdue Pharma, qui inondent les Etats-Unis. La diffusion de ces médicaments est nettement plus encadrée en France. 

Lire les billets de Yan, Ceciloule Pamolico, Clete, Richard, Jean-Marc Laherrère, Shangols.

26 novembre 2022

La longue marche des dindes - Léonie Bischoff et Kathleen Karr

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Avant d'être une bande dessinée, La longue marche des dindes est un roman écrit par Kathleen Karr qui a été publié aux Editions L'école des loisirs.

Dans ce billet, je ne vais parler que de la bande dessinée dessinée par Léonie Bischoff (Edition Rue de Sèvres) qui a aussi adapté le texte. Cet album de 144 pages me semble un cadeau de Noël idéal. Il peut être lu et apprécié par les petits et les grands. La grande marche des dindes débute dans l'Etat esclavagiste du Missouri en 1860. La guerre de Sécession n'a pas encore commencé. Simon Green, un jeune garçon de 12 ans orphelin de mère, vit chez un oncle et une tante qui ne l'apprécient guère. Grâce à son institutrice Miss Rogers, Simon va s'émanciper de sa famille et se lancer dans une drôle d'aventure: emmener 1000 dindes bronzées (race de dinde d'Amérique) jusqu'à Denver au Kansas et parcourir plus de 1000 km. Simon qui est un garçon dégourdi se lance dans l'aventure avec un chariot, quelques mules et un muletier. Pendant son voyage, il va rencontrer deux filles qui vont devenir des compagnes de voyage, Jo, une petite filles noire qui s'est évadée d'une plantation après la mort de sa mère, et Lizzie, une jeune fille de 14 ans, seule survivante d'une famille victime de la sécheresse. Simon va aussi croiser quelques Indiens à qui il cédera quelques dindes pour l'élevage, et retrouver son père qui s'avère être un fieffé filou. On apprend que les dindes, quand c'est nécessaire, peuvent voler. L'album se lit vite. J'ai aimé les dessins. Je conseille.

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