Deux livres à offrir en cadeau à des jeunes d'âge scolaire
Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vais vous offrir deux idées de petits cadeaux pédagogiques.
Lorsque nous étions retournés à Guédelon avec dasola il y a quelques mois, j'avais été très intéressé par une démonstration de géométrie appliquée à la construction, au travers de laquelle percolait la passion du "formateur". Ses instruments? Le compas et la règle. Mais nous n'avions pas été accueillis sur le site, comme en 2008, avec une "introduction à l'usage de la corde à 13 noeuds". Du coup, j'avais acheté à la librairie du site l'opuscule que je vous présente aujourd'hui.
Mesurer et tracer au Moyen-Âge, Guédelon, 2022, 64 pages
Le livre donne des informations sur les différentes unités de mesure, en lien avec le corps humain (donc, bien entendu, variables d'un lieu à l'autre, même si leurs rapports respectifs étaient stables).
Guédelon a "standardisé" ces différentes unités...
Page 13, est évoquée la "fameuse" corde à 13 noeuds, dont il est dit qu'elle a été inventée par les Egyptiens il y a plus de 4000 ans. Le titre général de la page est "Les instruments de mesure et de tracés sur un chantier au Moyen Âge".
Par contre, Wikipedia (consulté le 16 décembre 2022) fait état d'une controverse et insiste sur l'absence de preuve d'usage de la "corde à 13 noeuds" au Moyen-Âge (que ce soit dans l'iconographie ou dans les textes). Conclusion: selon les chercheurs cités, ce serait un "mythe néo-pédagogique" qui remonterait à 1966. Si ce n'est pas vrai, c'est bien trouvé! Le livre peut en tout cas constituer un bon "aide-mémoire" pour des notions de géométrie appliquée: la démonstration du théorème de Pythagore, la définition d'un carré, d'un triangle, d'un trapèze...
Bien entendu, cela n'empêche pas d'aller faire, en saison, une visite familiale au Château-fort.
Et, pour finir sur une anecdote concernant les mathématiques: je connais un professeur de maths qui me chante parfois les louanges du système duodécimal (12), pour multiplier les compétences en calcul mental aux gamins, notamment. Mais, à ma connaissance, il n'a pas encore écrit de livre sur le sujet...
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Le second ouvrage, que je viens de "cueillir" dans une librairie de quartier dans laquelle mon actuel club CIGALES vient d'investir, est encore plus polémique.
Le nucléaire n'est pas bon pour le climat, Hervé Kempf, Seuil coll. Seuil libelle, septembre 2022
Hervé Kempf est journaliste et fondateur du site Reporterre. Il est aussi l'auteur de plusieurs livres sur les thématiques environnementales et la critique du capitalisme (et des capitalistes). Dans ce récent ouvrage, il critique le "pari" fait sur la relance du nucléaire en France, non sans des arguments qui me paraissent solides, d'une part sur le problème des déchets nucléaires, et surtout, d'autre part, sur le risque d'accident d'une centrale nucléaire en France (en contradiction avec le discours officiel comme quoi un accident nucléaire, tel que Tchernobyl ou Fukushima, ne pourra jamais avoir lieu en France). Je pense que la lecture de cet opuscule (54 pages en gros caractères) peut aider à se construire un avis sur le sujet.
Pour conclure sur ce sujet en donnant ma propre opinion: je suis intimement persuadé que, lorsque se sera produit, en France, l'inéluctable accident aux conséquences catastrophiques clairement annoncées dans ce livre (territoire plus ou moins étendu contaminé et inhabitable, morts par centaines sinon par milliers [y compris pour des causes collatérales: accidents de la circulation, stress...], coût se comptant en centaines de milliards d'euros)... Une fois l'accident advenu, disais-je, tous les experts du monde seront sans conteste capables de nous expliquer par le menu, minute par minute, comment il s'est produit, à la suite de quelle intervention humaine intempestive et/ou de quel événement imprévu parce que totalement imprévisible... alors qu'on nous a seriné depuis des décennies qu'un tel accident était impossible. La question n'est pas là. La question est que nous devrions, le plus rapidement possible, décider de nous passer totalement d'une technologie aussi dangereuse. J'ai dit (et écrit).
A part ça, bonnes fêtes à tous, nous y sommes presque, ce n'est plus qu'une affaire de jours (pour les Fêtes, je veux dire).
Les bonnes étoiles - Hirokazu Kore-Eda
Comme Pascale, j'ai beaucoup aimé Les bonnes étoiles du réalisateur japonais Hirokazu Kore-Eda qui, cette fois-ci, a tourné son film en Corée du Sud avec des acteurs coréens. Les bonnes étoiles du titre sont peut-être les adultes qui entourent et dorlotent un adorable bébé âgé de quelques mois. So-Young, une jeune femme pas très sympathique de prime abord, abandonne son bébé au pied d'une "boîte à bébé" pas loin d'un orphelinat. Elle ne s'est pas rendue compte qu'elle est suivie par deux femmes dans une voiture. Ce sont deux femmes policiers. Peu de temps après, deux hommes qui travaillent dans un pressing, Sang-hyeon et Dong soo, volent le petit garçon avant que l'orphelinat ne le découvre. Ce n'est pas la première fois. Ils vendent chers les bébés au marché noir mais en choisissant de bons parents. Cette fois-ci, ils vont être aidés dans leur entreprise par So-Young qui compte bien récupérer sa part. On découvre pourquoi les deux femmes policières suivent ce trio improbable qui va être rejoint par un petit garçon échappé de l'orphelinat. Il y a beaucoup de tendresse et d'émotion dans ce film qui à un moment lorgne vers le polar quand un homme est découvert assassiné. J'ai aimé la fin même si on ne sait pas ce que deviennent certains personnages. Un film que je recommande tout comme Selenie.
Sous les figues - Erige Sehiri / Maestro(s) - Bruno Chiche
Sur les conseils de Miriam, je suis allée voir Sous les figues d'Erige Sehiri. L'histoire se passe dans la campagne tunisienne pendant une journée. Après un parcours cahotique dans des camionnettes, des jeunes filles et d'autres femmes plus âgées, ainsi que quelques hommes jeunes et moins jeunes, sont chargés de cueillir de grosses figues bien mûres. C'est un travail délicat car les branches des figuiers se cassent facilement. Pendant la cueillette, les conversations vont bon train. Les filles qui portent un foulard sur les cheveux bavardent beaucoup. Elles parlent librement sans langue de bois. Elles ne se laissent pas faire par certains ouvriers un peu entreprenants. Elles rêvent au prince charmant. Et pendant une pause, elles se maquillent. Les garçons semblent désabusés par la vie qu'ils mènent. Ils travaillent pour gagner quelques dinars. Les femmes âgeées se plaignent de leurs douleurs ou bien font du thé pendant leur pause. Sur le chemin du retour, tout semble un peu apaisé. J'ai aimé la manière dont la réalisatrice filme les visages au plus près. Ce film permet de côtoyer un échantillon de la population tunisienne aujourd'hui. Un film avec beaucoup de charme. Je conseille moi aussi.
Dans Maestro(s), Yvan Attal joue le rôle d'un chef d'orchestre Denis Dumar qui vient de recevoir un prix lors d'une cérémonie à la télé. Son père, François, est aussi chef d'orchestre. Lors d'une répétition, ce dernier (Pierre Arditi qui "fait la gueule") apprend par un coup de fil qu'il a été choisi pour diriger la Scala de Milan. Malheureusement, suite à un quiproquo, il y a eu une erreur. C'est Denis qui doit diriger l'orchestre et non François. La rivalité entre père et fils restera très feutrée grâce à la présence d'Hélène (Miou Miou), la compagne de François. De son côté, Denis bénéficie de la présence de son ex-femme qui est devenue son agent et il est tombé amoureux d'une femme violoniste qui souffre de surdité. Ce film permet de faire entendre quelques morceaux de musique dont l'ouverture des Noces de Figaro de Mozart en entier. Attendez la sortie du film à la télévision.
Sa préférée - Sarah Jollien-Fardel
Sa préférée (Sabine Wespieser Editeur, 200 pages), le premier roman de Sarah Jollien-Fardel née en Suisse en 1971, est une réussite. Il vient d'être récompensé par le prix du roman Fnac 2022 et il a été en lice pour le prix Goncourt. L'histoire se passe en Suisse, dans un village haut perché dans le Valais. Dès le début, Jeanne, la narratrice (le récit n'est fait que par une personne), nous fait entrer tout de suite dans le vif du sujet : la violence faite aux femmes. En l'occurence, Claire, la mère, et Emma, la soeur de Jeanne, sont maltraitées, battues, humiliées et (même violée pour Emma) par Louis, le père, un être fruste et frustré qui ne savait dire que des insanités. Jeanne, la plus jeune, est la seule à lui avoir tenu tête jusqu'au jour où il l'a tabassée à tel point qu'elle s'est retrouvée alitée. Dès qu'elle l'a pu, Jeanne est partie de la maison. Elle s'est rendue compte que les voisins et la famille savaient ce qui se passait, mais personne n'a levé le petit doigt pour aider ces trois femmes. Jeanne ne pardonnera jamais à son père pour ce qu'il a fait subir à sa soeur et à sa mère. Elle trouve refuge à Lausanne et éprouve de l'apaisement à nager dans le lac Léman. La nature tient une part importante dans l'histoire. Et Jeanne, malgré ses mauvais souvenirs d'enfance, revient souvent dans les montagnes valaisiennes. Par ailleurs, Jeanne a du mal à s'attacher profondément à quelques personnes comme Marine ou Paul, une femme et un homme dont elle tombera amoureuse. Un roman avec une écriture qui est tenue de bout en bout. Je conseille.
Le torrent - Anne Le Ny / Mes rendez-vous avec Leo - Sophie Hyde
Je suis allée voir ces deux films après avoir vu les bandes-annonces.
Le torrent d'Anne Le Ny se passe dans le département des Vosges en hiver. Dans une maison d'architecte, vivent Alexandre (José Garcia, à contre-emploi), Juliette et leur fils Darius. Lison, la fille d'Alexandre, s'invite chez eux. Lison est profondément attachée à son père. Le soir de son arrivée, elle va découvrir sur une clé USB quelque chose qu'elle n'aurait jamais dû voir. A partir de là, le drame éclate. Une dispute éclate entre Alexandre et sa femme qui tombe dans un ravin. Plus tard, son corps est emporté par une rivière en crue. Alexandre, complètement désemparé, se sert de sa fille pour se fabriquer un alibi. Ils doivent se serrer les coudes. Mais un grain de sable s'incruste en la personne de Patrick (André Dussollier), le père de Juliette. J'ai noté qu'un petit garçon arrive à se consoler de la mort de sa mère assez vite en adoptant un chien. C'est un film qui se laisse voir mais qu'on oublie relativement vite.
Mes rendez-vous avec Leo est un film britannique qui se passe presque entièrement dans une chambre d'hôtel "standard supérieur", vraisemblablement à Londres. J'ai voulu voir le film car je suis une inconditionnelle d'Emma Thompson. Dans le film, elle joue sans fard Nancy Stokes, une veuve à la retraite qui a été professeure de religion. Elle vient de louer les services de Leo Grande, un escort boy avec lequel elle espère apprendre des choses sur le sexe, vu comme quelque chose d'épanouissant et non pas de routinier comme ce qu'elle a connu pendant 31 ans avec son mari. Nancy parle beaucoup, elle n'est pas à l'aise. Elle se demande comment elle a pu décider de faire quelque chose de pareil. Pourtant, face à elle, Leo qui est un charmant jeune homme fait tout pour la mettre à l'aise. Il y aura quatre rendez-vous qui permettront de faire évoluer les deux personnages. Vu le sujet, on pouvait s'attendre à du graveleux, et bien pas du tout. Il y a beaucoup de pudeur et les deux acteurs sont vraiment bien. Emma Thompson a été courageuse de se montrer dénudée avec ses défauts. Un film sympathique.
Charlie Hebdo, 1992-2015 - Charb
Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) ne vois aucune raison de m'énorgueillir pour le n-ième "hommage à Charlie Hebdo" que j'ai péniblement réussi à rédiger vaille que vaille. S'il y a a sujet à appréciation, c'est bien sur l'objet lui-même, une "somme" sobrement intitulée Charb, Charlie Hebdo 1992-2015.
Cette "compilation" en 333 pages est parue en novembre 2016. Je me suis acheté mon exemplaire en août 2019. Je me rappelle avoir remarqué en début d'année 2022, au moment où ce recueil constituait le cadeau offert aux nouveaux abonnés à Charlie Hebdo, que l'"offre [était] valable jusqu'au 31/01/2022"... y compris dans le N°1541 paru mercredi 2 février! Comme quoi il peut arriver qu'une publication prenne un certain retard.
Le livre commence par trois pages de préface où Luz s'adresse au lecteur (il y précise bien que le livre ne couvre pas toute la production de Charb, mais seulement celle publiée dans Charlie). Les dessins sont classés par année (de 28 [en 1992!] à jusqu'à 60 dessins par année): je suppose qu'il s'agit plutôt d'un recueil exhaustif que d'une sélection? A l'époque où je l'avais acquis, j'avais moi-même consulté les deux premières années de Charlie Hebdo nouvelle série, et il me semble que la plupart des dessins aperçus au fil des pages du journal se retrouvent dans les années concernées du livre (à l'époque, j'avais fait en bibliothèque un relevé des dessins "intemporels" dont je pensais suggérer à Charlie la "repasse" à raison d'un par semaine pour les numéros de ce XXIe siècle, dans une rubrique dédiée). Charlie Hebdo "seconde série" a désormais plus de 30 ans, depuis cette "refondation" en juillet 1992 où Charb - entre autres jeunes dessinateurs - a rejoint les "historiques" de la 1ère série!
Pour en revenir au recueil, on y trouve jusqu'à 6 dessins par page (mais c'est rare), et au total plus de 1000 dessins (en faisant le total des 24 années, j'en ai compté exactement 1055 - avec les habituelles approximations de comptage, entre une double-page foisonnante et un minuscule crobard, qui comptent tous deux pour "1"...). Chaque année s'ouvre souvent sur une couverture de Charb emblématique de cette année-là. Bien entendu, les couv' figurent dans le recueil "Les 1000 Unes 1992-2011" qu'il faudra bien que je finisse par présenter un jour.
J'ai décidé de vous présenter en "citations" uniquement ma propre sélection parmi les dix premières années (1992-2001). Du coup, voilà une bonne raison pour (vous) offrir ce recueil, un beau cadeau pour garder la mémoire!
p.10, l'un des tout premiers dessins, en 1992 (n'apparaît-il pas daté aujourd'hui?).
p.22, reprise de la couv' du N°40 (31 mars 1993).
p.48, dessin de 1995 (en 2022, il ne s'agit plus des mêmes personnes, mais...?).
p.63, dessin de 1996 (encore un dessin intemporel?).
p.67, dessin de 1996 (avant qu'on parle d'économie circulaire?).
p.94, est-ce que la situation s'est améliorée depuis 1998? On pourra bientôt passer un coup de fil à la machine pour qu'elle se mette en marche - et, après-demain, pour qu'un drone nous fasse boire la tasse?
p.102 (dessin de 1998, bien sûr...).
p.114 (1999): COP, COP, COP... Cocorico?
p.136 encore (2000 toujours). Points de vue et images du grand monde.
p.145: nous y voilà bientôt (2001).
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P.S.: dans Charlie Hebdo N°1585 de ce mercredi 7 décembre 2022, je me trouve particulièrement en accord avec l'édito signé par Riss p. 3, titré "Conseil d'ami pour le XXIe siècle", qui commence par "Vivre sans électricité, c'est le défi de la semaine". Je vous cite encore une phrase (vers la fin de la colonne): "En réalité, notre niveau de consommation d'énergie n'a pas été conçu pour satisfaire nos besoins vitaux, mais ceux du marché, qui a besoin de millions de consommateurs pour exister." Vous pouvez lire le texte complet sur le site du journal.
*** Je suis Charlie ***
Nos vies en flammes - David Joy
Ayant beaucoup entendu parler de ce roman en bien, je me le suis procuré. Nos vies en flammes (Edition Sonatine, 324 pages poignantes) est un roman assez noir qui se passe de nos jours dans les Appalaches où vit une importante communauté amérindienne. Malgré que l'on soit à la fin de l'automne, des incendies ravagent le paysage. Ray Mathis qui travaillait au département des forêts est désormais retraité. Il est veuf, il a une chienne et un fils, Ricky, un jeune drogué qui ne fait rien pour s'en sortir. Un jour, Ricky appelle son père à l'aide car il doit 10 000 dollars à un homme dont on ne connaît pas tout de suite le nom. Ricky est salement amoché quand Ray le récupère après avoir donné ses dernières économies pour éponger la dette. Mais peu de temps après, Ricky meurt d'une overdose provoquée par un opioïde de synthèse. Et Ray Mathis va partir en croisade contre Walter Freeman, le dealer responsable de la mort de Ricky au yeux de Ray. Il va être plus ou moins aidé dans son entreprise par un certain Denny qui a assisté à la mort de Ricky. Vous me direz que tout cela n'est pas bien gai. Et bien non. Et je ne vois pas beaucoup d'espoir quand le roman se termine. Mais cela n'empèche pas que j'ai aimé ce roman qui se lit bien. Le personnage de Ray Mathis y est pour beaucoup. David Joy, avant d'écrire Nos vies en flammes, a fait publier un article en 2020 dans la revue trimestrielle America. L'article est repris en postface du roman. Il dénonce les milliers de morts à cause des opioïdes de synthèse, comme l'OxyContin fabriqué par le laboratoire Purdue Pharma, qui inondent les Etats-Unis. La diffusion de ces médicaments est nettement plus encadrée en France.
Lire les billets de Yan, Ceciloule Pamolico, Clete, Richard, Jean-Marc Laherrère, Shangols.
Aucun ours - Jafar Panahi
Je suis assez sensible aux films du réalisateur iranien Jafar Panahi qui été l'assistant d'Abbas Kiarostami. Depuis le 11 juillet 2022, Jafar Panahi purge une peine de six ans de prison pour "Propagande contre le régime de Téhéran". Toujours est-il qu'il a pu terminer Aucun ours qui vient de sortir sur les écrans français. Ce film a reçu le prix spécial du Jury à la dernière Mostra de Venise. Dans Aucun ours, il est devant et derrière la caméra. Il a loué pour quelque temps une chambre chez l'habitant dans un village reculé en Iran situé pas loin de la frontière turque. Il tourne un film dont les prises de vues ont lieu en Turquie. Il donne des directives grâce à Internet par écran d'ordinateur interposé. Tous ses techniciens suivent ses instructions. Les personnages de l'histoire désirent partir vers la France grâce à des passeports subtilisés à des touristes de passage. En parallèle, Jafar Panahi est très sollicité par les notables du village Ils sont persuadés que Jafar aurait pris une photo. Sur ladite photo, on devrait voir une jeune femme et un jeune homme qui n'auraient jamais dû être ensemble. En effet, la jeune femme est promise à un autre depuis sa naissance. On se rend compte que Jafar est épié de jour comme de nuit par les villageois qui deviennent de plus en plus hostiles. C'est très inconfortable. Pendant ce temps-là, un drame se noue en Turquie avec le couple d'acteurs. J'ai énormément aimé ce film dans lequel Jafar Panahi montre que le sort des femmes n'est pas enviable dans son pays. Ce sont elles qui sont cantonnées à faire la cuisine et à s'occuper des enfants tandis que les hommes décident de tout. De guerre lasse, Jafar partira. Le film se termine avec le signal sonore de la voiture du cinéaste. Quelques séquences sont frappantes comme celles de deux futurs mariés à qui on lave les pieds dans une rivière. C'est bien entendu une affaire d'hommes. Il y a une belle séquence qui se passe la nuit : Jafar Panahi s'approche très près d'une frontière invisible qui sépare l'Iran de la Turquie. C'est un chemin connu pour la contrebande. On le met en garde. On sent la menace toujours présente même si on l'assure qu'aucun ours n'est dans les parages. J'ai énormément aimé ce film que je conseille.
Saint Omer - Alice Diop
Ce n'est pas toujours le cas, mais pour une fois, je suis d'accord avec le billet de Pascale. J'aurais tant voulu aimer plus Saint Omer. Il dure un peu plus de deux heures, 1H20 ou 1H30 aurait suffi. Dommage que la réalisatrice, qui est aussi la scénariste, ne se soit pas concentrée plus sur le procès de Laurence Coli, une femme infanticide. Alice Diop a dilué l'histoire avec d'une part le procès qui est passionnant, et le reste. Le reste, c'est un préambule incompréhensible sur les femmes tondues à la Libération, c'est Rama qui donne un cours sur Marguerite Duras et c'est surtout le mal-être de la même Rama, qui est aussi écrivain et qui pour son nouveau roman suit le procès. Enceinte de 4 mois, elle semble avoir des problèmes relationnels avec sa mère. Moi, j'ai trouvé le personnage de Laurence Coli, la mère infanticide d'origine africaine qui s'exprime dans un français châtié, très intéressant. Il y a plein de choses qu'elle ne dit pas, dont la raison de son acte. Pendant tout le procès, elle s'exprime avec clarté. Au fur et à mesure que se déroule le film, il semble que cette femme intéresse de moins en moins la réalisatrice. L'un des deux seuls témoins que l'on entend est le père de la petite victime, une petite fille de 15 mois que Laurence a abandonnée une nuit sur une plage de Berck-sur-Mer dans le Pas-de Calais. C'est tiré d'une histoire vraie qui s'est passée en 2013. Guslagie Malanga dans le rôle de Laurence Coli et Aurélia Petit qui interprète l'avocate de la défense sont toutes les deux remarquables. Rien que pour elles, vous pouvez allez voir le film, mais vous allez peut-être vous ennuyer comme certaines personnnes dans la salle où j'ai vu le film. J'ai entendu des soupirs et quelqu'un qui disait qu'elle serait bien partie avant la fin. En tout cas, le film a reçu deux prix à la dernière Mostra de Venise et il représente la France aux prochains Oscars.
La longue marche des dindes - Léonie Bischoff et Kathleen Karr
Avant d'être une bande dessinée, La longue marche des dindes est un roman écrit par Kathleen Karr qui a été publié aux Editions L'école des loisirs.
Dans ce billet, je ne vais parler que de la bande dessinée dessinée par Léonie Bischoff (Edition Rue de Sèvres) qui a aussi adapté le texte. Cet album de 144 pages me semble un cadeau de Noël idéal. Il peut être lu et apprécié par les petits et les grands. La grande marche des dindes débute dans l'Etat esclavagiste du Missouri en 1860. La guerre de Sécession n'a pas encore commencé. Simon Green, un jeune garçon de 12 ans orphelin de mère, vit chez un oncle et une tante qui ne l'apprécient guère. Grâce à son institutrice Miss Rogers, Simon va s'émanciper de sa famille et se lancer dans une drôle d'aventure: emmener 1000 dindes bronzées (race de dinde d'Amérique) jusqu'à Denver au Kansas et parcourir plus de 1000 km. Simon qui est un garçon dégourdi se lance dans l'aventure avec un chariot, quelques mules et un muletier. Pendant son voyage, il va rencontrer deux filles qui vont devenir des compagnes de voyage, Jo, une petite filles noire qui s'est évadée d'une plantation après la mort de sa mère, et Lizzie, une jeune fille de 14 ans, seule survivante d'une famille victime de la sécheresse. Simon va aussi croiser quelques Indiens à qui il cédera quelques dindes pour l'élevage, et retrouver son père qui s'avère être un fieffé filou. On apprend que les dindes, quand c'est nécessaire, peuvent voler. L'album se lit vite. J'ai aimé les dessins. Je conseille.