Un drame en Livonie - François Rivière et Serge Micheli (d'après Jules Verne)
Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) publie mon premier billet pour le "challenge 120 ans Jules Verne (1828-1905)". C'est l'été dernier que je m'étais offert un album BD au dessin plutôt original, sans même l'avoir feuilleté de la première à la dernière page.
Un drame en Livonie, François Rivière (scén.) & Serge Micheli (dessin),
Librairie des Champs Elysées, 2000, 47 p.
d'après
Jules Verne, Un drame en Livonie, éd. originale 1904
(Le livre de Poche N°2061, 1976 [1ère éd.1968], 243 p.)
Si l'on commence par planter le décor, à l'époque de Jules Verne, la Livonie (appelée aussi "gouvernement [russe] de Riga" jusqu'à la création des Pays Baltes contemporains après la Première Guerre Mondiale) correspondait essentiellement, pour sa partie Sud, à ce qui est aujourd'hui l'Estonie et, pour sa partie Nord, à une petite partie de la Lettonie. Dans le roman, nous apprenons p.32 que nous sommes le 12 avril et p.38 que nous sommes en 1876. La carte ci-dessous figure en 2e de couv et en 3e de couv' de la bande dessinée.
Au début de l'oeuvre, de nuit, un fugitif poursuivi par des forces de l'ordre (douaniers) trouve refuge dans un moulin à vent...
Plus largement, sur fond d'intrigue policière dans un Etat qui ne l'est pas moins (policier), le livre met en scène la rivalité entre des "notables" d'origine germanique et une bourgeoisie plus "populaire" d'origine slave, à laquelle semble aller la sympathie de Jules Verne. L'histoire de ce pays et de ses occupants, minorités, majorités, propriétaires, maîtres... successifs semble assez embrouillée.
Le scénario de François Rivière m'a semblé assez fidèle au roman (que je n'avais pas lu depuis longtemps: je possède mon livre de poche depuis 1978...). Evidemment, transcrire 243 pages de dialogues et des habituelles digressions verniennes en 47 planches demande un art certain!
Au fil des pages, on découvre un voyage en voiture à cheval et ses aléas nocturnes, de mystérieux voyageurs, une auberge (rouge? Non...). Il est en grande partie question d'une famille, celle du professeur Nicolef, de sa fille et de son fils, engagés dans le "parti slave" contre le "parti allemand". Mais aussi d'argent, celui qui a été volé dans la fameuse auberge à un garçon de banque retrouvé assassiné, cependant qu'une habile enquête de police amène à soupçonner le professeur Nicolef, qui était justement en voyage cette nuit-là. Les coups de théâtre (positifs comme négatifs) s'enchaînent jusqu'au dénouement, quand Ilka, la fille du professeur, pourra enfin épouser l'élu de son coeur (je sais, je spoile... Mais si peu! Je n'ai pratiquement rien révélé!).
François Rivière, né en 1949, vieux routier de la bande dessinée pour laquelle il a rédigé de nombreux scénarios originaux à l'intention de nombreux auteurs, est aussi romancier. On sait moins qu'il avait écrit en 1978 Jules Verne, Images d'un mythe (la preuve: non seulement je ne le savais pas avant de me renseigner pour le présent billet, mais je ne l'ai toujours pas lu...). Ici, il est associé avec Serge Micheli, artiste peintre dont c'était, à l'époque (fin du XXe s.), la première bande dessinée.
J'avoue avoir été dérouté par l'esthétique de cet album. Il ne s'agit ici certes pas du genre de bande dessinée "classique" avec dessins réalistes que je lis le plus habituellement. J'ai été désarçonné par le style de dessins, souvent baroque (au sens de "bizarre"), avec des visages caricaturaux. Le dessinateur-peintre (le coloriage des planches a été effectué en "couleurs directes") utilise une palette de couleurs plus criardes que douces, plus ou moins ténébreuses ou contrastées selon les pages. Le style caricatural ("torturé"?) ne facilite pas forcément la reconnaissance des différents personnages ni de leurs rôles respectifs. L'un des personnages les plus reconnaissables est Ilka Nicolef. J'ai trouvé que le traitement de ce personnage féminin lui attribue des traits évoquant les indiens peaux-rouges tels que dessinés par Hugo Pratt en même temps que le maquillage d'acteurs japonais du théâtre Nô.
Bref, un album dont je suis content de connaître l'existence, mais que je ne suis pas certain de relire (même s'il le faudrait certainement, pour prêter attention à tous ses détails et, sûrement, en découvrir de nouveaux à chaque lecture). Le découpage des cases et leur faible nombre ne facilite pas forcément la compréhension de l'histoire. Je vous ai mis ci-dessous quelques planches à titre d'exemple.
Pour ma part, je conseillerais de lire en premier lieu le texte de Jules Verne avant de découvrir la bande dessinée, dont le dessin est suffisamment déroutant à l'oeil pour ne pas avoir, en plus, à se torturer le neurone en essayant de comprendre de qui il est question et "qui est qui".
ClaudiaLucia avait présenté le roman en 2021.
Analyse politique (p.6)
Enquête officielle pour meurtre (p.15)
Un des coups de théâtre (p.40)
Cette oeuvre et son adaptation participent comme annoncéà mon propre challenge 120 ans Jules Verne (1828-1905), et je l'inscris également pour le challenge 2025 sera classique aussi organisé par Nathalie. Je vais également essayer de le glisser pour le dernier mois de la 5e édition du challenge Les classiques c'est fantastique organisé par Moka et Fanny (thème d'avril: la littérature du XXe siècle à l'honneur)... Mais si le roman de Jules Verne a bien été publié en 1904, il a presque à coup sûr été rédigé des années auparavant - et l'auteur est en général vu comme du XIXe siècle.
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