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Le blog de Dasola
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30 septembre 2024

Des Jules Verne qui nous mènent en bateau

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous propose en ce dernier jour de septembre ce qui sera, je pense, mon dernier billet sur des oeuvres signées Jules Verne comportant bateaux et navigation maritime (les précédents ici, ici et ici). Je n'ai pas trouvé en bibliothèque parisienne tout ce que je souhaitais (par exemple, une édition "texte intégral" de Bourses de voyage). J'y ai tout au moins fait deux emprunts, que je complète avec deux achats (mais je n'ai pas non plus déniché de vieilles éditions "10/18", par exemple pour Les naufragés du Jonathan).

Le "signé Jules Verne" que j'employais ci-dessus n'est pas totalement innocent. En effet, les titres que je présente aujourd'hui ont en commun d'avoir été co-écrits par tel ou tel auteur, ...ou d'avoir été ultérieurement retravaillés pour publication par le fils de Jules Verne. 

 

L'épave du Cynthia (publié en 1885) est à part dans l'oeuvre de Jules Verne. Elle est parue sous la cosignature de notre auteur et d'André Laurie. Ce dernier nom est l'un des pseudonymes utilisés par Paschal Grousset (1844-1909). J'ai appris en consultant aujourd'hui sa notice Wikipedia qu'il était également l'auteur initial de deux manuscrits qui, retravaillés par Jules Verne, ont donné, publié sous son nom par celui-ci, Les cinq cents millions de la Begum et L'Etoile du Sud (aucun bateau dans ces deux-là). Quoi qu'il en soit, leur Epave du Cynthia constitue un roman touffu. L'exemplaire que j'ai lu provient d'une réédition de 1977 dans la collection "bibliothèque aérienne" des Humanoïdes associés (Maison davantage connue pour sa production en bande dessinée qu'en roman!). Le directeur de collection, qui signe aussi la préface, est François Rivière: je suppose (sans certitude) qu'il s'agit du romancier, éditeur, scénariste de BD... dont la fiche wikipedia le concernant ne comprend comme seul lien avec les Humanoïdes associés qu'une BD parue dans Métal hurlant. On y mentionne aussi un essai titré Jules Verne, images d'un mythe paru en 1978. - Bon, t'as fini avec tes cuistreries? Quelle est la part respective de Laurie et de Verne? - J'en sais rien. - Place à l'histoire, alors.

Un bébé trouvé dans une bouée, confié à la mer pendant une tempête, en Scandinavie? Bon sang mais c'est bien sûr, il doit s'agir de... Thorghal Aegirsson, dans la série BD du même prénom (créée par Van Hamme & Rosinski)? Ben, non. 

Dans le roman L'épave du Cynthia, parfois longuet (265 pages dans la présente édition, mais lu jadis en édition jeunesse, peut-être abrégée?) et d'autres fois expéditif, il est question de marins, de bateaux, mais aussi d'expédition vers l'océan arctique. Il constitue à la fois une "quête des origines" pour un enfant trouvé, un "roman d'aventures" et un "récit de voyage". Mais le récit prend son temps pour se lancer. Nous découvrons progressivement, par les yeux de ceux qui resteront des personnages secondaires jusqu'au bout, le jeune Erik, enfant recueilli en mer (bébé de 7 mois), qui vit dans le village de Noroë (près de Bergen, sur la côte occidentale de la Norvège). Elevé comme l'un de leurs enfants par de pauvres pêcheurs, c'est, quand l'histoire commence, un écolier d'une douzaine d'années. Meilleur élève de l'école locale, il a l'opportunité de poursuivre ses études jusqu'en médecine à Stockholm, tout en passant par plaisir le brevet de capitaine au long cours... et en s'efforçant de retrouver sa vraie famille. Plusieurs navires traversent le roman: la barque de pêche sans nom du père de famille, le fameux Cynthia perdu en mer à la hauteur des Îles Feroë (apprend-on), le Vega (navire de l'explorateur Nordentskiold), le Nordenskiold parti à sa recherche en suivant la même route, l'Alaska parti à sa rencontre par le passage du Nord-Ouest avec Erik comme second (au départ), le yacht l'Albatros (un navire pirate, quasiment). C'est à la recherche d'un marin signalé par le Vega qu'Erik se lance dans son périple et y affrontera mille dangers et un mystérieux ennemi. Entre autres, navigant sur carte dans des parages qu'il ne connaissait pas, le capitaine de l'Alaska, refusant d'écouter son second, ordonne une route qui flanque le navire sur un haut-fond, et se hâte de se suicider. Plusieurs heures s'écoulent ensuite, avant qu'on s'aperçoive que les cartes avaient été trafiquées par un malfaisant! Erik, qui en décembre 1878 venait d'entrer dans sa vingtième année, deviendra suffisamment célèbre au cours de ses aventures (auteur du premier périple circumpolaire) pour que sa vraie famille le recontacte: le voilà riche héritier et libre d'épouser qui lui chante. Cette fin m'a un peu fait songer au Sans famille d'Hector Malot. Le coup de théâtre final se dénoue dans les 2 dernières pages (p.148-150, prémonition...). Au final, il m'apparaît que "l'épave" ne désignait pas la carcasse d'un navire coulé ou échoué, mais bien "ce qui restait" du navire, à savoir Erik et la bouée à laquelle était accrochée son berceau.  

J'ai presque eu la larme à l'œil en voyant sur la 3e de couv' de ce livre pourtant plus jeune que moi le "triangle" orange (abondant en consignes: "Rendez vite vos livres : d'autres lecteurs les attendent... [etc.]") qui indiquait que ce livre provenait bien d'un fonds datant d'un système de prêt que les moins de trente ans ne peuvent pas connaitre... (destiné à accueillir la carte du livre, sur laquelle étaient inscrits les numéros des emprunteurs successifs et tamponnées les dates de retour). L'ouvrage est désormais tamponné "Réserve centrale", alors que son tampon précédent [Bibliothèque-discothèque (sic!) Plaisance (75014)] est rayé d'une croix. 

 

Ce petit livre, titré L'expédition de La Pérouse sous la signature de Jules Verne, a été publié en 2020 aux éditions Magellan et Cie, en Points Aventures N°P5493 (122 pages), dans une sous-collection "Un esprit de liberté" dirigée par Fabrice Franceschi (j'aurai sans toute l'occasion de reparler de lui dans un prochain billet). Le livre ne contient que le texte, sans autres "mises en perspective". Je ne peux que supposer qu'il doit être extrait d'un ouvrage du vulgarisation auquel Jules Verne avait travaillé à la demande d'Hetzel (attention, je vais encore faire mon cuistre!): Découverte de la terre, Histoire générale des grands voyages et des grands voyageurs (en collaboration avec Gabriel Marcel), trois tomes (en 2 volumes chacun) dont le tome 2, publié en 1879, avait pour titre Les grands navigateurs du XVIIIe siècle. La Pérouse y figure au 1er chapitre de la deuxième partie ("Les navigateurs français"). Cf. Wikipedia (consulté le 30/09/2024) pour en savoir plus. Mais, c'est vrai, je n'ai pas cherché à me reporter à l'édition "complète" pour confronter les textes (tout ça est depuis belle lurette dans le domaine public). En tout cas, Jules Vernes avait déjà parlé de La Pérouse dans 20 000 lieues sous les Mers. Dans ce roman, il évoquait le lieu de naufrage du troisième navire construit à Vanikoro par les survivants de l'expédition après la perte de l'Astrolabe et de la Boussole. Il imaginait que c'était aux Îles Salomon, "sur la côte occidentale de l’île principale du groupe, entre les caps Déception et Satisfaction", par une perte corps et biens, que s'était achevée cette histoire. Dans son livre de vulgarisation, plus sérieux, il ne donne que les faits. La relation proprement dite de l'expédition de La Pérouse s'arrête p.80, avec un dernier courrier écrit à Botany Bay, le 7 février 1788. Les 42 pages finales font le point sur les recherches menées pour retrouver sa trace. Le texte (de Jules Verne et/ou de son collaborateur, si mon hypothèse est bonne) n'est pas particulièrement tendre avec Bruny d'Encastrevaux, qui commandait l'expédition de secours partie de Brest en septembre 1791 avec deux navires, la Recherche et l'Espérance, et des vivres pour 18 mois. Il semble au moins trouver que d'Encastreveaux (qui n'est pas revenu vivant de son expédition) a pu manquer de zèle pour explorer toutes les îles croisées (il n'a pas abordé Vanikoro, par exemple) et pour interroger avec suffisamment de persuasion pour qu'ils répondent les indigènes rencontrés (notamment dans l'archipel des Amis ou en Nouvelle-Calédonie). Cette "expédition de secours", si elle n'a pas rempli sa mission initiale, a du moins rapporté "une ample moisson de faits, d'observations, de découvertes dans les sciences naturelles (...)".

 

En Magellanie, c'est le titre et la version d'origine d'un manuscrit de Jules Verne écrit en 1897-1898 (oui, il avait de l'avance, alors qu'il paraissait un "Verne" par an!), qui a été retouché par Michel Verne et est devenu Les naufragés du Jonathan lors de sa première publication (chez Hetzel) en 1909 sous le nom de Jules Verne (mort en 1905 en laissant au moins 6 romans inédits). Le manuscrit original a été publié par la Société Jules Verne en 1987 (tirage limité), avant une édition à diffusion plus large. Mon exemplaire? Folio N°3201, 1ère éd. 1999, impression. mars 2005, 347 pages. Son contenu? On nous présente un homme d'apparence européenne âgé d'entre 40 à 50 ans, le Kaw-Djer (l'ami, le bienfaiteur, en langage indigène des Pêcherais). Il est arrivée vers 1872 en Terre-de-feu, et s'est établi sur l'île Neuve [Nueva] où il vit avec le pilote d'origine indienne Karroly et son fils sans se reconnaître ni dieu ni maître. Leur chaloupe à deux mâts porte le nom de Wel-Kiej. En 1881, suite à une définition de frontière entre Argentine et Chili (mission de l'aviso Gracias de Dios), l'île devient officiellement chilienne! C'est le coup de canon d'un navire en détresse qui retient le Kaw-Djer au bord du Cap Horn duquel il allait se précipiter. Le quatre-mâts à coque de fer Jonathan (de San Francisco) est en perdition dans la tempête, ses officiers morts ou hors d'état de commander. Il transportait 900 émigrants en route pour s'établir en Afrique du Sud sur un territoire portugais [Angola?]. Les survivants débarquent sur la presqu'île Hardy de l'île Coste. Nous sommes vers la page 200. La colonie sera fondée en terre magellanique, sous la direction d'un M. Rhodes (non, le roman ne le prénomme pas Cecil, mais Harry!). Il ne reste plus qu'à construire un phare, ce sera fait en 1890 (dix ans plus tard), et la colonie achète alors le Yacana, un steamer de 300 tonnes... Je vous passe les péripéties, les questions philosophiques sur la gouvernance d'un groupe humain, le rapport au pouvoir... Apparemment, l'utopie de Jules Verne était plus généreuse que la version donnée par son fils en ajoutant vingt chapitres et en en supprimant cinq du texte d'origine, selon ce que je comprends de la préface signée Olivier Dumas (président de la Société Jules Verne). Je rappelle que je n'ai pas lu Les naufragés du Jonathan

J'ai même découvert par hasard qu'Ariane Mnouchkine avait tiré en 2010 de l'histoire un spectacle, Les naufragés du fol espoir, plus proche de la version de Jules Verne que du texte remanié par Michel Verne.

 

Très rapidement, un petit éclairage sur Le phare du bout du monde. J'ai déjà évoqué ce titre, du moins sa version en Livre de Poche (mon exemplaire, imprimé semble-t-il en 1968, m'avait été offert en 1980), en signalant ici que j'en possède désormais une autre version. Mon Folio N°4036 (266 pages), 1ère édition 1999, dépôt légal avril 2004 (même préfacier que En magellanie), donne cette fois à lire la version d'origine, avant les retouches apportées par Michel Verne. Comme c'était le premier texte sur lequel il intervenait, celles-ci avaient été nettement plus discrètes. Le manuscrit a été rédigé par Jules Verne en 1901, et le roman est paru seulement neuf mois après la mort de Jules Verne. Apparemment, Michel Verne avait mal relu les épreuves, d'où quelques coquilles. Il s'est permis quelques corrections de style. Il a aussi rajouté un "raid" de l'un des héros, le gardien de phare Vasquez pour faire sauter le gouvernail de la goélette pirate Carcante (ex-Maule) et la retarder jusqu'à l'arrivée de l'aviso Santa Fe. Mais les différences sont relativement faibles. Prenons le début du roman...

 

Version Hetzel (1905) / Livre de Poche [Michel Verne] Version originelle (1999) / Folio [Jules Verne]
Le soleil allait disparaître derrière les collines qui limitaient la vue à l’ouest. Le temps était beau. A l’opposé, au-dessus de la mer qui se confondait avec le ciel dans le nord-est, quelques petits nuages réfléchissaient les derniers rayons, qui ne tarderaient pas à s’éteindre dans les ombres du crépuscule, d’assez longue durée sous cette haute latitude du cinquante-cinquième degré de l’hémisphère austral.  Le soleil allait disparaître derrière la ligne de ciel et de mer qui limitait l’horizon à quatre ou cinq lieues dans l’ouest. Le temps était beau. A l’opposé, quelques petits nuages absorbaient çà et là les derniers rayons, qui ne tarderaient pas à s’éteindre dans les ombres du crépuscule, d’assez longue durée sous cette haute latitude du cinquante-cinquième degré de l’hémisphère austral.

 

L'argument reste exactement le même: la bande du pirate Kongre, cachée dans une grotte pendant que se construisait un phare sur l'île des Etats, a massacré les deux collègues de Vasquez. Celui-ci a pu s'échapper et a recueilli Davis, le second du trois-mâts américain Century, naufragé parce que le phare était éteint. Kongre, seul survivant de sa bande, se suicidera. 

 

Comme mes trois recensions précédentes, j'inscris ce billet pour le challenge Book trip en mer chez Fanja, tout en participant également au challenge 2024 sera classique aussi organisé par Nathalie.

Je crois que, cette fois, je vais en rester là pour mon book trip en mer vernien. Je n'ai pas fait de recherche systématique pour savoir si Jules Verne était ou avait été beaucoup chroniqué sur des blogs littéraires. Si les moteurs de recherche ne donnent plus de renseignements sur les blogs anciens, j'aurais pu du moins chercher dans les blogs "en lien" (colonne de droite) si "Verne" renvoie quelque chose... Je ne l'ai pas fait. En tout cas, pour que je fasse sur l'un ou l'autre roman des billets plus complets que les quelques lignes que j'ai pu consacrer à quelque 35 titres, il faudrait que ce soit dans le cadre d'un challenge (au long cours) spécifiquement dédié à Jules Verne. Les romans de Jules Verne s'inscrivaient le plus souvent dans un cadre très contemporain pour lui et ses lecteurs, même si chaque décennie qui passe nous en éloigne davantage. On pourra commémorer l'an prochain, en 2025, le 120e anniversaire de sa mort. Je songe de plus en plus à une "activité Jules Verne" (sur un trimestre, ou plus longuement?), mais j'aimerais trouver un ou plusieurs blogs pour co-organiser, en prenant en compte la richesse des possibilités (les romans, mais aussi leurs adaptations sous toutes formes (cinéma, série TV, radio, théâtre, bande dessinée, manga...), et ce qui peut être plus périphérique: biographies, expositions, suites éventuelles...). Des suggestions? Des volontaires? 

28 septembre 2024

Quatre Maigret - Georges Simenon

En attendant de retourner au cinéma (les dernières sorties ne m'ont pas trop tentée), je lis pas mal et j'ai donc lu, coup sur coup, trois romans et une nouvelle de Georges Simenon. J'ai été attirée par les couvertures. Et puis, j'aime la grosseur de police de caractère qui convient très bien pour mes yeux.

Je commence par La pipe de Maigret (Livre de poche, 94 pages) une nouvelle écrite à Paris, rue de Turenne, en 1945. C'est le mois de juillet à 7h30 du soir, il fait chaud et Maigret s'apprête à rentrer chez lui. Il cherche sa belle pipe en bruyère offerte dix ans plus tôt par sa femme. Il ne la trouve pas. Il se remémore toutes les personnes qui sont passées par son bureau ce jour là et il en arrive à penser que c'est un jeune homme qui a pris la pipe de Maigret. Il accompagnait sa mère. Cette dernière, veuve depuis environ cinq ans, est venue pour se plaindre que quelqu'un est venu chez elle en son absence. En dix pages, tout est décrit sans un mot de trop. Les 80 pages qui suivent se lisent avec intérêt. Maigret est toujours bien épaulé par ses adjoints dont Lucas. 

Je continue avec Le pendu de Saint-Pholien (Livre de poche, 186 pages), un roman écrit dans deux lieux différents: à bord d'un bateau (péniche?) en Seine-et-Marne et près de Concarneau dans le Finistère, l'été 1930 et l'hiver 1930-1931. L'histoire se passe entre la Hollande, la Belgique et l'Allemagne. L'histoire débute dans une petite gare au nord de la Hollande. Six voyageurs attendent un train. Un homme encore jeune, très agité, a une valise. Un autre homme (Maigret, grand, lourd et large d'épaule) a une valise presque identique qu'il va intervertir avec celle du jeune homme. Celui-ci, affolé, quand il se rendra compte que ce n'est plus sa valise qu'il tient à main, se suicide. Dans la valise du mort, Maigret trouve seulement des vêtements avec du sang et ce ne sont pas ceux du mort. Il remonte le fil de cette histoire où d'autres personnes sont impliquées dont un homme qui s'est pendu plusieurs années plus tôt à l'église de Saint-Pholien en Belgique. J'ai aimé.

Tout comme Maigret et L'homme tout seul (Livre de poche, 221 pages), un roman écrit en Suisse dans le comté de Vaud en 1971. Nous sommes en août 1965, Maigret est appelé à propos d'un meurtre qui s'est déroulé dans le quartier des Halles à Paris. Et toute l'histoire va se passer dans le XVIIIème arrondissement de Paris. Il faut attendre plus de 40 pages pour connaître l'identité du mort tué de trois balles dans un vieil immeuble voué à la démolition. Il s'agissait d'un certain Marcel Vivien qui était devenu clochard depuis quelques années. Ebéniste, il était marié (avec une femme pas commode) et père d'une fille. Du jour au lendemain, il est parti sans un mot. Il a vécu dans plusieurs hôtels et pendant un temps (6 mois), il a eu une amie. J'ai trouvé l'enquête passionnante. On suit Maigret qui ne perd pas son sang-froid et qui est bien soutenu par sa femme d'une patience d'ange. Pour mieux réfléchir, il va souvent dans une brasserie place Dauphine, pas loin du quai des Orfèvres. Un roman à lire.

Je termine avec Maigret et l'homme du banc (Livre de poche, 191 pages), un roman écrit aux Etats-Unis, dans le Connecticut, en 1952. L'homme du banc s'appelait Louis Thouret et il vient d'être retrouvé poignardé d'un coup de couteau dans le dos. L'histoire débute un 19 octobre, il commence à faire froid et Madame Maigret conseille à son mari de prendre son gros pardessus. J'adore cette phrase "A huit heures et demie (du matin), on gardait encore de la lumière dans les appartements, et le pardessus de Maigret sentait la naphtaline" (p6). Une fois de plus, l'histoire se passe rive droite de la Seine, dans le IIIème arrondissement. Le corps de Louis Thouret, un magasinier, est mort dans une impasse. Il portait des souliers jaunes. Sa femme qui méprisait son mari est étonnée car Louis Thouret portait habituellement des souliers noirs pour aller travailler dans une petite entreprise. La fille de Thouret n'a pas plus de considération pour son père. Maigret découvre que Louis Thouret ne travaillait plus dans l'entreprise depuis qu'elle avait fermé trois ans plus tôt du jour au lendemain. Depuis cette date, Thouret faisait comme si de rien n'était et il rapportait son salaire régulièrement à sa femme qui tenait les cordons de la bourse. Au fur et à mesure de l'enquête, on découvre la double vie que menait Thouret. Une fois de plus, je suis admirative du style de Simenon qui va à l'essentiel. 

27 septembre 2024

Parti de Liverpool... / Hans le marin / Le sel de la mer - Edouard Peisson

C’est affreux ! Je (ta d loi du cine, « squatter » chez dasola) perds la mémoire. Sur les trois romans d’Edouard Peisson (1896-1963) que je chronique aujourd’hui, j’étais persuadé qu’il y en avait un que je ne connaissais pas. En fait, ils étaient tous trois dans ma pochothèque depuis quatre décennies. 

Hans le marin, Le livre de Poche N°257, 2e trim. 1964 (© Bernard Grasset, 1929), 180 pages
Parti de Liverpool..., Le livre de Poche N°855, 4e trim.1966 (© Bernard Grasset, 1932), 241 pages
Le sel de la mer, Le livre de Poche N°518-519, 3e trim. 1965 (© Bernard Grasset 1953, 1954, 1955), 499 pages

 

Je commence par celui qui peut avoir un intérêt sociologique, mais qui est davantage un "polar" qu'un "livre de métier". Dans Hans le marin, nous n’avons guère de navigation, plutôt une mésaventure portuaire. Hans Muller est un jeune (25 ans) marin américain, né à Hambourg, et qui a manifestement fait la guerre (le roman date de 1929). Dans quel camp ? On ne le saura pas. Ni exactement le pays où il a passé son enfance, en rêvant de bateaux. Quand l’Alabama sur lequel il navigue fait escale à Marseille, il descend à terre avec trois autres matelots, dans l’idée d’y passer la nuit (« petites femmes ? »). Il se réveille à l’hôpital, blessé d’un coup de couteau, dépouillé de ses dollars : il s’est fait « entôler » par une certaine Marcelle, qui l’a soûlé puis amené dans un guet-apens. Guéri, mais sans argent ni papiers, il va devoir apprendre à survivre en marge de la société. Dans cette Marseille de l’entre-deux guerre, avant même la grande crise économique, la vie est dure aux miséreux. À l’asile de nuit, il rencontre un « gueux » (La Bête), et se fait chiffonnier pour survivre, puis « guide » pour marins débarqués ou bourgeois souhaitant s’encanailler. Quand l’Alabama repasse à Marseille, six mois plus tard, il a l’occasion de revenir à bord (certains marins le connaissent). Mais la vengeance est un plat qui se mange froid… 
J’ai relu en deux heures ce roman nerveux, tout en phrases courtes et en amères notations. Mon exemplaire est aussi vieux que moi. Il m’avait été offert en vue de mes 17 ans. 
Aujourd'hui, une recherche sur internet pour savoir si des blogs ont pu en parler ramène l'exaspérant "Certains résultats peuvent avoir été supprimés conformément à la loi européenne sur la protection des données."

 

Partis de Liverpool…, je l’ai lu en plusieurs éditions différentes (sans jamais avoir l’occasion de les confronter l’une à l’autre). Chez mes grands-parents, d’abord (une édition plus vieille que moi, mais intégrale, je crois). En vieille « bibliothèque verte », à l’époque où j’en complétais la collection chaque année dans notre « maison de campagne » familiale ». Et mon propre exemplaire en Poche, acquis en …1979.
C’est de ce livre que je me souvenais le mieux. 
Si les jours de semaine qui sont indiqués ont une signification (le livre commence lundi 11 mai 19…), nous sommes en 1903, 1908, 1914, 1925 ou peut-être même 1932 (année de parution).

Pour son voyage inaugural vers New York, l'Etoile-des-Mers a ordre de battre, "coûte que coûte", le record de la traversée (ce qui va l'amener à foncer à 28 noeuds dans la brume). Les conditions de cette "course" sont celles du début du XXe siècle : pas de radar, encore moins de GPS, mais une vitesse incommensurable par rapport à la marine à voile. Je me rappelle avoir vu récemment ce qui est maintenant un vieux film, Les marins de l’Orgueilleux (Henry Hathaway, 1949) : au XIXe siècle, un baleinier à voile entre en collision avec un iceberg dans la brume… et y survit. Ici, quand le roman d'Edouard Peisson est publié, nous sommes 20 ans après l'histoire tragique du Titanic

Toute l'action se joue en deux jours de début de traversée de l’Atlantique nord. Le récit m’a fait songer à l’odyssée du croiseur qui escorte un convoi vers l’URSS, durant la Seconde guerre mondiale, dans HMS Ulysses d’Alistair McLean. Mais dans Parti de Liverpool... nous sommes en temps de paix, il n’y a ni sous-marins, ni avions, ni navires de guerre ennemis. Nous voyons travailler, agir, discuter, douter, les officiers (pont, machines), et leurs hommes plus anonymes. Les couvertures de certaines éditions insistaient sur le véritable « binôme » constitué par le Capitaine Davis et son Second, Haynes. Le choc (relativement léger) réveille l'un des officiers vers 11 h du soir (p.167). La catastrophe s'annonce inévitable p.197. Tous les capitaines de la « ligne transatlantique » se connaissent (de quelque nationalité qu'ils soient), et le Berlin accourra au secours de l’Etoile-des-Mers. Mais ni le capitaine, ni le second, ni l'officier mécanicien du malheureux paquebot ne survivront pour en révéler les malfaçons. 
ClaudiaLucia en a parlé récemment.

 

En toute bonne foi, je croyais ne jamais avoir lu Le sel de la mer. Or, j’en avais un exemplaire dans ma pochothèque, et il est annoté « acheté en 1981 pour le voyage en Roumanie ». L’y ai-je finalement emmené lors de ces deux semaines de vacances estivales en 1981 avec mes parents, pour la dernière fois (j’avais 17 ans), ou pas ? Je conserve le souvenir d’avoir dû me séparer d’un livre de poche sur le Débarquement de Normandie (Georges Blond ? Cornelius Ryan ?), au profit d’un enseignant roumain, collègue de mes parents, intéressé par mon livre parce qu’à l’époque, leur « histoire officielle » de la seconde guerre mondiale était toute à la gloire de l’Armée rouge et ignorait superbement le « front de l’Ouest ».

 

Ce tome unique ("volume double") en Poche intitulé Le sel de la mer contient en fait une trilogie, formant un récit choral par la diversité des points de vue alors que toute l'histoire tourne autour du même événement envisagé sous plusieurs facettes: le capitaine Godde a dû prendre "à l'improviste" le commandement d'un paquebot, le Canope, que sa compagnie venait d'acquérir en vue de traversées transatlantiques alors qu'il était déjà passé de mains en mains chez plusieurs armateurs, et alors que lui-même en était depuis peu le "second" jusqu'à l'AVC qui frappe le commandant en titre. Le bateau finira au fond de l'eau. Toute la question du livre peut se résumer à: "à qui la faute?".
Je dirais que ce sont les faits qui nous sont exposés dans Capitaine de la route de New York (avec, très important, le point de vue du capitaine Vox (!), commandant du Virginia venu au secours du Canope, qui connaît Godde de longue date). 

Dans la seconde partie, Le sel de la mer (qui, dans l'"édition revue par l'auteur", a donné son titre à la trilogie), nous assistons à l'enquête après le naufrage. Les enquêteurs s'efforcent de tout reconstituer: les conditions, l'enchaînement des faits (le Canope s'est dérouté en affrontant des conditions de mer pénibles pour venir au secours d'un cargo italien, le Marco-Polo, qui s'est perdu corps et biens), la chaîne des décisions prises et jusqu'aux pensées du moment, face au capitaine Godde, seul responsable à bord, qui a survécu. Le capitaine décide et tous doivent obéir à ses ordres, mais lui assume aussi la responsabilité de ceux-ci, notamment en cas de "fortune de mer"... Les échanges "entre professionnels" sont passionnants. On sent que l'auteur connaissait son sujet, il nous fait baigner dans un langage codifié, économe de mots et où chacun compte. Reconstituer ce qui s'est passé, minute par minute, doit permettre de comprendre comment ce qui s'est passé (qui est connu quand commence l'enquête) est arrivé, et si cela aurait pu être évité. Autrement dit, y a-t-il eu, ou non une ou plusieurs décision(s) erronée(s)?

Enfin, dans Dieu te juge!, 6 ans et une guerre après les faits, nous avons la fin de l'histoire (et de Godde), mais aussi l’avis du journaliste qui avait raconté l'histoire et celui de plusieurs autres capitaines, dont Vox. Dans ce livre, on sent particulièrement la solitude, l’isolement, d’un commandant de navire, seul « responsable » à bord, devant assumer ses décisions sans avoir eu à les expliquer à qui que ce soit (aussi longtemps que tout a bien été), évitant de partager ses doutes (il lui est interdit de faire preuve de la moindre faiblesse…). On constate aussi que le "commandement" se base sur un mélange subtil d'expérience, d'intuition, d'instinct, de chance, et n'est pas forcément une « science exacte » puisqu’elle contient une telle part de subjectivité... À la fin du livre, Godde, blessé à mort, coule avec le Woërmann, le cargo à bord duquel il avait retrouvé un commandement.
Ce roman ne donne pas beaucoup de place aux femmes: leur rôles sont ceux de passagères, ou d'épouses. Celle de Godde lui est d'un soutien indéfectible. 
Le côté répétitif, « ressassé » ("ressasser les mêmes pensées, détailler les mêmes images", p.277), de ce livre m’a peut-être désarçonné quand j’étais jeune? Peut-être avais-je sauté quelques pages?
Lors de ma relecture globale des trois livres, j'ai été frappé par le fait que la typographie du volume double Le Sel de la mer étaient plus petite que ceux des deux autres livres: 34 lignes à la page, contre 29 (avec un corps de police nettement plus gros) pour Parti de Liverpool... et Hans le marin
ClaudiaLucia en a aussi parlé.

 

Deux au moins des trois couvertures sont dues à Lucien Fontanarosa (1912-1975). Je lui aurais bien attribué les trois, mais je suppose que l’association qui gère la mémoire du peintre en sait davantage que moi ! 

Edouard Peisson est né à Marseille et y a vécu une bonne partie de sa vie. Il a navigué dans la marine marchande de 1914 à 1924 (radio-télégraphiste, puis capitaine).

Je pense que j’ai dû lire aussi un autre titre écrit par lui, L’aigle de mer. Mais je ne l’ai pas sous la main. Et… aucun souvenir du contenu. En à peine quatre décennies ! C’est comme si j’avais tout oublié de ce que je savais à l’époque de mon bachot (mais peut-être ai-je tout oublié de ce que je savais à l’époque de mon bachot !). C’est grave, docteur ?

J'ai eu plaisir à relire ces livres, et je finirai sans doute par en lire bien d'autres si je tombe dessus dans des bacs d'occasion. Mais cela ne me donne pas envie, pour ce qui me concerne, de devenir marin et de naviguer. Pourquoi serais-je assez bête pour m’exposer au froid, à la fatigue, au danger, à l'obligation d'anticiper en permanence tous les aléas qui peuvent survenir, pour vivre une vie emplie de sensations et d’événements, ...quand je puis la vivre « par procuration », en lisant des livres ou en regardant des films ? 

 

Je pense qu'au moins deux de ces trois livres (Parti de Liverpool... et Le sel de la mer) peuvent s'inscrire à deux challenges: "Book Trip en mer" chez Fanja, "Monde ouvrier et monde du travail" chez Ingannmic, et les trois titres sont admissibles pour le troisième, "2024 sera classique aussi" organisé par Nathalie

26 septembre 2024

Les gens de la colline - Chris Offutt

Ayant lu les billets d'Ingannmic, de Belette2911 et Encore du Noir, j'ai eu envie de découvrir l'écrivain Chris Offutt. Le roman Les gens des collines (Edition Gallmeister, 232 pages) m'a fait penser à ceux qu'écrit S. A. Cosby. Sauf que dans Les gens des collines, cela se passe au Kentucky. Une fois de plus, on a la description des gens de peu, l'Amérique dite profonde. Dans le comté de Morehead, une femme shérif, Linda, élue depuis peu, demande de l'aide à son frère Mick Hardin, vétéran de guerre et enquêteur dans l'armée. Mick est venu en permission pour revoir sa femme qui est enceinte (mais pas de lui). Il accepte d'aider sa soeur pour une enquête sur un homicide. Une femme de 43 ans est retrouvée étranglée dans un bois à côté d'une plantation de ginseng. Mick connait la région et il a un bon contact avec les gens (mieux que Linda). L'enquête est menée vite et bien. Chris Offutt s'attache à nous faire des descriptions de la faune et de la flore. On sent qu'il connait cette région d'Amérique et qu'il y est attaché. J'ai lu ce roman en moins d'une journée. On ne lâche plus dès qu'on le commence. Je conseille tout comme Aifelle.

 

24 septembre 2024

Bilan du challenge Les Epais de l'été 2024

Les participant(e)s au challenge Les Epais de l'été 2024 (2e édition) avaient jusqu'à hier lundi 23 septembre 2024 (à minuit...) pour déclarer leurs participations. Il est donc temps que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) fasse le bilan de ces trois mois de challenge estival sur de gros bouquins que j'avais organisé sur ce blog. 

== Je commence par les questions qui tuent (oui, je suis méchant!): participant(e) ou non au challenge, vous qui lisez ce billet de bilan, combien de ceux des participant(e)s avez-vous lu?
Sous combien avez-vous signalé votre lecture? Vous en trouverez la liste ici.
... Bon, c'est dit, passons à autre chose. ==

 

Par exemple, pour rappel ou comparaison, je signale que vous pouvez toujours aller voir le bilan 2023

 

Mais pour 2024, voici le Podium que vous attendez tous!

Sur la plus haute marche, on trouve pour cette édition Belette2911 (qui était deuxième l'an dernier): elle a lu cette année 16 livres "épais", soit un de plus qu'en 2023. Suivent Ingannmic avec 9 livres, et Je lis, je blogue (ex-Doudoumatous) avec 6 livres. Ces trois participations "olympiques" représentent déjà 41% du total de nos Epais. 

Ensuite, toutes et tous celleux (?) qui ont participé (c'est l'essentiel!): Dasola a réussi à lire et chroniquer 4 titres. Nous sommes trois (ou quatre) à en avoir chroniqué 3: moi-même (Ta d loi du cine), Fanja, Sandrion... et Aliénor (ex-Jigs), si l'on compte d'une certaine manière. Quatre (ou cinq) ont publié des billets sur 2 livres: Keisha, Dame Ida (invitée chez Belette2911), Enna, Ju lit les mots (participation validé in extremis)... et Aliénor (ex-Jigs), si l'on compte d'une autre manière. Enfin, 20 participant(e)s ont cette année chroniqué un unique "Epais" compté pour au moins 650 pages (c'est déjà bien!). Voir le détail ici (bis). 5 inscriptions (totalisant 8 titres envisagés) ne se sont pas concrétisées dans le délai imparti. 

 

Parmi les 75 participations, j'ai répertorié 65 oeuvres différentes, rédigées par 63 auteurs ou co-auteurs (un seul titre a deux auteurs; mais faut-il compter "un" ou "deux" pour J. K. Rowling et Robert Galbraith?). La liste en est éclectique: la fantasy est largement présente, mais on trouve aussi du polar, de la littérature étrangère... Les auteurs contemporains semblaient cette année mieux représentés que la littérature "classique". 

 

En ce qui concerne les livres représentés, le gros succès de cette édition 2024, c'est Les raisins de la colère de Steinbeck, grâce notamment à une lecture commune dans le cadre de l'activité "Monde ouvrier, mondes du travail" chez Ingannmic: 5 chroniques (mais aucun autre gros volume steinbeckien n'a trouvé lecteur)! Stephen King a inspiré quatre chroniques, dont trois pour Conte de fées (lu en français ou en anglais). Philippe Kerr a tenté trois blogueuses avec deux volumes différents (dont La trilogie berlinoise x 2). Deux blogueuses se sont plongées dans Le silence et la colère de Pierre Lemaitre. Vine Street, de Dominic Nolan, a été goûté par deux blogueuses. Ken Follett a inspiré de la curiosité pour deux des tomes de ses Piliers de la terre. Le reste, ce sont des oeuvres à l'unité, ou alors une même blogueuse qui a lu deux tomes d'une même saga ou d'une même oeuvre. 

 

Habile transition pour évoquer quelques cas concrets, divers et variés, qui peuvent induire une certaine subjectivité dans mes comptages: une oeuvre en un seul volume, objet d'un seul billet, mais dont il existe une édition en deux volumes, chacun susceptible d'être lui-même compté comme "épais"... Des oeuvres en plusieurs tomes, chacun bénéficiant d'un billet, tandis que l'oeuvre en question est habituellement considérée comme "unique" (pas de titre spécifique mentionné ou mentionnable pour chaque tome). Certains blogueurs qui lisent en traduction, d'autres dans la langue d'origine... Je me suis surtout interrogé quand un même blog analysait la même oeuvre en plusieurs billets successifs, et puis j'ai accepté exceptionnellement, à partir du moment où un même lien amenait à tous les billets. 

Je précise que j'ai (toujours) fait le choix de privilégier le nombre de pages de l'édition en comportant le plus (même si ce n'est pas celle lue, ou lue par tous les participants). Les 75 contributions comptent donc (pour) plus de 62 000 pages au total!

 

Mes règles sont relativement souples: il doit exister une édition "papier" comportant le nombre de pages voulu, mais ce n'est pas nécessairement celle qui a été lue. Les livres en langue étrangère comptent aussi (même si ce n'est pas la langue dans laquelle a été rédigée l'oeuvre originale). Autrement dit, tout livre dont il existe une édition "papier" en langue étrangère avec le nombre de page voulu est éligible (même si ce n'est pas l'édition qui a été lue). Ces règles sont tellement souples, disais-je, que leur souplesse a dû donner l'impression de tricher à certains qui du coup ne se sont pas inscrit(e)s à ce challenge "Les épais de l'été 2024".

 

C'est l'occasion de rappeler que Sibylline (blog La petite liste) organisait un challenge parallèle, Les Pavés de l'été 2024 (elle avait abaissé son seuil à 500 pages cette année, contre 550 en 2023). La double participation était bien sûr possible. 

Ceux qui se sont inscrits à un des challenges sans vouloir s'inscrire à l'autre ont, dans l'écrasante majorité des cas, fait savoir qu'ils le faisaient en toute connaissance de cause, soit au motif de ne pas s'astreindre à un challenge de plus (perçu négativement comme une "contrainte"?), soit parce que ma manière de "compter" les pages ne leur convenait pas (édition qui peut ne pas être celle réellement lue). À noter, la claire logique de Fanja, qui a participé chez Sibylline seulement pour ses livres comptant entre 600 et 650 pages, et chez moi seulement pour ses livres comptant au moins 650 pages. 

Au final, j'ai eu un peu plus d'inscriptions (37 contre 34) et même de participant(e)s (4 de plus: 32 contre 28), mais nettement moins de livres chroniqués au total qu'elle (75 billets/livres contre 129). Quatre de ses participant(e)s ne sont pas venus chez moi. Trois l'auraient pu (pour un total de 8 livres et 6367 pages). En tout cas, celles et ceux ayant participé, en 2024, à l'un et/ou l'autre challenge sur les gros bouquins sont donc 36. 

 

En 2025, s'il y a comme je l'espère une nouvelle édition des challenges pour de gros bouquins estivaux, j'annonce d'ores et déjà que je monterai la barre à 700 pages minimum. Seuls une quinzaine des 75 billets pris en compte en 2024 n'auraient donc pas été éligibles en 2025 (seuls 5 de mes 32 participants 2024 n'auraient pas participé). 

23 septembre 2024

Le procès du chien - Laetitia Dosch / Les Barbares - Julie Delpy

Le point commun entre ces deux films est qu'ils ont été réalisés et interprétés par des femmes.

Le procès du chien se passe en Suisse. Avril (Laetitia Dosch) est une avocate qui perd régulièrement ses procès. Mais quand Dariuch (François Damiens) vient la voir pour défendre son chien Cosmos qui a mordu plusieurs femmes et qui risque l'euthanasie, Avril sent qu'elle peut enfin arriver à quelque chose. Elle arrive à ce qu'un procès se tienne. Pour défendre Cosmos (Kodi, un chien très bien dressé), un comportementaliste et quelques personnalités de différentes religions ainsi que des philosophes sont appelés à la barre. Car davantage que le procès d'un chien, c'est une discussion sur la place des chiens dans notre société. A sa charge, Cosmos (qui est un mâle non castré) est accusé de ne s'en prendre qu'aux femmes. La dernière a été affreusement défigurée. C'est une comédie douce-amère dont je vous laisse découvrir la fin. Kodi a reçu une Palme dog bien méritée au dernier festival de Cannes. Lire le billet d'Henri Golant

Je passe au film Les Barbares de Julie Delpy, qui se passe dans la petite ville de Paimpont en forêt de Brocéliande en Bretagne. Le maire, qui veut que tout soit filmé, annonce qu'une famille de six réfugiés Ukrainiens doit arriver. Tout est prévu. Mais au denier moment, vu qu'il n'y a plus assez d'Ukrainiens "en stock", c'est une famille de six Syriens qui arrive. Ce changement d'origine des réfugiés ne plait pas à tout le monde, dont le plombier Hervé Riou (Laurent Lafitte, excellent en beauf "bas de plafond"). Les réfugiés ont un peu de mal à s'acclimater et à se faire accepter. L'institutrice (Julie Delpy) qui est à l'origine du projet se débat avec l'administration (les Syriens n'étaient pas prévus). J'ai trouvé l'ensemble très sympathique avec quelques scènes savoureuses comme la scène de ménage entre Sandrine Kiberlain et Mathieu Demy: elle le bat avec une grosse andouillette. Un film qui fait passer un bon moment. Lire les billets de Pascale et Henri Golant (dans le même billet une critique favorable et une défavorable). À vous de vous faire une opinion. 

21 septembre 2024

Les Rougon-Macquart (Pléiade, tome I) - Emile Zola

J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) jeté un oeil sur une édition "Pléiade" du cycle romanesque Les Rougon-Macquart d'Emile Zola, qui appartient par héritage à dasola (5 volumes), notamment sur la préface et les deux versions d'arbre généalogique (1878 et 1893). J'avoue que ma (re)lecture en cours des 20 titres s'effectue sur mes propres éditions "poche" acquises dans les années 1979-1980 (second cycle du secondaire puis classes prépas) (2)

Emile Zola, Les Rougon-Macquart, tome I, La Pléiade (copyright 1960, DL 1er trim. 1980): La fortune des Rougon / La curée / Le ventre de Paris / La conquête de Plassans / La faute de l'abbé Mouret (1720 pages)

Comme dit plus haut, j'ai opté pour une lecture "mixte": à la maison (chez dasola), j'ai découvert l'introduction et les commentaires d'Armand Lanoux dans le volume de la Pléiade; mais pour mes trajets quotidiens en métro, j'ai relu un par un mes vieux tomes en "poche". Et je dois signaler que c'est "un copain de trente ans" qui m'a donné l'idée (par l'exemple) de me plonger dans ces relectures: sachant que j'en possédais des éditions "poche", il me les a empruntées par lots de deux ou trois... mais je pense que je ne tarderai plus guère à le rattraper là où il a fait une pause! Pour ma part, cela m'a fait plaisir de me replonger dans ma vieille collection. C'est vrai que, si je me l'étais constituée moi-même au lieu de me la faire offrir tome par tome, j'aurais sans doute pris les 20 dans la même édition, la plus ancienne des deux représentées ici, celle avec les bandes horizontales de couleurs... 

 

Pour nous qui connaissons les suites de l'histoire, Zola a clairement bien choisi son moment pour rédiger et faire publier ce premier roman des Rougon-Macquart, La fortune des Rougon. Quand il contacte un éditeur, sa série de romans sur une famille ne prévoit encore que dix titres, qui passeront vite à douze pour finir à vingt, plus de deux décennies plus tard. Pour le moment (1870), c'est dans le journal Le siècle que commence la parution en feuilleton de cet ouvrage, avant que la publication soit interrompue, fin juillet, par la guerre franco-prussienne (déclarée par la France de Napoléon III au roi de Prusse Guillaume Ier). Le roman avait sans doute été rédigé principalement dans le second semestre 1869 (entre juin et décembre). Il pose les bases de tout le reste du cycle. 
Ce premier volume, construit en "analepses" (1) (comme je l'ai découvert chez DonaSwann), nous présente la famille "recomposée" par la matriarche Adélaïde Fouque (qui survivra, centenaire, jusqu'au vingtième et dernier volume!): elle représente la première génération d'une famille dont les plus jeunes enfants qui seront évoqués constitueront jusqu'à la cinquième génération. Orpheline sauvageonne, Adélaïde a épousé son garçon jardinier, un certain Rougon. Après la mort de celui-ci, elle se mettra en ménage avec un certain Macquart, contrebandier. Analepse oblige (1), cela ne nous est dévoilé qu'au fil des pages. Quand le roman commence, nous sommes aux premiers jours de décembre 1851. Les Républicains des environs de la ville provençale (fictive) de Plassans se mobilisent contre le "coup d'Etat" de Louis-Napoléon Bonaparte à Paris. Parmi eux, le jeune Sylvère (arrière-petit-fils d'Adélaïde, qui vit chez elle et s'en occupe), dont nous découvrons les amours juvéniles avec la jeune Miette (13 ans), qui va devenir porte-drapeau pour la colonne républicaine. Mais, après avoir traversé Plassans où elle a terrorisé les bourgeois et amené un des fils d'Adélaïde (côté Macquart) à s'installer à l'hôtel de Ville, la colonne républicaine rencontrera les soldats du parti de l'Ordre... L'agitation révolutionnaire aura surtout servi au plus opportuniste des deux frères (le légitime, celui qui porte le nom de Rougon, Pierre) à apparaître comme le "sauveur" de la ville de Plassans (du moins, c'est ce qu'on pourra lire dans les journaux et qui fera foi - pas de réseaux sociaux "instantanés", à l'époque!), avec la complicité mi-forcée mi-intéressée de son demi-frère Antoine Macquart, et au prix de quelques morts... Peu cher payé pour l'ascension sociale d'une famille (les Rougon, qui ont végété sous la Restauration puis sous la Monarchie de juillet, y apparaissent comme les plus assoiffés de pouvoir, de prestige et de réussite sociale) alors que s'annonce le Second Empire (qui sera proclamé un an plus tard). D'autres analepses (1) nous avaient présenté les différents rameaux de la famille (troisième génération). Il semble que Zola ait rajouté quelques membres de la famille en cours de route et au fil des rééditions. 
Mon exemplaire, imprimé au 1er trim. 1979, comporte 435 pages. 

 

Le deuxième tome de la série, La curée, nous présente un autre membre de la famille Rougon, l'un des fils de Pierre et de son épouse Félicité, qui a préféré changer de patronyme pour "faire des affaires" et ne pas interférer avec la position de son frère Eugène, bien introduit dans les milieux bonapartistes. Aristide Saccard, petit fonctionnaire, a donc "fait son beurre" des informations qu'il a vues passer (ou qu'il a su dénicher) au sujet des grands travaux hausmanniens: boulevards à tailler à travers des quartiers, des immeubles, des maisons, des bâtiments déjà existants, dont il convient d'exproprier les propriétaires... Ceux-ci fussent-il de longue date ou récents (et bien informés...)! Et si l'on connaît du beau monde dans la Commission chargée de fixer l'indemnité d'expropriation, il peut y avoir moyen d'aller de culbutes en culbutes, alors que l'argent (ou plutôt l'or) coule à flots (3).

À ce qui, pour moi, fait figure d'intrigue principale, s'entremêle une intrigue sentimentale: Renée, la seconde épouse d'Aristide, s'ennuie dans leur hôtel particulier, et s'amourache de son beau-fils, Maxime (fils d'un premier lit d'Aristide), jeune homme viveur précoce. Je comprends que cet inceste ait pu choquer la France catholique de la fin du XIXe siècle: les deux protagonistes nous en apparaissent, à nous (lecteurs du XXIe), comme majeurs et consentants... ce qui est l'essentiel, n'est-il pas vrai? Dans ma lecture de cet ouvrage, l'intérêt pour les mécanismes financiers l'a largement emporté sur la violation de la morale ou de la pudibonderie. Ma sympathie va en tout cas à la gamine tubarde qui se fiche bien de ce que fricotent son fiancé et sa (future) belle-mère, et demande juste à pouvoir faire aussi, elle, ce que font les autres. 
Mon exemplaire, imprimé au 1er trim. 1972, comporte 434 pages. 

 

Pour lire Le ventre de Paris, il faut avoir l'estomac bien accroché et pas peur des noms d'aliments. Pour ma part, j'ai été un peu submergé par les pages et les pages d'énumération indigeste, qui sont plus longues que les descriptions d'actions proprement dites. Comme tout le monde le sait, ce ventre de Paris est symbolisé par le quartier des Halles et ses tout nouveaux pavillons Baltard (oui, ceux démolis entre 1971 et 1973). Nous le découvrons par les yeux de Florent, échappé du bagne de Cayenne où il avait été déporté pour raisons politiques (arrêté, plus ou moins par erreur, pour résistance au coup d'Etat de 1851...). Son demi-frère est un charcutier, Quenu, qui a épousé la fille ainée d'Antoine Macquart, Lisa. Leur belle boutique éveille la jalousie d'autres commerçantes ou habitantes du quartier. Au milieu de toute cette boustifaille, nous avons la métaphore de la lutte des "maigres" (les Républicains, parmi lesquels Florent, qui rêvent d'un grand soir dans l'arrière salle d'un café) contre les "gros" (les bourgeois bien établis, qui rêvent de l'ordre propice aux affaires et à leur quiétude égoïste). Dans ce Ventre, pour épicer tout de même le menu, il y a une tentative de viol dont l'auteur se fait quelque peu casser la tête (qu'il avait fragile d'ailleurs). Mais, je le redis, il y a surtout des listes interminables: légumes... Fruits... Volaille... Viandes... Charcuterie... des noms d'aliments, alignés sans une seule répétition, mais en veillant surtout à ne rien oublier, jusqu'à l'écoeurement.

Ecoeurante aussi, la manière dont, sur le dos de Florent renvoyé au bagne (avec quelques "complices" pincés en même temps que lui), s'engraissent tout ceux auxquels son arrestation a profité: les mouchards, les dénonciateurs et dénonciatrices, tous ceux qui ont "provoqué" la rédaction de son projet d'insurrection exaltée jusqu'à ce que le dossier soit bien monté et le gibier prêt à être capturé. Qui en récoltera de l'argent sonnant et trébuchant, qui une vengeance personnelle, qui la captation d'un héritage, qui un avancement dans la police... Le mot de la fin appartient à un autre membre de la "famille" que nous retrouverons à L'oeuvre, le peintre Claude Lantier, petit-fils d'Antoine Macquart. (3)
Mon exemplaire, imprimé au 2e trim. 1972, comporte 502 pages. 

 

Le titre La conquête de Plassans contient, à mon avis, un "double sens" (voire davantage). Il s'agit d'abord de la "reconquête politique" de la ville elle-même, qui a "mal voté" aux [dernières] élections législatives (s'agit-il de celles de 1857 ou de 1863? Ce n'est jamais précisé). Mais le livre raconte en parallèle, "à" Plassans, le "grignotage" d'une maison (bourgeoise, bien douillette et à la petite vie sans nuages) par des pique-assiettes. La demeure des Mouret, un couple de rentiers bien tranquille, lui républicain vaguement libre-penseur et elle indifférente (+ trois enfants), fait entrer le loup dans la bergerie sous la forme d'une location de deux pièces inutilisées à un prêtre aux dents longues (assoiffé de pouvoir, mais non d'argent ni d'amour pour son prochain ou sa prochaine!) accompagné de sa mère. L'abbé Faujas est (en secret) chargé de ramener le poste de député local à l'Empire alors que Plassans était passée à l'Opposition. Stratégiquement placé entre la "bourgeoisie orléaniste", la noblesse légitimiste et les notables de l'administration bonapartiste, il va réussir à les faire converger, bien aidé en sous-main par diverses ambitions plus ou moins cachées... En ce qui concerne les Mouret (tous deux cousins puisque descendants de l'aïeule des Rougon et des Macquart), la "maîtresse de maison" finira frappée d'hystérie mystique, tombée amoureuse de la religion sinon de son serviteur, tandis que le mari se retrouvera à l'asile! 
J'ai été frappé par la place démesurée qu'occupent, dans cette petite ville, intrigues, querelles de préséances, mensonges et cancans. L'écrivain a l'art de faire endosser par ses personnages secondaires les explicitations qui font avancer l'intrigue ("pensa-t-elle", "dit-il à l'oreille de"...). Pour accabler le malheureux Mouret, on assiste à la mise en circulation de rumeurs assassines et fausses. J'ai eu l'impression qu'Octave Mouret tombait dans ce que j'identifierais comme une dépression, même si le diagnostic des symptômes minutieusement décrits ne pouvait pas être posé à l'époque (Zola parle de folie). Tous ces petits bourgeois, sous couvert d'intérêt pour autrui, ne s'occupent que de soi. La (courte) séquence consacrée aux élections elles-mêmes (au suffrage universel masculin) m'a fait songer à celles que l'on voit décrites dans un fragment de Lucien Leuwen (Stendhal), bien entendu ignorée de Zola puisque ce roman inachevé (datant de 1834, sous la Monarchie de juillet, à l'époque du suffrage censitaire) n'a été publié qu'en 1894. On retrouve dans La conquête... l'atmosphère de "salons" déjà décrite dans La fortune des Rougon, mais cette fois l'intrigue va plus loin et mobilise l'Archevéché (il ne s'agit pas uniquement de la seule conquête "bourgeoise" du pouvoir par un coup de force, mais bien du monopole de la représentation politique au profit du "parti de l'ordre", soit "l'ordre dans la liberté et la liberté dans l'ordre", slogan d'époque!) avec une alliance entre les partisans de l'Empire et les royalistes (légitimistes du quartier noble comme orléanistes bourgeois): 33 0000 voix (contre les 1500 des "républicains irréductibles"). 
Mon exemplaire, imprimé au 4e trim. 1978, comporte 440 pages. 

 

Dans La faute de l'abbé Mouret (paru en 1875), on retrouve deux des personnages de La conquête de Plassans, le précédent tome de la série. Serge Mouret, fils cadet des époux François et Marthe Mouret, a fini son séminaire et a été ordonné prêtre. Il a pour paroisse un village fictif, désolé, en Provence: Les Artaud. Il a recueilli sa jeune soeur Désirée, simplette qui n'est heureuse que dans la basse-cour avec ses animaux chéris. Mais ce n'est pas avec sa soeur qu'il fautera...

J'avais l'idée (fausse) que le mot "abbé" était nécessairement lié à une abbaye, or il peut désigner un "prêtre séculier" depuis le XVIIIe siècle. On voit donc "l'abbé Mouret" célébrer une messe, un mariage... dans une Eglise plutôt peu voire mal fréquentée (mariage à l'aube en présence des parents, de leur nourrisson, et de la partie de la famille qui n'est pas occupée par plus important, à savoir le travail aux champs...). En tout cas, "telle mère tel fils", notre abbé fait preuve d'un mysticisme personnel exacerbé, mais que l'on finit par découvrir égoïste: si sa religion est douce aux pêchés d'autrui, c'est, me semble-t-il, bien davantage par indifférence à ce qui n'est pas sa relation "personnelle" à Marie ou à Jésus que par sollicitude ou bonté. Alors, cette faute?

A force de prières à genoux, de veilles, de trajets à pied sous le soleil pour aller porter la bonne parole de Dieu aux malades ou aux mourants (ou à ceux crus tels, comme un certain Jeanbernat), v'là-t-y pas que notre prêtre tombe malade (il s'évanouit dans sa chambre devant la représentation de l'Immaculée Conception...)! Et tonton Pascal [Rougon], passant par là, décide (il aime bien les expériences anthropologiques, le Docteur Pascal) que son neveu sera mieux soigné chez des "étrangers" qu'à la cure par sa fidèle bonne, La Teuse.

Dans ce roman en tout cas, l'énumération, dont certains passages sont aussi écrasants que dans Le ventre de Paris, porte sur des fruits et des fleurs: les restes d'un verger, d'un potager et d'un jardin merveilleux, dans le domaine du Paradou, dont le château a brûlé des décennies plus tôt. Là survivent dans un splendide isolement le vieux gardien libre-penseur, ce fameux méchant de Jeanbernat, et sa petite-fille, élevée à la diable dans toute cette nature, Albine. Et la vie est si belle, au Paradou (pardon, au Paradis), que ce qui doit arriver arrive: le garçon et la fille se découvrent... Mais si le garçon (Serge) sera ramené dans le droit chemin de ses bondieuseries par un "frère" au catholicisme intransigeant, la fille (Albine) se suicidera de chagrin (asphyxiée par les fleurs témoins de leurs amours qu'elle a entassées, toutes fenêtres fermées, dans une chambre). Elle était enceinte. J'ai trouvé Jeanbernat bien indulgent à l'encontre de Frère Archangias. 
​​​​​​​Mon exemplaire, imprimé au 4e trim. 1978, comporte 437 pages. 

 

Zola fait partie des "valeurs sûres" pour les blogs littéraires (que ce soit en première lecture ou en relecture, selon les âges des blogueurs ou blogueuses). Il n'est que de voir les réactions nombreuses à l'article de dasola relatant notre visite à Médan. Je signalerai donc juste que j'ai cru remarquer que Lybertaire a aussi depuis quelques années le projet de relire Les Rougon-Macquart et doit en être au tome 10... 

 

L'apparat critique de cette édition de La Pléiade est dû à Armand Lanoux (1913-1983) [préface, p.IX-LXX] et à Henri Mitterand (1928-2021) [étude, notes, variantes et index, p.1529 et suiv.]. J'avoue les avoir parcourus en diagonale, pressé par le temps, et sans m'interdire d'y revenir une fois les challenges finis (ouf!). D'Armand Lanoux, j'ai lu jadis le roman Le commandant Watrin, et c'est en m'intéressant à cette édition en Pléiade que j'ai appris son rôle d'"éditeur", mais aussi de biographe de Zola (je n'ai jamais lu son Bonjour, Monsieur Zola de 1954). Je ne sais rien d'autre d'Henri Mitterand que ce que n'importe qui peut trouver sur Wikipedia. En tout cas, j'inscris cette dernière lecture estivale pour les trois challenges Les Pavés de l'été 2024 chez Sibylline, Les Epais de l'été 2024 chez dasola, et 2024 sera toujours classique organisé par Nathalie

Et voici les deux versions d'arbres généalogiques des Rougon-Macquart (1878 et 1893) que contiennent toutes deux les deux derniers tomes (tome IV et tome V) de La Pléiade. 

 

(1) Oh bon allez, vous le saviez peut-être ou peut-être avez-vous déjà cherché, mais à toutes fins utiles... L'analepse (retour en arrière) "consiste à interrompre momentanément le cours d'une narration pour insérer une narration secondaire se déroulant antérieurement à la narration principale" (équivalent du flashback au cinéma).

(2) Et non 1879, évidemment. Bien vu Aifelle et Keisha, merci... et haro (pointé...) sur la première "relectrice" (et secrétaire de rédaction...) de mon billet! 

(3) Je rajoute le logo du "challenge urbain" organisé par Ingannmic, la troisième édition de "Sous les pavés les pages" ["pavé" n'y ayant aucun rapport avec l'épaisseur des ouvrages!]: La curée et Le ventre de Paris, au moins, y sont éligibles, m'a-t-elle signalé. 

 

20 septembre 2024

La septième lune - Piergiorgio Pulixi

La septième lune de Piergiorgio Puluxi (Edition Gallmeister, 525 pages) fait suite à L'illusion du mal car, dans La septième lune, on retrouve cette fois-cil les policiers Vito Strega, Eva Croce et Mara Rais dans la région de Pavie en Lombardie. Une jeune femme disparue, Teresa Poletto, a été retrouvée assassinée de la même façon, semble-t-il que la victime de L'île des âmes. Quand on a trouvé son corps dans une rivière, Teresa portait un masque avec des cornes bovines et elle était entourée d'une toison de mouton. C'est pourquoi on a fait appel aux trois enquêteurs, qui forment désormais une unité d'enquête. C'est Croce et Rais qui avaient résolu le crime dans L'île des âmes en Sardaigne (vous me suivez?). Vito, Eva et Mara ne sont pas tous seuls sur cette enquête. Ils sont aidés par Bepi Pavan, un inspecteur rondouillard très gourmand, et Clara Pontecorvo, une géante d'1m98 (sans les chaussures) qui est la première à découvrir le corps de Teresa Poletto, qui était une jeune femme parfaite et sans histoire. C'est sa soeur Alice qui est allé voir la police pour signaler sa disparition. Les parents de Teresa gèrent une hôtel miteux. On se rend compte qu'ils cachent quelque chose. Le roman est découpé en courts chapitres dont certains nous permettent de faire connaissance du meurtrier de Teresa. On ne devine pas ses motivations, à part le fait qu'il est manipulé. Il y a au moins deux intrigues dans le roman, dont une qui se rapporte à la ndrangheta, la Mafia calabraise, mais c'est vraiment secondaire par rapport au crime commis. J'avoue que je n'avais pas deviné qui était le manipulateur et surtout, jusqu'aux dernières pages, on se demande comment les enquêteurs vont le coincer. Et on apprend le pourquoi du titre "La septième lune" presque à la fin du roman. Un livre que j'ai énormément aimé avec une intrigue bien menée. Ce roman peut faire partie du challenge des "pavés de l'été 2024" chez Sibylline. Lire les billets de Pierre Faverolle (un peu moins enthousiaste que moi), BigMammy et Baz'art

 

18 septembre 2024

Simulacres martiens - Eric Brown

J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) lu, après elle, un nouveau titre (après De l'espace et du temps d'Alastair Reynolds) dans la collection UHL. Cela n'empêchera pas, j'espère, la parution prochaine d'un billet signé dasola pour contribuer à mon challenge marsien!

Eric Brown, Simulacres martiens, Le Bélial, Coll. Une Heure Lumière N°35, 2021, 130 pages. 9,90 euros

 

J'ai été un peu désarçonné par ce petit roman (novella?) où, nul ne l'ignore, sont mis en scène trois héros de Conan Doyle: Sherlock Holmes et le Docteur Watson, ainsi que le professeur Challenger. Nous sommes en 1907, 13 années après que l'invasion venue de Mars ait été vaincue par les microbes terrestres comme l'a raconté Herbert Georges Wells dans La guerre des mondes. Les premières lignes et une note font référence à un récit déjà dû à Eric Brown dans la revue Bifrost N°105 (janvier 2022): la tragique affaire de l'ambassadeur martien avait été résolue par Sherlock Holmes l'année précédente (1906). D'autres Martiens, en effet, sont venus sur terre quelques années après les premiers, en une seconde vague, mais cette fois-ci, ils étaient dûment vaccinés... et ont proposé des rapports pacifiques et constructifs aux humains grâce à leur science avancée. Simulacres?

 

Simulacres! Quoi de mieux que de montrer l'état d'avancement de Mars en y invitant chefs d'Etat et grands hommes de science? Après tout, le voyage grâce aux engins martiens ne prend que 5 semaines dans chaque sens! Et il ne reste plus qu'à ces humains, ainsi éclairés, à convaincre leurs compatriotes des bienfaits de la collaboration... Nos trois héros sont également conviés à faire le voyage, au prétexte d'un mystère à résoudre sur Mars pour les enquêteurs (au fait, ils n'ont pas invité l'inspecteur Lestrade?), Challenger pour une série de conférences dans une Université martienne. Bien entendu, rien ne sera si simple, et en tout cas pas très conandoylesque, à mon humble avis... Je laisse chaque lecteur ("holmésien" émérite ou non) lire de son appréciation sur cette novella de science-fiction. Sherlock Holmes pourra en tout cas revenir sur terre: pas de contradiction, à ce niveau, avec son dernier coup d'archet!

 

D'autres blogueurs-euses avaient déjà attiré mon attention sur ce court roman. Voici quelques billets en ayant parlé bien avant moi (liste non exhaustive, et dont certains contiennent encore d'autres liens!): Le nocher des livres, Tampopo24, CélinedanaëGromovar, FeydRauthaJean-Yves, Xapur, Lutin82Ombres Bones, F6k... Sans oublier, bien sûr, que Zoé Lucaccini avait participé avec cet ouvrage à la première édition de mon Challenge de la planète Mars.

 

Ce billet va représenter ma dernière participation au XVe challenge Summer Star Wars Ahsoka de Lhisbei. Les deux autres challenges, eux, continuent: le 12e challenge de l'Imaginaire organisé par Tornade jusqu'à la fin de l'année 2024, et bien sûr mon propre challenge marsien jusqu'au 31 mars 2025!

 

17 septembre 2024

Les graines du figuier sauvage - Mohammad Rasulof

Demain, mercredi 18 septembre 2024, sort Les graines du figuier sauvage, un très grand film, que dis-je un immense film réalisé par un réalisateur iranien désormais en exil en Allemagne. S'il revenait dans son pays, il risquerait d'aller en prison pour quelques années. J'ai vu ce film en avant-première, jeudi soir dernier dans une salle pleine. Le réalisateur Mohammad Rasulof a pris comme toile de fond la mort de Mahsa Amini, décédée en 2022 après avoir été tabassée pour une mèche de cheveux qui dépassait sous son voile. Ce film est exceptionnel à plus d'un titre. Il n'a reçu (si je puis dire) que le Prix spécial du jury au dernier festival de Cannes. Il aurait peut-être mérité la palme d'or et un prix pour l'actrice Soheila Golestani qui interprète le rôle de la mère de famille Najmeh. Le film, qui dure presque trois heures que je n'ai pas vu passer, se concentre sur la vie d'une famille moyenne dans un appartement. Nous avons le père, Iman, la mère, Najmeh, et leur deux filles Rezvan et Sana. Iman vient d'avoir une promotion, il est devenu juge enquêteur dans un tribunal islamique. Cela fait vingt ans qu'il exerce son métier, mais c'est la première fois qu'on lui demande de signer des arrêts de mort sans vérification. Il n'est pas à l'aise. Najmeh est une femme soumise à son mari à qui elle ne sait pas dire non, et qui demande à ses filles de faire attention à ne pas dire la profession du père à leurs connaissances. Cela risquerait de mettre la famille en danger d'autant plus que la rue gronde. Il y a des échauffourées dans la rue en général et dans les écoles et universités en particulier. Une camarade de Rezvan est grièvement blessée lors d'une bagarre alors qu'elle n'y est pour rien. Sous ses airs inflexibles, c'est Najmeh qui va enlever avec douceur les plombs que Sadaf a reçu au visage. Plus tard, c'est le pistolet qu'Iman a reçu dans le cadre des ses fonctions qui disparait de chez lui. Il risque trois ans de prison s'il ne le retrouve pas. Aucune des trois femmes ne se dénonce et Iman ne supporte qu'elles puissent mentir. Ces mêmes femmes subissent un interrogatoire et les derniers trois quart d'heure du film nous transportent dans la région natale d'Iman. Une terrible tension se crée entre Iman et les trois femmes et je ne vous dirai rien de la fin qui prend le spectateur par surprise.  Du très grand cinéma qui a été longuement applaudi à la fin. Le réalisateur a fait une présentation et il est revenu à la fin de la projection. Il semble que ce film va être en lice pour l'Allemagne aux prochains Oscars.

 

15 septembre 2024

Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé - J. K. Rowling (livre) / David Yates (film)

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) continue à "revisiter" Harry Potter, aussi bien en film qu'en livre, et pour ce dernier média en tant que "gros bouquin" dans le prolongement de mes billets de l'an dernier

J. K. Rowling, Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé, Folio junior N°1418, 2005, 750 pages (DL juillet 2007 pour mon exemplaire)
David Yates, Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé, 2009, 153 minutes

 

J'ai toujours connu les couvertures de Jean-Claude Götting qui illustrait les éditions originales en France, et je ne cherche même pas à m'habituer aux couvertures des nouvelles éditions. Mais bon, mes 7 tomes vieillissent tranquillement chez moi (je ne compte plus mes relectures), et je n'ai pas de raison de les changer. Dans cet épais volume (mais moins que le précédent), il faut attendre le quart du livre avant que nos héros arrivent à Poudlard. Le livre avait commencé par une vingtaine de pages où le Premier ministre [anglais/moldu] recevait la visite de l'ex-Ministre de la Magie venu lui présenter son successeur. Harry finit ses vacances au Terrier avant de prendre le fameux train à vapeur. Mais auparavant, les Dudley ont été tétanisés par une visite de Dumbledore chez eux: il venait quasiment "enlever" Harry pour la première des ténébreuses "missions" pour lesquelles il fera appel à lui (sous couvert de "cours particuliers") tout au long du livre. Le classique achat des fournitures sur le chemin de Traverse est l'occasion de surprendre Malefoy, qui manifestement n'aurait pas souhaité l'être (il aura sa revanche). Cette année sera encore dramatique à Poudlard, sous la menace de Voldemort et de ses Mangemort. Nos "sixièmes années" sont de plus en plus en proie à diverses attirances, que celles-ci soient naturelles ou artificielles. Comment un professeur de potion peut-il commencer son cours en présentant un philtre d'amour surpuissant?! Rogue ne l'aurait sans doute pas fait, mais il n'est plus professeur de potions. Cette année, Harry, dont ce n'était pas la matière favorite, va particulièrement s'y illustrer... grâce aux annotation manuscrites découvertes sur un vieux manuel trouvé au fond d'un placard. Hermione, qui se méfie de la note griffonnée au bas de la dernière page de couverture ("Ce livre appartient au Prince de Sang-Mêlé", p.224), sera pourtant la première à avoir une intuition juste sur l'identité princière. Si Ron sort avec une fille (et avale plusieurs fois des produits qui ne lui sont pas destinés), Harry finit par trouver l'élue de son coeur. Mais, une fois de plus, le livre finit brutalement et dans le drame. 

 

Je trouve toujours aussi intéressant de revoir ces films juste après avoir relu le tome correspondant de la saga (en attendant, un jour, remakes, séries TV "au long cours", BD et manga... ou peut-être adaptations radio?): cela favorise les comparaisons de traitement pour partir d'un début connu et aboutir à une issue qui ne l'est pas moins et annonce le septième épisode de la saga. Et des différences, il y en a ici. Il est normal que le film doive faire des choix en élaguant. Certaines "innovations" sont plus étonnantes. Et on peut comprendre le souci légitime d'un réalisateur de faire voir sa "patte" dans le climat général. 

Bien des personnages du livre sont à peine présents voire pas du tout dans le film (le Premier Ministre moldu, la famille de Harry côté moldu, Fleur et Bill, Tonk et Lupin...). On a par contre la présence de Bellatrix (absente dans le roman). On retrouve ce qui me paraît être la vision de Yates: des épisodes de course dans le noir, de "confusion" et de moments où les personnages sont "aux aguets", incertains de ce qui va (leur) arriver... (l'attaque du Terrier par les mangemorts). Le début du film est traité différemment: on sent que le "jeune homme" qu'est devenu Daniel, pardon, Harry, ferait bien connaissance de plus près avec une jeune Moldue. Les "cours" de Dumbledore sont bien plus succincts, et le nombre de voyages dans la pensine, parmi des souvenirs sur Voldemort qu'il a rassemblés lors de sa longue enquête, est bien inférieur à ceux du livre. Le premier bisou d'Harry est beaucoup moins "flamboyant" que dans le roman. Mais nous avons du Quidditch et quelques "morceaux de bravoure". Le travail mystérieux de Malefoy nous est montré, en silence et sans explications, à plusieurs reprises.

Ce que m'amène à penser ce "rapprochement des média" (livre puis film), c'est que les spectateurs du film sont "censés" avoir lu le livre et être capable de "savourer" les décalages. Enfin, c'est mon opinion. Mais je ne vais pas tout raconter non plus, hein! 

 

Je pense que c'est pour l'édition 2025 des Epais de l'été que je pourrai chroniquer le dernier épisode, Harry Potter et les reliques de la Mort.

Pour cette année, j'inscris Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé aux deux challenges sur de gros bouquins (Pavés de l'été 2024 chez Sibylline et Epais de l'été 2024 chez dasola), ainsi qu'au 12e challenge de l'imaginaire organisé par Tornade

La blogosphère contient pas mal de billets tant sur le livre que sur le film. Une simple recherche sur internet en ramène encore des quantités (que les blogs soient toujours actifs ou non). Mais le blog de dasola n'en avait encore jamais parlé. 

14 septembre 2024

Guyanes - Jean-Paul Delfino

J'ai été attirée par la couverture colorée de ce roman, Guyanes de Jean-Paul Delfino (Editions Pocket, 706 pages) qui entre dans le cadre des challenges Pavés de l'été 2024 et Les épais de l'été 2024
L'écrivain nous emmène donc en Guyane dans les années 1870, juste après la Commune de Paris. On fait la connaissance de trois personnages : Mané, un esclave noir brésilien, va devenir Français après un passage par le bagne de Saint-Laurent du Maroni. Clara Martinelli, native d'Aix en Provence qui a 16 ans en 1870, a été condamnée comme beaucoup d'autres au moment de la Commune de Paris à 8 ans de bagne en Guyane (d'autres iront en Nouvelle-Calédonie). Et nous avons un jeune homme de 22 ou 23 ans, Alfonse de Saint-Cussien, vil et sans scrupules, qui s'est ruiné au jeu et qui doit prendre possession d'une terre en Guyane. Pour cela, il a abandonné femme, enfants et parents. Mané, avant d'arriver en Guyane, perd sa compagne qui était enceinte. Elle a été tuée. En Guyane, Mané devient orpailleur suite à sa rencontre avec deux hommes peu scrupuleux qui vont le faire condamner au bagne. Clara, matricule 32, est une des détenues d'un "couvent" tenues par des bonnes soeurs. Elle reste digne malgré les mauvais traitements et le manque de nourriture. Il faut savoir qu'à partir du moment où la peine était de 8 ans et plus, l'homme ou la femme libérable était condamné à la double peine et devait rester en Guyane jusqu'à la fin de leurs jours. Bien entendu, Mané et Clara vont se rencontrer et plus si affinités. Je ne vous dis rien de plus. Quant à Alfonse, grâce à son aplomb, il va devenir ordonnateur des dépenses de l'administration pénitentiaire et en profiter au maximum. Il devient un notable à Cayenne, mais son goût pour la luxure et le jeu vont le conduire à sa perte. Les trois récits qui s'entremêlent par moment sont bien menés et l'écrivain décrit assez bien ce qu'était peut-être la Guyane à cette époque. On sent qu'il s'est documenté. On comprend que malgré l'abolition de l'esclavage en 1848, il valait mieux avoir la peau blanche que noire. J'ai trouvé la fin un peu triste. Un roman que j'ai lu très vite et que je conseille. 

 

13 septembre 2024

Rollergirl sur Mars - Jessica Abel

J'avais (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) relevé grâce à Fanja l'idée d'une contribution pour mon "challenge marsien" que je finalise cette quinzaine. Il s'agit d'un volume reprenant en "intégrale" une série couvrant trois albums d'une bédéiste américaine, qui, si j'ai bien compris, a commencé par la publier directement en français. 

Jessica Abel, Rollergirl sur Mars version intégrale, Dargaud,
août 2019, 204 pages. 22,50 euros
(Le tome 1 de Trish Trash, Rollergirl sur Mars (64 pages) est sorti en 2015, les tomes 2 et 3 étaient inédits en français si j'ai bien compris)

 

La première page commence avec une retransmission sportive. Puis on découvre la "spectatrice", et enfin sa localisation. Trish (diminutif de Patricia Nupindju, surnommée Trisha, avatar Trix...), sept ans et demi (en années martiennes, soit le double en années terrestres!), est une "martiate", lycéenne davantage passionnée de "hoverderby", dont elle suit en spectatrice toutes les "sessions (jams) retransmises en vidéo, que par ses études. Nous sommes sur Mars (où le derby est un sport professionnel depuis 2128). La planète a commencé à être colonisée à partir de 2062 (dernier vaisseau arrivé en 2111), et l'action commence à la fin du XXIIe siècle. Tout le contexte est exposé dans 16 pages "Pour en savoir plus..." en fin d'album. 

Orpheline, notre gamine travaille à la ferme de ses oncle et tante, hygrofermiers. Bricoleuse, elle est capable de réparer le vieux matériel agricole qu'ils utilisent aussi bien que les "patins magnétiques" utilisés dans le hoverderby. Ce qui lui permet d'intégrer l'équipe locale! Le hoverderby? Sur un circuit ovale, deux équipes de 5 patineuses tournent, chacune s'efforçant de "bloquer" le passage à la "jammeuse" adverse, sans la frapper ni l'agripper, mais avec seulement quelques techniques autorisées... Les sessions des différentes "ligues" sont suivies par un public interplanétaire, en temps réel et en permanence!

 

Très intelligemment, cette bande dessinée nous fait découvrir la "prise de conscience politique", à marche forcée, de Trish et de ses différents réseaux relationnels (familial, amical, scolaire, sportif): ce "sport" est surtout un "moyen de contrôle" de la population par la société commerciale Arex, qui contrôle tout Mars (sinon au-delà), dont l'économie entière, en bonne logique capitaliste, repose sur la rareté de l'eau. Les "hygrofermiers" la recueillent goutte à goutte, et la revendent à Arex. Arex est aussi propriétaire des terres sur lesquelles ces fermiers travaillent, leur louent leur maison, leur outillage... Bref, ils sont débiteurs d'une dette qui ne diminue jamais.

 

Trish recueille une jeune "martienne native" (non pas une martiate comme elle-même [être humain né sur Mars], mais l'autre acception du terme, une "bestiole" [indigène non-humaine née sur Mars]). Celle-ci lui fera des cadeaux inestimables: des "patins à roulettes" fonctionnant dans la poussière de Mars (ce qui qui permet d'entraîner son équipe vers la victoire), et des informations et moyens concernant l'eau... 

 

Dans les vignettes de la BD, différents "niveaux de texte" permettent de voir que les "réseaux" (vidéo, social...) sont sous surveillance électronique automatique d'Arex, avec alertes par mots-clés : ces réseaux sur lequel nos jeunes bavardent en toute inconscience sont en fait aussi étroitement surveillés que le réseau des cheminées dans les derniers tomes de Harry Potter.

Pour accentuer la ressemblance avec le jeune Luke Skywalker, il ne manque même pas une révélation malveillante sur les parents disparus de notre héroïne. Mais au final, c'est bien en "inversant les règles" et en faisant en sorte que "le peuple" se réapproprie leur derby-aimé à sa manière que Trish parvient à court-circuiter les stratégies savantes de la société Arex. Que la force soit... Oui bon, pardon.
Cette "intégrale" qui prend le temps, dans ses quelque 180 pages dessinées, de développer plusieurs intrigues et arcs narratifs dans l'entourage de Trish représente un album intéressant, avec plusieurs degrés de lecture possibles. 

 

Comme je l'ai dit plus haut, Fanja a présenté récemment cette BD (dans le cadre de mon challenge marsien - merci pour l'idée!). J'ai aussi déniché les billets de Ma lecturothèque, d'Excessif (du blog Le journal de Pok), et celui d'un blog canadien, Sophielit.

 

Le mien participe au XVe challenge Summer Star Wars Ahsoka de Lhisbei, au 12e challenge de l'Imaginaire organisé par Tornade, et bien sûr au challenge marsien.

 

11 septembre 2024

Le fil - Daniel Auteuil

L'acteur Daniel Auteuil est aussi réalisateur. Pour le Fil, il s'est donné le premier rôle, celui d'un avocat qui n'a pas plaidé depuis 15 ans et qui reprend la robe pour défendre un homme dont il est convaincu de l'innocence. Dans le rôle de l'accusé, on a le plaisir de voir Grégory Gadebois qui joue un rôle "casse-gueule" en s'en sortant très bien. En février 2017, Nicolas Milik (Grégory Gadebois) est mis en garde à vue puis en détention provisoire car il est accusé d'avoir tué sa femme après une dispute. Cette dernière buvait trop. Pendant les trois ans de sa détention provisoire, Nicolas Milik n'avoue rien mais il a hâte de revoir ses cinq enfants qu'il élevait presque seul. Pendant ce temps-là, Jean Monier (Daniel Auteuil) a du mal à trouver un angle d'attaque pour sa future plaidoirie devant le mutisme de son client. Et en fin de compte, je ne vous dirai pas si Nicolas Milik est condamné ou non, et il y a une révélation finale inattendue. Je ne me rappelais pas l'affaire qui a inspiré le film - car c'est tiré d'une histoire vraie. Un bon film très bien interprété. 

8 septembre 2024

La maison d'Emile Zola à Médan

C'est Miriam qui nous a donné envie d'aller visiter la maison d'Emile Zola (1840-1902) à Médan, à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Paris. Et donc, le 5 septembre 2024, on est partis vers Médan, petit village aux maisons cossues pas loin des bords de Seine et de voies de chemin de fer. En arrivant à destination, on voit la mairie et un panneau discret pour indiquer la maison de l'écrivain. En résumé, le village est très content de la notoriété de la maison d'écrivain mais cela s'arrête là. Il veut garder sa tranquillité. Pour information, pensez à prendre votre pique-nique, il n'y a plus qu'un lieu pour se restaurer, le "Garden Bar" qui propose des croque-monsieur et des bruschettas. A 12H40, il ne restait qu'un croque-monsieur pour deux mais l'accueil était très sympathique. Un autre restaurant est en travaux sur les bords de Seine. Il n'ouvrira que dans un an (si tout va bien - cela ne l'empêche pas d'être indiqué d'ores et déjà sur les affichages dans Médan).

La maison Zola est gérée par une association qui est dans le rouge du point de vue financier malgré les 10 000 visiteurs qu'il y a eu déjà cette année. Il n'est même pas sûr que la maison puisse ouvrir l'an prochain. C'est grâce à la fondation Pierre Bergé qu'il y a eu 10 ans de travaux entre 2011 et 2021 pour créer le musée Dreyfus et restaurer la maison qui est donc réouverte aux visiteurs depuis cette date. On a eu un guide bénévole membre de l'association qui nous a raconté l'essentiel de ce qu'il faut savoir. Il lisait son texte mais de manière vivante. Comme l'a écrit Miriam, c'est grâce à trois des romans de l'écrivain, "l'Assommoir", "Nana" et "Germinal" que Zola a pu s'acheter la première maison en 1878 (la petite du milieu) et qu'il a pu faire construire les deux tours par la suite. Lire la chronologie sur l'évolution du domaine.

En prolongement de cette demeure en trois parties, il y a une extension, un ancien lazaret (construit par l'Assistance Publique parisienne à qui la veuve de Zola avait donné le domaine en 1905) où se trouve le musée Dreyfus. Nous avons visité le musée mais je n'ai pas pris de photos à l'intérieur où l'on trouve bien entendu le fac similé de "J'accuse" et plein de caricatures issues de journaux de l'époque et aussi des photos. Il faut savoir que Zola aimait beaucoup la photographie, il avait un labo pour développer ses photos. Il faisait même des "selfies". On nous a aussi rappelé que Zola, né à Paris, a passé pas mal d'années à Aix en Provence où il a fait sa scolarité en butte aux moqueries de ses camarades, sauf Paul Cézanne qui est devenu son ami. Une visite intéressante et on eu de la chance d'avoir très beau temps.

Voici quelques photos prises pendant notre visite.

 

 La façade sur rue


Le derrière des trois bâtiments

Le lazaret transformé en musée Alfred Dreyfus

 

La salle de billard et les vitraux aux fenêtres. Il y en a d'autres dans quelques pièces.

 Le grand salon

 

 

 

 La cuisine qui donnait directement sur la salle à manger

 La salle de bain avec baignoire, et il y avait de l'eau chaude car il y avait un calorifère au sous-sol.

 

7 septembre 2024

Scènes de la vie hormonale - Catherine Meurisse

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) me rappelle avoir lu dans Charlie Hebdo certaines des planches regroupées dans ce recueil (et certainement les chroniques habdomadaires post-7 janvier 2015, puisque je n'ai plus jamais raté un numéro depuis). Mais il me semble qu'elles paraissaient plutôt sur toute une colonne qu'en format "planche"en gaufrier de 6 à 8 vignettes comme ici: les pages ont dû être remontées pour la parution chez Dargaud. Pour mémoire, j'ai déjà présenté dans mes "hommages du 7" plusieurs albums de Catherine [Meurisse].    

Catherine Meurisse, Scènes de la vie hormonale,
(chronique publiée dans Charlie Hebdo d'octobre 2014 à juillet 2016), 
Dargaud, 2016, 78 pages (74 planches) 

Il s'agit de petites chroniques où l'auteure se moque, soit d'elle-même (ou de son héroïne), soit de ses interlocuteurs ou -trices. Ou de la vie de couple en général (attentes désynchronisées...).

Certaines planches peuvent faire penser aux thèmes (féminins, forcément féminins) de dessinatrices antérieures: Brétecher, Catherine Beaunez, Florence Cestac. Il ne fait pas toujours bon prendre le "sexe faible" à rebrousse-poil! On y découvre aussi que l'introspection, ça peut avoir du bon, à condition d'éviter de creuser trop profond... 

Je vous mets quelques planches à titre de citation (j'ai eu du mal à me limiter à sept, pas plus, pour vous donner envie d'aller découvrir l'intégralité des autres!). 

P1160886 p.25 (pourquoi tant de violence? L'art et la manière?)

P1160885 p.19 (plusieurs niveaux...)

P1160893 p.29 (sans commentaire)

P1160889 p.48 (histoire sans paroles)

P1160888 p.40 (la 3e vignette figure aussi en page de garde...)

P1160894 p.69 (comment le prendre?)

P1160890 p.63 (excellent! Et s'il n'en reste qu'une...)

P1160891 p.73 (va savoir...)

Oh, allez, je suis monté jusqu'à huit... 

L'amour comme l'humour sont parfois un peu vache. A la relecture, j'ai quand même trouvé pas mal de ces chroniquettes douces-amères, souvent plus amères que douces. Enfin, je vous rappelle que mon point de vue est celui d'UN lecteur, hein... 

Dommage qu'il n'y en ait pas eu davantage. Mais après tout, rien n'interdit de rêver que Catherine [Meurisse] y revienne un jour! 

Bado l'avait présenté en 2016 (avec une planche en plus...). Lisou du blog Les Pipelettes en parlent en a choisi d'autres en 2017. Voir aussi Baz'Art, ou Pages à pages (impossible d'y laisser des commentaires!). 

*** Je suis Charlie *** 

6 septembre 2024

Hôtel Adlon - Philip Kerr

Pour ma 4ème participation aux Pavés de l'été 2024 et ma 3ème participation aux Epais de l'été 2024, je vous emmène en 1934, dans une période trouble pour l'Allemagne. Dans Hôtel Adlon de Philip Kerr (Livre de poche, 668 pages), j'ai fait la connaissance de Bernie Gunther, Juif par sa grand-mère maternelle (mais personne n'est vraiment au courant). Il est responsable de la sécurité à l'hôtel Adlon à Berlin. Hitler est au pouvoir depuis plus d'un an et le règne du meurtre et de la violence a commencé. La situation de certaines personnes comme Gunther n'est pas simple. Il a été chassé de la Kripo, il faisait partie de la police criminelle. Ses sympathies pour la République de Weimar l'ont desservies. En 1934, il est question des futurs jeux olympiques qui se dérouleront dans la capitale du Reich en 1936. Un dénommé Max Reles, un homme d'affaires véreux, et qui plus est, de confession juive, va tout faire pour remporter un des marchés pour la construction du stade olympique. Sans aucun scrupule, il va semer la mort autour de lui. Une journaliste américaine, Noreen Charalambides, est chargée d'écrire un article sur le régime hitlérien afin de dissuader les Américains de participer aux jeux. Gunther a le béguin pour elle car c'est une très belle femme. Vingt ans plus tard, en 1954, à Cuba, on retrouve Gunther, Noreen et Max Reles. Gunther, pendant les années de guerre, est passé par l'uniforme SS et un camp soviétique. Max Reles s'est de plus en plus enrichi et il fait des affaires avec Batista au pouvoir à Cuba. Noreen, qui vit temporairement dans l'une des demeures d'Ernest Hemingway, est la mère de Dinah, une grande fille de 19 ans. Pour info, Hôtel Adlon est le sixième volet des enquêtes de Bernie Gunther. Je n'ai pas lu les cinq autres. Dans Hôtel Adlon, l'intrigue est bien menée et il y a du rythme car Bernie Gunther est le narrateur de l'histoire. Le roman se lit vite. Une découverte intéressante en ce qui me concerne. 

 

5 septembre 2024

Le chant de Kali - Dan Simmons

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous présente un livre que j'ai acheté chez un bouquiniste sur la seule foi du nom de l'auteur, Dan Simmons. 

Dan Simmons, Le chant de Kali, J'ai Lu (coll. Ténèbres) N°2555, 1999, 318 pages
Traduit de l'américain (Song of Kali, 1985) par Bernadette Emerich en 1989

 

Hé bien, voilà un livre plus sombre que les Cantos d’Hypérion. Je peux vous le conseiller comme une lecture au réveil, pour commencer la journée. Mais surtout, ne le lisez pas le soir avant de vous endormir : cauchemar garanti ! Particulièrement si vous êtes jeune parent. 

Pour ma part, j’ai déjà lu au fil des ans un certain nombre d’œuvres de Dan Simmons (même si je n’en ai jamais tiré de chroniques). 

Dans ce premier roman de lui à avoir été publié, on trouve déjà ce qui reviendra dans plusieurs de ses oeuvres ultérieures : le pouvoir du mal (l’échiquier…), les terreurs de la nuit (d’été…), fantômes, spectres, zombies et autres créatures animées mais désormais sans âme humaine. Ou, simplement, toute la noirceur humaine. 

 

Un Américain, Robert Luczak, écrivain plus ou moins journaliste, part à Calcutta sur les traces d’un mythique poète disparu dont on aurait sur place découvert un « inédit ». Il emmène dans ce reportage sa petite famille : sa femme Amrita (elle-même d’origine indienne) et leur fillette de 7 mois, Victoria… On a du mal à s'arracher au récit avant la fin. 

 

Je crois que j'ai repéré une petite erreur de traduction (p.16, un "non" à la place d'un "pas" concernant Gandhi...). Je ne suis pas forcément d'accord avec ce qui est dit dans le roman sur Les bâtisseurs de pont de Kipling (mais c'est le jeu). J'ai relevé avec amusement le petit "coup de patte", p.59, envers les "romans de pacotille" de Stephen King. Enfin, l'intrigue se plaçant à la fin des années 1970, cela fait bizarre, aujourd'hui, de lire vers la fin du livre la possibilité de transporter en avion, d'un aéroport à l'autre, un Luger et plusieurs dizaines de ses balles.

Ce livre noir m’a un peu fait songer à certaines aventures du héros d’Henri Vernes. Dans une Inde mythifiée (et même ailleurs), celui-ci se heurte aussi bien à des thugs et autres adorateurs de Kali qu’à la pègre ou à des « tueurs » identifiés comme les « dacoïts » (et qu’il massacre par douzaine). Mais ceux-ci n’enlèvent pas la fillette âgée de quelques mois qu’il n’a pas (d’ailleurs, Bob Morane n’a jamais (eu) aucune responsabilité paternelle sauf erreur de ma part…). 

Je pense que je relirai d'abord certains livres de Dan Simmons, ou en découvrirai que je ne connais pas encore, avant de reprendre en main celui-là. Comme déjà dit, ce n'est pas un livre à lire le soir, dans son lit, avant de s'endormir.

J'ignore si j'ai réussi à attiser votre curiosité? J'ajoute encore que la collection Ténèbres chez J'ai lu n'a vécu que de 1996 à 2000, le temps d'abriter 42 titres dont celui-ci. Je n'en ai lu aucun autre. 

 

Apophis a chroniqué une édition plus récente que la mienne, comme Jean-Louis Dragon (en 2018 - dernier billet en 2019), et le blog Carolivre encore une autre, comme Tenseki (dernier billet en 2022). 

4 septembre 2024

Tatami - Guy Nattiv et Zar Amir

Je vous conseille d'aller voir Tatami, un film tourné dans un très beau noir et blanc et coréalisé par un Israélien, Guy Nattiv, et une Iranienne, Zar Amir. Il sort aujourd'hui, mercredi 4 septembre 2024. Je l'ai vu en avant-première. J'avoue que je ne m'étais pas rendu compte immédiatement que la co-réalisatrice Zar Amir était l'une des deux actrices principales du film. Elle interprète Maryam, l'entraineuse de Leila, une judokate en lice pour être championne du monde de judo à Tbilissi en Georgie. Leila est une joueuse exceptionnelle qui bat ses concurrentes l'une après l'autre lors des éliminatoires. Jusqu'au moment où Maryam reçoit un appel des hautes instances de la République islamique qui demande que Leila abandonne la compétition afin d'éviter une confrontation éventuelle avec la concurrente israélienne. Cette histoire s'inspire de faits réels. Les sportifs iraniens sont soumis à beaucoup de menaces. En refusant les diktats du gouvernement islamique, Leila met en danger ses parents, son mari et son petit garçon. Même Maryam subit de grosses pressions. La tension reste soutenue jusqu'au bout. On est captivé car on ne sait pas ce qui va se passer. Les deux actrices sont vraiment très bien. Un bon film pour la rentrée.

2 septembre 2024

De l'espace et du temps - Alastair Reynolds

J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) trouvé à emprunter (il était classé en "nouveauté" dans une des bibliothèques que je fréquente) un court ouvrage que j'avais déjà croisé à plusieurs reprises dans la blogoboule (1). 

Alastair Reynolds, De l'espace et du temps, Le Bélial, mars 2024, 108 pages. 10,90 euros
(titre original: Understanding Space and Time, copyright 2005)

Je vous mets aussi l'extrait de signalétique "nouveauté" sur l'exemplaire emprunté...

 

Le "De" initial en français peut rappeler les titres savants jusqu'au XIXe siècle (pouvant se traduire par "Au sujet de..."). Je ne sais pas si le "Understanding" anglais est connoté du même sens? Il s'agirait plutôt de "compréhension...", et non de rédaction d'une thèse savante...?

 

En tout cas, le texte proprement dit se termine p.103. Dans les quatre pages de son "mot final" (pp.105-108), j'ai apprécié que l'auteur raconte l'histoire... d'une longue gestation pour ce qui est en fait une "nouvelle", entre 2001 et 2005. Elle est formée de quatre parties (non titrées), dont chacune aurait sans doute pu constituer un (court) texte indépendant.

 

Dans la première partie (18 pages), nous sommes presque à la fin de l'humanité, puisqu'il ne reste plus sur Mars qu'un couple (dont la femme est gravement malade) dans une base, alors qu'un "virus militarisé" a exterminé les humains, sur terre d'abord, sur Mars ensuite. 

 

Désormais seul dans la deuxième partie, John Renfrew s'occupe comme il peut (durant 27 pages). Apprendre à jouer du piano? Pas une bonne idée. J'ai été intéressé par l'idée qu'un millier de livres avaient été, non pas transportés depuis la terre, mais imprimés sur place. Intéressante répartition des seuls qui avaient été imprimés tant que le système d'impression à la demande fonctionnait... (p.37-38). Que lire? Philosophie, religion, sciences dures (le pourquoi et le comment de l'existence!). Mais l'articulation entre le macro et le micro, entre l'infiniment grand et l'infiniment petit, entre la relativité générale et la physique (mécanique?) quantique, semble toujours impossible. Un jour, un signal radio est reçu...

 

Dans la troisième partie (14 pages), John a été ressuscité par les "Bienveillants", accourus de là où ils se trouvaient (à 200 années-lumière) dès qu'ils avaient capté les premiers signaux radio émis par l'Humanité. Mais ils ne pouvaient voyager plus vite que la lumière. Ils lui proposent de recréer d'autres humains ou de l'aider à comprendre l'univers... à son choix.

 

La quatrième partie est la plus longue, pas tant en pagination (21 pages) qu'en terme de "durée". Durant des milliers puis des millions d'années, avec le soutien des Bienveillants, John s'efforce d'atteindre le Savoir ultime. J'ai apprécié la description de celui-ci, un peu à la manière d'un oignon (cette comparaison excessivement grossière est de moi!).

 

Ma culture SF contemporaine étant maigre, c'est surtout à l'Asimov de Rama ou des cycles de Fondation et des Robots, et particulièrement au roman "clé de voûte" des deux cycles (Terre et Fondation) avec son personnage "deus ex machina" R. Daneel Olivaw, que j'ai pu songer. J'évoquerai aussi un des prolongateurs d'H.G. Wells, c'est-à-dire Stephen Baxter et son roman Les vaisseaux du temps. John acquiert-il la sagesse ultime? Cela m'a rappelé le mot de l'empereur romain Vespasien alors qu'il passait "de l'autre côté": "Malheur! Je sens que je deviens dieu"... Enfin, j'ai eu une vague réminiscence, mais que je suis infichu d'imputer correctement, un compte-rendu par quelqu'un de culture "classique" de sa conversation avec un "grand homme", quelque chose comme "il me parla de lui, de Dieu, de l'Univers et encore de lui" (à moins que ce soit "nous parlâmes de nous, de Dieu, de l'univers, et encore de nous"?)... S'agirait-il de Chateaubriand et Napoléon, ou bien de deux autres personnes?

 

Je ne sais pas si la conduite des Bienveillants suffit pour tirer cette nouvelle vers du "space opera" et la rendre admissible au XVe challenge Summer Star Wars Ahsoka de Lhisbei. En tout cas, elle peut participer au challenge marsien, mais aussi au 12e challenge de l'Imaginaire organisé par Tornade

 

Après avoir rédigé mon billet, je mets les liens vers ceux d'Elwyn et de Gromovar. AnudarCélinedanaéLe Maki, FeydRautha, Weirdaholic [possibilité d'y commenter réservée à qui possède un compte "Blogger"?] ou Soleil Vert ont aussi rédigé une chronique. Si j'en trouve d'autres, je ne m'interdis pas de les chroniquer... ou de leur proposer le référencement pour mon challenge marsien! Il me semble que ce petit bouquin tente d'ores et déjà l'un ou l'autre des blogs qui y sont dûment inscrits... 

 

(1) Note du 03/09/2024: en réponse au commentaire de ClaudiaLucia ci-dessous, je précise ne pas être l'inventeur du terme blogoboule, mais l'avoir déjà croisé sur la "blogosphère". Une recherche m'a ramené des occurrences dès 2008. Ce qui n'exclut d'ailleurs pas que le jeu de mots ait été utilisé antérieurement. 

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