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Le blog de Dasola
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billet de ta d loi du cine
4 février 2023

The Station Agent - Tom McCarthy

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vais vous parler d'un film qui a aujourd'hui une vingtaine d'années (il est sorti en 2003, et le DVD date de 2004). Etant en cours de visionnage de la série Game of Thrones (nous venons de commencer la série complète - pas plus d'un épisode par jour!), Dasola m'a fait découvrir hier (à l'occasion du reclassement de sa DVDthèque) le film The Station Agent (Les rencontres de Mr McBride), de Tom McCarthy, qu'elle avait vu bien avant qu'on se connaisse. L'acteur principal (sinon le héros) en est Peter Dinklage, qui, comme chacun sait, a été mondialement connu à partir de 2011 dans le rôle de Tyrion (mais, promis, je ne parlerai plus de GoT dans la suite de cet article). 

The Station Agent nous montre des "tranches de vies" d'une "personne de petite taille" (comme on dit aujourd'hui!) à l'âge adulte, Finbar McBride (dit Fin) qui a construit sa vie autour de son intérêt pour les chemins de fer (américains). C'est quelqu'un de plutôt renfermé, quasi-muré dans une solitude choisie. Peu après le début du film, il hérite d'une gare désaffectée dans un trou perdu (je connais des villages français comme ça...). Il va y organiser sa vie (tous ses avoirs tiennent dans une petite valise), entre la lecture de livres sur les chemins de fer et, au fil des jours, l'ouverture à différentes personnes qui, pour commencer, s'immiscent dans sa vie à l'insu de son plein gré. 

En premier lieu, c'est Joe, bon cuisinier, qui conduit le food truck de son père malade, qui s'impose. Des interactions se créent aussi avec Olivia, qui ne sait pas exactement ce qu'elle veut (elle peint des figures humaines dans son chalet) et son ex dont elle dit être toujours amoureuse. Son amour des livres amène Fin à rencontrer Emilie, la jeune bibliothécaire, dans une position intéressante, et son abruti de copain. Il constitue un peu une curiosité locale... même si les notations sont subtiles davantage qu'explicites (oui, mais vous savez bien que j'adore enfoncer les portes ouvertes...). La gérante de l'épicerie du coin se comporte surtout en boutiquière. Cleo, une jeune écolière noire un peu enveloppée, lui organisera une conférence. 

Fin marche beaucoup, surtout le long de voies de chemins de fer (parfois désaffectées): c'est de cette manière qu'il arrive à son nouveau "home". Comme sur beaucoup de lignes en France, le trafic passager est supprimé, mais des trains de marchandise continuent à passer devant la gare. Dans cette campagne américaine, tout les autres utilisent un véhicule. Lui se promène (accompagné ou seul), et cinq kilomètres (le double aller-retour, bien sûr) ne sont pas pour lui faire peur. 

Il s'agit d'un film qui chemine lentement. On ne dirait pas vraiment qu'il progresse, et pourtant, peut-être débouchera-t-il sur quelque chose, après la fin du film? Nous n'en saurons rien. Pour moi, c'est dommage qu'il n'y ait pas eu une suite: j'aurais aimé savoir ce qui se passe "après". Je dirai encore avoir remarqué que la mort est y fortement présente (et liée à la vie). Celle, soudaine, du patron de Fin (qui lui lègue la gare). Une tentative de suicide d'un personnage. Le père d'un autre dont la maladie est sans doute grave. Et divers accidents dont chacun aurait pu s'avérer définitif. J'ai aimé ce film qui m'a aussi évoqué Stand by me.

Quelques mots à propos des bonus du DVD. Le réalisateur a débuté comme acteur, une dizaine d'année (et une demi-douzaine de films) avant de passer derrière la caméra (The Station Agent étant son premier film). Le film a disposé de 500 000 dollars de budget pour 20 jours de tournage. Dans une interview, il dit qu'il n'a pas fait d'école de cinéma, mais qu'il est diplômé en philosophie. J'ai été ravi qu'il y parle de son admiration pour Truffaut: je pensais de mon côté à une saga comme celle d'Antoine Doinel. 

Comme le film et le DVD ont près de vingt ans, le seul blog sur lequel j'ai trouvé un article est L'oeil sur l'écran.

Ah, signalons pour conclure que Fin ne possède pas de téléphone (mobile), non plus.

Edit du 09/06/2023: on peut désormais trouver deux chroniques différentes de ce film sur le blog 1001bobines.

15 janvier 2023

François Mauriac en "lecture commune"

Il y a quelques mois, Ingannmic avait signalé à l'occasion de mon bilan d'un "mois Wells" que, lorsqu'elle avait co-organisé une "activité" bloguesque autour de François Mauriac, il y avait eu peu de participation à part les deux organisatrices. Lorsque j'ai vu annoncé un projet de "lecture commune" d'une oeuvre de Mauriac à programmer pour le 15 janvier 2023, je (ta d loi du cine, “squatter” chez dasola) me suis dit que c'était l'occasion de relire cet auteur! 

P1150626

Vérification faite dans ma pochothèque, je possède cinq livres de François Mauriac, entrés en ma possession entre 1980 et 1982... et que je suis certain de n'avoir jamais relus depuis. Ils prenaient donc depuis 40 ans la poussière entre Maupassant (une douzaine de volumes acquis pour la plupart plus récemment, certains relus plusieurs fois y compris il y a un ou deux ans) et Maurois (relu ou du moins feuilleté aussi plusieurs fois) - les livres de ma bibliothèque m'avaient suivi quand j'ai déménagé en 1988. Et j'aurais été incapable de parler du contenu de mes cinq volumes. Bref, j'ai affecté quelques heures de mon "budget-temps de lecture" des deux dernières semaines aux trois bouquins que je présente ci-dessous.

P1150627Destins, 191 p., copyright 1928, volume imprimé en 1980 et cadeau de Noël reçu en 1982 (191 p.). 

Ce livre présente les relations entre plusieurs générations d'au moins trois familles, dans la bourgoisie de la Gironde, dont certains membres sont "montés" à Paris tandis que d'autres continuent à habiter (voire à agrandir, en rachetant aux précédents) les domaines, la terre, la vigne, la forêt de pins des Landes proches... et à y vivre de leurs revenus. Chacun a ses centres d'intérêt, cloisonnés (les priorités de l'un étant antagonistes avec celles des autres). Famille Gornac: le patriarche a passé plusieurs décennies à acquérir la maîtrise du siège de député local (pas forcément pour l'occuper lui-même, mais au moins pour que l'élu serve ses intérêts). Sa belle-fille Elisabeth supporte bien son veuvage (Prudent Gornac n'était pas vraiment doué pour les affaires), et a peu d'atomes crochus avec son exalté de fils, Pierre, lequel n'a que la religion - catholique - à la bouche (conférences et sermons moralisateurs). Les voisins Lagave: pour la première génération, on ne parle guère du mari. Le vieux Gornac semble avoir veillé à ce que le fils, Augustin, fasse une bonne carrière dans la fonction publique, alors que sa mère servait la famille Gornac? Monté à Paris, Augustin s'y est marié, mais son fils, Robert, ne marche pas dans ses traces (s'élever par le travail, et ne penser qu'à cela - carrière). Robert (Bob) apparaît plutôt comme un esthète dont les moyens d'existence de jeune homme proviennent des services qu'il vend (au titre de ce que l'on appellerait aujourd'hui "décoration d'intérieur - sans parler d'autres "services" demeurés dans un pesant sous-entendu). S'entrelace pourtant avec Robert une demoiselle de la Sesque, Paule, "une jeune fille du vrai monde", descendant d'une famille d'anciens propriétaires des Landes qui a vendu ce qui lui restait de terres (notamment aux Gornac et apparentés?) pour "monter" à Paris. Lorsque Robert vient en convalescence chez sa grand-mère, un voyage l'amène, elle, dans la région. Cette jeune fille est suffisamment affranchie pour posséder sa propre auto (ce qui autorise tous les "coups de la panne") alors que les campagnards continuent à utiliser les voitures à chevaux. Mais c'est bien au mariage avec Robert qu'elle rêve. Pierre va se mêler de ce qui ne le regarde pas, avec des conséquences tragiques et au désespoir de sa mère.

J'ai souri lorsque Elisabeth, jadis parfaite femme d'intérieur veillant à tout dans la maison, constate "Je laisse tout aller" mais s'aperçoit que "tout allait aussi bien qu'au temps qu'elle surveillait les chais, le poulailler, la cuisine et la buanderie". Et aussi en lisant les remarques aigres sur les dépenses excessives générées par le lavage des chemises de notre esthète. 

En avaient parlé: Athalie (sur son nouveau blog), Ingannmic, Miss Sunalee.   

             ***********

P1150628Thérèse Desqueyroux (1927, exemplaire imprimé au 2e trim.1975, donné en 1981 par mon grand frère - 184 p.).

Juste quelques mots sur ce livre. Il fut un temps où il faisait partie des livres incontournables pour une culture littéraire "classique", une lecture recommandée au lycée. Il est l'un des plus connus de François Mauriac, et Claude Miller en a tiré un film en 2012 (je ne l'ai pas davantage vu que l'adaptation précédente de Franju, 50 ans auparavant avant - 1962, du vivant de Mauriac). Comme toute personne cultivée, disais-je, le sait, le roman s'ouvre sur l'acquittement de Thérèse. On découvre que, enfermée dans une vie tristement bourgeoise de mère au foyer, vie plutôt subie que choisie, elle a eu l'idée de "forcer la dose" sur les médicaments que devait avaler son mari, quitte à falsifier quelques ordonnances. Mais en province, pharmacien et médecin se parlaient, à l'époque (cependant que la "receveuse des postes" pouvait "bloquer" une lettre si une famille ayant suffisamment d'influence le lui demandait). Si Thérèse  a été acquittée, c'est bien parce que la famille (père, mari, belle-famille) a fait tout ce qu'il fallait pour "sauver les apparences". Thérèse se retrouve cloîtrée à la campagne, avec quelques livres qu'elle a tôt fait de connaître par coeur (affreuse, la séquence où le mari laisse sans réponse sa demande de commande au libraire!). Elle s'y laisse périr d'ennui. Mais le souci du qu'en dira-t-on et le souhait que sa belle-soeur fasse le mariage qui convient amène un marché: pas de scandale, et on la laissera partir à Paris. Ce qui advient à la fin. 

... Bon, j'ai l'air d'avoir tout dit, mais aujourd'hui, ce "fait divers" donnerait tout juste lieu à quelques articles de presse. Tout l'art de Mauriac est de restituer les pensées successives (ou leur absence) des différents antagonistes, et surtout de faire transparaître les mentalités de l'époque, du lieu, des milieux sociaux des protagonistes (maîtres et domestiques), via les interactions de Thérèse avec son entourage. 

J'ai trouvé une dizaine de blogs ayant chroniqué ce livre: Anis (Litterama) comparait livre et film de Claude Miller, Athalie (sur son nouveau blog), DonaSwannHélèneIngannmic, Lili GalipetteMiss Sunalee, Philisine cave, Sandrine, XL (m'a appris l'existence de deux nouvelles?). Apparemment, en 2012, plusieurs blogueuses littéraires avaient organisé des concours en vue de faire gagner des places de cinéma... Missionnées pour "faire le buzz" autour de ce film et de cette oeuvre? J'ai encore trouvé Des livres des livres!Le bouquineur, Les livres de George, Livrepoche, Pourquoi s'ennuyer (Gaëtane).

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P1150629La fin de la nuit (paru en 1935; mon exemplaire date de 1981 et m'a été offert à Noël 1982 - 253 p.)

Beaucoup moins connu que le précédent, ce roman en constitue la suite. Thérèse Desqueyroux vit à Paris une vie d'oisiveté (appartement, domestique, subsides versés par son mari sur les revenus de ses pins) depuis 15 ans. Lorsqu'elle voit débarquer sa fille Marie, 17 ans, elle est d'abord enchantée de "redécouvrir" une fille qu'elle n'a pas vue grandir, avant d'être atrocement désappointée lorsqu'elle comprend que la gamine n'est pas venue voir sa mère "pour ses beaux yeux" mais dans son propre intérêt... Il y a évidemment un garçon là-dessous, Georges Filhot, un voisin en Gironde, monté à Paris pour étudier à Sciences Po, et qui admire de son côté l'intellect d'un de ses condisciples. Ce qui va amener tout un jeu de "suis-moi, je te fuis / fuis-moi, je te suis" entre les trois ou quatre personnages. Cette fois-ci, il semble que Thérèse, hantée par son passé qui lui sert de "grille de lecture" pour ses rapports avec son entourage, ne s'en relèvera pas. J'ai noté quelques citations qui ont pimenté ma lecture.

p.84, Georges: "Nous ne sommes plus comme nos parents dont toute la vie tournait autour de ces problèmes de dot, d'héritages, de testaments. La crise a flanqué tout ça en l'air: ça ne nous intéresse plus".

p.32, Marie (la rebelle, parlant de son père). "Vous ne pouvez imaginer... Il faut les entendre, grand-mère et lui: "On ne peut plus mettre de côté, maintenant... ou ce que l'on met de côté se perd; et le reste va au percepteur. Tu devras travailler, ma petite,... Nous en arriverons là: il faudra que tu travailles!" Si vous voyiez leur tête quand je leur réponds: "Hé bien! Le beau malheur! Je travaillerai!..." Ils voudraient que je gémisse avec eux. Ils ne comprennent pas que j'accepte mon époque."

p.154, Georges à propos de Thérèse: "Il se souvenait d'un mot d'elle comme de tout ce qu'elle avait dit devant lui: que les jugements les plus opposés sur une même créature sont justes, que c'est une affaire d'éclairage, qu'aucun éclairage n'est plus révélateur qu'un autre...".

p.163, Thérèse songeant à Georges: "Pourquoi se résigne-t-il? Non plus par amour, ni même par pitié pour moi... afin de tenir sa parole, peut-être? Beaucoup d'hommes sont ainsi: ils croient qu'il faut tenir leur parole".

p.196: "Thérèse ne doutait pas d'être le point de mire au centre d'un complot immense et secret... Comment aurait-elle su qu'il n'y avait pas, à cette heure, dans le monde entier, une seule pensée qui lui fût dédiée, qu'il n'existait pas une créature humaine, durant cette nuit, pour se soucier de Thérèse Desqueyroux?"

Vous l'aurez compris avec ces extraits, j'ai trouvé que nos personnages, dans les trois romans, se préoccupent beaucoup trop de "ce que les autres vont penser de soi", tout en cherchant plus ou moins consciemment à les "manipuler" afin de pouvoir, justement, les amener à penser ceci ou cela... Et l'auteur nous donne parfois accès aux pensées d'une personne et de l'autre, chacune étant dans l'erreur par rapport à ce qui se pense en face d'elle. Disons que, si Mauriac en est évidemment resté sur le côté tragique, pour La fin de la nuit, en ce qui me concerne, j'ai eu idée, à cette lecture, qu'on pourrait en tirer une bonne pièce de boulevard!

Quoi qu'il en soit, sur ce dernier livre, je n'ai pu trouver que le billet de Praline.

       ********

Je vais maintenant essayer, moi aussi, un brin d'introspection sur mon rapport à cette littérature mauriacienne. Il n'est pas impossible que, dès mes premières lectures, ce monde de bourgeoises corsetées par les conventions sociales m'ait non seulement paru suranné et futile, mais encore ait provoqué en moi un rejet parce que telle de mes aïeules, née avec le siècle dans une grande ville de province, faisait preuve d'une mentalité datant de sa jeunesse qui me paraissait en complet décalage avec la position sociale occupée dans les années 1980. On me souffle en tout cas que la grande bourgeoisie bordelaise, elle, est bien dans le "paraître" surtout.

Dans ces trois livres qui se déroulent, je pense, entre peu avant ou après la guerre de 1914 et les années 30, c'est un même milieu qui est présenté, celui des propriétaires de pinèdes dans les Landes. Les revenus annuels sont tirés de la résine (avec laquelle on fabrique de l'essence de térébenthine et de la colophane si l'on a l'esprit suffisamment industrieux pour installer une distillerie), cependant que les arbres abattus fournissent des poteaux pour les mines de charbon sinon des traverses de chemins de fer. Les personnages de Mauriac touchent des revenus et ont le souci de veiller à ce que leur patrimoine fructifie (y compris via des alliances matrimoniale et en limitant la descendance du couple). Ils craignent l'incendie pour leurs parcelles de pins. 

Par moment, chez Mauriac, la minutie de l'introspection peut faire songer à du Proust. Quatre-vingt-dix pour cent des pages de ces romans consistent en introspection minutieuse des personnages-clés, ou en l'observation commentée de leurs pensées, l'auteur pouvant savoir à tout moment ce que songe chacun des deux interlocuteurs (en général deux à deux)... "et gnagnagni et gnagnagna" (ajouterais-je méchamment). Leurs abominables turpitudes nous paraissent bien bénignes aujourd'hui. 

Cette "lecture commune" m'a permis en tout cas de m'introspecter suffisamment pour comprendre pourquoi je n'ai jamais non plus relu Proust (auquel La fin de la nuit, par exemple, m'a fait songer par moment) depuis ma jeunesse: trop "cérébral" pour moi... Ces relectures ont été pour moi l'occasion de consulter la liste des autres oeuvres de Mauriac (pas forcément romanesques). Et je me suis dit qu'il existe quelques titres que je découvrirais volontiers, si j'avais le temps et la motivation d'en prendre la peine... Je vais tâcher d'être en veille pour réagir en temps voulu si un autre "Challenge Mauriac" se lance, sur une durée plus importante qu'une "lecture commune" pour une seule journée!

Il semble en tout cas que les blogueuses rédigent peu de billets sur François Mauriac (cela ne veut pas dire qu'elles ne le lisent pas, bien sûr). Une quinzaine de titres étaient disponibles en "poche" dans les années 1980, je suppose qu'on peut encore plus facilement accéder à Mauriac aujourd'hui, si on le souhaite (même si, mort en 1970, il s'en faut encore de 18 ans qu'il soit dans le domaine public). J'ai pris la peine de faire une recherche dans les 70 blogs "Livres" classés comme "actifs" dans la colonne de droite, c'est de là que j'ai tiré les liens vers pas mal de billets sur Thérèse Desqueyroux, quelques-uns sur Destins, beaucoup moins sur La fin de la nuit. Il n'y avait guère que moins d'une demi-douzaine d'autres titres représentés par un ou plusieurs billets. 

P.S.: je rajouterai en "edit" ci-dessous les billets des autres participant(e)s à cette "lecture commune Mauriac du 15 janvier 2023" au fur et à mesure que je les identifierai!

* Le noeud de vipères: Ingannmic, Marilyne, Le bouquineurKeisha (dès le 14!), Passage à l'Est 
* Thérèse Desqueyroux: AnneNathalie (12 ans après un précédent billet). [Grominou a pour sa part attendu avril 2023 pour le lire]

P.S.2:  je rajoute ce 17 janvier 2023 le logo du challenge "2023 sera classique" co-organisé par Nathalie et Blandine.

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9 janvier 2023

Deux-mille-cinq-centième billet et seizième bloganniversaire pour "Le blog de dasola"

16 ans de blog...             
                     ...2500 billets
  (et 30 662 commentaires par 1232 personnes différentes)

Dasola et moi (ta d loi du cine, "squatter" et statisticien sur son blog) avons "cravaché" pour faire coïncider les deux événements en titre ci-dessus. Le 1500e billet remonte à pratiquement 7 années pleines (janvier 2016): et dire que nous nous y plaignions d'avoir eu seulement 1861 commentaires l'année précédente (en 2015)...

En cette année 2023, Dasola me dit "regarde, ce mois de janvier démarre beaucoup mieux que décembre dernier: il avait fallu attendre le 21 décembre 2022 pour avoir les 50 com' que nous avons passés hier, et 27 personnes sont venues" (dont l'une pour la première fois et quelques-unes qui n'étaient pas passées de tout 2022).

Soit; mais le 8 janvier 2022, nous en étions déjà à 63 commentaires par 42 blogueurs-euses...

Pour un bilan 2022, en terme de billets, ce sont 171 qui ont été publiés et rédigés (115 par dasola et 56 par moi). Le nombre de personnes en ayant commenté sur l'année est largement inférieur.

Dans le détail, sur les 123 blogueurs venus faire au minimum un commentaire en 2022 (pour un total de 1475 commentaires), 68 en ont fait au moins un sur un des 56 billets de "ta d loi du cine" (291 commentaires au total concernaient des billets 2022, sur 299), cependant que 112 en ont fait au moins un sur un des 115 billets de dasola (ayant généré 1145 commentaires pour des billets 2022, sur 1176), ce qui nous apprend que 39 commentaires ont été faits, en 2022, sur tel ou tel billet d'une des 15 années antérieures. 

Comparons cela avec l'année la plus faste en terme de commentaires (2014). Janvier 2014 nous avait amené 355 commentaires par 135 blogueurs (davantage de monde que pour toute l'année 2022), et 2615 commentaires sur toute l'année 2014 (par 253 blogueurs...), dont 125 commentaires sur des billets des années antérieures. Les 131 billets en 2014 ont reçu les années suivantes 53 commentaires, entre le 1er janvier 2015 et encore novembre 2022.

Du 1er au 8 janvier 2014, nous avions eu 127 commentaires par 91 blogueurs (je n'ai pas pris la peine de vérifier leur ventilation précise), approximativement le double de cette année 2022 pour les mêmes huit premiers jours de l'année, donc. 

Et ce mois de décembre 2022 a été le pire mois, en terme de nombre de commentaires, depuis 2007, avec 87 commentaires seulement. Il a compté trois jours sans un seul commentaire. J'ai l'intuition que certains "basculements" techniques de la plateforme canalblog n'ont pas été étrangers à ce piètre score. Déjà, en octobre et novembre 2022, il y avait eu des périodes infernales où la plateforme canalblog rendait pratiquement impossible la consultation des blogs en général et de celui-ci en particulier, et a fortiori le dépôt de commentaire... Je suppose que beaucoup de nos blogueurs "habitués" ont dû perdre l'habitude de venir faire un tour chez dasola... Avec des journées complètes d'inaccessibilité du blog: forcement, les "habitués" se lassent, et ceux qui ne connaissent pas encore le blog n'insistent pas et ne reviennent jamais si un lien ne fonctionne pas à leur (premier) passage.

Il est clair que, en 2022, le nombre moyen de commentaires par billets a bien diminué (ceux de dasola en générant toujours davantage que les miens: le nombre de commentaires serait-il inversement proportionnel à la longueur du billet?). L'objectif d'intéresser suffisamment de lecteurs (ou "les lecteurs") pour que cela se marque par un minimum de 100 commentaires (pertinents...) par mois est de plus en plus difficile à remplir. Le 100e commentaire arrive de plus en plus tard dans le mois (les suivants constituent "du bonus").

Bon, je vais tout de même arrêter de trop me lamenter sur le passé. Pour l'anecdote, je remarquerai qu'il arrive que des billets datant de 2007 soient de nouveau commentés il n'y a encore pas si longtemps (Pas de printemps pour Marnie, lors du décès de Sean Connery, en 2020). Et parmi nos 1232 commentateurs, il m'est arrivé de constater qu'une même personne a pu faire un total de deux commentaires, à quelque 10 ans d'intervalle. A ce rythme-là, il lui faudra quelque 50 siècles pour se voir proposer un entretien de présentation "500e commentaire chez dasola" (déjà sept ont été publiés)...

Soyons un peu plus positif, et regardons les choses côté billets, avec un petit focus sur les billets cinéma. En regardant de près l'Index des films par titre et ses plus de 1720 entrées, j'ai fait quelques constats.

Parmi ces plus de 1720 titres répertoriés, quatre films ont bénéficié de deux billets: Bullit et Le trou, deux fois par Dasola, à de nombreuses années d'intervalle; mais aussi L'Exercice de l'Etat et 20 ans d'écart, par dasola et par ta d loi du cine. Neuf titres représentent 18 films différents, qu'ils soient adaptés du même livre (Millenium; Mort sur le Nil; Le crime de l'Orient Express), ou sans rien avoir à voir: L'illusionniste, L'italien, Le grand jeu, Les proies, Souvenir, The square.

Côté Index des réalisateurs, seuls trois films ont été co-réalisés par trois des quelque 1210 auteurs répertoriés: Le petit fugitif, Ernest et Célestine, Une vie secrète. Quelque 900 réalisateurs n'ont bénéficié que d'une seule chronique pour l'un de leurs film. Les plus de 300 autres ont donc eu les honneurs d'un billet (parfois partagé) pour au moins deux films. Parmi les réalisateurs particulièrement représentés dans les billets de ce blog, Woody Allen est à ce jour le recordman avec 11 films, mais on en trouve une quinzaine dont entre six et neuf films ont été chroniqués au fil des ans, et encore dix concernés par cinq films.

Bon, je sens que j'en ai encore perdu certains et certaines avec mes volées de chiffres. Allons-y donc pour quelques considérations plus "générales", un peu en vrac.

Je me dis désormais que ce ne sont pas seulement les réseaux sociaux généralistes (fb, touiter et autre amstramgram) qui ont asséché la vitalité de la blogsphère. Mais peut-être aussi l'émergence de plateformes spécialisées dont la "communauté" est bien évidemment sans commune mesure avec celle de tel ou tel blog particulier, quelle que soit sa notoriété: livraddict, babelio ou booknode...

Les sphères de la blogo sont étanches. Je pense notamment au phénomène générationnel des nouveaux blogs qui naissent autour des littératures "de l'imaginaire": sorciers, vampires, elfes, fantaisy... Les jeunes lectrices ont leurs propres réseaux de blogueuses. Et puis, elles prennent un peu d'âge et découvrent éventuellement la littérature classique (parfois même dans le cadre de leurs études!). Nonobstant, elles resteront plutôt "entre elles" pour en parler... "Génération spontanée"?

Les modes de lecture sur internet ont sans doute changé. C'est vrai que pour ma part, je consulte les blogs essentiellement depuis le grand écran d'un ordinateur de boulot, éventuellement depuis celui (un peu plus petit) d'un ordinateur portable, mais jamais depuis celui d'une tablette ou d'un "smartphone". Du coup, j'écris aussi long que je veux, et ne souhaite pas avoir à anticiper le mode de lecture majoritaire aujourd'hui - j'ai certainement tort! 

Il a toujours existé, naturellement, des manières différentes de bloguer (commenter): laisser systématiquement un mot/une petite phrase sous le dernier billet paru (plus ou moins régulièrement) / chercher un billet commentable en remontant la liste à partir du dernier paru / chercher un billet précis dans le blog / regarder systématiquement tout le contenu du blog à partir du billet le plus ancien puis en remontant le temps / ne commenter un billet que si l'on a quelque chose de pertinent à dire dessus...

Mes billets à moi génèrent nettement moins de commentaires que ceux de dasola. Même pour mes billets "livres", je dirais que beaucoup de blogueuses chroniquent "dans le flux" (des nouveaux livres qui paraissent) alors que, pour ma part (ta d loi du cine), je nage plutôt "dans le stock" (des livres qui penvent avoir été publiés il y a des dizaines d'années).

Je me rappelle avoir vu que tel ou tel blog a déjà fêté ses 16 ans il y a quelques mois, d'autres en sont à leur quatorzième ou quinzième année... Parfois, c'est plutôt la blogueuse ou le blogueur qui est actif depuis tout ce temps, via plusieurs blogs successifs, dont les tout premiers billets ne sont plus forcément en ligne... 

Parmi les quelque 200 blogs qui ont figuré dans la colonne de droite (les blogueurs ayant fait au moins cinq commentaires sous cinq billets du présent blog...) et se sont arrêtés du jour au lendemain, parfois il y a plus de 10 an, mais sont toujours consultables en ligne: combien de blogueurs décédés (covid ou toute autre raison) sans qu'on le sache * ? Ou (plus optimiste) combien ont repris ensuite un autre blog, sans prendre la peine de venir en signaler le lien dans un dernier billet sur leur blog précédent?

Enfin, le statisticien va terminer. Je n'ai toujours pas compris comment il se fait que, sur les MILLIERS de blogs parcourus depuis 16 ans, je n'en ai jamais trouvé un seul qui, au-delà d'une blogroll tenue plus ou moins à jour (avec parfois indication de la date du dernier billet paru [via flux RSS], mais généralement sans indication ou "reclassement" des liens morts ou des blogs en pause...), prendrait en compte pour chaque blog indiqué ses "relations" avec celui qui le répertorie, en indiquant nombre de commentaire et dates des premiers et derniers commentaires! C'est pourtant pas compliqué... (enfin, via la plateforme canalblog, du moins. Mais je sais que c'est aussi faisable via wordpress par exemple, même si je ne connais pas les "back-offices" des autres). J'ai bien réussi à "convaincre" dasola de le faire. Ça demande juste des "mises à jour" rigoureuses, avec vérification éventuelle une fois par an. 

Signalons encore que je me garde plein de possibilités d'extractions de chiffres en tout genres. Ce sera pour une prochaine fois: 17e, 18e, 19e, 20e... bloganniversaires, ou bien le 3000e billet, dans... entre 3 et 5 ans d'ici!

30_000e_commentaire_23-07-2022Et que, pour me faire un peu plaisir en me réservant le droit de rédiger le 30 000e commentaire, il avait fallu que je surveille de près le compteur!

* PS du 11/01/2022: petite pensée pour la blogueuse Gazou (4 commentaires depuis septembre 2020), dont je viens juste d'apprendre, par des hommages rendus sur d'autres blogs, le décès fin novembre 2022.

7 janvier 2023

Indélébiles - Luz

Alors que le massacre de l'équipe de Charlie Hebdo remonte aujourd'hui à huit ans, je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) choisis ce mois-ci de vous présenter comme "hommage du 7" un billet sur le livre de souvenirs que Luz a consacré à ses copains assassinés (parution en novembre 2018 chez Futuropolis). Je me le suis procuré courant 2022.

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Ça commence comme un rêve sinon comme un cauchemar: Luz, perdu dans le noir, arrive à la salle de rédaction pour un bouclage, mais personne ne voit qu'il est là, et Cabu, dernier à quitter la rédaction, l'y enferme en éteignant la lumière... Après cet épisode introductif, notre auteur réveillé se lève, va prendre une bière au frigo, la décapsule: occasion de commencer à se remémorer (sur plus de 300 pages) différentes séquences, des tranches de vie en noir & blanc. En tout premier lieu (p.15 à 26), comment il a rejoint les dessinateurs de La grosse Bertha, arrivant de sa province, à l'été 1991... un an avant le début de la re-fondation de Charlie Hebdo: l'histoire de sa rencontre avec Cabu qui sortait de l'imprimerie du Canard enchaîné lorsque lui s'y rendait, qu'il a osé abordé en bafouillant de nervosité et qui, ayant ri à son dessin d'actualité, l'emmène à La Grosse Bertha, l'introduit dans l'équipe, suggère de publier son dessin... Timidité du jeune provincial de pas même 20 ans! Il en conclut que, pour collaborer depuis chez lui, un fax lui est indispensable (pas d'internet à l'époque - j'ai connu). Des planche bleutées nous ramènent à la nuit d'insomnie, introduisant tels ou tels souvenirs et évocations... 

P1150621 (p.142)

L'un des premiers épisodes montre Charb en action, préparant des blagues pas forcément fines (mais parfois en flux circulaire). Le 21e anniversaire de Luz est fêté grâce à Charb (avec une semaine de retard) à la Rédaction de Charlie Hebdo en janvier 1993. Charb devenu un vrai copain "complice" via leur passion commune pour Les Simpson, à l'occasion d'un des Festivals "Scoop en Stock" de la presse lycéenne et étudiante à Poitiers en 1992 [je ne sais plus si c'était l'année où le petit canard dont je faisais partie à l'époque y a été primé dans la catégorie "journal étudiant", ou une autre...].

La séquence qui débute p. 44 montre la sortie des presses du premier numéro de Charlie, à l'imprimerie (après la scission d'avec La grosse Bertha). [Ces pages m'ont encore rappelé un épisode où toute notre rédaction, crevée par une nuit blanche de bouclage, attendait le retour de repas de notre imprimeur pour voir enfin nos exemplaires sortir à la chaîne (et chacun de se précipiter ensuite à la porte de la quinzaine de "centres périphériques" pour nos quatre facs afin d'y vendre à la criée le nouveau numéro...). Fin de cette seconde parenthèse personnelle].

Luz ne se prive pas de réflexions sur le travail du dessinateur. Sur huit pages, nous avons droit ensuite à une évocation de séance de gommage de crayonnés, sur table puis autour de la table... avec toute l'énergie rageuse de Riss (je crois?). Je ne sais pas si Luz possède effectivement des "chiures de gomme" pouvant être attribuées à chaque dessinateur selon sa méthode (comme évoqué p.60)...

L'ambiance dans la salle de rédaction, les "jours de bouclage", est mise en scène à de nombreuses reprises (avec l'indispensable Luce pour rappeler les délais à tenir), et montre bien l'engagement militant des dessinateurs-journalistes (à l'époque de la seconde cohabitation, notamment) en-dehors de leur salle de travail. On est plongé dans le bain d'une manif dans le contexte de l'époque, et un gnon qui vaut à Luz un point de suture sur le crâne (et une troisième mi-temps post-manif) refait surface. Dessinateur, c'est un métier!

Séquence pédagogique concernant l'académie de la grande Chaumière: Cabu y a emmené les "p'tits jeunes" (Charb, Riss, Luz) faire du dessin d'après modèle vivant... Je retrouve dans mon exemplaire une coupure d'un article paru dans Le Canard Enchaîné du 31/08/2022 (p.5): à ce moment-là, la Grande chaumière semblait sous la menace d'être expulsée de l'atelier où avaient lieu les séances depuis des décennies... Vérification faite ce jour, les activités continuent (même avec des horaires restreints pour raisons financières, depuis septembre 2022): https://www.academiegrandechaumiere.com/

Voici un exemple de séquence d'ambiance de rédac', ensuite (il faut lire chaque bulle, apprécier chaque détail et chacun des personnages croqués), qui commence par le dessin ci-dessous.

P1150624 p.95, une image magnifiquement construite, autour de la "figure tutélaire" (rayonnante?) de Cabu ("le mentor")... 

Vient ensuite un bel hommage à Gébé, accompagné en manif: est-ce une anecdote vécue, un souvenir de discussions qui ont réellement eu lieu, ou un regret de ne pas avoir assez parlé avec ce dessinateur et auteur complet de son vivant (il a été Directeur de la publication de Charlie jusqu'à sa mort en 2004)?

P1150623 L'auteur en lévitation après une couv' publiée et reprise par des manifestants... (p.118-119 - hommage à Gébé - "juste Gébé"). Les pages qui précèdent expliquent bien le processus contributif (itérations successives pour un dessin, sa légende, sa construction) qui pouvait régner au sein de la rédac'. Cette élaboration collective sera montrée à une autre occasion dans l'une des dernières séquences, lorsque Luz s'acharne à (re)travailler sa toute première couv'...

Mais il n'y avait pas seulement Charlie Hebdo dans la vie de dessinateur de Luz à l'époque. Il raconte ainsi une séance de dédicace à Angoulême pour un canard sans beaucoup de lecteurs (Chien méchant), où les dessinateurs boivent des coups en attendant le chaland, font passer de fausses annonces à la sono, et dessinent sans filtre... (à la plus ou moins grande satisfaction des dédicataires et de leurs "accompagnateurs"). On a droit plus loin à nn autre grand moment de dédicace, sur un support original, à la fête de l'Huma... 

Et puis retour au journal, pour de courtes évocations de séances de travail à la fois collectives et individuelles: chacun dans son dessin, mais en demandant parfois de l'aide pour croquer un personnage, pour trouver une photo sur laquelle s'appuyer (sans internet, encore)... séquences reliées les unes aux autres par ses réflexions nocturnes et colorées (les séquences, elles, sont en noir et blanc). "C'est vrai que, parfois, on était plus droles à faire le journal que dans le journal" (cf. dessin plus haut, de la p.142).

L'une des explications possibles du titre arrive peu avant la page 200: ayant pris de mauvaises habitudes en tenant feutre ou pinceau, Luz avait les doigts en permanence incrustés d'encre, ce qui n'était pas sans poser quelques soucis intimes... (séquence auto-dérisoire!).

Ma (courte) séquence préférée reste la série de réactions de Cabu devant la nouvelle photocopieuse (une jolie historiette, que j'avais découverte comme "bonnes feuilles" au moment de la sortie du bouquin, dans une publication de presse...).

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Côté avancées technologiques, on a aussi droit à l'arrivée de la "tablette graphique" utilisée par Tignous. Bah oui, mais si quelqu'un arrache le fil alors que le dessin n'était pas sauvegardé, il n'en reste rien... 

Luz nous partage encore ses souvenirs sur diverses aventures. Par exemple, en reportage dessiné lors d'une tournée musicale de Renaud et Val durant la guerre de Bosnie... On n'a pas envie d'être à sa place! La Bosnie, c'est compliqué. Chez les sado-masos (avec sa compagne), l'atmosphère est autre. En banlieue, c'est autre chose, un autre univers. Et son infiltration chez les Chiraquiens en 1995 a été l'occasion de tenter le "dessin dans la poche" dont Cabu maîtrisait la technique! Encore une séquence retraçant une visite à la prison d'Angola en Louisiane (lors d'un reportage avec Val, alors Directeur de la publication), qui enchaine sur l'art de dessiner pendant les concerts: cette fois-ci, c'est Luz qui (dé)montre une nouvelle technique à Cabu: la "perception rétinienne".

Finalement notre insomniaque se rendort (il est 4 h du matin), ...et une dernière séance en bichromie commence. C'est le jour de la mort de Johnny Hallyday. J'ai trouvé cette ultime séquence très belle. Elle est colorée avec discrétion. On y voit un bouclage à la rédaction, à l'occasion du décès de ce chanteur populaire en France (intervenu en décembre 2017...): tous les "anciens" croisés par Luz sont présents / se présentent pour l'occasion, notamment Cavanna, Gébé, Renaud bien sûr ("alors comme ça, on a éliminé la concurrence?")..., et cette fois-ci, contrairement au début du "roman autobiographique", ils lui parlent et entendent ses réponses (et ceux qui ne se sont jamais croisés en réalité interagissent aussi).    

P1150625 Une belle double-page colorée: le dialogue apaisé (p.302-303)

Et la couv' du numéro bouclé ce jour-là, bien sûr, c'est Cabu qui réussit à la dessiner (et tous de s'extasier). Je ne peux vous la montrer: il faut juste l'imaginer. Bel hommage.

Le 7 janvier 2015, Luz avait 43 ans. Du coup, il est arrivé en retard à la conférence de rédaction, ce qui lui a vraisemblablement sauvé la vie contrairement à tant de ses copains. Si vous songez toujours aux journalistes assassinés (au moins une fois par an, lorsque leurs proches pensent à eux tous les jours), si vous êtes toujours Charlie, alors lisez cet album.

Je suis certain d'avoir croisé ici ou là sur la blogosphère une chronique sur Indélébiles. Mais aujourd'hui, dans l'urgence, je n'ai pu en trouver que deux via moteur de recherche: The killer inside me et Collectif polar. Si je tombe directement sur d'autres par la suite, je les rajouterai en "post-scriptum".

 *** Je suis Charlie ***

30 décembre 2022

Collection "Raconter la vie" / Le parlement des invisibles - Pierre Rosanvallon

J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) remis la main sur mon second exemplaire du livre Le parlement des invisibles de Pierre Rosanvallon, (ancien) directeur de la collection "Raconter la vie" aux éditions du Seuil. Je l'avais acheté en 2020, année de parution de cette seconde édition.

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Le parlement des invisibles, 142 pages, 3,50 euros, format 10 x 15 cm (contre 20,4 x 13,9 pour les livres de la collection "Raconter la vie" elle-même).  

J'ai aussi sous la main une bonne partie de tous ceux de la collection que j'ai achetés (d'autres sont actuellement prêtés via tel ou tel canal). Dasola m'en avait offert plusieurs. 

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En les feuilletant aujourd'hui, je m'aperçois que je les ai pour la plupart aussi vite oubliés que lus, et l'esprit du présent billet n'est pas de les relire. Encore heureux que j'aie pour habitude de noter quelques mots à la fin des "essais" que je lis... et vivent les 4e de couv' de chaque livre (reprises dans le bouquin de Pierre Rosenvallon!). Entre 2014 et 2015, format et prix ont changé (pour tenter de résoudre l'équation économique?): 5,90 euros pour moins de 80 pages, contre 7,90 et une centaine de pages par la suite. 

Voici quelques mots sur chacun des titres photographiés ci-dessus.

Un homme à la crèche, Thomas Grillot. Par un écrivain professionnel, une sorte d'immersion sociologique imaginant (?) un homme faisant un métier "normalement" (?) dévolu aux femmes... et les réactions des collègues, des parents. Pas simple.

La Barbe, Omar Benaala: 1995-1999, le temps pour l'auteur de faire le tour d'un "retour à la religion" pour un voyage au terme duquel il a fini par raser sa barbe et se ranger. C'est écrit avec style, à la première personne. Je l'avais acheté en 2015, quelques mois après publication.

Dans l'oeil du gardien, Jean-François Laé. L'auteur est sociologue. Le sujet d'étude? Le rôle du gardien dans un HLM. De la médiation, de la pédagogie... Beaucoup de plaintes, peu de merci. Quel métier! On y croise même des étudiants en socio. 

Sous mon voile, Fatimata Diallo. Je me rappelle avoir été "dérangé" par cette lecture. Dans mes notes, je comparais cette jeune Malienne à Bernadette Soubirous, tout autant convaincue que l'expression de sa foi était sans conteste le seul mode de vie possible et imaginable... (j'avais noté "se voiler la face"). 

Grand patron, films d'ouvrier, Jules Naudet. Cet ouvrage, l'un des premiers parus dans la collection, est encore un livre de sociologue. Le "patron" en question a souhaité rester anonyme. Il semble assumer sans état d'âme son changement de classe sociale, tout en restant imperméable à toute notion de "lutte des classes"? Citation (p.45) d'une citation: "Franck ne se retrouve donc pas dans l'affirmation d'Annie Ernaux selon laquelle "il était normal d'avoir honte, comme d'une conséquence inscrite dans le métier de mes parents, leurs difficultés d'argent, leur passé d'ouvriers, notre façon d'être"."

Au prêt sur gage, Pauline Peretz. Un des livres qui m'avait le plus intéressé (et je ne dis pas cela parce que l'auteur était la co-directrice de la collection!). Je connais le mécanisme des prêts du Mont-de-Piété. L'analyse sur les motivations des "clientes" (en majorité), leurs histoires de vie, leurs rapports aux objets mis en gage, sur la constitution d'une épargne en "objets de valeur" plutôt qu'à la bourse ou à la banque, le désintérêt, d'une certaine manière, du véritable "coût du crédit"... Tous cela représente un monde "à part", mais fascinant.

Business dans la cité, Rachid Santaki. L'auteur a publié une quinzaine de livre (essentiellement des polars?) entre 2008 et 2020. Cet ouvrage, publié en 2014, semble une oeuvre d'imagination, mais avec une connaissance de l'environnement du "9-3" qui, certainement, rend le récit à la première personne crédible (comme les "série noire" de la grande époque?). 

Les reins cassés, Lou Kapikian. A ce jour le dernier que j'ai acheté, d'occasion, en 2021 (y compris la dédicace de l'auteur). Ce témoignage sur la dialyse et la greffe du rein et les contraintes vécues par une malade (accompagnée dans l'écriture du livre par des "professionnels") m'a permis de mieux cerner ce que vit un de mes propres cousins. Brrr... 

La maison des vulnérables, Sylvia Zappi. Quelques portraits de résidents dans un genre de "foyer social". Des parcours de vie cassée et qui se reconstruisent dans ces murs où les personnes peuvent bénéficier d'un accompagnement à la vie quotidienne.

Les grandes villes n'existent pas, Cécile Coulon. Un témoignage sur une enfance dans un village à la campagne. Et sur la vie au village, au passage à l'âge adulte (symbolisé par le permis de conduire et la liberté qu'il apporte - y compris celle de mourir sur la route). Emma en avait parlé.

L'homme océan, Sylvie Caster. Un style bien journalistique (des phrases courtes: sujet, verbe, complément...) pour parler d'un homme, marin, pêcheur, ancien militaire, tatoué, père de famille... 

Moi, Anthony, ouvrier d'aujourd'hui (sans nom d'auteur). La vie entre petits boulots, enchaînements de CDD entrecoupés de chômage, l'absence d'envie de se retrouver "prisonnier" d'un emploi en CDI (alors que le quitter en démissionnant fermerait la porte des indemnités chômage), formation en alternance arrêtée parce qu'il ne supportait plus, la vingtaine passée, d'être mis sur le même pied que ses condisciples adolescents... En janvier 2014, Anthony avait 27 ans. Il doit donc en avoir 36 aujourd'hui? A la fin du livre, il envisageait de reprendre ses études, en passant le DAEU...

La députée du coin, Nathalie Nieson. Un témoignage intéressant. J'avais noté que cela recoupait un ou deux autres livres du même genre que j'avais lus (mais sans qu'ils s'inscrivent dans un tel cadre de "collection"). A l'époque, l'auteur était député PS. elle avait commencé par être maire, et l'est redevenue à l'issue de son mandat (en tenant sa parole de ne pas en briguer un second). En 2022, elle est devenue secrétaire générale déléguée de Renaissance (le parti de Macron). Comme quoi, avec des études de compta, on peut faire beaucoup de choses.

Je ne me sens pas capable, aujourd'hui, de faire une analyse très poussée de cette aventure éditoriale qui s'est achevée en soumission aux contraintes économiques. Je citerais seulement la préface de la seconde édition du Parlement des invisibles (p.10): "Sur les 26 titres publiés, trois seulement ont eu un fort impact sur les milieux concernés, ayant eu un effet miroir producteur de répercussions collectives (...). Les autres ouvrages, d'après les informations que nous avons pu recueillir, ont, malgré leur prix de vente très bas (6 euros) [sic!], été lus davantage par ceux qui s'intéressaient à la société que par la grande masse des Français d'en bas [re-sic!]. L'indéniable impact éditorial de l'entreprise (il y a eu 185 000 exemplaires vendus pour 26 titres) doit ainsi être modulé par cette considération sociologique".

Je concluerai juste en relevant que j'étais tombé, lorsque j'avais écrit précédemment quelques lignes à propos de la collection "Raconter la vie", sur un article de Frédéric Lordon, en février 2014, qui ne laissait même pas le bénéfice du doute à l'initiative lancée par Pierre Rosanvallon. 

18 décembre 2022

Deux livres à offrir en cadeau à des jeunes d'âge scolaire

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vais vous offrir deux idées de petits cadeaux pédagogiques.

Lorsque nous étions retournés à Guédelon avec dasola il y a quelques mois, j'avais été très intéressé par une démonstration de géométrie appliquée à la construction, au travers de laquelle percolait la passion du "formateur". Ses instruments? Le compas et la règle. Mais nous n'avions pas été accueillis sur le site, comme en 2008, avec une "introduction à l'usage de la corde à 13 noeuds". Du coup, j'avais acheté à la librairie du site l'opuscule que je vous présente aujourd'hui.

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Mesurer et tracer au Moyen-Âge, Guédelon, 2022, 64 pages

Le livre donne des informations sur les différentes unités de mesure, en lien avec le corps humain (donc, bien entendu, variables d'un lieu à l'autre, même si leurs rapports respectifs étaient stables).

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Guédelon a "standardisé" ces différentes unités... 

P1150599 p.10-11.

Page 13, est évoquée la "fameuse" corde à 13 noeuds, dont il est dit qu'elle a été inventée par les Egyptiens il y a plus de 4000 ans. Le titre général de la page est "Les instruments de mesure et de tracés sur un chantier au Moyen Âge".

P1150600 p.21.

Par contre, Wikipedia (consulté le 16 décembre 2022) fait état d'une controverse et insiste sur l'absence de preuve d'usage de la "corde à 13 noeuds" au Moyen-Âge (que ce soit dans l'iconographie ou dans les textes). Conclusion: selon les chercheurs cités, ce serait un "mythe néo-pédagogique" qui remonterait à 1966. Si ce n'est pas vrai, c'est bien trouvé! Le livre peut en tout cas constituer un bon "aide-mémoire" pour des notions de géométrie appliquée: la démonstration du théorème de Pythagore, la définition d'un carré, d'un triangle, d'un trapèze...

Bien entendu, cela n'empêche pas d'aller faire, en saison, une visite familiale au Château-fort.

Et, pour finir sur une anecdote concernant les mathématiques: je connais un professeur de maths qui me chante parfois les louanges du système duodécimal (12), pour multiplier les compétences en calcul mental aux gamins, notamment. Mais, à ma connaissance, il n'a pas encore écrit de livre sur le sujet... 

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*          * 

Le second ouvrage, que je viens de "cueillir" dans une librairie de quartier dans laquelle mon actuel club CIGALES vient d'investir, est encore plus polémique. 

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Le nucléaire n'est pas bon pour le climat, Hervé Kempf, Seuil coll. Seuil libelle, septembre 2022 

Hervé Kempf est journaliste et fondateur du site Reporterre. Il est aussi l'auteur de plusieurs livres sur les thématiques environnementales et la critique du capitalisme (et des capitalistes). Dans ce récent ouvrage, il critique le "pari" fait sur la relance du nucléaire en France, non sans des arguments qui me paraissent solides, d'une part sur le problème des déchets nucléaires, et surtout, d'autre part, sur le risque d'accident d'une centrale nucléaire en France (en contradiction avec le discours officiel comme quoi un accident nucléaire, tel que Tchernobyl ou Fukushima, ne pourra jamais avoir lieu en France). Je pense que la lecture de cet opuscule (54 pages en gros caractères) peut aider à se construire un avis sur le sujet. 

Pour conclure sur ce sujet en donnant ma propre opinion: je suis intimement persuadé que, lorsque se sera produit, en France, l'inéluctable accident aux conséquences catastrophiques clairement annoncées dans ce livre (territoire plus ou moins étendu contaminé et inhabitable, morts par centaines sinon par milliers [y compris pour des causes collatérales: accidents de la circulation, stress...], coût se comptant en centaines de milliards d'euros)... Une fois l'accident advenu, disais-je, tous les experts du monde seront sans conteste capables de nous expliquer par le menu, minute par minute, comment il s'est produit, à la suite de quelle intervention humaine intempestive et/ou de quel événement imprévu parce que totalement imprévisible... alors qu'on nous a seriné depuis des décennies qu'un tel accident était impossible. La question n'est pas là. La question est que nous devrions, le plus rapidement possible, décider de nous passer totalement d'une technologie aussi dangereuse. J'ai dit (et écrit).

A part ça, bonnes fêtes à tous, nous y sommes presque, ce n'est plus qu'une affaire de jours (pour les Fêtes, je veux dire).

7 décembre 2022

Charlie Hebdo, 1992-2015 - Charb

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) ne vois aucune raison de m'énorgueillir pour le n-ième "hommage à Charlie Hebdo" que j'ai péniblement réussi à rédiger vaille que vaille. S'il y a a sujet à appréciation, c'est bien sur l'objet lui-même, une "somme" sobrement intitulée Charb, Charlie Hebdo 1992-2015

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Cette "compilation" en 333 pages est parue en novembre 2016. Je me suis acheté mon exemplaire en août 2019. Je me rappelle avoir remarqué en début d'année 2022, au moment où ce recueil constituait le cadeau offert aux nouveaux abonnés à Charlie Hebdo, que l'"offre [était] valable jusqu'au 31/01/2022"... y compris dans le N°1541 paru mercredi 2 février! Comme quoi il peut arriver qu'une publication prenne un certain retard. 

Le livre commence par trois pages de préface où Luz s'adresse au lecteur (il y précise bien que le livre ne couvre pas toute la production de Charb, mais seulement celle publiée dans Charlie). Les dessins sont classés par année (de 28 [en 1992!] à jusqu'à 60 dessins par année): je suppose qu'il s'agit plutôt d'un recueil exhaustif que d'une sélection? A l'époque où je l'avais acquis, j'avais moi-même consulté les deux premières années de Charlie Hebdo nouvelle série, et il me semble que la plupart des dessins aperçus au fil des pages du journal se retrouvent dans les années concernées du livre (à l'époque, j'avais fait en bibliothèque un relevé des dessins "intemporels" dont je pensais suggérer à Charlie la "repasse" à raison d'un par semaine pour les numéros de ce XXIe siècle, dans une rubrique dédiée). Charlie Hebdo "seconde série" a désormais plus de 30 ans, depuis cette "refondation" en juillet 1992 où Charb - entre autres jeunes dessinateurs - a rejoint les "historiques" de la 1ère série!

Pour en revenir au recueil, on y trouve jusqu'à 6 dessins par page (mais c'est rare), et au total plus de 1000 dessins (en faisant le total des 24 années, j'en ai compté exactement 1055 - avec les habituelles approximations de comptage, entre une double-page foisonnante et un minuscule crobard, qui comptent tous deux pour "1"...). Chaque année s'ouvre souvent sur une couverture de Charb emblématique de cette année-là. Bien entendu, les couv' figurent dans le recueil "Les 1000 Unes 1992-2011" qu'il faudra bien que je finisse par présenter un jour.

J'ai décidé de vous présenter en "citations" uniquement ma propre sélection parmi les dix premières années (1992-2001). Du coup, voilà une bonne raison pour (vous) offrir ce recueil, un beau cadeau pour garder la mémoire!

P1150570 p.10, l'un des tout premiers dessins, en 1992 (n'apparaît-il pas daté aujourd'hui?).

P1150572 p.55, dessin de 1995.

P1150571 p.22, reprise de la couv' du N°40 (31 mars 1993).

P1150573 p.48, dessin de 1995 (en 2022, il ne s'agit plus des mêmes personnes, mais...?).

P1150574 p.63, dessin de 1996 (encore un dessin intemporel?).

P1150575 p.67, dessin de 1996 (avant qu'on parle d'économie circulaire?).

P1150576 p.80, dessin de 1997.

P1150577 p.94, est-ce que la situation s'est améliorée depuis 1998? On pourra bientôt passer un coup de fil à la machine pour qu'elle se mette en marche - et, après-demain, pour qu'un drone nous fasse boire la tasse?

P1150578 p.102 (dessin de 1998, bien sûr...).

P1150579 p.114 (1999): COP, COP, COP... Cocorico?

P1150580 p.136 (dessin de 2000).

P1150581 p.136 encore (2000 toujours). Points de vue et images du grand monde. 

P1150582 p.145: nous y voilà bientôt (2001).

*****

P.S.: dans Charlie Hebdo N°1585 de ce mercredi 7 décembre 2022, je me trouve particulièrement en accord avec l'édito signé par Riss p. 3, titré "Conseil d'ami pour le XXIe siècle", qui commence par "Vivre sans électricité, c'est le défi de la semaine". Je vous cite encore une phrase (vers la fin de la colonne): "En réalité, notre niveau de consommation d'énergie n'a pas été conçu pour satisfaire nos besoins vitaux, mais ceux du marché, qui a besoin de millions de consommateurs pour exister." Vous pouvez lire le texte complet sur le site du journal.

*** Je suis Charlie ***

19 novembre 2022

L'appartement de la rue Henri-Robert - Jean-François Berthier

Le livre que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) chronique aujourd'hui met en avant une unité de lieu à défaut d'une unité de temps. L'appartement de la rue Henri-Robert qui donne son titre à l'ouvrage est ce qui relie entre elles six nouvelles. J'ai commandé cet ouvrage à ma librairie de quartier, et l'ai reçu en moins d'une semaine.

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L'appartement de la rue Henri-Robert, éd. Le temps qu'il fait, 2022, 91 pages

La première nouvelle, La fin d'une légende, se présente comme un témoignage de première main sur une héroïne historique. J'ai apprécié la mise en avant d'un phénomène de rapprochement de personnes de classes sociales différentes "dans la vraie vie", à partir du moment où elles fréquentent, hors de chez elles, un endroit où les rassemble un intérêt commun. 

La fin d'un combat (oui, en fait, chaque nouvelle commence par La fin...) m'a bien évidemment évoqué telle ou telle des nouvelles du recueil Le silence de la mer de Vercors, de par la période traitée (l'Occupation).

J'avoue: la conclusion de la troisième nouvelle, La fin d'une illusion, je ne l'avais pas vue venir. Elle se déroule en 1968.

La fin d'un aveu (la quatrième) est l'une des deux plus longues. Comme chacune, c'est un "récit à la première personne", et cette fois-ci l'héroïne occupe l'appartement du titre dans un cadre de type B&B (une semaine de vacances).

Même si on ne peut pas dire qu'il s'agit d'histoires gaies, j'ai trouvé la cinquième nouvelle (La fin de l'espoir) particulièrement triste: comment "la société" se permet de se mettre en travers d'un élan de rapprochement entre deux personnes (au motif de ce qu'on appelle un "délit de solidarité"?).

Je me suis quelque peu identifié au narrateur de la sixième et dernière nouvelle (La fin du désir?). C'est vrai qu'adolescent, je rêvais d'habiter un jour un appartement pas loin de là (dans l'Ile de la Cité - place Dauphine, comme Yves Montand!). Mais surtout, je me reconnais dans le fait de recopier dans un cahier les phrases des livres qui m'ont le plus touché... depuis des décennies. Et le livre finit comme dans le souvenir évoqué en introduction, par une visite de l'appartement lié à Madame Roland.

Tout n'est-il qu'imagination (au-delà de toute remarque sur la mémoire qui trahit), ou bien a-t-il dans telle ou telle nouvelle quelque élément autobiographique? Il faudra que je le demande à l'auteur, en même temos qu'une dédicace, la prochaine fois que je le croiserai. Car, oui, je ne vous l'ai pas encore dit, je connais l'auteur (qui m'avait annoncé la parution imminente de l'ouvrage), et cette chronique pourrait donc figurer sous un intitulé "copinage" si nous étions dans un titre de presse...

11 novembre 2022

Le cabaret de la belle femme / Les croix de bois - Roland Dorgelès

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Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) voulais présenter, à l'occasion du 11-Novembre, deux livres de Roland Dorgelès sur cette guerre de [19]14-18 désormais tellement lointaine que les humains déjà nés lorsqu'elle se déroulait se font de plus en plus rares... Les deux titres sont éligibles au challenge "2022 en classiques" (co-organisé par Nathalie et Blandine), même si Le cabaret de la belle femme bénéficie, en 2022, d'infiniment moins de notoriété que Les croix de bois pour le(s)quel(les) le grand public connaît encore Roland Dorgelès. Je ré-émets la même hypothèse que j'avais mise dans un billet précédent: peut-être faudra-t-il encore attendre 18 ans avant que le passage dans le domaine public entraîne des rééditions de ses titres moins susceptibles de générer de grosses ventes... Je l'inscris aussi pour le Challenge Première Guerre mondiale 2022 - De 14-18 à nous organisé par Blandine seule pour la 6ème année (il lui tient à coeur!).

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Le Livre de Poche (N°189-190 et 92). Mes deux volumes ont tous deux été imprimés en 1969.

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Je commence par le plus mince (248 pages), qui est aussi le moins connu des deux titres. Le cabaret de la belle femme contient un copyright 1928 chez Albin Michel (en "édition définitive"?), je ne saurai pas dire en quelle année il a été publié pour la première fois. Ce livre-là, je ne l'avais jamais lu "de ma vie", ni même n'avait eu l'occasion de le feuilleter (avc sa couverture "vieillotte" et datée, je ne sais pas si ce N°92 de la collection Le livre de Poche avait connu ou non un succès de librairie à l'époque de sa sortie? Il n'a jamais figuré en tout cas dans les pochothèques des "maisons de famille" que j'écumais pour y glaner de quoi lire durant mes vacances d'enfant puis d'adolescent (prolongé...). Je me le suis offert il y a quelques semaines après être tombé dessus dans une bouquinerie. Les 11 premiers chapitres peuvent apparaître comme des "nouvelles "plus ou moins indépendantes, ayant pour thématique la guerre de 14-18. Dans ce "récit à la première personne", l'auteur dit "nous" avant de passer au "je". Il se positionne comme un  témoin, qui décrit, qui "capte" les conversations entre "camarades". La nouvelle qui donne son nom au recueil arrive alors que les "désillusions" de la vie en campagne ont déjà commencé à être exposées. Dorgelès nous croque des personnages: le principal semble Lousteau, qui peut faire songer aux troupiers de Courteline (jusqu'à finir en apothéose?). Les épisodes alternent entre vie dans les tranchées et "repos" à l'arrière. Si tragique que puisse être la guerre, Dorgelès arrive à en mettre en exergue certains éléments comiques. D'autres pages peuvent décrire des guerriers rappelant le Capitaine Conan de Vercel (Cadinot). Les officiers supérieurs (jusqu'au général inclus) en prennent parfois pour leur grade (si je puis dire). D'ailleurs, les trois derniers chapitres sont présentés comme ayant été rédigés pour faire partie des Croix de Bois, mais (auto-)censurés. Je cite: "ces trois chapitres, qui figuraient dans la première version des Croix de bois, ne furent pas maintenus dans la version définitive. Le lecteur comprendra qu'il était difficile à l'auteur, alors simple caporal, de présenter quelques-unes de ces pages au visa de la censure militaire." Précisons encore qu'il en existe une édition plus récente (1979) avec une autre couverture. Ce bouquin-là, je vais me le garder pour moi dans une pile, pour pouvoir le relire à volonté, l'an prochain ou dans 10 ou 20 ans... 

J'ai trouvé quelques mots concernant ce livre sur le blog littéraire de Jean-Louis Le Breton (dernier billet en 2019). 

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P1150444Les croix de bois

Celui-ci, je me l'étais acheté en novembre 1985 (alors que le film Les croix de bois de 1932 était passé à la télévision le 11 novembre, d'après ce que j'avais marqué dans mon exemplaire). Le livre compte 475 pages, mais il est imprimé en corps plus gros. Il est divisé en 17 chapitres (il aurait donc dû y en avoir 20?). L'aspect "témoignage vécu apparaît tout à fait crédible. Je relèverai entre autre le "besoin" de partager ce qui a été vécu, mais uniquement avec les "frères d'armes", ceux qui peuvent "comprendre" et apprécier. p.253: "Au comptoir, dans un tumulte, les camarades parlaient interminablement de la tranchée: il n'y a que le soldat qui écoute sans lassitude les histoires de soldats. La bouche déjà gonflée de la réplique traditionnelle: c'est comme moi, figure-toi...", ils s'entendaient l'un l'autre, sans chercher à comprendre, et pensant seulement à placer leur récit." Je relèverai encore le constat grandiloquent, p.326: "Au secours! Au secours! On assassine des hommes!" (p.326). On lit des descriptions de massacres (inutiles, vus à hauteur de soldats qui se font tuer par les obus, faucher par les mitrailleuses...). Une compagnie massacrée pour quelques centaines de mètres "gagnés" (jusqu'à la prochaine contre-offensive ennemie), quelle utilité, peut-on penser aujourd'hui. Alors même que l'on sait maintenant que "le soldat" de 14 tiendra toujours, tant que l'industrie a encore assez de matières premières pour produire du matériel de guerre, de la main-doeuvre pour faire tourner les machines... malgré blocus d'un côté (contre les Allemands), guerre sous-marine à outrance de l'autre (contre les Alliés)... La question, vue de l'état-major pour renseigner le politique, n'était pas tant de savoir "comment vaincre l'ennemi" que "comment ne pas se faire vaincre soi-même"... 

Voici ce que j'ai trouvé sur la blogosphère: Isabelle du blog Ribambelle d'histoires, une lecture commune proposée par Blandine, un billet comparatif sur le blog Cercle des chamailleurs (dernier billet, d'ailleurs, en 2018), ou encore un article d'Elizabeth Bennet du blog Ars Legendi.

J'ai appris en rédigeant ma chronique qu'une BD avait été tirée des Croix de Bois, en 2020. Je ne l'ai pas lue (pas encore).

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Au final, à un siècle de distance, je trouve que ces deux livres rendaient bien justice (dès 1919) à ce que les héros morts ont gagné à cette guerre et aux sacrifices qu'elle a coûté: rien à titre individuel, et pour le pays (ou même pour notre Europe!), collectivement, des millions de morts. Aujourd'hui, la préoccupation de nos états-majors est de "réarmer le moral de la Nation" (à coup de soutien à la publication de bandes dessinées patriotiques!), tout en préparant l'opinion publique au fait que, en cas de "guerre de haute intensité", les morts français (de militaires professionnels) ne se compteront pas (plus) en dizaines comme cela pouvait être le cas lors des "opérations extérieures" de ces dernières décennies, mais en centaines, voire en milliers d'hommes. 

7 novembre 2022

Bidoche - Fabrice Nicolino

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous présente aujourd'hui un cinquième livre de Fabrice Nicolino, que j'ai acheté récemment. Bidoche est par contre un livre déjà ancien, mais il reste intéressant par l'éclairage qu'il donnait déjà, à l'époque, sur les filières industrielles de la viande et plus généralement de l'alimentation. Pour rappel, Fabrice Nicolino est l'un des survivants blessés de Charlie Hebdo, et le seul dont les membres inférieurs conservent les traces non pas d'un, mais de deux attentats. 

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Bidoche, éd. LLL (Les Liens qui Libèrent), 2009, 381 p.

Pour qui ne connaît pas le sujet (évoqué dans le bandeau rouge), ce titre constitue une bonne mise en bouche pour soulever le coeur du système de l'industrie agro-alimentaire en France depuis l'après-Seconde Guerre Mondiale et le mettre au jour. Au long du livre, Nicolino raconte, rencontre, rend compte, révèle, dévoile, explique... 

L'auteur commence par préciser qu'il mange (encore) de la viande, mais de moins en moins: le livre explique pourquoi. Il commence par s'intéresser aux hommes, avant les animaux. Pour le dire vite, avec l'augmentation de la productivité agricole apparue dans les années de l'après-guerre, la France a cherché à ce que sa population toute entière ne se retrouve plus dans la situation de restrictions alimentaires qui était celle en vigueur sous l'Occupation. Pour cela, il fallait augmenter les rendements végétaux, et privilégier des "races" animales plus productives (des animaux à viande qui engraissent plus vite, qui ont des muscles plus volumineux; des femelles laitières inséminées artificiellement à partir de reproducteurs sélectionnés; des poules pondeuses "optimisées" pour cela - et différentes des poules "à viande")... Les sagas des différentes filières nous sont contées. Et puis, on voit, on comprend le basculement se faire à partir du moment où l'élevage ne vise plus seulement à d'apporter des produits animaux en "quantité suffisante" à la population française, mais lorsque un système "industriel" cherche à développer ses produits financiers (quitte à utiliser tous les moyens pour inciter le "consommateur" à consommer): on est passé de la production d'aliments "pour vivre" à la recherche de parts de marché pour gagner encore davantage d'argent en diminuant autant que possible les coûts de production. Bref, le système capitaliste, dans toute son horreur. Pour obtenir les "rendements maximaux" de ces "usines à viande" (ou à oeufs, ou à lait...) standardisées (au détriment de la diversité des anciennes "races locales" de terroir), la "ration" doit être optimisée en terme de coût et de profitabilité (prise de poids par l'animal). Aliments miracles (au détriment des vieux pâturages...): le maïs (qui peut être produit en France... mais est extrèmement gourmand en eau), et surtout le soja, importé massivement d'Amérique du Sud (au détriment des forêts primaires et des populations locales). La Bretagne a été choisie pour y développer en masse la production porcine: on en constate depuis déjà quelques décennies les résutats environnementaux (pollution des eaux potables et algues vertes sur les plages).

Beaucoup de thèmes s'entrecroisent dans ce livre cohérent: au départ, la volonté politique de transformer la paysannerie traditionnelle, ventilée à l'époque en trois catégories: ceux qui devraient disparaître (inadaptés et inadaptables); ceux qui étaient considérés comme les "premiers de cordée" de ce temps-là, capable d'atteindre la masse critique visée en supportant les investissements nécessaires; et ceux qui devaient bénéficier d'un "accompagnement" vigilant de la part des pouvoirs publics ou... para-publics. Puis les moyens pour ce faire: imitation de ce qui se pratiquait déjà aux Etats-Unis, en terme de passage à une industrie de plus en plus soutenue par la chimie (engrais pour les plantes, et pratiquement pour les bêtes, traitées à coup d'antibiotiques, à défaut d'hormones comme nos "concurrents" des Etats-Unis). Tout au long de l'ouvrage, notre journaliste cite des noms, donne des détails, le tout non sans l'ironie caustique qui fait partie de son style. Les collusions incestueuses entre chercheurs et laboratoires, députés soutenant telle ou telle filière à coup d'amendement plus ou moins téléguidé, lobbyistes orchestrant l'organisation de colloques, campagnes de presse coordonnées, éléments de langages cités en boucle... sont explicités. Un certain "comité Noé", cercle informel dont la liste des membres n'est pas "publique", a été mis en place pour contrer tout discours susceptible de mettre en péril les intérêts (financiers) de l'industrie agro-alimentaire. Il est clair que le consommateur final français (nous) est manipulé (puisque c'est pour notre santé, on vous dit!).

Après vous avoir exposé ce que j'ai personnellement retenu du livre, je vais en profiter pour dire quelques mots à propos des "vegans", idéologie à la mode en 2022, en pointe sur ce qu'ils appellent "antispécisme". Bidoche, en 2009, ne mentionne pas le terme de vegans sauf erreur de ma part. Le terme (la marque...) a connu une éclosion médiatique plus tardive en France. A l'époque, L214, aujourd'hui célèbre pour ses vidéos filmées clandestinement dans des abattoirs, s'occupait surtout du gavage des oies et canards pour produire du foie gras (évoqué dans Bidoche). Aujourd'hui, L214 interroge plus généralement sur la légitimité de tuer les animaux "sans nécessité", et j'ai bien l'impression que vouloir les manger (et/ou/puis se vêtir grâce aux produits qu'ils nous fournissent, entre mille et un motifs d'"élever" les animaux) ne sera jamais, à leurs yeux, une raison légitime... Pour ce qui concerne les "visées ultimes" et les conséquences finales de cette action quand elle aura été poussée à son terme, je préconise la lecture de La cause vegane, un nouvel intégrisme?, de Frédéric Denhez, dont la lecture m'avait personnellement intéressé (même si, je l'avoue, je n'ai pas enquêté pour savoir par qui ou par quels intérêts il était soutenu ou financé).

J'ai pris par contre la peine de vérifier la position de Fabrice Nicolino sur les vegans. Sans prétendre être exhaustif, je citerai un article (paru dans Charlie Hebdo N°1394 du 10/04/2019) concernant une action de L214 contre le sort fait aux 1000 milliards de poissons tués dans le monde chaque année pour notre alimentation, qui contient les phrases suivantes: "Je ne suis pas vegan et ne compte pas le devenir. J’ai ferraillé contre ce mouvement, et je recommencerai, mais dans l’amitié qui me lie aux deux fondateurs de L214, Brigitte ­Gothière et Sébastien Arsac." Dans CH N°1355 du 11/07/2018, il mettait en garde contre les excès possibles.

Evidemment, pour une raison d'âge (le mien, et le sien), je fais bien plus confiance à la qualité des informations de Fabrice Nicolino qu'à celles d'un quelconque freluquet de 20 ans militant de fraîche date chez telle ou telle association, ou même qu'à un journaliste ou un diplômé Master 2 de ceci ou de cela (de moins de 25 ans) frais émoulu de l'Ecole de journalisme, de la Fac ou d'un Grande Ecole quelle qu'elle soit. Ces "jeunes" parfois excessifs, à mon avis, n'ont pas eu le temps d'acquérir l'épaisseur et la largeur d'esprit qu'amènent les années et - désolé du gros mot - les expériences successives non moins que partagées.

*** Je suis Charlie ***

1 novembre 2022

Regarde les lumières mon amour - Annie Ernaux

Depuis qu'Annie Ernaux a décroché le prix Nobel de littérature le 6 octobre 2022, j'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vu fleurir sur la blogosphère quelques billets consacrés à l'une ou l'autre de ses oeuvres. Pour ma part, j'exhume aujourd'hui un livre que j'avais lu peu après sa parution, lorsqu'il avait été publié dans une collection aujourd'hui disparue, intitulée "Raconter la vie" (éditions du Seuil). Je pensais détenir là le "collector" absolu, mais j'ai déchanté en voyant que le livre avait été réédité par Flammarion avec un dossier visant spécifiquement les "scolaires", et qu'il est également disponible en "Folio" (N°6133), avec une postface inédite de l'auteur. Nonobstant, je vais vous le présenter - peut-être que tous les lecteurs et lectrices du blog ne le connaissent pas?

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Regarde les lumières mon amour, Annie Ernaux, 2014, Seuil, 72 pages

Ce titre a fait partie des six premiers publiés dans la collection. Je ne sais pas s'il a été rédigé spécifiquement pour elle, je suppose que oui: une "signature", ça peut aider un démarrage. En tout cas, il a demandé une certaine préparation - sauf s'il s'agit d'une pure fiction bien sûr. Le titre se présente pourtant comme un essai de sociologie appliquée, sous forme d'un journal d'observations qu'elle a tenue du 8 novembre 2012 au 22 octobre 2013 (le livre est paru en mars 2014). Le récit à la première personne retrace donc ses visites au supermarché Auchan du centre commercial des Trois Fontaines, à Cergy. Cela fait aussi remonter quelques bouffées de souvenirs (supermarché à Londres où Annie Ernaux était fille au pair en 1960, ou Annecy dans les années 1970...). Si vous vous interrogez sur le titre de l'oeuvre, c'est p.40 qu'il est justifié. 

Vu que c'est le seul livre de notre nouvelle Prix Nobel que j'ai lu jusqu'à présent, je ne sais pas si le style "discret" employé dans ce livre est particulièrement caractéristique. Il lui permet de glisser à petites touches quelques critiques plus ou moins voilées de notre société de consommation "de masse", en visant ici spécifiquement Auchan. Au fil des pages ou des rayons sont égrenées quelques considérations sur le jour privilégié pour l'achat du poisson, le fait que la clientèle du samedi n'est pas la même que celle des autres jours, et pourquoi (p.25), sans oublier les interrogations de l'auteur sur les termes à choisir (p.21) pour "qualifier" la clientèle observée. Elle évoque aussi bien le rayon super-discount (produits en vrac, à bas coût, sans "mise en valeur") que l'espace "livres" (pas vraiment une librairie) où sont mises en avant systématiquement les "meilleures ventes". Et puis il y a la saisonnalité des ventes, que la durée de son "journal" permet de mettre en évidence: la "rentrée scolaire" qui se met en place (p.64) dès début juillet ("rends ton vieux cartable, tu auras un "avoir" sur celui que tu achèteras neuf" [en fait, le message semble voussoyer les gamins...]), Noël et ses jouets "genrés" (pp. 18 et 33), le passage de la banque alimentaire (p.29: "pas de pâtes, s'il vous plaît, l'année dernière on en a eu trois tonnes!").

En quelques phrases neutres et l'air de ne pas y toucher, elle parvient à instiller le doute sur le bien-fondé des temples de la politique de consommation. Je vais me permettre une citation (p.28): "Dans le monde de l'hypermarché et de l'économie libérale, aimer les enfants, c'est leur acheter le plus de choses possibles". Par une simple remarque, elle réussit à "déconstruire" le passage à marche forcée aux caisses automatiques au détriment des caissières: en cas d'erreur involontaire quand on "scanne" ses propres achats sur une caisse automatique, on n'a pas l'impression de voler une machine.

Certains thèmes entrent davantage en résonance avec ma propre "grille de lecture": par exemple, la fine observation sur le "super-discount", relégué au fond du magasin, à côté des produits pour animaux... alors que quelques années avant il occupait un espace plus "stratégique", qu'il partageait alors avec le - petit - rayon bio... mais il a fallu étendre celui-ci, destiné à un autre segment de clientèle. p.32, elle relève l'humiliation imposée par les marchandises: elles sont trop chères, donc je ne vaux rien.

Annie Ernaux trouve le moyen d'évoquer deux catastrophes qui ont eu lieu durant sa période d'observation dans des entreprises textiles au Bangladesh dont les ouvrières (en majorité) fournissent nos produits vendus à bas coût en grande distribution. p.31 (à propos de l'incendie d'une usine textile au Bangladesh [28/11/12?]: "Même les chômeurs français victimes des délocalisations sont bien contents de pouvoir s'acheter un tee-shirt à 7 euros". Et p. 62, elle évoque le bilan de l'effondrement de l'immeuble Rana Plazza (toujours au Bangladesh) le 24/04/2013: bilan de 1127 mort annoncé le 13/05/2013. [Auchan a versé 1,5 millions de dollars au fonds d'indemnisation des victimes en août 2014, selon Wikipedia consulté le 29 octobre 2022.]

J'ai trouvé quelques autres billets sur la toile ayant parlé de l'une ou l'autre édition de ce livre: Florian (blog Le dévorateur), My discovery (dernier billet en 2018), Sabell dans son Petit carré jaune (interrompu en 2019), Vio de Culture en jachère (dernier billet en 2021). Et, plus inattendu, le blog Cuisine d'amour s'est même fendu d'un court billet (1)(2).

Jusqu'à ce que je consulte l'article de Wikipedia sur cet ouvrage (le 29 octobre 2022), j'ignorais que Raconter la vie avait fait l'objet d'une adaptation théâtrale en 2016.

(1) Merci à Aifelle qui m'a signalé (en "commentaire" ci-dessous) la chronique qui était sur sur son ancien blog. et m'a ainsi orienté vers celles de Clara, Cathulu et Mirontaine (et tous les rebonds afférents "d'époque", que les moteurs de recherche ne référencent évidemment plus: Yv, Jostein, Emma...).

(2) Sans oublier Maggie... ni LillylivresSharon. ou Sandrion.

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J'aurais souhaité aussi dire quelques mots de la collection "Raconter la vie". J'avais acheté le livre-manifeste de la collection, rédigé par son directeur, Pierre Rosenvallon, publié parmi l'un des tout premiers. Puis j'ai acheté, au fil de l'eau et au fur et à mesure de leur parution, à peu près la moitié des parutions entre 2014 et 2016; et j'en ai déniché par la suite quelques autres en "seconde main" jusqu'à monter aux deux tiers, alors même qu'il n'y avait plus de nouvelles sorties (j'en possède aujourd'hui 17 sur 25)... Ce n'est d'ailleurs qu'à la parution de la réédition du manifeste de Pierre Rosenvalon (début 2020) que j'ai eu connaissance du "bilan global" de l'expérience. Le projet initial comprenait aussi la publication en ligne de "récits" proposés par tout un chacun. J'avais même songé moi-même, un moment, à proposer un texte personnel pour la parution en format numérique. Mais mon "temps de réaction / rédaction" s'est avéré trop long par rapport à la brièveté de l'existence de la collection... Et aujourd'hui, je suis bien en peine de savoir ce que sont devenus les centaines de "récits" publiés, à l'époque, sur la plateforme en ligne qui supportait la collection, au format numérique... Un nouvel article à rédiger, si je creuse davantage le sujet? [voir billet du 30 décembre 2022]

27 octobre 2022

Lettres de la Terre - Mark Twain

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Je (ta d loi du cine, squatter" chez dasola) vous présente aujourd'hui un livre découvert via le système de prêt de livres au sein de l'AMAP dont je fais partie: les Lettres de la terre de Mark Twain (éd. L'oeil d'or, 2005, 87 p.). Je l'inscris au challenge 2022 en classiques co-organisé par Nathalie et Blandine

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Le petit livre ci-contre est un bijou. Je le considère comme se situant au croisement de Candide ou de Zadig de Voltaire, des Histoires comme ça de Kipling, ou des Lettres persanes de Montesquieu. L'édition que j'ai entre les mains, datée de 2005, est celle de la première traduction en français (par Freddy Michalski). 

Mark Twain est mort en avril 1910 (crise cardiaque, apparemment). Sa fille Clara, la seule qui lui a survécu, avait interdit en 1939 la publication de cette oeuvre restée inédite (sa rédaction datant de 1909). Elle ne l'a autorisée que peu avant sa propre mort (à 88 ans - elle était née en 1874). Du coup, Letters from the Earth a été édité aux Etats-Unis seulement en 1962 (année du début du concile Vatican 2 - il n'y a sans doute aucun  rapport?).  

La couverture du livre prend bien en compte la mouche obsédante qui est mentionnée à maintes reprises sous la plume de Mark Twain. Mais commençons par le commencement, le prétexte. C'est Dieu, il donne un cours à ses trois élèves (la Genèse). "A la fin de l'heure, la séance du Grand Conseil fut levée" (fin du 1er chapitre - une page [p.11]). Dans le deuxième chapitre (dialogue entre les trois acolytes - Gabriel, Michel... et Satan), l'un des trois semble manifester diverses réserves à l'encontre de l'oeuvre du Maître. Notamment à propos de la création d'animaux sur un petit globe [qu'Il a] fait il y a de cela quelque temps (trois siècles divins équivalents à 100 millions d'années terrestres?). Ayant eu la langue trop longue, Satan est banni dès le chapitre 3 (une page [p.16]). Et c'est de la Terre qu'il enverra ses épitres clandestines à ses deux camarades (la suite du texte, p.17 à 87). L'archange en visite sur cette planète est loin du Petit Prince de Saint-Exupery. Certaines de ces lettres sont numérotées voire divisées en parties, d'autres non. On peut supposer que le texte était loin d'être définitif et achevé. "Satan" (prétexte?) n'y apparait plus guère, une révision globale aurait peut-être pu amener davantage de "liant". 

Mes lecteurs auront sans doute commencé à le comprendre, lire ce livre est surtout agréable si on le comprend bien en tant que pamphlet subversif, sacrilège, riche en paradoxes, ironie ou satire mordante ... Bref, une bonne publication susceptible de réjouir les mécréants comme moi, mais dont la lecture hérissera certainement les intégristes de tous poils. 

Au fil des lettres sont égrenés quelques morceaux de bravoure. Les analyses concernant l'Arche de Noë (coût de revient, considérations logistiques, contraintes matérielles, etc.) constituent un monument d'ironie (le sujet amène encore Mark Twain à prendre la mouche pratiquement à témoin...). L'auteur s'attarde sur une critique brillante du "paradis terrestre" tel que littéralement présenté (les hommes qui passent leur temps, tout leur temps, à chanter et jouer de la harpe, but ultime d'une vie éternelle...? Ça doit être abominable, sous-entend l'épistolier). Une oeuvre jubilatoire pour moi, certainement blasphématoire pour tous les fondamentalistes prenant leurs "textes sacrés" (??) au pied de la lettre, incapables qu'ils sont d'en faire une lecture critique en les remettant dans le contexte historique et sociologique de l'époque de leurs rédactions. On peut comprendre pourquoi elle a dû attendre un demi-siècle pour être éditée, si en 1910 les Etats-Unis n'avaient toujours pas fait leur aggiornamento sur la bigoterie (l'ont-ils fait en 2022?). Allons, j'admets que Twain est quelque peu de mauvaise foi en mêlant le Dieu de l'Ancien Testament avec celui du Nouveau. Mais c'est encore là un ressort satirique et attirant. La sexualité est aussi bien montée en épingle. Considérée comme une joie mise à disposition par le Créateur, d'où vient donc qu'elle soit simultanément frappée de tabous interdisant de l'utiliser, de la pratiquer, d'en faire étalage (et autant pour les bigots, toujours)?

P1150539Les illustrations réalisées pour cette édition agrémentent (occupent?) 11 pages. Je vais m'abstenir de vous exposer certaines des gravures de Sarah d'Haeyer qui égaient l'ouvrage: quelques-unes ne sont certes pas à mettre entre toutes les mains. La seule que je cite (ci-contre), destinée à illustrer la construction de l'Arche de Noé, me rappelle pour ma part l'adage célèbre "si votre seul outil est un marteau, tous les problèmes auront tendance à vous apparaître sous forme de clous" (je ne prétends pas que c'est ce que l'artiste a voulu exprimer, hein...).

Entre autres excellents préceptes pour ceux ayant engendré un enfant, MT recommande de ne pas lever la main sur lui, sauf par gentillesse ou pour son propre bien (p.34): cela suffirait aujourd'hui, je suppose, à le faire tomber sous le coup de la loi française, qui ne prévoit même pas de telles exceptions, sauf erreur de ma part... 

Pour finir, je regrette un peu l'absence d'une introduction présentant les circonstances de l'écriture. Mais peut-être le "biographe officiel" de Twain (Albert Bigelow Paine), adoubé par sa fille Clara, n'a-t-il pas donné suffisamment d'informations sur Letters from the Earth (oeuvre interdite à la publication)?

En cherchant sur internet si des blogs avaient parlé de ce livre, j'ai seulement déniché un billet amusant sur l'Alamblog, dans lequel Le Préfet maritime allume Actes sud, coupable à ses yeux d'ignorer superbement l'édition que je vous ai présentée. 

Bon, maintenant, il est temps que je m'offre Le droit d'emmerder Dieu, de Richard Malka, l'avocat de Charlie Hebdo, pour un prochain billet... [chroniqué le 07/02/2023]

7 octobre 2022

La rafle du Vel d'Hiv - Cabu

Le sujet de l'"hommage du 7" que je (ta d loi du cine, squatter" chez dasola) vous livre ce mois-ci présente un lien indirect avec l'actualité. Dasola m'a offert à sa sortie le beau livre ci-dessous. Il s'agit du catalogue d'une exposition qui remet au jour une quinzaine de dessins de Cabu réalisé dans les années 1960. L'ouvrage, paru chez Taillandier, peut bien sûr se lire tout à fait indépendamment de l'exposition. Pour ma part, j'ai été visiter celle-ci il y a déjà plusieurs semaines (les photos y sont interdites). 

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Taillandier, DL juin 2022, dessins Cabu © V. Cabut, 56 pages.

Depuis le 1er juillet 2022 et jusqu'au 7 novembre 2022, une exposition commémorant le 70e anniversaire de la Rafle du Vel' d'Hiv et présentant des dessins de Cabu est donc en cours au Mémorial de la Shoah à Paris (au 3ème étage, "entrée libre" - gratuite). 

Comme l'explique l'introduction du livre ci-dessus, en avril 1967, le magazine Le nouveau candide publie les "bonnes feuilles" d'un livre à paraître chez Robert Laffont, La grande rafle du Vel' d'Hiv (de Claude Lévy et Paul Tillard). Fondé en 1961, le magazine est un journal de droite (gaulliste), qui cherche à contrebalancer l'influence de L'Express alors positionné au centre-gauche. Le nouveau Candide cessera sa parution en décembre 1967. Pour le moment, le magazine commande une quinzaine de dessins d'illustration, pour les quatre numéros du journal concernés, à un dessinateur de 29 ans: Cabu (qui collaborait déjà au journal depuis 1964). Mais on n'est pas chez Hara Kiri: les couvertures du Nouveau Candide ne sont pas dessinées, en tout cas pas celles ci-dessous qui annoncent la parution de notre "feuilleton" (pp. 12-13 du catalogue). 

P1150504En 1967, la rafle du Vel' d'Hiv a été oubliée du fait des années passées sinon de par l'historiographie officielle. Alors que la police parisienne a été glorifiée pour sa contribution à la Libération de Paris en août 1944, il n'était pas simple de rappeler sa participation vingt-cinq mois auparavant à une rafle visant à livrer à l'occupant allemand des juifs étrangers, pour un voyage que l'on sait aujourd'hui sans retour pour une immense majorité. Sur les quelque 13 152 personnes (dont 4115 enfants) victimes de la rafle parisienne les 16 et 17 juillet 1942, une centaine d'adultes ont survécu et sont revenus des camps nazis. Rares sont les enfants (des adolescents, en général) qui avaient pu échapper, avant d'arriver à la destination finale, au sort qui leur était réservé. 

Je me suis rendu le mois dernier (jeudi 8 septembre) à l'exposition, après ma journée de travail. J'avais noté que, ce soir-là, Riss et Jean-Luc Porquet, entre autres, devaient apporter au cours d'une conférence des éclairages sur le travail de Cabu. Mais, ne m'étant pas inscrit à l'avance, je ne pensais pas pouvoir y assister (l'événement annonçait déjà "complet" bien avant mon arrivée). Au 3ème étage, au centre de la pièce consacrée aux dessins de Cabu, les originaux sont exposés dans des vitrines horizontales. Sur les murs s'étalent diverses reproductions de différents formats, accompagnés de textes explicatifs. Près de l'entrée, d'autres vitrines montrent des documents, courriers, photos, tapuscrits, différentes publications... (je reparlerai de l'une d'elles ci-dessous). Mais surtout, à mon arrivée, une visite guidée était en cours, et j'ai tendu l'oreille. Je ne m'étendrai pas sur un incident suscité par un individu qui a interpellé notre guide à la fin de son exposé, en arguant qu'il n'y avait pas lieu de "faire de l'humour" avec un événement tragique comme la rafle du Vél' d'Hiv'. Mon interprétation personnelle est que ce monsieur visait avant tout la reprise, par Cabu, de trois de ses dessins de 1967 dans un "remontage" publié en 1971 dans Charlie Hebdo pour attaquer une chanson trop patriotique (voir ci-dessous). Mais il n'a pas su le "verbaliser" et a refusé le dialogue avec le personnel du Mémorial. Ci-dessous, trois des dessins présentés par l'exposition (on peut y voir les originaux). 

P1150506p.50, je cite l'ensemble de la légende: "reprise par Cabu de trois de ses dessins de 1967 pour une double page de Charlie Hebdo (26 avril 1971)". Et p.48: "(...) Le tout est illustré par des extraits de la chanson de Philippe Clay, "Mes universités" (Polydor), dans un jeu de contraste entre les images terribles d'arrestation, d'internement, de déportation, et les paroles complaisantes du chanteur (...)". La chanson est clairement anti-mai-68.

P1150505 p.32-33, l'un des dessins repris ci-dessus.

 

 

P1150483 p.39: un dessin annoncé dans le catalogue comme "inédit", représentant la fuite d'une femme qui s'échappe du Vél' d'Hiv. Celle qui a inspiré le dessin retrouvera par miracle sa fille, poussée aussi vers l'évasion vingt minutes plus tôt. Leur fuite dans le métro est le sujet d'un autre dessin, publié, lui.

À l'issue de la visite guidée et de l'incident relaté ci-dessus, il a été proposé au groupe du 3ème étage de pouvoir assister à la fin de la conférence, sous condition de disposer d'une pièce d'identité à présenter au personnel de sécurité à l'entrée de l'auditorium (où quelques places au fond avaient été pré-réservées). J'ai aussi pu m'y joindre, prendre quelques notes sur ce qui était dit par les différents intervenants (je n'ai bien entendu pas pu tout noter!), et même, à la fin, prendre le micro pour poser deux questions. J'espère ne pas avoir fait d'erreurs dans ma prise de notes! Selon elles, à la tribune se trouvaient Jean-Luc Porquet et Riss, ainsi que deux autres personnes. Laurent Joly, qui a écrit les textes de présentation, n'avait pu être présent ce soir-là. Je n'ai pas bien compris si Véronique Cabut était dans la salle ou non, elle n'était pas à la tribune. Son témoignage rapporte en tout cas que Cabu n'en revenait pas que les gens ne connaissent pas la Rafle du Vél' d'Hiv'. Lui-même, lorsqu'il préparait ses illustrations en 1967, en a fait des cauchemars. Jean-Luc Porquet a précisé que Cabu avait été sensibilisé, vers l'âge de 12-13 ans, par un aumonier, l'abbé Grazer (?), qui avait été déporté. Il a amené ses jeunes ouailles visiter le camp de Struthof. Cabu ne l'a jamais oublié. En outre, il était ami avec le secrétaire de l'association des anciens de Dachau. Cabu avait en général la mémoire historique (par exemple, il connaissait le CV des personnages politiques de la Ve République). À Riss, il a été demandé quelles sont les règles du dessin de presse par rapport à l'Histoire? Réponse: un dessin doit toujours vouloir dire quelque chose, ou attirer l'attention sur quelque chose. On peut faire de l'humour, mais pas faire des mensonges ou raconter n'importe quoi. Surtout, ne pas transmettre des choses mensongères et fausses. Le dessinateur de presse doit en permanence se demander comment les gens vont interpréter ce qu'il dessine. Riss se demande si les dessinateurs ont encore les outils, face à la force des réseaux sociaux? Cabu disait: on doit "venger le lecteur" (lui apporter ce qu'il ne voit pas suffisamment). Dans son cas, la guerre d'Algérie a joué un rôle déterminant: ce qu'il y avait vu n'était pas "dit" en France. Ici, dans un dessin, on peut se demander si dessiner un gendarme en tenue d'été n'était pas une réminiscence, pour Cabu? Riss se demande si elle était inconsciente, involontaire, ou bien réfléchie?

À ma question sur le fait que Cabu se soit représenté lui-même sur un dessin (petit garçon au visage rond, à la coupe au bol brune, à lunettes rondes, regardant le lecteur devant un gendarme, vers le centre du dessin pp.42-43...?), la réponse de la tribune est ferme: non. Riss rajoute que le lecteur ne doit pas "surinterpréter " un dessin. Et à ma deuxième question (sait-on pourquoi l'un des dessins est resté inédit - décision de Cabu ou du journal?), le "spécialiste" présent répond (confirme) que, non, on ne sait pas pourquoi. 

En conclusion, Jean-François Pitet, spécialiste de l'oeuvre de Cabu, analyse que ces dessins sur la rafle du Vél' d'Hiv' cumulent plusieurs techniques: rotring, plume travaillant à l'encre, lavis d'encre de chine, fusain, lame de rasoir (scarifications sur un fond noir). Les textes dans le livre sont un peu plus importants que les légendes de l'exposition, mais ils se répondent parfaitement.

P1150500C'est dans une des vitrines de l'exposition que j'ai vu un exemplaire de ce J'Ai Lu N°A195 ** (collection bleue "J'ai lu leur aventure"). Cela m'a rappelé que je le possédais moi-même (je n'ai pas la totalité des titres de cette collection, mais j'en ai accumulé un bon nombre au fil des décennies). Selon ce que j'avais noté à l'époque dans mon exemplaire, je me l'étais acheté (d'occasion, bien entendu) le jour où Maurice Papon était arrivé à Fresnes (23 octobre 1999) après son arrestation en Suisse deux jours avant. Je viens de finir de le relire (y compris la préface de Joseph Kessel). La grande rafle du Vél' d'Hiv est une litanie de cas individuels (dont les auteurs affirment que chacun s'appuie "soit sur un témoignage recueilli directement, soit sur un extrait de dossier officiel ou de livre déjà publié sur la question", à l'époque). Il vaut aussi témoignage en faveur de tous ceux (souvent anonymes) qui ont fait preuve de compassion et se sont efforcés, chacun à leur manière, de mettre des grains de sable dans le mécanisme mortel si bien huilé par Vichy et ses fonctionnaires zélés. Dans certaines pages du livre, on retrouve bien les "situations" qu'a illustrées Cabu.

Ci-après quelques liens vers d'autres blogs ayant parlé du livre de 2022. La liste n'en est sans doute pas exhaustive, mais j'ai vraiment l'impression que les moteurs de recherche excluent volontairement les blogs de leurs résultats (sans doute est-ce en rapport avec le RGPD d'une part, et les sujets "sensibles" d'autre part - nous voilà "protégés" malgré nous!). J'ai tout de même déniché Henri GolantMatamoune, ou le blog Bonnes bobines

Sans oublier l'article de Riss paru dans Charlie Hebdo le 22 juin 2022 (N°1561).

Je peux aussi citer un album BD retraçant la rafle, que je ne connaissais pas, et dont j'ai trouvé trace chez Les Caphys.

Bien entendu, il existe d'innombrables dessins de Cabu de loin antérieurs à ceux-ci. Un jour, il faudra que je présente le livre (que je possède depuis février 2015) Pas complètement BETE... mais pas encore MECHANT! [chroniqué le 7 mai 2023].

En tout cas, le présent billet, où je souhaitais aborder cinq sujets (la rafle de 1942, le livre de Claude Lévy et Paul Tillard et les dessins de Cabu de 1967, l'exposition et la conférence de 2022), est l'un des plus difficiles à écrire auxquels je me suis affronté depuis que je rédige cette rubrique. 

*** Je suis Charlie ***

3 octobre 2022

La Coupe d'Or - John Steinbeck

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Belette m'a signalé que les participations au "Mois américain en solitaire 2022" pouvaient être enregistrées au moins jusqu'au 3 octobre (le "bilan" devant être publié mardi 4). Du coup, je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vais me fendre d'un court billet sur un (autre) livre de Steinbeck, La Coupe d'Or, que je n'avais jamais lu jusqu'au mois dernier, alors que j'en connaissais l'existence depuis les années 1980. Pour rappel, Belette et PatiVore ont perpétué ce "Mois américain" que sa fondatrice, Titine, n'organisait pas en 2022. J'inscris aussi ce livre pour le challenge 2022 en classiques co-organisé par Nathalie et Blandine

P1150499Je me suis offert le bouquin (d'occasion) le 15 septembre 2022. La Coupe d'Or est le premier livre qu'a publié en 1929 (sans succès à l'époque) John Steinbeck, alors âgé de 27 ans. L'oeuvre est difficilement classable. On peut croire qu'il s'agit d'une biographie du pirate Henry Morgan (personnage historique). Mais c'est beaucoup moins simple que cela. On hésite entre roman initiatique sur le sens de la vie, aventures picaresques, démonstration de l'inanité des choses, tentative de prouver que les pirates qui ont fait rêver tant de gamins (de lecteurs) n'étaient que de pauvres types pas très malins... Ainsi, dans ce roman, nous suivons toute la vie d'un ado attardé du XVIIe siècle qui, élevé au sein d'une famille aisée mais dominée par sa mère, n'a guère qu'une idée ou deux dans le crâne. Notamment, l'idée fixe d'aller courir l'aventure aux Antilles pour y trouver gloire et fortune avant de revenir cueillir l'amour au pays. Mais notre "embarqué volontaire" se heurte évidemment au principe de réalité, une fois arrivé aux Antilles: si la traversée se passe bien, il est vendu comme serviteur pour 5 ans par le capitaine avant même d'avoir quitté le navire. Avant ce terme, il aura trouvé à s'embarquer, cette fois comme boucanier, pour apprendre à mener navire et hommes. Et les années passent, à la poursuite de ses chimères. Il vieillit sans guère mûrir, tout en devenant craint, respecté, aimé? Le roman est rythmé par la manière dont il raconte les aventures que nous lui avons vu vivre, embellies par les ans à chaque récit (que ses interlocuteurs le croient ou non). Après avoir rencontré le Roi (Charles II, roi d'Angleterre) et été anobli, il mourra dans son lit, riche et tout autant insatisfait qu'au premier jour, si j'ai bien compris. Quand on parcourt cette oeuvre, on n'y retrouve guère le Steinbeck écrivain "réaliste" que l'on connaît. Et je ne vous ai même pas dit ce qu'est la "coupe d'or". Ces 303 pages se lisent vite, à vous de vous faire votre propre opinion! 

1 octobre 2022

Covid-19: que nous distillent-ils? - N°30

Avec un beau "chiffre rond" atteint, je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) pense cette fois suspendre (pour la seconde fois) mes parutions "Covid-19" (30 billets en 31 mois, tout d'même!). Après, si Macron remet le couvert d'une manière ou d'une autre sur ce sujet, ma chronique reprendra...

Remontée d'un article très utile en cette période automnale: comment différencier les symptômes d'un simple rhume de ceux du Covid-19? Mais en cas de doute, vous pouvez toujours vous offrir un test, hein... 

07/09/2022: le gouvernement duplique sa communication entre covid-9 et crise de l'énergie... ? Ah bah ça doit être pour faire des économies.

08/09/2022: un pas en avant, cinq pas en arrière...  Selon le PNUD, dans le monde, le niveau de vie est revenu 5 ans en arrière à cause du Covid-19. Et une troisième guerre mondiale, ça donnerait combien d'années de recul? On va éviter de sous-entendre que si ça tuait 7 milliards sur 8, ça sauverait peut-être "la planète", hein...

21/09/2022: les anticorps du nez plus efficaces pour éviter l'infection au Covid-19 (plus exactement, les immunoglobines A)? Depuis le temps qu'on nous promet un vaccin à sniffer (ô bonheur)...

Même date: selon une étude, le risque de caillots sanguins mortels subsiste jusqu'à près d'un an après une contamination au covid-19. Pour les personnes les plus prédisposées, sans doute?

Il fallait, bien sûr, que cela se passe dans un pays développé et se réclamant du capitalisme. 240 millions de dollars auraient été détournés durant le covid-19... Business as usual, surtout au bon prétexte d'aide à l'enfance.

22/09/2022: la barre symbolique du million... de tests hebdomadaires a été franchie, a communiqué le Ministère de la santé. Avec 30 000 résultats positifs, surtout chez les jeunes de moins de 16 ans (d'âge scolaire, donc). Courage, braves gens, vaccinez-vous, re-vaccinez-vous... (enfin, c'est valable surtout pour toutes les personnes qui ont une indication à la vaccination).  

23/09/2022: après deux "rebonds" (Yahoo puis JDD), je suis arrivé sur The Conversation: cela rend compte d'une étude fort complète sur le "Covid long" (qui toucherait des millions de personnes dans le monde). La bonne nouvelle, c'est que les toutous spécialement formés sont capables de le détecter... 

24/09/2022: un autre coronavirus (à ce jour inoffensif pour les humains) pourrait poser un problème de santé publique si jamais il se "combinait" avec l'un de ses petits copains... Khosta à déclarer? 

Si j'ai bien interprété ce que j'ai glané à droite ou à gauche (y compris en demandant à des proches!), il semble que la principale utilisation (à défaut d'utilité) de TousAntiCovid soit (ait été?) de télécharger certificats de vaccination et attestations covid-19 en mode électronique sur smartphone. Tout ça pour ça... J'attends qu'une estimation nous donne le coût évité par rapport... aux impressions papier devenues potentiellement inutiles.

28/09/2022: je trouve que la presse parle de plus en plus du "covid long" ces dernières semaines. Et beaucoup moins de vacciner l'intégralité de la population. A mon avis, "Big Pharma" doit être en train de concocter tout un tas de traitements spécifiques, ou je ne sais pas ce que le terme de "campagne de presse" signifie!

A ce jour, le dernier variant à la mode serait Omicron BA2.75.2. Depuis 10 mois, Omicron n'a cessé de se réinventer, grâce à deux facultés: très haute transmissibilité et échappement immunitaire. Si jamais il se stabilise définitivement, j'espère qu'on l'appellera ZZ3,1415926... Mais finalement, si je comprends bien, l'homme et le virus ont fini par s'apprivoiser mutuellement? Allez, j'ai aucune envie de chercher l'intégralité des interventions filmées de Raoult (le professeur, pas le politicien!). Pour voir si, par hasard, ce ne serait pas une des choses (entre autres vérités ou contre-vérités) qu'il aurait prédites un jour ou l'autre... 

Pour ma part, j'ai fini par me payer mon propre test sanguin. Et voilà ce que ça dit ("sans le mot de passe du propriétaire, vous ne pouvez copier aucune partie du document").
"Sérologie quantitative anti-Sars-CoV2 (Covid-19)
(Technique immunoluminométrique permettant la détermination quantitative des IgG spécifiques dirigées contre la protéine Spike du Sars-Cov-2)
Recherche des IgG anti-Sars-CoV2 (Covid-19)             Positive
"
Titre des Ig G anti-Sars-CoV2 (Covid-19)                           90.5 BAU/mL
Interprétation: Titre < 33.8 : Négatif, Titre >= 33.8 : Positif
Présence d'IgG spécifiques en faveur d'un contact avec le Sars-CoV2 (Covid-19) ou d'une vaccination Covid."
En gros, ça me confirme ce dont je pouvais déjà, statistiquement, me douter, sans vraiment me servir à rien...

Hors sujets: 

23/09/2022 - encore une mauvaise nouvelle: au Groënland, l'état de santé de la morue arctique inquiète. (...inquiète les scientifiques, disons - pas la morue)

Même jour: près de 50 incendiaires ont été arrêtés cette année, de tous milieux sociaux, âges et profils (majoritairement des hommes, parfois fragiles psychologiquement). Il y a quelques pompiers volontaires, mais ce n'est pas la majorité. Du genre? Hé ben moi, je trouve que ça va beaucoup mieux en le disant!  

...Et en même temps, on apprend sur le site Public Sénat que l'indemnité horaire des pompiers volontaires vient d'être augmentée (à 8,36 euros pour les sapeurs-pompiers, 10,13 euros pour les sous-officiers et 12,50 euros pour les officiers). Et la durée de service avant de toucher une rente annuelle est passée de 20 à 15 ans. Le tout cherchant à lutter contre la baisse des vocations. 

Ah, un dernier truc: je ne sais pas qui sont les communicants qui ont pondu le dernier logo en date sur le recyclage, ni combien ils ont été payés, mais ce sont des nuls, je trouve. C'est pas un bonhomme ("Triman") qu'ils auraient dû mettre en avant, mais un trimaran. La mer, si polluée finalement...

== Rappel: sauf catastrophe sanitaire majeure, il n'y aura pas de chronique "Covid-19" le 1er novembre (jour des morts?), ni les premiers des mois suivants... ==

30 septembre 2022

Tortilla Flat / Rue de la Sardine / Tendre jeudi - John Steinbeck

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Je (ta d loi du cine, "sqatter" chez dasola) remercie PatiVore et Belette de m'avoir suggéré l'idée de participer à leur Mois Américain 2022 en solitaire, qui perpétue l'initiative lancée à l'origine par Titine. Il semble que je sois le seul blogueur mâle à avoir participé à leur challenge? Cela m'a donné l'occasion de relire trois romans de Steinbeck, qui m'avaient été offerts pour Noël en 1980, 1981 et 1982. A l'époque, chaque membre de ma famille susceptible d'offir un cadeau pour Noël au grand garçon que j'étais se voyait affligé / infliger (?) par mes soins (d') une liste de l'oeuvre complète d'un de mes auteurs favoris (en général prolixe - et décédé), à utiliser jusqu'à extinction pour Noël et mon anniversaire (seules "fêtes à cadeaux" chez moi). Ces trois romans peuvent aussi participer au challenge 2022 en classiques co-organisé par Nathalie et Blandine

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Je m'y prends pratiquement à la dernière minute pour publier mon billet. Un mois, ça doit être un délai trop court pour moi, le temps d'avoir l'idée, de lire et surtout de chroniquer. Et je voulais faire un seul billet pour les trois livres de la photo ci-dessus (les illustrations des Folio sont de Jean-Paul Théodule, j'ignore l'auteur de celle du Livre de Poche).

P1150491Dans Tortilla Flat (écrit en 1935), John Steinbeck, avec beaucoup de tendresse, peint des personnages haut en couleur, des "paisanos" de Monterey, sur les hauteurs de la ville. Ce sont des "déclassés" sans domicile fixe, dormant dans les bois lorsqu'ils ne sont pas retenus en prison ou chez une belle... Mais quand l'un d'eux se suicide, c'est sans le faire exprès. Le principal héros, Danny, hérite de deux maisons. Il commence par occuper l'une et louer l'autre à l'un de ses copains - qui ne lui paiera jamais de loyer, bien entendu. Ce dernier en invite un autre... avant d'incendier la maison, et nos deux paisanos échaudés rejoignent donc Danny dans la sienne. Puis un autre copain arrive, et encore, et encore... Au final, la Maison de Danny peut faire songer à celle du film Affreux, sales et méchants. Mais les rencontres avec leurs amours de passage se déroulent toujours hors de cette maison-là, le plus souvent chez les femmes, mariées ou non. 

Le gallon de vin que se procurent régulièrement nos compères leur est vendu un dollar (un gallon représente approximativement quatre litres). Ils consomment aussi du brandy, du whisky... mais c'est plus cher! On est vraisemblablement en pleine période de prohibition, ce qui n'a pas l'air de les empêcher outre mesure de se saoûler au whisky de... 4 mois d'âge! En désespoir de cause, s'ils n'ont vraiment aucune autre solution, nos paisanos sont prêts à tout pour se procurer leur boisson, et acceptent même de travailler pour deux dollars par jour. Ce sont de vrais copains, mais qui peut résister à l'attrait d'un verre supplémentaire? Cependant, celui qui vole un membre de la troupe peut en être cruellement puni. 

La bande de Danny, qui s'étoffe au fil du roman, termine à sept personnages : Pilou, Pablo, Jesus-Maria, le Pirate, Big Joe Portugee, Johnny Pom Pom et Tito Ralf. Mais nos paisanos sont parfois sujets à la mélancolie sinon à la dépression, jusqu'à ce qu'une fête leur remonte le moral et cimente leur communauté. Je retiens la citation finale, après la destruction de leur havre de paix."Les amis de Danny gardaient toujours les yeux fixés sur les ruines fumantes. Puis ils s'observèrent l'un l'autre avec des regards étranges et reportèrent une fois encore leurs yeux sur la maison brûlée. Un peu plus tard, ils se retournèrent et s'en allèrent d'un pas tranquille. Il n'y en avait pas deux qui marchassent ensemble". [on notera l'imparfait du subjonctif].

J'ai trouvé quelques autres billets sur cet ouvrage: Joëlle de la Bibliothèque du dolmen, Leiloona, Nad du blog L'amarrée des motsSandra du blog Lettres et caractères

P1150493Rue de la Sardine (paru en 1945) est un peu de la même veine. Nous sommes toujours à Monterey, mais cette fois dans la partie basse de la ville, du côté des conserveries. Dans les 30 premières pages du roman, Steinbeck nous conte deux suicides différents (pour différentes raisons). Et pourtant le roman fait aussi dans le genre comique. Il est composé de chapitres dont les liens sont ténus, on peut plutôt les considérer comme des "tranches de vie" sans vraiment de début ni de fin... Il nous narre la vie des habitants du quartier. Les 32 chapitres n'ont même pas de titres. Ce coup-ci, l'équipe de loosers sympathiques est menée par Mack. La bande se compose de Gay, d'Eddy, d'Hazel. Il y a aussi le propriétaire de leur "palais [des coups]" (Lee Chong, le marchand chinois d'en face), la Maison de Dora (Le drapeau de l'Ours) et ses filles, Henry le peintre qui vit dans un bateau éternellement en construction... Entre autres personnages, on y croise aussi la ford T. Je ne résiste pas au plaisir d'une citation: "quelqu'un devrait se décider à écrire un essai sur les effets moraux, physiques et esthétiques du modèle T sur la nation américaine. Deux générations d'Américains en savent davantage sur les engrenages du modèle T, que sur le clitoris, sur le système planétaire de son changement de vitesse que sur le système solaire des étoiles. Chez nous, le modèle T a modifié pour une grande part la notion de la propriété. Les clefs anglaises ont cessé d'être un objet personnel, et une pompe pour gonfler les pneus appartient désormais à celui qui l'a ramassée le dernier." A part cela, comme figure notable, le roman comporte aussi, voire surtout, Doc (personnage inspiré d'un ami de Steinbeck), qui tente péniblement de vivre de son activité de biologiste dans le laboratoire dont il est propriétaire. Doc, c'est la providence du quartier, celui qui vous dépanne de quelque sous contre des animaux dont il n'a pas forcément besoin, celui qui, tout en s'en défendant, peut soigner les bobos: tout tourne un peu autour de lui... Et quand, pour le remercier de ses services, les habitants du quartier décident de lui offrir une fête, c'est souvent lui qui en fait les frais!

Concernant Rue de la Sardine, j'ai seulement déniché un vieux billet (commentaires fermés...) sur le blog Le bouquineur

P1150492Tendre jeudi (publié en 1954) enfin, c'est une extraordinaire histoire d'amour, l'envers lumineux du si sombre A l'Est d'Eden. Il s'agit de la suite de Rue de la Sardine. Suzy n'est pas un homme (comme celui que chante Joe Dassin), certes non. Cette fois-ci, il y a une histoire avec un début, un milieu et une fin, et 40 chapitres avec des titres variés et signifiants (certains ne font que 2 pages). Le premier chapitre dépeint ce qui s'est passé "rue de la Sardine": notamment, la seconde guerre mondiale... Doc a été appelé sous les drapeaux, et, de retour dans ses foyers, doit relancer son laboratoire... (il a l'idée d'un article scientifique qu'il ne lui reste plus qu'à rédiger). Le nouvel épicier est mexicain. On peut relever que, à cette époque-là, le gallon de vin vaut 62 cents [0,62 dollar] (p.172). Mack et sa bande constatent que Doc a le blues. Au 5ème chapitre, Suzy entre en scène. Doc et elle vont se tourner autour, s'attirer et se repousser... avec leurs caractères respectifs bien trempés. Il faudra que toute la bande du quartier s'en mêle, spécialement Hazel, esprit simple, qui, à défaut de devenir Président des Etats-Unis, s'avèrera très efficace dans le rôle de Deux ex machina. Et l'on verra à la fin (le chapitre 40 est magnifique!) Doc et Suzy partir en expédition de recherche scientifique vers le bord de la mer... 

Je n'ai pas pour le moment de billets ayant chroniqué Tendre jeudi à indiquer. 

Je noterai que mes éditions de ces trois oeuvres ont chacune été traduites par une personne différente (je suis bien incapable de lire de la littérature étrangère en VO). C'est peut-être ce qui explique quelques menues différences (par exemple L'ours au lieu du Drapeau de l'ours, le Palais au lieu du Palais des coups...).

Je prends en tout cas conscience que, à l'époque où j'ai lu pour la première fois ces trois romans, internet n'existait pas: chercher les oeuvres disponibles (ou même existantes) pour un auteur donné était nettement moins simple qu'aujourd'hui... Je peux signaler que j'ai découvert en septembre 2022 l'existence de nouvelles oeuvres de Steinbeck publiés en français dans l'une ou l'autre collection format poche, en plus de celles dont je connaissais les titres parce qu'ils figuraient comme "autres titres" dans mes bouquins des années 1980 (Folio et/ou Poche), voire dans les catalogues de ces collections, que distribuaient les libraires lorsqu'on les leur demandait: Voyage avec Charley, Dépêches du Vietnam, Lune noire, Dans la mer de Cortès, Une saison amère, ... sont donc des livres que j'ignorais. Leur découverte pourrait être à mon programme pour un prochain "Mois américain"!

7 septembre 2022

Au diable vauvert - Maryse Wolinski

Ce mois-ci, dans le cadre de mes "hommages du 7", c'est un simple roman que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vais commenter. Mais bon, pas n'importe quel roman, puisqu'il s'agit du premier publié par Maryse Wolinski. Cela fait aujourd'hui presque un an que la veuve de Georges est décédée. J'ai trouvé ce livre d'occasion il y a quelques semaines, mais je vais ci-dessous me cantonner à une chronique littéraire "classique". 

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Le dessin de couverture, non signé, est bien sûr de Georges, pour l'édition en "poche" (J'ai lu N°2560, mars 1989) du 1er roman de Maryse (Flammarion, 1988, pour la 1ère édition). Mon exemplaire avait été acheté en octobre 1989 par son ou sa premier(e) propriétaire...

La première partie commence par l'exposition des personnages, autour de la famille Sainte-Lagüe, dans l'après-guerre de 1940-44. Ida se trouve être la mère de famille. Anna, sa fille, l'héroïne principale, a 5 ans au début du récit, lorsque naissent ses deux frères jumeaux Antoine et Amaury. Etienne Sainte-Lagüe, le père, représente une sorte de hobereau local. Parmi l'entourage de la famille, on trouve encore Clémence, la grosse cousine (secrètement amoureuse du père), Fernand, le fermier, et Raymond son fils, de 4 ans plus âgé qu'Anna, et enfin Estrella, la belle Andalouse, mère d'Inès (sa seconde fille), une des maîtresses d'Etienne, devenue fille-mère (de Violetta).

A l'occasion de la naissance des jumeaux, Etienne décide de racheter le château local (en ruine), Seyrac-de-Haut qui surplombe le village et la Baise, rivière capricieuse. Ah, et le Diable vauvert, me direz-vous? Il s'agit d'une bâtisse abandonnée dépendant du château, que découvre à 5 ans Anna lorsque la famille s'installe dans celui-ci. Et voilà le décor planté pour une tragédie clanique. A 10 ans, Anna ne supporte pas d'entendre dire que ce sont ses frères qui reprendront les vignes familiales (p.34). Anna a les mêmes yeux vairons que sa tante maternelle décédée. Sa seule amie est Elisa, le même âge qu'elle, fille d'une voisine. Dès ses 16 ans, pour sa part, Raymond a déjà tous les vices (il boit, notamment)... 

La deuxième partie, la plus longue, reprend l'histoire lorsque, à 22 ans, diplôme de l'Ecole d'agriculture de Bordeaux en poche (elle y a passé 3 ans en internat [?]), Anna revient sur le domaine (p.60). Elle doit épouser un étudiant en droit, Philippe, fils des plus importants viticulteurs de la région. Et, le lendemain de son retour, encore un drame: une sale affaire, dans laquelle les coupables seront finalement... ses frères. Verdict: cinq ans de prison, dont un avec sursis. Alors qu'Anna avait pris fait et cause pour la victime, ses beaux-parents potentiels, eux, conseillaient de "ne pas rompre la loi du silence" (p.116). 

Dans la troisième partie, quelques années plus tard, Anna a fini par épouser Jules, le maire dilettante, malgré ses quelques années de plus qu'elle, et a pris en main en son nom la coopératve viticole, les affaires de la commune... Mais survient la mort du père, avant celle du mari (un accident de voiture, avec le volant pris un peu trop imbibé...).

Maintenant que j'ai raconté une partie de l'histoire (qui s'étend sur plus de 200 pages, je le rappelle), quel est mon sentiment sur ce livre? Je dirai que sa lecture n'est pas forcément faite pour apaiser l'esprit. Bien sûr, ces histoires d'enfants et d'enfance ne comprennent ni vampires, ni zombies, ni magie, ni superpouvoirs ou technologies surpuissantes... Rien que du naturel! On n'est pas vraiment non plus dans de la "Chick Litt" (si ce n'est que l'héroïne dévoile au fil des ans des talents d'entrepreneuse et de politicienne). Mais les péripéties sont noires, ou plutôt sanglantes.

Quelles autres oeuvres puis-je évoquer sur le thème de l'enfant mal aimé par sa mère? Je pourrais l'inscrire dans la lignée d'autres livres que j'ai lus jadis: Poil de Carotte, de Jules Renard, Vipère au poing, d'Hervé Bazin. Dans Malevil de Robert Merle, le schéma initial est inversé: ce sont les deux soeurs qui sont préférées au garçon... Et n'oublions pas le sort pas très enviable des gamines campagnardes tel que dépeint par Colette dans Claudine à l'école (paru en 1900!) [chroniqué le 26/07/2023].

Vu l'ancienneté du livre Au diable vauvert, en cherchant sur internet, j'ai seulement trouvé un article universitaire, datant de 2014, de Lori Saint-Martin, enseignante canadienne à l'Université du Québec à Montréal et spécialiste des études féministes en littérature. 

Le site personnel (officiel) de Maryse Wolinski est toujours en ligne (avec un nom de domaine personnalisé). Il n'a pas été mis à jour après son décès, je suppose qu'Elsa n'en a pas les codes (ou bien aura souhaité le conserver "tel quel"?). La fiche du roman Au diable vauvert y permet de se le procurer en ligne.

*** Je suis Charlie ***

1 septembre 2022

Covid-19, mais de quoi parlez-vous? - N°29

Même si je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) n'ai pas en permanence été "connecté" à la presse durant le mois d'août 2022, mon impression est tout de même qu'on parle de moins en moins de notre "cher" Covid-19, globalement.

09/08/2022: les performances des footballeurs atteints par le Covid-19 baissent pendant plusieurs semaines. C'est affreux.

10/08/2022: je juxtapose deux informations. Dix milliards de dollars pour de nouvelles armes pour l'Ukraine. 89 millions de dollars pour déminer l'Ukraine. Par association d'idées (je suis très fort pour les associations d'idées...), ça me fait penser aux milliards de chiffre d'affaires pour les entreprises fabriquant les vaccins... et aux quelques millions accordés parcimonieusement aux hôpitaux.

Si vous manquez de pif après un épisode covid-19, et que vous avez plus de 60 ans... Ça ne sent pas très bon! 

Une prochaine vague annoncée, "probablement pour l'automne". Ah bah on peut pas dire qu'il fait pas le job, Monsieur le Ministre, hein... Va-t-on nous remettre sous cloche fin septembre?

 11/08/2022 : et encore un petit plaisir potentiel en perspective (le virus Langya pourrait sévir)... Vous croyez qu'on va louper le coche, ou pas?

26/08/2022: Moderna porte plaine contre Pfizer et BioNTech pour violation de brevet, selon Le Point (source AFP) et Le Journal du Dimanche (avec AFP). Les loups entre eux (enragés? Qui communique(nt)?). Tout ça tournera en eau de boudin et se terminera par un accord (au montant strictement confidentiel) portant sur quelques milliards de dollars (une broutille). Je suggère qu'on fasse comme pour Renault, à la fin de la guerre: qu'on les nationalise, ces "Big Pharma"! 

24/08/2022: rien à voir (a priori) avec notre covid, mais un article médical m'a fait rire. Moralité que j'en tire? Messieurs, mangez plus de yaourts. Mesdames, arrêtez d'en manger!

En cherchant dans des "bribes" d'informations que j'avais stockées sans en faire état au fil des mois, je retombe sur une information sortie le 21 février 2021 (dans le New York Times, à l'origine), concernant Trump: apparemment, il avait été davantage malade du Covid-19, en octobre 2020, que ce qui avait été rendu public à l'époque. Sans commentaire (et on l'a soigné, aussi? Sans AUCUN commentaire...).

Un article de septembre 2020 à propos de l'utilité du masque: finalement, il serait plus utile pour protéger les autres de moi (si je suis contagieux) que pour me protéger (si je suis exposé à la contamination). Cependant, diminuant la quantité de virus auquel je suis exposé, il contribuerait à atténuer la gravité des symptômes de la maladie (via une sorte de mécanisme de "vaccination"? l'article parle de "variolisation"!! [j'avais dû l'éliminer parce que "réservé aux abonnés"?]). Pas très clair, tout ça... Finalement, on n'en sait trop rien?

Depuis combien de temps ne nous parle-t-on plus du nombre de masques vendus chaque jour ou chaque mois? Où en est ce business? Moi, mes masques dits "jetables", je les garde, et les réutilise (après décontamination? Cette question!) aussi longtemps que les élastiques tiennent (c'est vraiment bâti fragile, bien sûr...). Au fait, est-ce que ce n'était pas à cause d'attaches devenues défectueuses que nos "stocks gouvernementaux" d'un milliard de masques avaient fondu, depuis la crise du N1H1?
Et, bien entendu, je les range soigneusement, après chaque usage, mes masques lavables utilisé, dans leur enveloppe individuelle. Et, si je suis masqué sur une longue période d'affilée, j'en change au bout de 4 heures. Heu... je suis vraiment crédible, là?

J'avais eu il y a déjà longtemps l'idée d'associer quelques bribes de culture populaire concernant Henri IV avec le covid-19 (mes fameuses associations d'idées). Allez hop, mieux vaut tard que jamais.
C'est Henri IV qui, mécontent de ne pas avoir été accueilli dans une ville par 100 coups de canon, demande à l'édile pourquoi. "- Majesté, il y a mille et une raisons. La première, c'est que nous n'avons pas de canon... - C'est bon, je vous dispense des 1000 autres." Pourquoi est-ce que tout le monde n'a pas téléchargé TousAntiCovid sur son smartphone?
C'est Henri IV, qui surpris par l'orage, se réfugie dans une pauvre masure, dont la toiture laisse passer des filets d'eau... Le Roi au maître des lieux: "- Mais enfin... pourquoi ne répares-tu pas ce toit? - Oh, Sire, avec cette pluie? - Soit... Mais quand il ne pleut pas? - Ha, Sire, alors ce n'est pas la peine!". L'hôpital pourra-t-il faire face à la prochaine vague?

Pour le moment, en tout cas, l'hôpital gère. Et si l'hôpital gère, tout va bien, non?

Toujours beaucoup d'intérêt à regarder la page wikipedia comparant les scores par pays... même si les scores sont certainement (faute de tests) sous-estimés dans certains pays.
En France: plus de 34,5 millions de cas confirmés en France à fin août 2022. J'aimerais bien savoir quels ont été le nombre de tests réalisés, le chiffre d'affaires correspondant, la marge réalisée par les différents acteurs de la "filière" par rapport à ce qu'a dépensé la sécurité sociale, et pour tout dire les bénéfices tirés de ce gros business?

Est-ce que, à une prochaine occasion, le gouvernement sera capable de faire confiance a priori aux Français? Par exemple, dire ce qu'il en serait de l'absence de masques ("on n'en a pas mais fabriquez-en vous-mêmes", plutôt que "ça ne sert à rien") ou de la fermeture des bars à 22 h (parce que accidentogènes alors que les hôpitaux ont autre chose à faire...)? 

Il n'est pas impossible que cette "revue de presse chronique" soit l'une des dernières que je rédige sur le sujet. Je ne sais pas si elle manquera à grand monde...

29 août 2022

Comme un hibou au soleil - Maurice Denuzière

Encore un livre que j'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) chiné vendredi 26 août 2022 chez l'un des nombreux libraires d'occasion que je fréquente à Paris.

P1150480Comme un hibou au soleil (1974, 188 pages dans cette édition LDP datant de 1984) se lit très vite et et agréablement. Un quidam (Félix, écrivain...) se laisse convaincre par un ancien copain de classe de devenir honorable correspondant d'un service secret français pour une mission faisant appel à son talent personnel (que laisse plus ou  moins deviner le titre). Et voilà notre "anti-héros" propulsé aux Bahamas, comme un poisson chinois, pour y rencontrer un "contact". Ce n'est qu'après quelques premières mésaventures qui l'ont laissé impavide qu'intervient cette rencontre. Le compagnon d'aventures de Félix s'avère être François, un vétéran du "service action". Et c'est parti pour quelques journées de "planque" dans un archipel isolé et désolé, mais avec au moins le soleil et la mer. Pour passer le temps, en plus de le forcer à s'entraîner à la natation, François ne manquera pas de [nous] servir un couplet patriotique sur le fait que, ancien résistant, il ne lui a pas été possible de reprendre ses études ni une vie "normale" après la libération, et qu'il a préféré consacrer sa vie, dans l'ombre, à lutter contre la subversion et pour protéger les citoyens insouciants dans ce monde resté si dangereux... Bref, au cours des pages, notre écrivain si candide au départ s'avèrera un tireur passable à la carabine, et même capable, à l'occasion, de tirs mortels. On se croirait dans un James Bond de la belle époque (mais avec davantage d'humour!), impliquant base secrète, organisation qui ne l'est pas moins et qui cherche à dresser les Etas-Unis contre l'URSS, sans oublier les "girls"... Heureusement que la France est là pour sauver le monde! Tout est bien qui finit bien quand arrive au rendez-vous (convenu par radio) la frégate Suffren... Ce navire de la Marine nationale, je sais qu'il a vraiment existé (actif entre 1969 et 2001). Pour le reste?!?

Je n'ai pas réussi à trouver de blog ayant parlé de ce "vieux" livre. Pour ma part, jusqu'à présent, je ne connaissais guère Maurice Denuzière (96 ans aujourd'hui même [29/08/2022]!) que par la saga Louisiane (1977-1987, j'en possède cinq tomes...). Pas mal de temps s'étant écoulé depuis, un nouvel épisode Louisiane ne serait-il pas envisageable, en y intégrant jusqu'aux décennies les plus récentes (chute du mur, interventions américaines ici ou là, changement climatique et ouragans, gaz de schiste... et coton bio)? Quitte à se faire assister par une plume plus jeune, comme l'a fait par exemple Arthur C. Clarke (sauf erreur de ma part) dans ses dernières oeuvres? Le dernier livre publié par M. Denuzière remonte à 2016 (sauf erreur de ma part - bis).

Quant à une série "Hibou"... J'ai juste vérifié (non sans mal pour dénicher l'info!) que L'Anglaise et le hibou, rédigé précédemment (en 1961), n'avait rien à voir avec notre nyc... (oups pardon, spoiler!) notre héros, mais tout avec une statue de Guy Lartigue. Pour Comme un hibou au soleil, ça n'a donc pas été le début d'une série à la "Langelot". Bon, il faut dire que Langelot est plus "jeune" [Bibliothèque Verte], il tue rarement et ne couche jamais - sauf erreur de ma part (ter). Quant à la Bibliothèque Verte telle que je l'ai connue, elle a disparu...

21 août 2022

Monsieur Papa - Patrick Cauvin

Encore un billet de Ta d loi du cine, squatter... sur un "vieux bouquin" chiné dans les bacs de librairies d'occasion.

P1150432  P1150433
Monsieur Papa, Le Livre de Poche N°5699, 217 p.

J'ai acheté il y a quelques jours ce livre que je dois posséder par ailleurs dans ma propre pochothèque depuis quelques décennies [1996, vérification faite]. C'est le genre d'achats que j'effectue dans les bacs d'occasion avec des "classiques de poche" à 30 centimes d'euros (0,50 centimes d'euros les 3 - ça ne vaut plus rien, un livre!). J'avais dans l'idée de le mettre dans l'armoire à livres du hall de chez dasola. Et puis, tant que j'y étais, je l'ai relu. Et tant que j'y suis, j'en tire un billet (mon précédent sur un roman de Patrick Cauvin remonte à 2010 - déjà). 

Par comparaison avec une autre de mes lectures (le premier roman de Maryse Wolinski, que je chroniquerai dans quelque temps), j'ai trouvé ce livre d'"enfance" reposant. Patrick Cauvin l'a écrit en se glissant dans la peau d'un gamin de 10 ans (Laurent), dont les parents sont séparés (c'est récent). Laurent préfère rester avec son père, qu'il appelle "Franck" (et en particulier l'accompagner lors d'un voyage prévu à l'étranger) plutôt qu'aller passer les prochaines vacances d'été avec sa mère et son nouveau compagnon. Et ce gamin, plutôt intelligent mais pas spécialement surdoué, va commettre plusieurs bêtises (vol, fugue, ...), pas tant pour "se faire remarquer" que pour se donner les moyens de parvenir à ses fins. Le "roman à la première personne" raconté à hauteur d'enfant (en toute candeur) est plutôt reposant. Ici, on ne trouve pas de problématiques "lourdes" ou glauques (du genre inceste, viol, harcèlement, drogue ou autres addictions, ni même "dys" quelconque ou questions sur le genre). L'époque ne s'y prêtait pas, me direz-vous - ou bien ces sujets n'étaient pas encore à la mode, la société n'y était pas sensible, et il n'existait aucun "marché" encore à ce sujet... Bref, ça se lit très gentiment. 

J'ai trouvé quelques mots sur Monsieur Papa sur un vieux blog dont le principal intérêt est de compiler aussi plusieurs entretiens avec Patrick Cauvin. Plus intéressant, l'avis de Jake (2014). Ou celui de Milou (dernier billet en 2020). 

Je me dis que ce genre de livre, paru il y a déjà quelques décennies (1976...) peut éventuellement interpeller quelques blogueuses-documentalistes (en CDI, en collège), pas forcément nées à sa sortie, mais toujours intéressées par des bouquins à proposer à leur lectorat... (je pense à Doc Bird, mais il y en a d'autres). Il semble qu'on puisse encore trouver sans problème Monsieur Papa en neuf ou en occasion. Le livre avait été adapté au cinéma en 1977, je ne l'ai (encore) jamais vu.

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