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Le blog de Dasola
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billet de ta d loi du cine
14 août 2023

Tsunami - Marc Dugain

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) programme le présent billet pour qu'il paraisse une douzaine d'heures après sa rédaction, et sur un livre que j'ai eu en main il n'y a pas 24 heures, prouvant à la fois qu'il se lit vite et qu'il m'a intéressé.

  Dugain_couv 
Marc Dugain, Tsunami, Albin Michel, 2023, 260 pages

Dans Tsunami de Marc Dugain, le premier livre que je lis de cet auteur (qui en a écrit ou co-écrit une vingtaine), le "raz-de-marée" est à la fois allégorie et menace réelle. Le roman à la première personne se présente en prologue comme une "chronique" durant les premiers mois d'un nouveau Président de la République, qui s'est faufilé à ce poste en remportant l'élection grâce au soutien des grandes multinationales (américaines) du numérique. Dans cette politique-fiction, la personne qui "tient la plume" n'est ni un conseiller, ni un ministre: c'est notre Président lui-même, un homme jeune ayant fait fortune dans une entreprise de biotechnologie, qui lui a permis de se constituer un carnet d'adresses intéressant. On apprend assez vite qu'il souhaite mettre en place, pour lutter contre le réchauffement climatique, un principe "pollueur-payeur" reposant sur le consommateur final, avec un bonus-malus fiscal incitatif. mais pour cela, tout doit être sous contrôle... avec les fameuses GAFAM qui participeront à la gestion des données. Nous le suivons, au jour le jour, durant quelques semaines. Notre héros m'a donné l'impression d'un talent certain pour slalomer entre les événements qui se déroulent, davantage qu'il n'en a l'initiative. Il doit faire face, jour après jour, à différentes affaires (privées, tant sentimentales que financières), aussi bien qu'à de petites ou grandes décisions politiques à prendre toujours dans l'urgence, comme pour le maintien de l'ordre public face aux réactions à son projet de loi. Il cotoie les grands de ce monde à défaut de leur parler d'égal à égal. Dans cette fiction dystopique, s'il rencontre un président des Etats-Unis, un chancelier allemand et Poutine, j'ai remarqué l'absence de MM. Erdogan ou Xi?

Je vais poursuivre ma présentation du livre par quelques citations sélectionnées (parce que correspondant à des thèmes qui m'ont "parlé"), mais bien entendu hors contexte du (court) chapitre qui les entoure (44 au total), et, a fortiori, de l'intégralité de ce court roman. Le président jugeant son Premier ministre, p.18: "c'est un fin politicien qui se fait une idée de la France qu'il garde pour lui-même pour ne pas se mettre en porte-à-faux lorsque ses capacités d'adaptation le mènent au-delà de ses convictions". Avec une prise de recul quelque peu désabusée, p.32: "c'est un peu le lot de tous les candidats à la magistrature suprême que de déployer une énergie extraordinaire à conquérir le pouvoir pour ensuite consacrer ce qu'il reste de cette énergie à maintenir les choses en l'état". À propos de la fameuse loi en préparation, p.65: "soixante-cinq pour cent des Français voient le traitement de l'urgence climatique comme une priorité, mais les premiers sondages donnent aussi soixante-cinq pour cent d'opposants au principe de l'individualisation de la responsabilité". Alors qu'il se rend en avion à Vancouver pour un "sommet" privé (un peu comme un Forum de Davos, donc?), p.111, il ne se prive pas de bons mots, sur "un de ces sommets depuis lesquels on voit le monde en attendant d'en redescendre", qui lui permet de croiser le Président des Etats-Unis pour un tête-à-tête assez court et chaleureux ("il me prend pour un allié, enfin pour un vassal plutôt fiable")... Il est même question, p.149, de la mortalité de personnes plus vulnérables que d'autres au Covid (pour cause d'obésité ou de diabète), en remarquant que "si l'on s'élève un peu plus, on comprend que, pour une partie non négligeable de son activité, la médecine soigne des maladies que la société crée elle-même par le stress, la pollution, la nourriture pathogène, situation contre laquelle les gouvernements craignent de lutter, de peur de contrarier les lobbies agroalimentaires". p.153, la rencontre avec le médecin-chef d'un nouvel hôpital psychatrique en banlieue est l'occasion pour celui-ci d'un long développement sur la perte de l'altérité (compétence dans les rapports sociaux avec les autres) dans la société contemporaine, à cause de ces fichus écrans. Enfin, p.183, qu'a-t-il à dire à propos du discours qu'il prononce pour ressouder la nation après un drame? "lorsque la fiction est la même pour tous, elle devient réalité". 

Bien entendu, je suis loin de vous avoir dévoilé tous les personnages ni toutes les péripéties auxquelles la France et son Président doivent faire face dans l'ouvrage. 

Après avoir fini ce livre (il m'a fallu peu de temps), je me suis dit que j'aimerais bien continuer à en lire la suite en "feuilleton", un chapitre par semaine, où le cadre dystopique se confronterait avec l'actualité réelle... Mais je ne pense pas que ce concept soit à l'ordre du jour (et puis, quel en serait le modèle économique? Je n'accepterais sûrement pas de payer pour cela...)!

Par contre, à l'occasion, et une fois lue mes PAL ou LAL les plus urgentes, je prendrai (ou donnerai) sans doute quelques heures pour lire des oeuvres antérieures de Marc Dugain.

Sibylline avait parlé de Tsunami (et je crois bien que c'est chez elle que mon attention a d'abord été attirée). Lizathène expose en quelques phrases qu'elle n'a pas aimé. Si j'en trouve, je ne m'interdis pas de rajouter par la suite des liens vers d'autres billets publiés avant le mien... comme Isabelle sur le blog "Fumet de lectures". Ou Géraldine.

7 août 2023

Merci Hannukah Harry - Wolinski / Barkats

En ce mois de vacances estivales, je (ta d loi du cine, squatter" chez dasola) vous présente (dans le cadre de mes "hommages du 7") une drôle de bande dessinée, que j'ai chinée lors d'un voyage en province avec dasola. Je passe ainsi d'un Harry à l'autre, et ne parlerai donc pas ici de mes co-Harry, même si celui-là est vert...

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Merci Hannukah Harry, Pierre-Philippe Barkats & George Wolinski (préf. Nicolas Hulot), éditions Jungle, 2007, 65 pages (dont 52 de BD)

Avant ces dernières semaines, je n'avais jamais eu cet album entre les mains (même s'il figure bien entendu dans les listes d'oeuvres complètes de Wolinski). Mais qui est donc le "fameux" Hannukah Harry? Tant dans les textes récitatifs que dans la bande dessinée elle-même, les deux auteurs (l'idée originale ayant été amenée à Georges Wolinski par Barkats, un avocat spécialisé en droit américain qu'il connaissait depuis une dizaine d'années) nous présentent cet être mythique comme (à ce que j'en comprends moi-même) un croisement entre Prométhée et le Père Noël. Il a fait aux hommes, naguère, un cadeau (le feu) qui a pour lointaines conséquences, aujourd'hui, d'empoisonner notre planète terre. Que faire, donc?

D'abord, présentons les choses dans l'ordre. Dans le cadre d'un scénario général plutôt imaginatif ("délirant" m'était venu à l'esprit... mais c'est marqué p.58!), l'album est divisé en "chapitres", certaines saynettes ne comptant qu'une seule planche, une autre jusqu'à six, mais la majorité (sur un total de 15) en comportant au moins quatre. L'album est bourré de personnages variés et, selon ce que j'ai cru détecter, de références. On y croise ainsi un diablotin (qui a un peu la tête de Sarko tel que le dessinait notamment Cabu?). L'atmosphère familiale du prologue, tout comme l'ambiance générale, pourraient évoquer (en plus trash?) les contes de La divine sieste de papa scénarisés par Maryse Wolinski... et illustrés par Georges. La "machine à climat" au coeur de l'intrigue m'a fait un peu fait songer à une aventure des Schtroumpfs (Le schtroumpfeur de pluie). Il y a même un ouvrier rondouillard en salopette rayée, qui traite le monde d'enfoirés: Coluchon! Un important personnage avec un bonnet rouge peut évoquer un écologiste mondialement connu (surtout en France et aux Etats-Unis). Ou encore le prince Album de Manac, qui n'arrive pas à se faire prendre au téléphone par sa "cousine" la reine d'Angleterre (himself!). 

Au fil des pages, on découvre que réparer une machine en panne n'est pas simple (le problème, plutôt que la solution, venant davantage du machinisme lui-même), cependant que l'organisme "à l'origine du monde" est désormais bien malade... De quoi décourager un bon génie, si bienveillant soit-il au départ. 

Comme à mon habitude, voici ci-dessous quelques extraits en guise de citations du bouquin.  

P1160631 pp.36-37, quelques intellectuels mobilisés par notre héros pour sa cause. 

P1160628 p.11... P1160629 ... et p.12: comment, selon la légende, H....h H aurait donné ce bienfait qu'est le feu à l'humanité. Cela n'a pas été sans me rappeler Le premier amour (film de Marcel Pagnol non tourné).

P1160630 Un "bonnet rouge" au pôle (rappelons que l'album remonte à 2007!). 

P1160634 P1160633 pp.55 & 57: et retour à la case départ...

P1160632 p.64: signé Wolinski, un "message divin" qui me paraît parfaitement crédible.  

Pour en savoir plus et mieux que ce que j'ai pu dire, écoutez Wolinski lui-même: il en parlait gentiment, le 30 mai 2007 à 13 h, sur la 2 (les cinq dernières minutes). Et si le site www.mercihannukaharry.com cité en 3ème de couv' ne renvoie, en 2023, à rien du tout, on trouve encore une "mini-interview des auteurs en 10 questions" accessible via un vieux skyblog datant d'avril 2007 (aujourd'hui blog de Skyrock) dont on ne sait trop qui l'avait créé. Cet album m'a aussi rappelé qu'il faudra que je chronique, un mois ou l'autre, l'Inspecteur la bavure dessiné en 1980 par Wolinski sur un scénario dont, me semble-t-il, il n'était pas l'auteur...

En tout cas, Merci Hannukah Harry, oeuvre plutôt atypique, "polar polaire" comme dit la couverture, précédait de quelques années, et sous une forme originale, beaucoup de livres catastrophistes qui fleurissent de plus en plus à mesure que le climat se détraque visiblement. Il mérite lecture, ne serait-ce que pour Wolinski!

*** Je suis Charlie ***

3 août 2023

Claudine à l'école - Colette / Lucie Durbiano (BD)

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J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) découvert seulement il y a quelques semaines l'existence d'une adaptation en bande dessinée du premier roman de Colette, Claudine à l'école, grâce au thème du mois dernier du challenge "Les classiques c'est fantastique" et plus particulièrement au billet de Fanny. Après mon propre billet sur le roman (qui participait aussi au challenge "2023 sera classique" co-organisé par Nathalie et Blandine), j'ai emprunté la fameuse BD en bibliothèque. 

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Claudine à l'école, Lucie Durbiano d'après l'oeuvre de Colette, Gallimard Bande Dessinée, 2018, 116 pages

L'adaptation en bande dessinée commence "dans le vif du sujet", avec dès la première page ene entrée matinale de Claudine à l'école (si, si). Evidemment, la traduction en image du livre avec ce que le dessin peut montrer d'une manière plus explicite que les mots sur le papier (même si cela reste fidèle au parti-pris du livre de suggérer plus que de montrer) nous épargne les longues pages de "récitatif" où notre "Claudine" parle d'elle-même et de sa vie "bourgeoise".

Dans cet album au dessin de style très "ligne claire", l'action s'enchaîne à toute allure et sans temps mort. Tout passe par les dialogues. Par moment, les vignettes peuvent faire songer aux "enfants" d'Hergé: Jo et Zette, ou Quick et Flupke... A d'autres, des passages plus adultes ou en tout cas plus "lestes" qu'Hergé n'aurait jamais publiés nous transcrivent crûment les sous-entendus de Colette. On a droit à quelques extraits de Pierre Louÿs illustrés très explicitement devant lesquels les gamines tombent en arrêt.

Nous voyons "de l'extérieur" Claudine agir et réagir, parfois via cette "communication non verbale" que permet le "croquage" de ses expressions corporelles... voire tel phylactère à pensée imagée. Mais il constitue une exception. On ne voit guère Claudine penser, la plus grande partie du texte du roman est transposé en dialogues. Du coup, on trouve dans l'album beaucoup de "bulles" [phylactères] (tout le texte doit y passer), car il n'y a aucun encadré narratif, et seulement de rares onomatopées ou bruitages, ou des signes conventionnels (chagrin et pleurs avec gouttes encadrant un visage, éclairs indiquant un regard furibond...).

La composition est, elle aussi, classique. Les planches sont le plus souvent composées de trois bandes horizontales de deux ou trois cases chacune. Certaines planches sont un peu plus "irrégulières", avec par-ci-par-là une subdivision horizontale en deux vignettes dans une ligne. On a aussi quelques planches avec un "gaufrier" de quatre lignes de trois cases presque carrées, je n'ai pas réussi à trouver selon quelle logique. Et, de loin en loin, quelques planches "pleine page", telle celle (le bal) qui conclut l'album. Voici quelques pages à titre de "citations".

P1160077 p.4-5

P1160078 p.13...  P1160079 ...et p.14. Des images licencieuses (bien avant youporn). Je n'ai jamais eu l'occasion de parcourir les oeuvres originales de Pierre Louÿs ou Albert Guillaume (?).

P1160080 p.22-23. Un peu trop "tripoteur", le toubib belâtre. Et il y a pire quelques temps et pages après (cf. plus bas p.87). De nos jours, ce médecin des écoles se retrouverait certainement en prison. 

P1160082 p.24-25. On change radicalement de sujet. Notre Claudine apparaît très câline et tactile.

P1160086 p.36-37. Une évocation...

P1160087 p.56. Elle ne lui a pourtant rien fait, cette porte fermée...

P1160088 p.72. Notre Claudine apparaît parfois contradictoire, cyclothymique, ... et toujours gamine. Toujours ce décalage entre des dialogues qui peuvent être vifs (dans les "bulles" appelées phylactères) et la sagesse du trait.

P1160089 p.87. Et pan! Ce n'est certes pas ce qui était attendu.

P1160090 p.116. La fête continue... Le ridicule ne tue pas, mais fait rire.

Hein, en voilà une école différente de Poudlard (je suis encore en train de relire Harry Potter, mais chut!).

Plus sérieusement, Lucie Durbiano a déjà publié plusieurs oeuvres chez Gallimard depuis 2006, j'y jetterai un coup d'oeil si je les croise en bibliothèque. 

31 juillet 2023

Harry Potter et la coupe de feu - J. K. Rowling (livre) / Mike Newell (film)

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Vu que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) croulais déjà sous une demi-douzaine de billets ou articles en cours dont je procrastine toujours la finalisation, j'ai bien évidemment, le weed-end dernier, consacré une quinzaine d'heures à tout autre chose, à savoir une n-ième relecture d'un "épais" livre, et le n-ième visionnage d'un long film et des bonus qui l'accompagnent en DVD. Voici donc ma première participation au challenge "Les épais de l'été" que j'organise chez dasola, et à celui, "Les pavés de l'été", organisé de son côté par Sibylline sur son blog

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[Edit 02/08/23] Image prise une fois l'appareil photo de dasola revenu de voyage!

L'idée de relire et de chroniquer le premier tome de la saga à avoir dépassé (en français) les 600 pages m'est donc venue (j'accuse personne, hein!) suite aux billets de Belette qui, dans le cadre de nos challenges estivaux sur de gros bouquins, a non seulement rédigé son premier billet de participation sur le septième tome de la célèbre heptalogie, mais a encore chroniqué successivement deux tomes d'une autre même saga. Bon, arrivons-en à nos coupes de feu. 

J'ai acquis mon exemplaire de Harry Potter et la coupe de feu en 2004, d'occasion, bien après sa sortie tant en "grand format" qu'en Folio jeunesse, mais avant la sortie du film qui en a été tiré. Dans ce quatrième tome de la saga principale de J. K.. Rowling, beaucoup de choses vont par quatre: qu'il s'agisse du nombre de "champions" pour le Tournoi des Trois sorciers, du nombre de défis que devra surmonter Harry Potter pour triompher des trois épreuves qu'il est censé compter, des triangles amoureux que comportent les différents couples de héros... Car cette quatrième année d'études, où notre héros a désormais 14 ans, est bien celle de la découverte que "les filles, c'est compliqué". Ce qui est bien plus important qu'une pierre philosophale, une chambre des secrets, ou un vrai-faux coupable, non? Et ne parlons pas des ravages du "quatrième pouvoir"!

Comme chacun sait, la "coupe de feu" du titre est censée ne pas contenir de nom d'élèves sorciers âgés de moins de 17 ans. Donc... vous avez lu le livre, ou bien le titre est un indice suffisant? Notre Harry va une nouvelle fois se trouver au coeur d'une sombre machination agencée par son ennemi de longue date, "vous-savez-qui". Mais il maîtrise de mieux en mieux sa baguette et ses sorts (non sans travail et sans mal), et finit par savoir se défendre. Sorts et baguettes magiques ne peuvent malheureusement pas grand-chose pour (ou contre) les problèmes relationnels. Le "meilleur copain" se retrouve en rivalité, la "meilleure copine" s'entiche des elfes de maison, et la fille qui tape dans l'oeil est déjà prise. Harry se montre un peu trop enclin à la procrastination et doit à diverses interventions extérieures ses propres avancées dans l'action. Mais le beau gosse finira mal... 

Comme chaque volume, l'histoire se finit avec l'arrivée des vacances et le départ de Poudlard... en attendant la nouvelle saison, pardon, le nouvel épisode / la prochaine année scolaire et le prochain livre! J'espère que je n'en ai pas trop dit sur ce livre paru en novembre 2000?

Parmi les quelque 160 participant-e-s à une ou plusieurs des 11 éditions (2012-2022) du "Pavé de l'été" de Brize, seules deux avaient chroniqué ce volume-là: Lutin82 en 2018, Belette en 2019.

* * * * * * * *

En ce qui concerne le film de Mike Newell (sorti cinq ans après, fin novembre 2005), je l'ai revu alors que je n'avais pas fini de relire le livre. Enfin, disons que je n'en avais pas achevé la lecture suivie, mais que j'avais déjà jeté quelques coups d'oeil furtifs pour me remettre en mémoire les principales péripéties. J'ai donc pu constater une nouvelle fois que, forcément, les 2H37 du film (générique compris, je suppose) sont loin de rendre compte de l'intégralité de nos 762 pages du livre. Je suis d'accord avec le constat de dasola (qui n'a lu aucun des sept livres) lors de son premier visionnage: les spectateurs non lecteur du livre n'ont pas toutes les clés pour comprendre... Il a fallu sabrer dans les personnages, les péripéties, compresser les durées... et faire des choix (je n'aurais pas voulu être à la place des scénaristes - c'est un métier!). 

Ainsi, les Dursley sont escamotés. Ceux (ou celles!) qui ont rêvé sur les pages décrivant la Coupe du monde de Quiddish risquent d'être déçus. L'un des personnages haut en couleur du livre est inexistant. Ce n'est pas dans cet opus qu'on verra agir les "grands frères" de Ron. Les longues et fastidieuses heures de recherche en bibliothèque sont à peine évoquées. Et il nous manque certains des tenants et aboutissants pour ce qu'il est advenu ou ce qu'il adviendra à l'un des principaux personnages du livre... me suis-je aperçu une fois "sorti" du film et en pouvant prendre un peu de recul sur ce que je venais de voir.

Du coup, comme dasola l'avait évoqué à l'époque, je pense personnellement qu'il vaut mieux avoir lu le livre pour comprendre certains détails (qui est qui, pourquoi telle action...). Mais peut-être qu'aujourd'hui, des spectateurs sont capables de savourer les images et l'histoire sans connaître de la saga autre chose que ce qu'en a rendu le cinéma.

Il y a eu, par contre, des "développements" apportés à certaines péripéties. Ainsi, l'épisode avec le dragon dure plus de quatre minutes à l'écran - dont des images de poursuite époustouflantes. Même si tout n'en a pas été conservé dans la version finale, la "scène du bal" ou la formation préalable ont apparemment été ... intéressants à tourner pour les jeunes acteurs (les bonus du DVD apportent un éclairage savoureux, entre scènes coupées et entretiens avec le trio principal). Et la rencontre finale est douloureuse à souhait (même si la jambe d'Harry semble plus valide que dans le livre?).

Parmi les blogueurs "cinéma" qui fréquentent le présent blog, seul Sélénie a chroniqué le film (sous réserve de mauvaise recherche de ma part bien entendu). Je pense que cela peut s'expliquer par l'ancienneté de sa date de sortie et par la disparition des blogs "allociné" (il y a une douzaine d'années).

Bon, un peu de sérieux, je vais essayer ces prochains jours de (finir de) rédiger au moins un billet ou deux avant de me lancer dans Harry Potter et l'ordre du phénix...

********

Ouf, au moins, j'aurai réussi à participer à mon propre challenge avant la fin de son deuxième mois d'existence (avec un "épais" comptant pour 784 pages)... Si j'en reprends les chiffres à ce jour: lancé le 10 juin, il compte désormais avec moi 36 inscrit-e-s, dont 23 ont rédigé au moins un (pour 13 participantes) et jusqu'à neuf billets (six participantes en ont déjà inscrit 2, une en est à trois billet, une autre à quatre, cependant que la recordwoman est talonnée avec six billets). En outre, huit livres sont annoncés, dont six par six inscrites n'ayant pas encore rédigé de billet. Donc, avec ces 23 participations déjà répertoriées chez dasola (sans parler des inscriptions seulement chez Sibylline), je considère que le défi de succéder à Brize et à son "Pavé de l'été (2012-2022)" est d'ores et déjà relevé. À 40 participations, ce sera une réussite; à 60, un succès; à 80, un triomphe!

Edit du 21/09/2023: Bon sang mais c'est bien sûr, Harry Potter peut aussi participer au 11e Challenge de l'imaginairecli11-02

14 juillet 2023

Je n'étais pas la bienvenue - Nathalie Guibert / Le jour ne se lève pas pour nous - Robert Merle / Casabianca - Jean L'Herminier

Quel rapport entre les écrivains auteurs des livres que rassemble le billet que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous propose aujourd'hui, me direz-vous? A part le fait que deux des deux titres ont des tournures "négatives", leurs images de couverture sont peut-être suffisamment parlantes en elles-mêmes... 

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Je n'étais pas la bienvenue, Nathalie Guibert, 2016, réédité en 2022 en "poche", chez Paulsen, 171 pages
Le jour ne se lève pas pour nous, Robert Merle, 1986, Plon (Presse Pocket 1987), 280 pages
Casabianca, Commandant L'Herminier (Presse Pocket 1963), 247 pages

Dans les trois cas, il s'agit de livres sur l'univers de cette "élite" de la Marine nationale (française) que représentent les sous-mariniers et leurs sous-marins. 

P1150872Je m'étais offert le livre de Robert Merle il y a plus de 30 ans, en 1991, quelques années après sa sortie, et alors que j'étais plongé dans les profondeurs de la plus grande oeuvre de cet auteur, sa saga au long cours Fortune de France (13 volumes, de 1977 à 2003). Fortune de France se déroule entre le XVIe siècle et le XVIIe siècle, sous huit rois de France successifs, depuis les origines des guerres de religion sous François Ier jusqu'à la prise de pouvoir de Louis XIV. Bien des guerres et des combats y sont évoqués.

Mais dans Le soleil ne se lève pas pour nous, le conflit reste absent, précisément (c'est à la fois la position française depuis De Gaulle et la thèse du livre) grâce à la "dissuasion nucléaire", dont l'une des composantes est constituée par une flotte de sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE). Robert Merle a choisi de nous faire partager la vie d'un équipage durant une "patrouille" (pouvant durer jusqu'à une dizaine de semaine) où le SNLE voyage sous les mers en se tenant prêt à tout moment à lancer ses 16 missiles sur l'ordre du Président de la République - ce qui ne devrait jamais arriver, car ce serait le constat que la fameuse dissuasion... a échoué. 

Robert Merle a lui-même vécu la Seconde Guerre mondiale (il a été fait prisonnier à Dunkerque en mai 1940 et est resté en captivité jusqu'en 1943), et sait que la guerre n'est pas une plaisanterie. Il s'est minutieusement renseigné avant de rédiger cet ouvrage, sous forme d'un récit à la première personne, en l'attribuant à un officier "de la" Marine, à savoir un médecin de bord embarqué un peu à la dernière minute pour compléter un équipage où tous se connaissent déjà. Notre héros, médecin, a donc tout à découvrir de la vie quotidienne, du fonctionnement et des buts de cette vie de "patrouille", et nous le découvrons avec lui et par ses yeux. Il a la possibilité de parler avec tout le monde et de poser les questions candides d'un "éléphant" (ce terme désignant, dans la marine, tous ceux qui ne sont pas marins). Ceci dit, l'auteur ne nous révèle aucun secret militaire (profondeur maximale de plongée, vitesse, profondeur optimale pour lancer les missiles...) et se paye même le luxe de nous lancer sur la piste d'un métal qui, sauf erreur de ma part, n'existe pas. Lectrice de 2023, n'oublie pas que, à l'époque de rédaction de cette "fiction pédagogique", nous n'avions pas internet à notre disposition pour y dénicher tout (et n'importe quoi) sur tout! Mais ce que je n'ai pas réussi à trouver, c'est s'il s'agissait d'une "oeuvre de commande" ou pour quelle raison notre romancier avait décidé d'aborder ce sujet. Peut-être parce que je n'ai pas (encore) lu la biographie consacrée par l'un de ses six enfants à Robert Merle?

P1150873Le deuxième livre est le plus récent des trois. Il a été écrit par quelqu'un qui n'est ni un écrivain, ni un soldat, ni un marin, mais une journaliste (correspondante Défense au journal Le Monde). Nathalie Guibert a été en juin 2015 la première femme à embarquer tout au long d'une patrouille de SNA (sous-marin nucléaire d'attaque) français. Elle nous livre ainsi un reportage original, celui non seulement d'une personne de culture "terrienne", mais surtout d'une femme, dans ce milieu si particulier. Le récit est très souvent introspectif, pour tenter de rendre compte à la fois de ce qu'elle vit elle-même, mais aussi de la manière dont elle perçoit être perçue. J'ai encore reconnu dans cet ouvrage les origines souvent bretonnes, parfois alsaço-lorraines, et de forte tradition catholique, de l'élite des marins, encore à l'heure actuelle. Si le médecin de Robert Merle ironisait sur la présence incongrue dans son infirmerie d'une boite de tampax (petite farce des pharmaciens de la base navale), ici, elle explique que son médecin de famille lui a prescrit avant le départ des antibiotiques adaptés aux infections féminines, dont à coup sûr l'infirmier du bord ne disposerait pas dans son stock (p.15). Ainsi qu'un antidépresseur, "au cas où, quand même!".

Quelques notations sur le rituel recommandé pour la douche: 10 secondes d'eau pour se mouiller, savonnage, 15 secondes d'eau pour le rinçage... dans un carré de 60 centimètres de côté. Avec une pensée pour les sous-marins "classiques", qui ne bénéficiaient pas de suffisamment d'eau douce pour une douche, p.58, Nathalie Guibert se demande si certains des sous-mariniers naviguant avec elle avaient ou non vu Opération Jupons. Pour sa part, elle s'est efforcée de se faire la plus discrète possible. Elle ironise sur son sentiment d'être sans cesse "dans le passage", assise "au mauvais endroit", dans un espace clos où la place est comptée. Elle explique aussi les tâches répétitives de chaque membre de l'équipage, dans ce navire qui travaille quotidiennement pour se tenir à tout moment prêt à la guerre s'il faut la faire: détecter sans être détecté... On ne reste pas très longtemps sous-marinier: la plupart des hommes étaient plus jeunes (27 ans, en moyenne) qu'elle. La patrouille, au-delà du Détroit de Gibraltar, a été moins longue que prévue initialement (pas d'escale à Cadix!). L'auteure a débarqué au retour à Toulon, les adieux ont été discrets alors que l'équipage se préparait déjà pour continuer la mission...

En "note de l'auteur" finale pour cette édition "poche" en date de janvier 2022, Nathalie Guibert évoque son émotion lors de l'incendie qui a affecté l'avant du SNA Perle en juin 2020 (lors d'une période d'entretien au port). Le navire est aujourd'hui revenu au service actif, après s'être vu "greffer" l'avant d'un autre SNA, lui-même désarmé, le Saphir. Il devrait rester en service jusqu'en 2030 au moins, avant d'être remplacé par un représentant de la deuxième série de SNA, qui, comme la première, comptera parmi ses "sisters-ships" un navire perpétuant le nom Casabianca dans la marine française.

En 2016, la première édition du livre avait été chroniquée par Keisha.

P1150879Un livre plus ancien maintenant, pour lequel le terme de "classique" est tout à fait approprié. 20232-300x300_2023seraClassiqueLes exploits durant la Seconde Guerre Mondiale de mon troisième sous-marin de ce billet, le Casabianca sous le commandement du capitaine de frégate puis capitaine de corvette Jean L'Herminier, font partie de l'Histoire de France. L'Herminier, malade, est resté à bord de son "bateau noir" aussi longtemps qu'il l'a pu (jusqu'à la libération de la Corse), avant de devoir être amputé des deux jambes. Maintenu en service à titre exceptionnel, il est mort en 1953 (à 51 ans), après avoir écrit deux livres de souvenirs, dont celui-ci.

Nommé au commandement du Casabianca le 15 avril 1942, sa mission était de le mettre en état de naviguer et de combattre pour être envoyé à Madagascar au titre de la "relève" d'un autre sous-marin de la Marine de Vichy. Du moins, c'est ce qui était prévu avant le débarquement américain en Afrique du Nord vichyste en novembre 1942 et l'invasion subséquente, par les Allemands, de la "zone non-occupée" en France métropolitaine. Grâce à cette préparation, le Casabianca a pu s'échapper et rallier Alger (avec quelques autres sous-marins), quand les autres navires de guerre de la flotte de Toulon ont été contraints au sabordage le 27 novembre 1942 faute d'être en état d'appareiller. L'Herminier a quelques mots intéressants sur la préparation de son équipage, p.14: "Jusqu'à la fin des travaux de réparations, nous ne pouvons que faire des exercices au mouillage, mais j'ai souvent constaté que la réalité est plus simple que la théorie. Lorsque l'esprit a fait un difficile effort d'imagination et envisagé toutes les solutions théoriques d'un problème au cours d'un exercice, vienne l'action, tout s'éclaire."

Que cherchait L'Herminier en s'échappant de la rade de Toulon avec son navire et la plupart des marins qu'il avait formé? Ecoutons-le (p.43): "j'espère recevoir d'une autorité libre de ses décisions l'ordre de reprendre le combat, car les yeux de tous les Français sont maintenant dessillés". L'Herminier a été reçu par l'Amiral Darlan dès l'arrivée du sous-marin à Alger. J'ai remarqué que l'auteur n'a pas un seul mot sur l'assassinat de Darlan (le 24 décembre 1942, entre deux missions en Corse du Casabianca). Le meurtrier de Darlan, jugé et fusillé très rapidement, a été réhabilité en décembre 1945 par un arrêt qui jugea que l’exécution par ses soins de l'amiral Darlan avait été accomplie « dans l’intérêt de la libération de la France ».

Je m'étais offert d'occasion, en 1980 (avant d'être bâchelier!), ce livre plus vieux que moi. A l'époque, je ne connaissais rien à la Marine. Relevons encore une citation, p.63: "la "drome", c'est-à-dire les embarcations et leur gréement, est peu importante sur un sous-marin. Elle se compose d'un youyou et d'une plate. Le youyou est une embarcation qui a une quille assez profonde et peut contenir neuf hommes, au plus. C'est une embarcation très "marine" qui tient bien la mer, mais n'est pas commode pour l'accostage d'une plage à cause de son tirant d'eau. (...) La plate est un baquet peu robuste, difficile à manoeuvrer, qui contient à peine quatre hommes. Elle n'est pas marine du tout." Au fil de ses missions consistant précisément à débarquer sur les plages corses des hommes, des armes et des munitions, L'Herminier montre l'évolution de ladite drome, par mise à disposition par les Anglo-saxons d'embarcations gonflables ("rubbers"), par construction d'un "cuirassé" en tôles non cintrées avec les moyens du bord... voire même par "récupération" d'embarcations inemployées quelque part dans le port! La guerre justifiait de parfois violer quelque peu les procédures adaptées au temps de paix. Le Casabianca finit ainsi par embarquer, afin de les débarquer en Corse, mi-septembre 1943, 109 hommes du Bataillon de choc (pour 106 prévus par L'Herminier) ... et leur barda. L'équipage était certes réduit aux deux tiers, la navigation s'est certes faite en surface, mais cela faisait tout de même 170 hommes à bord d'un sous-marin "classique" de 1500 tonnes, dans une atmosphère étouffante.

Le Casabianca, lancé en 1935, a été désarmé en 1952. J'avais vu la reproduction de son kiosque à Bastia lors de notre voyage en Corse en 2018. Et j'inscris le livre le concernant pour le challenge "2023 sera classique" co-organisé par Nathalie et Blandine.

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Ma motivation pour faire paraître ce billet aujourd'hui précisément est double. D'un côté, je le conçois comme un hommage sincère aux hommes des "bateaux noirs" qui, en ces temps où la menace de guerre (que nous -les civils- avions oubliée après des décennies de paix en Europe) se réchauffe et se rapproche de plus en plus, nous protègent au jour le jour, à l'insu de notre plein gré, mais de manière à se faire craindre de nos ennemis potentiels (et avec bien d'autres hommes et femmes "engagés"). "Et  en même temps", l'affirmation que, non, en ce jour, je n'irai pas assister au défilé, pas plus que je ne vais assister aux commémorations des guerres passées, mais je reste dans mon lit douillet: la musique qui marche au pas, cela ne me regarde pas... comme chantait Brassens.

7 juillet 2023

Retraites: le casse du siècle - Gilles Raveaud

J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) acheté l'opuscule que je vous présente aujourd'hui dans un kiosque à journaux, fin janvier 2023, et à peu près en même temps qu'un autre, que je vous présenterai sans doute aussi un mois ou l'autre. 

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Retraites. Le casse du siècle. Pourquoi Macron veut nous faire bosser à mort, Gilles Raveaud, Hors-série N°3H

Je crois que c'est quelques mois après la parution de cet ouvrage, en avril 2023, que les articles de la rubrique "Economie" dans Charlie Hebdo ont cessé d'être signés "Jacques Littauer" pour être publiés sous la signature "Gilles Raveaud". Oui, le même que celui qui a signé cet opuscule. En fait, les deux ne faisaient qu'un, comme il l'avait signalé à l'époque (début 2023?) sur son propre blog. Je ne sais pas trop s'il l'avait déjà annoncé dès 2019 en ligne, ou bien si le "titulaire du compte" (planqué derrière les portes et fenêtres blindées) a été plus récemment modifié... 

J'en viens maintenant à l'opuscule. Il défend la thèse que la France aurait pu faire l'économie de l'épisode picrocholin (le qualificatif est de moi) DES votes à rallonge sur les retraites. Tout d'abord, le motif de cette réforme est, selon lui, ni plus ni moins que d'aboutir à une baisse globale des pensions, en remontant le niveau d'exigences à satisfaire pour bénéficier d'une pension à "taux plein", alors même que le taux d'emploi des "seniors" est faible en France. Il met aussi en question les "projections à 2050" dont un camp comme l'autre nous ont rebattu les oreilles. Il rappelle l'existence de différents "fonds de prévoyance" amassés par différents organismes (dont les différents régimes de retraites complémentaires), qui constituant une "cagnotte" sans doute suffisante pour faire face, globalement parlant, à une dizaine d'années de déficits. Mettant en cause le "refus" des salariés de travailler, il suggère de "renverser l'obligation" en contraignant plutôt les entreprises et autres employeurs... à employer (ce qui génèrerait des cotisations sociales). Il déconstruit fort bien (à mon humble avis) le système américain des "fonds de pension"... qui a très bien su ruiner certains retraités qui rêvaient d'une épargne pour leurs vieux jours, laquelle a disparu dans les sables mouvants de la Bourse [cf. aussi, sur ce sujet, tel ou tel des livres de Maris et Labarde que j'avais chroniqués il y a quelque temps]. La retraite par point, c'est très joli aussi: cela permet surtout, et encore, de baisser équitablement les retraites pour tous... en diminuant chaque année la valeur des points. Plus globalement, ce qui est mis en cause par Emmanuel Macron et l'idéologie qu'il incarne, c'est notre système basé sur la solidarité entre tous, et non soumis exclusivement à la loi du libéralisme économique: une autre vision politique. Concernant les "régimes spéciaux (RATP, SNCF), qui comptent aujourd'hui davantage de retraités que de cotisants, Gilles Raveaud rappelle utilement que les distributeurs automatiques de billets ne payent pas de cotisations sociales, contrairement aux anciennes guichetières qu'ils ont remplacées... Il rappelle aussi que tous les métiers ne sont pas logés à la même enseigne en terme de pénibilité, de début d'entrée dans l'activité professionnelle (après de longues études ou non), ni même en terme d'espérance de vie après l'âge de la retraite. Et il conclut, comme vous pouvez vous en douter, sur l'inégalité de répartition de la richesse produite et accumulée, chaque année, dans notre pays (l'argent allant à l'argent).

Je conclurai pour ma part en avouant que je n'ai pas vérifié si ce "Hors-série Charlie Hebdo" était constitué de chroniques hebdomadaires mises bout à bout, éventuellement retravaillées en "chapitres" réécrits, ou bien si l'ouvrage était intégralement, ou en partie, inédit... J'en recommande la lecture en tout cas, même maintenant que l'effervescence est quelque peu retombée cependant que l'actualité chaude a embrayé sur d'autres sujets. Il est toujours disponible sur la boutique en ligne du journal (5 euros).

PS: je profite de ce billet pour signaler que dasola avait reçu par la poste, il y a quelques mois, un exemplaire gratuit de l'hebdomadaire accompagné d'une proposition d'abonnement signée Riss (différente de celle qui était publié à la même époque dans celui que j'achète en kiosque). On ne sait pas comment Charlie a eu son adresse, elle pense que c'est via une des associations loi 1901 auxquelles elle fait un don...?

*** Je suis Charlie ***

26 juin 2023

Claudine à l'école - Colette

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Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) me suis replongé, plus de 40 ans après ma première lecture, dans un petit "Poche" que je peux inscrire aujourd'hui aussi bien au challenge "2023 sera classique" co-organisé par Nathalie et Blandine qu'à la 4e "saison" (2023-2024) du challenge "Les classiques c'est fantastique" de Moka et Fanny pour leur thème de juin 2023 (Colette vs Sand).

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Le livre de Poche N°193 **, 2e trim. 1980, 253 pages.

Ce livre de poche, Claudine à l'école, co-signé Willy et Colette, m'a été offert en août 1981, alors que je venais d'obtenir mon [premier] Bac, par l'une de mes grand-mères, celle des deux qui s'étonnait toujours que je lui demande de marquer elle-même la date où elle m'offrait les livres qu'elle me choisissait...  

"... Un ouvrier plante des piquets pour faire une palissade. Il les enfonce à une distance telle les uns des autres que le seau de goudron dans lequel il trempe l'extrémité inférieure jusqu'à une hauteur de trente centimètres se trouve vide au bout de trois heures. Etant donné que la quantité de goudron qui reste au piquet égale dix centimètres cubes, que le seau est un cylindre de 0 m. 15 de rayon à la base et de 0 m. 75 de hauteur, plein aux 3/4, que l'ouvrier trempe quarante piquets par heure et se repose huit minutes environ dans le même temps, quel est le nombre de piquets et quelle est la surface de la propriété qui a la forme d'un carré parfait? Dire également quel serait le nombre de piquets nécessaires si on les plantait distants de dix centimètres de plus. Dire aussi le prix de revient de cette opération dans les deux cas, si les piquets valent 3 francs le cent et si l'ouvrier est payé 0 fr. 50 de l'heure."

Quel lycéen de 15 ou 16 ans, aujourd'hui (2023), saurait résoudre ces problèmes sans ordinateur ni calculette, rien qu'avec un crayon, un papier et son cerveau? Il s'agit du genre de "question d'arithmétique" que Claudine et ses condisciples, dans leur dernière année d'école, s'échinent à résoudre, avec en perspective le Brevet élémentaire [en fait, le "Brevet de capacité pour l'enseignement primaire (Institutrices - brevet élémentaire)"].

Dans le roman Claudine à l'école, publié en 1900, un récit à la première personne se présente (p.10) comme le "journal" quotidien d'une gamine plutôt délurée, en dernière année d'école primaire supérieure, qui entretient des relations ambivalentes avec ses enseignantes et accessoirement ses condisciples, elles-mêmes sans doute futures institutrices. Cette année-là, c'est l'année du brevet élémentaire, un examen qui se passait à 16 ans (l'ancêtre de notre "Brevet des collèges"). La jeune héroïne en sabots (p.62) va nous raconter toute l'année scolaire, avec l'arrivée de la nouvelle équipe enseignante, la démolition de l'ancienne école cependant que la nouvelle se construit. Le roman se termine avec l'inauguration des nouveaux locaux, peu après les résultats de l'examen. A l'époque, celui-ci se "passe" en trois jours plein à partir du 5 juillet... tandis que notre Brevet des collèges se passe, en 2023 (mais pour combien d'années encore?), les 26 et 27 juin (cependant que les points strictement nécessaires à la moyenne de nos collégiens proviennent désormais du contrôle continu!). 

Basé sur les propres souvenirs de la jeune Colette (27 ans en 1900), et censé se dérouler alors que s'annonce l'Exposition universelle de 1900 (annoncée dès 1892), ce roman est reconnu comme l'une des premières "fictions autobiographiques". La jeune autrice a dû quelque peu tricher avec les années, par contre. On découvre une belle plante sauvage de 15 à 16 ans, fille unique et orpheline de mère (ce qui n'était pas son cas). Je me rappelle avoir appris l'an dernier, à l'occasion de notre visite à Saint-Sauveur-en-Puisaye, qu'Henry Gauthier-Villars avait demandé à sa jeune et candide épouse Sidonie-Gabrielle (ils se sont mariés en 1893) d'écrire ses souvenirs de jeunesse dans des cahiers, puis l'avait assurée que ça ne valait rien, avant de retomber dessus quelque temps plus tard et de les porter sans rien lui dire chez un éditeur, pour les faire publier sous son seul nom (pseudonyme, plutôt) de Willy: le premier volume de la série des "Claudine...". 

Les "observations" de Claudine sur son entourage, ses condisciples, ses enseignantes, les amours de celles-ci ou de celles-là, le médecin qui tripote et grenouille pour devenir député, la balourdise rurale... peuvent expliquer que Colette ait failli être accueillie à coups de cailloux quand elle a tenté, dans les années 1930, de revenir en visite dans sa maison natale, même si elle les avait transposées dans le bourg fictif de "Montigny". La "jeune fille" apparaît à la fois comme gamine et garce. Je pense que, lors de ma propre première lecture, beaucoup des sous-entendus, notamment saphiques, avaient dû passer largement au-dessus de la tête du garçon pas très dégourdi que j'étais à l'époque... Cette édition du livre de poche estampillé "texte intégral" ne comporte aucune information biographique, présentation du livre ou introduction. Rappelons qu'à l'époque, internet n'existait pas: pour apprendre quelque chose sur un écrivain, il fallait se reporter à un dictionnaire de la littérature, ... ou au Lagarde & Michard du XXe siècle et à ses notices édulcorées.

On trouve aussi quelques notations acides, peut-être audacieuses, sociales sinon socialisantes, par rapport aux "cours de morale" de l'époque. p.123: "Expliquer et commenter cette pensée de Franklin: L'oisiveté est comme la rouille, elle use plus que le travail". Commentaire de "Claudine", après avoir dûment "bâclé" le devoir demandé: "Avec ça que ce n'est pas bon de paresser dans un fauteuil! Avec ça que les ouvriers qui travaillent toute leur vie ne meurent pas jeunes et épuisés! Mais quoi, faut pas le dire. Dans le "programme des examens", les choses ne se passent pas comme dans la vie."  

Peut-être que l'auteure était à court d'imagination? La fin de l'année arrive vite, après près de deux mois de maladie à la maison puis de convalescence, ce qui n'empêche pas notre "première de la classe" d'obtenir plutôt facilement son examen. Mais elle ne se voit pas entrer ensuite dans une Ecole Normale pour devenir  institutrice, elle... Le roman se clôt sur un adieu nostalgique à l'école, et l'espoir de l'entrée dans le monde. 

L'année où j'ai reçu ce bouquin, alors que quatre "Claudine" y figuraient en 4ème de couverture (sous le titre "Les “Claudine” dans le Livre de Poche"), la page "Oeuvres de Colette dans Le livre de Poche", en début d’ouvrage, oubliait tout autant Claudine en ménage. Il fallait attendre l’avant-dernière page du livre, qui listait la totalité des oeuvres, pour y dénicher les quatre "Claudine" canoniques”, finalement, dans un paragraphe “En “collaboration” avec M. Willy". Hasard des éditions...? Puisque j'avais eu seulement le second titre en même temps que Claudine à l'école (avec aussi La maison de Claudine, sorte de "hors-série" d'exploitation d'une "marque", paru en 1922), j'ai complété au fil des ans ma collection, avec des éditions dépareillées... Je ne suis même pas sûr de les avoir tous lus. Encore trois "classiques" en perspective! Ils sont respectivement parus en 1901, 1902 et 1903. 

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L’oeuvre de Colette devrait tomber dans le domaine public soixante-dix ans après sa mort, soit en... 2025. 

Edit du 07/08/2023: je viens de découvrir un billet de 2018 de Grominou.

10 juin 2023

Challenge "Les épais de l'été" 2023 (21 juin au 23 septembre)

samedi 10 juin 2023 (dernière mise à jour de ce billet : samedi 23 septembre 2023)


 == Attention : le présent billet est resté "épinglé" en tête de blog jusqu'au 23/09/2023 inclus, mais les billets "réguliers" continuaient à arriver, juste en-dessous de celui-ci et de sa partie récapitulative ... ==

À la suite de Brize qui, après avoir créé et fait vivre durant 11 éditions son challenge "Pavé de l'été", n'a pas souhaité l'organiser en 2023, je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous propose à mon tour de poursuivre un an de plus le défi, avec :

Epais
[Challenge Les épais de l'été 2023, organisé chez dasola par ta d loi du cine]

* L'objectif reste le même: lire (et chroniquer) un livre de 600 pages minimum (dont l'édition papier -à mentionner- doit exister en un seul volume).
Il est indispensable de préciser quelque part dans votre billet le nombre de pages.
Dates de publication des billets: du mercredi 21 juin 2023 au samedi 23 septembre 2023 (inscriptions acceptées jusqu'au 31 août 10 21 23 septembre). 

* Une bonne motivation pour vider sa PAL d'un ou plusieurs volumes en profitant de la période estivale!

* Ces dernières années, Brize avait baissé la barre à 550 pages. Disons qu'en replaçant la barre à 600 pages, je laisse de l'espace à tout blogueur-euse qui souhaiterait aussi reprendre le concept, mais avec un plancher inférieur ;-)

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== À noterSibylline du blog La petite liste a repris le concept intégralement et a ouvert dès le 2 juin les inscriptions pour vos participations chez elle.

  - Si vous ciblez un livre entre 550 et 600 pages, vous pouvez donc vous inscrire chez elle.

  - Si c'est plus de 600, n'hésitez pas à vous inscrire aux deux (chez elle et ici) ;-) ==

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Quelques précisions tout de même sur celui que je vous propose pour ma part.

Bien entendu, je ne peux pas dire avoir, plutôt qu'un autre, le moindre aval de Brize pour reprendre le challenge pavé de l'été: comme elle l'a écrit, chacun est libre de reprendre l’idée de ce challenge s’il le souhaite et de s’organiser, pour le mener, comme bon lui semble.

* À part le nombre de pages, le challenge ne comprend aucune contrainte ni suggestion, ni aucun thème (il peut s'agit d'un ou plusieurs romans, d'une biographie, d'un essai...). Ce qui signifie qu'il est tout à fait possible, autorisé, voire même conseillé, de faire "d'un livre deux challenges", en dotant votre billet non pas d'un mais de plusieurs logos (classiques, littérature de l'imaginaire, mois thématique, ...ou que sais-je encore!).
Si vous ne savez où en trouver, bon nombre de challenges sont répertoriés chez Pativore.

* Je ne fréquente pas les livres numériques... mais je suppose qu'il me faudra les accepter le cas échéant (sauf si quelqu'un d'autre insiste pour créer un challenge à part?).

* Je ne m'occuperai d'aucune page f*ceb**k ni de relais sur Inst*gr*m (je n'y suis pas présent et n'ai aucune intention d'y être): là encore, s'en occupe qui veut!

* Vous pouvez d'ores et déjà vous inscrire par un commentaire sous le présent article (qui sera mis à jour quotidiennement).
Je ne sais pas encore si j'utiliserai un système de "boite à liens" ou non (non fait pour les précédents challenges que j'ai déjà organisé ou co-organisé) [voir "Challenges en cours", colonne de droite, en haut, ou bien "Challenges terminés", colonne de gauche, en bas]. 

* Mon fonctionnement sera plutôt "light": sans doute pas de billets "de rappel" ni de "bilans intermédiaires. Mais le présent billet "récapitulatif" sera mis à jour tout au long du challenge, au fil des inscriptions d'une part, des publications de chroniques d'autre part.

* Un "Bilan final" sera bien entendu publié après la clôture, avec quelques statistiques (on ne se refait pas!) [Billet publié le 24 septembre 2023].

* À noter que, sur le blog de dasola, nous n'avons pas l'habitude de répondre systématiquement à chacun de vos commentaires.
Par contre, chaque billet référencé sera lu et commenté chez les blogueuses-eurs concerné-e-s (qui y auront intégré logo et lien vers la présente page).

* Je ne suis pas très chaud pour accepter des chroniques postées sur les plateformes monopolistiques que sont b*b*lio, livr*ddict et autres b**knode (je n'y suis pas inscrit et n'ai pas l'intention d'y aller).
Par contre, pourquoi ne pas aller "squatter" pour publier votre billet chez l'un ou l'autre blogueur-euse de votre connaissance (cela arrive à des gens très bien...)?
Ça peut aussi permettre de se motiver pour des lectures communes, pourquoi pas?

Edit du 17/06/2023 suite à la question de claudiaLucia de ce jour. Comment compter le nombre de pages? En regardant (aaaargh!) sur les sites de la Fn*c ou d'*m*z*n. Dans son cas, les deux donnent l'édition de 1954 d'Olympio pour 604 pages, donc, non-fiction ou pas, c'est bon ;-)

Edit du 21/06/2023 suite à la question d'Ideyvonne: comme dit "entre les lignes" plus haut, tout ce qui est "non-fiction" (études, livre d'histoire, "beaux livres", etc.) est acceptable (et pas seulement la littérature). Et aussi les "essais", bien sûr [Edit du 01/08/2023, après une question de Jigs].

Edit du 12/07/2023: je précise bien que l'édition "épaisse" doit exister, mais que ce n'est pas forcément celle que vous avez eue entre les mains... N'hésitez pas à participer si cette condition d'existence est remplie. Certain(e)s en seraient presque trop honnêtes à mes yeux et font preuve de trop de scrupules ;-)

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Inscriptions [43 (datées) parfois déjà dans la blogroll], objectifs annoncés à venir (4 pour 2 660 pages, par 4 participantes& participations publiées (avec nombre si plus d'un billet) [106 "épais" pour 79 164 pages, par 34 participant(e)s, avec 92 livres différents, par 77 auteurs ou co-auteurs (avec date de publication du billet)]:

Agnès (27/06/2023), 3 livres: Elizabeth Jane Howard - Etés anglais (La saga des Cazalet, tome 1) [608 pages - 27/06/2023] - Anne-Marie Garat - L'enfant des ténèbres [944 pages - 30/07/2023] - David Graeber et David Wengrow - Au commencement était... [752 pages - 10/09/2023]

* Aifelle (17/07/2023): Julia Glass - En ces temps de tempêtes [608 pages - 03/08/2023]

* Anne (24/06/2023): Yann Arthus-Bertrand - 365 jours pour réfléchir à la terre [800 pages - 24/06/2023]

* Athalie (10/06/2023), 3 livres: Zhang Yueran - Le Clou [640 pages - 12/07/2023] - Nicolas Mathieu - Leurs enfants après eux [608 pages, en gros caractères - 07/08/2023] - Michael Christie - Lorsque le dernier arbre [672 pages - 11/09/2023]

* Audrey (10/06/2023) [cf. colonne de droite]: Elena Armas - The Spanish Love Deception [672 pages]

* Belette2911 (12/06/2023), 15 livres: J. K. Rowling - Harry Potter et les reliques de la mort (Harry Potter, tome 7) [896 pages - 28/06/2023] - Nadine Matheson - L'équarisseur (Anjelica Henley, tome 1) [600 pages - 30/06/2023] - David Gemmell - Le coeur de corbeau (Rigante, tome 3) [640 pages - 04/07/2023] - Stephen King - Conte de fées [736 pages - 19/07/2023] - David Gemmell - Le cavalier de l'orage (Rigante, tome 4) [752 pages - 26/07/2023] - John Gwynne - Malice (Le livre des terres bannies, tome 1) [640 pages - 30/07/2023] - Jérôme Camut et Nathalie Hug - Le calice jusqu'à la lie (W3, tome 3) [992 pages - 04/08/2023] - Stephen King - Salem [832 pages - 10/08/2023] - Terry Hayes - Je suis Pilgrim [912 pages - 14/08/2023] - David Gemmell - Les épées de la nuit et du jour (Drenaï, tome 11) [600 pages - 19/08/2023] - Stephen King - Tout est fatal [704 pages - 22/08/2023] - Greg Iles - Brasier noir (Natchez Burning, tome 1) [1056 pages - 29/08/2023] - John Gwynne - Bravoure (Le livre des terres bannies, tome 2) [672 pages - 30/08/2023] - Ray Celestin - Mascarade (Michael Talbot et Ida Davies, tome 2) [624 pages - 12/09/2023] - Karl Marlantes - Faire bientôt éclater la terre [860 pages - 19/09/2023]

* Canel (31/07/2023) [cf. colonne de droite]

* Cannetille (20/08/2023)

* Carole Nipette (10/06/2023): Bret Easton Ellis - Les éclats [616 pages - 16/08/2023] 

* Claudialucia (10/06/2023), 4 livres: Stefan Zweig - Balzac [664 pages - 21/06/2023] - André Maurois - Olympio ou la vie de Victor Hugo [604 pages - 05/09/2023] - Jo Nesbo - Leur domaine [688 pages - 06/09/2023] - Jussi Aldler-Olsen - Sel (les enquêtes du département V, tome 9) [672 pages - 11/09/2023]

* Dan (18/06/2023)

* Dasola (24/06/2023), 5 livres: Eva Garcia Saenz de Urturi - Les rites de l'eau [608 pages - 10/07/2023] - Ghislain Gilberi - Sa Majesté des ombres (La trilogie des ombres, tome 1) [740 pages - 21/07/2023] - Stefan Ahnhem - La neuvième tombe [736 pages - 12/08/2023] - Philippe Sands - Retour à Lemberg [768 pages - 15/08/2023] - Jo Nesbo - Leur domaine [688 pages - 05/09/2023] 

* Doc Bird (10/06/2023), 3 livres: Liane Moriarty - Neuf parfaits étrangers [672 pages - 11/07/2023] - Karine Giebel - Toutes blessent, la dernière tue [800 pages - 17/07/2023] - Margaret Atwood - Les testaments (La servante écarlate, tome 2) [650 pages en grands caractères - 20/09/2023]

* Doudoumatous (10/06/2023): Zhang Yueran - Le Clou [640 pages - 12/07/2023]

* Ecureuil bleu (11/06/2023): Edmonde Permingeat - Tu es moi [628 pages - 14/09/2023]

* Enna (26/06/2023), 2 livres: Jussi Aldler-Olsen - Sel (les enquêtes du département V, tome 9) [672 pages, écouté en audiolivre - 26/08/2023] - Robert Galbraith - The Ink Black Earth (Cormoran Strike, tome 6) [1248 pages, en VO - 30/08/2023] 

* Erwelyn (23/06/2023) [cf. colonne de droite]: John Christopher - Les Tripodes [612 pages]

* Gaëtane (26/07/2023): Hans Fallada - Seul dans Berlin [768 pages - 16/07/2023]

* Gambadou (11/06/2023), 2 livres: Albert Cohen - Belle du Seigneur [852 pages - 30/08/2023] - Amor Towles - Lincoln Highway [640 pages - 06/09/2023]

* Gromovar (16/08/2023): Larry McMurtry - Lonesome Dove (Gus McCrae & Woodrow Call, tome 1) [848 pages, en VO - 16/08/2023]

* Ingannmic (10/06/2023), 8 livres: George Sand - Histoire de ma vie [864 pages - 27/06/2023] - Zhang Yueran - Le Clou [640 pages - 12/07/2023] - Jo Nesbo - Leur domaine [688 pages - 22/07/2023] - Michael Christie - Lorsque le dernier arbre [672 pages - 28/07/2023] - Joyce Carol Oates - Un livre de martyrs américains [864 pages - 22/08/2023] - Alexandre Dumas - Le comte de Monte Cristo [1504 pages - 28/08/2023] - Malcolm Lowry - Au-dessous du volcan [608 pages - 06/09/2023] - R. J. Ellory - Le carnaval des ombres [768 pages - 12/09/2023] 

* Isabelle (22/07/2023)

* Jigs (20/06/2023), 2 livres: Anthony Doerr - La cité des nuages et des oiseaux [704 pages - 29/07/2023] - Umberto Eco - Le pendule de Foucault [672 pages - 17/09/2023]

* Kathel (10/06/2023), 3 livres: Francesca Melandri - Tous, sauf moi [640 pages - 03/07/2023] - Elizabeth George - Une chose à cacher (Inspecteur Linley, tome 21) [864 pages - 18/07/2023] - Goliarda Sapienza - L'art de la joie [800 pages - 24/07/2023] - Sok-Yong Hwang - Le vieux jardin [704 pages] 

* Keisha (10/06/2023), 2 livres: Hélène Gestern - L'odeur de la forêt [704 pages - 10/07/2023] - Hanya Yanagihara - Vers le paradis [816 pages - 27/07/2023]

* Lhisbei (02/07/2023): Marie Robinette Kowal - Sur la lune [736 pages - 06/09/2023]

* L'or rouge (06/08/2023) [cf. colonne de droite]

* Maggie 76 (24/07/2023): Soren Sveistrup - Octobre [736 pages - 24/07/2023] 

* Manika 27 (26/07/2023): Alice Ferney - Cherchez la femme [720 pages - 12/07/2023]

* Mara (16/06/2023), 17 livres: Lucinda Riley & Harry Whittaker - Atlas (Les sept soeurs, tome 8) [768 pages - 21/06/2023] - Bernard Minier - M, le bord de l'abîme [640 pages - 24/06/2023] - Martha Hall Kelly - Le lilas ne refleurit qu'après un hiver rigoureux (Les femmes Ferriday, tome 1) [672 pages - 25/06/2023] - Sarah Lark - Le chant des coquillages (Fleurs de feu, tome 2) [792 pages - 02/07/2023] - Lucinda Riley - L'ange de Marchmont Hall [710 pages - 04/07/2023] - Min Jin Lee - Pachinko [640 pages - 07/07/2023] - Santiago Posteguillo - Moi, Julia - un empire, une destinée [944 pages - 10/07/2023] - Pierre Lemaitre - Le grand monde (Les années glorieuses, tome 1) [768 pages - 15/07/2023] - Elizabeth Chadwick - Le chevalier d'Aliénor (Guillaume le Maréchal, tome 1) [672 pages - 29/07/2023] - Mazo de la Roche - La naissance de Jalna / Matins à Jalna (Jalna, la saga des Whiteoak, tomes 1-2) [800 pages - 06/08/2023] - Lucinda Riley - La chambre aux papillons [640 pages - 08/08/2023] - Anne Jacobs - La villa aux étoffes (tome 1) [648 pages - 13/08/2023] - Elizabeth Chadwick - L'hiver d'une reine (Aliénor d'Aquitaine, tome 3) [672 pages - 16/08/2023] - Margaret Atwood - Captive [624 pages - 22/08/2023] - Alexandre Dumas - La reine Margot [672 pages - 01/09/2023] - Anne Jacobs - Les filles de la villa aux étoffes (la villa aux étoffes, tome 2) [696 pages - 11/09/2023] - Annie Barrows - Le secret de la manufacture de chaussettes inusables [696 pages - 18/09/2023]

* Marilyne (10/06/2023) [cf. colonne de droite]

* Martine (15/06/2023): Elizabeth George - Une chose à cacher (Inspecteur Linley, tome 21) [864 pages - 30/08/2023] 

* MHF (22/08/2023), 4 livres: Alice Ferney - Cherchez la femme [720 pages - 12/07/2023] - Karine Giebel - Glen Affric [768  pages - 09/08/2023] - Robert Goddard - L'énigme des Foster [604 pages - 21/08/2023] - Robert Goddard - Sans même un adieu [800 pages - 29/08/2023] 

* Michel Tabras (01/07/2023): Elizabeth Jane Howard - Etés anglais (La saga des Cazalet, tome 1) [608 pages - 01/07/2023]

* Miriam (27/07/2023) [cf. colonne de droite]: Barbara Kingsolver - Un autre monde [672 pages]

* Nathalie (17/07/2023): Daphné du Maurier - Rebecca [640 pages - 30/06/2023]

* Patrice (11/07/2023), 2 livres: Alexandre Dumas - Les Trois Mousquetaires [852 pages - 31/08/2023] - Anni Kytömäki – Gorge d’Or [640 pages - 20/09/2023]

* Sacha (01/07/2023), 3 livres: Thomas Hardy - Loin de la foule déchaînée [768 pages - 30/06/2023] - Alexandre Dumas - Les Trois Mousquetaires [852 pages - 28/08/2023] - Nino Haratischwili - La huitième vie [1200 pages - 04/09/2023]

* Sandrion (29/07/2023), 4 livres: Dolores Redondo - Tout cela je te le donnerai [768 pages - 16/07/2023] - Hans Fallada - Seul dans Berlin [768 pages - 29/07/2023] - Julia Glass - En ces temps de tempêtes [608 pages - 02/08/2023] - Ernest Hemingway - Iles à la dérive [672 pages - 24/08/2023]

* Sibylline (19/07/2023): J. K. Rowling - Une place à prendre [792 pages - 15/07/2023]

* Sunalee (26/06/2023), 5 livres: Larry McMurtry - Les rues de Laredo (Gus McCrae & Woodrow Call, tome 2) [784 pages - 23/07/2023] - Nino Haratischwili - La huitième vie [1200 pages - 30/07/2023] - Owen Hatherley - Landscapes of Communism. A History through Buildings [612 pages - 24/08/2023] - Bret Easton Ellis - The Shards [608 pages, en VO - 27/08/2023] - Luther Blissett - Q – L’oeil de Carafa [752 pages - 17/09/2023] 

* Ta d loi du cine (10/06/2023), 3 livres: J. K. Rowling - Harry Potter et la coupe de feu (Harry Potter, tome 4) [784 pages - 31/07/2023] - Michael Mann et Meg Gardiner - Heat 2 [704 pages - 26/08/3023] - J. K. Rowling - Harry Potter et l'Ordre du Phénix (Harry Potter, tome 5) [1040 pages - 18/09/2023] 

* Violette (07/08/2023), 2 livres: R. J. Ellory - Seul le silence [608 pages - 10/08/2023] - Philippe Jaenada - La petite femelle [744 pages - 12/09/2023]

7 juin 2023

La vie secrète des jeunes (tome III) - Riad Sattouf

Cela fait pas mal de temps que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vois sur les blogs des billets sur L'Arabe du futur de Riad Sattouf. Le tome six (et dernier, a priori) venant de sortir en librairie (enfin, il y a déjà quelques mois désormais: novembre 2022...), cela m'a été l'occasion de me dire "Bon, jy vais...". Pour commencer, j'en ai donc emprunté les quatre premiers tomes en bibliothèque. Mais ce n'est pas de cette série-ci que je vais parler. En faisant quelques recherches (wik... est toujors mon ami!), je me suis remémoré que Riad Sattouf avait un temps collaboré à Charlie Hebdo, et ai noté cette info dans un coin de ma tête. Puis j'ai rendu les 4 premiers tomes de L'Arabe du futur et ai cherché le tome cinq (le six, déjà présent en bibli, est indisponible à peu près partout - sauf à le "réserver" -, quel succès!). Et en allant emprunter ledit tome cinq, je suis tombé sur ... le tome III de La vie secrète des jeunes, que je vous présente aujourd'hui. 

VieSecrete_III
Septembre 2012, L'Association, coll. Ciboulette. 
"Les planches de cet ouvrage sont toutes parues dans Charlie Hebdo entre 2010 et 2012. Merci à Charlie Hebdo".

Dans cet album, nous n'avons pas d'histoire suivie, aucune couleur, mais du dessin de silhouettes en noir et blanc, quasiment sans applats noirs à part quelques vêtements ou chevelures (aucun gris, pas de trame). Il s'agit de petites scènes, avec en haut de la première case une mention "vu et entendu dans / à" suivie d'un lieu plus ou moins (in)déterminé, à Paris le plus souvent, parfois en province, exceptionnellement à l'étranger. Qui sont les "jeunes" visés par le titre? Je dirais que leur définition semble ici plus englobante que le terme "politiquement correct" inventée en fin de XXe siècle pour permettre aux journalistes de ne pas se montrer trop discriminante en rendant compte de "faits divers". Comme personnages (qui ne reparaissent jamais d'une planche à l'autre - sauf si certaines scènes s'étendent sur deux planches qui se suivent), nous avons des couples plus ou moins improbables, des enfants entre eux, un parent (ou deux) avec un gamin (ou deux)... parfois insupportables, parfois pleins de bon sens.

Dans le livre, chaque petite "bande dessinée" se présente sous forme d'un "gaufrier" de 8 cases d'approximativement 6 cm de large sur 5 cm de haut. Je ne suis pas en mesure de préciser si elles ont bénéficié d'un "remontage", si la publication originale dans Charlie Hebdo se faisait en colonne(s), en ligne(s), ou bien exactement sous le même format que dans l'album. En tout cas, leur contenu, extrèmement varié, m'a parfois fait songer à certaines des saynettes croquées par Charb dans Paris-Pontoise.

Ici, une "sociologie des rues" (ou du métro, du bus, du café...) captée semble-t-il au vol nous fait assister à des situations diverses et diversifiées, cocasses ou pitoyables, dont certaines font sourire et d'autres grimacer. Je crois que les "scènes dans le métro" sont les plus nombreuses (52 planches - avec une écrasante majorité de ligne 9, voire de sortie à Buzenval...). On se demande parfois où l'amour va se nicher... La relation avec les commerçants n'est pas toujours simple pour tout le monde. La racaille exubérante peut effrayer le bourgeois. A quoi donc peuvent servir agressivité feinte et insulte? Obtenir le "respect" de ses pairs, peut-être? Certaines planches sont quasi-muettes. Dans d'autres, bourrées de texte, on a plutôt une démonstration avec la vacuité et la futilité de conversations au premier abord plus intellectuelles que de simples échanges d'interjections. Mais je vais arrêter là mes longs discours.

Pour vous donner (j'espère!) l'envie de découvrir cet album par vous-même, j'en ai extrait une sélection personnelle de quelques planches parmi les 130 que compte le volume.

P1150835 La lecture ou la vie!   P1150836 Le boulot ou l'amour!

P1150837 Mamma lei! (je crois)   P1150838 ... pas pousser mémé dans les orties.

P1150840 (Ça me fait songer au masque, il y a trois ans... Qui protégeait-il?) 

 P1150844 ... croirait-on pas Hergé lui-même?

P1150839 La dictature c'est "ferme ta gueule", la démocratie c'est "cause toujours", disait-on dans mon jeune temps à moi.

La logique "dessin de presse" conduit à une publication où je regrette (ce n'est ni la première ni la dernière fois) l'absence de mention de date de publication dans l'hebdomadaire, ou même de numéro de page...

Selon les informations que j'ai trouvées, Riad Sattouf a arrêté sa série et quitté Charlie Hebdo en octobre 2014 (après 9 ans de présence dans les pages du journal). Il devrait donc exister des planches non publiées en album, peut-être de quoi faire (au moins) un quatrième tome... ou bien que nous verrons seulement à l'occasion de la publication d'une "intégrale"?

Pour ma part, il me reste encore à découvrir le reste de son oeuvre, notamment son autre série-phare Les cahiers d'Esther. Et si je trouve les deux tomes précédents de La vie secrète des jeunes, j'en ferai peut-être un nouveau billet un de ces mois...

Edit du 11/06/2023Une comète avait en 2016 publié une chronique du tome II sur son ancien blog. En... 2008, Deedee et DonaSwann avaient chroniqué le premier tome; Lorraine en 2009.

*** Je suis Charlie ***

23 mai 2023

Mémoires / Vivre et laisser mourir, le livre d'un film - Roger Moore

Il y a quelques semaines, lors d'une recherche physique, est remonté à la surface le contenu d'une des PAL de dasola. J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) alors été "happé" par ce livre, que j'avais moi-même acheté il y a des années, "en solde", au hasard d'une halte dans une station d'autoroute (je sais, c'est pas bien). Et j'ai décidé d'en faire un billet, en y rajoutant un autre titre "du même auteur" que j'avais chiné en 2020, pour ce sixième anniversaire du décès de Roger Moore.

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Mémoires (avec Gareth Owen), trad. Marie-Céline Mouraux, First Editions, 2015, 19,95 euros (édition originale publiée sous le titre Last Man Standing: Tales from Tinseltown, 2014)
Vivre et laisser mourir : Le Film d'un film, Plon, 1973 (trad. par France-Marie Watkins)

P1150788Ecrit avec l'aide de Gareth Owen (sur lequel la seule chose que l'on apprend [p.271], c'est qu'une fois de plus il a "donné corps aux velléités d'écrivain" de Roger Moore), ce livre se présente (dans l'introduction de RM) comme la suite de James Bond par Roger Moore : 50 ans d'aventures au cinéma (publié en 2012 pour l'édition française), ouvrage auquel il est parfois fait allusion dans le texte par "j'ai déjà raconté ailleurs...". Dans ces Mémoires, RM rebalaie ici une carrière étendue sur plus de soixante ans, où il raconte des anecdotes qui sont arivées à lui-même, mais aussi à d'autres en sa présence, ou bien que d'autres célébrités lui ont racontées leur être arrivées, ou encore d'autres "de notoriété publique" (?) sans qu'il cite sa source... Il a croisé sur son chemin bien du beau monde, c'est certain (l'Index comporte pas moins de huit pages en petits caractères sur deux colonnes)! L'ouvrage est bien écrit, enlevé, et l'édition contient des photos de Roger Moore à tous âges, dans des spectacles et films pour certaines, ou lors d'événements pour les plus récentes... Une lecture distrayante, et qui peut nécessiter de fréquentes consultations d'internet pour resituer les personnes ou les films dont il parle! Le livre, organisé à ce qu'il semble de prime abord en 8 chapitres, saute souvent du coq à l'âne, sans vraiment de fil conducteur, en tout cas pas toujours de manière chronologique. Je dirai, à titre d'anecdote, que Tony Curtis, partenaire dans la série mythique Amicalement vôtre (The Persuaders! en VO), excellent compagnon au demeurant, en prend pour son grade (près de ses sous, réticent à refaire des prises, encore davantage à post-synchroniser ses répliques...). Il était déjà décédé quand le livre est sorti... 

Si vous êtes curieux d'histoires de télévision, de cinéma et d'acteurs anglais amusantes à lire, je vous conseille cette lecture intéressante.

P1150784P1150786En 1973, la couverture de l'autre livre présenté joue sur l'ambiguïté, la tranche encore plus. Sur celle-là, on lit seulement James Bond - Roger Moore. Sur la couverture, où il y a davantage de place, on lit ensuite, en caractères un peu plus petits: Le livre d'un film / Vivre et laisser mourir. Ce n'est qu'en page de garde que l'on peut découvrir la véritable identité du livre: titre principal Le film d'un livre, en-dessous (en plus petit) Vivre et laisser mourir (Live and Let Die). Le livre a été traduit en français en 1973, l'année même de sa sortie en anglais, par France-Marie Watkins, traductrice bien connue pour la catégorie "roman populaire" (je dois posséder quelques livres de feue la collection Western-Le Masque, Librairie des Champs Elysées). Rappelons qu'il s'agissait du premier film où Roger Moore prenait la suite de Sean Connery (ce dernier ayant joué auparavant six fois le rôle de James Bond): un bon plan marketing...

Et le livre commence à 100 à l'heure, précisément au moment où Roger Moore répète sans caméra la course en hors-bord... et se prend une petite gamelle. Il cadre ensuite l'histoire du tournage qu'il fait commencer au départ de Londres le dimanche 8 octobre 1972. [je suppose que tout le monde connaît le film par coeur, est est donc capable de visualiser les scènes auxquelles je peux faire allusion. Non? Bah je vais faire comme si: z'avez qu'à le (re)voir!].

Tout au long du film, RM nous livre ses impressions sous forme de chronique au jour le jour, en interaction avec ses partenaires (réalisateur, producteur, acteurs, cascadeurs, journalistes, collègues en visite...), parsemé de quelques anecdote (j'ai perdu le nombre de mariages célébrés, mais il y en a eu plus d'un!). La vie, sur le tournage, c'est un travail répétitif et prenant, parfois émaillé d'incidents plus ou moins graves survenus sur le tournage. Mais tout au long, il n'oublie pas de manger, boire, revoir de vieilles connaissances déjà croisées sur un autre tournage TV ou cinéma, jouer aux cartes avec le producteur... et les corvées que sont les photos ou les interviews de presse, elles aussi répétitives: "En quoi votre Bond diffère-t-il de celui de Sean Connery?", quand ce n'est pas "Combien êtes-vous payé?" (réponse: "je ne parle jamais d'argent, sauf avec mon banquier, mon impresario et mon percepteur!" [p.91]). Et pour modestie garder, il cite son gamin de 6 ans, Geoffrey, qui lui demande à peu près: "tu peux battre n'importe qui, même un voleur? - Bien sûr. - Et si James Bond arrivait? - James Bond, c'est moi. - Non. Je veux dire le vrai James Bond: Sean Connery" (p.49). Plus généralement, d'une jolie plume, il nous dévoile les dangers véritables courus par les acteurs et l'équipe pour un résultat spectaculaire à l'écran. La magie du cinéma, tu parles. Il nous révèle encore les dessous de la post-synchronisation, sans perdre son humour: "quand j'y pense, il m'est arrivé de voir à l'étranger des films de moi, doublés par d'autres acteurs dans des langues étrangères et j'ai souvent eu l'impression que la traduction était meilleure" (p.216). 

Ce livre semble ne jamais avoir été réédité: si vous le croisez dans une bouquinerie, n'hésitez pas! 

Et je finis ce billet en répondant à la question que vous vous posez tous, maintenant: non, l'autobiographie de Sean Connery, publiée en 2008 sous le titre Being a Scot (écrite avec Murray Grigir, traduisible par "Etre Ecossais"), ne semble pas avoir été traduite en français...?

17 mai 2023

La révole nature - Aline Geller

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) n'ai pas réussi à emmener avec moi la "maîtresse de blog" découvrir dimanche dernier La révole nature, le film documentaire objet du présent billet, au cinéma L'Entrepôt (75014). C'est dommage, car la documentariste était présente, ce que j'ignorais lorsque j'ai décidé d'aller le voir.

Affiche_La-revole-nature_40x60cm-BD_JPG_web_rvb (bande-annonce)

Ce documentaire a pour sujet le vin naturel, c'est-à-dire plus que "Bio": comme il est dit dans le documentaire, le jour où il sera obligatoire d'afficher sur l'étiquette d'une bouteille tous les produits utilisés pour le raisin d'abord, la vinification ensuite (ce qui semble prévu pour fin 2023?), le consommateur sera peut-être quelque peu désabusé par ce produit-phare en France, dont une bonne part de la production française est exportée. Les producteurs de "vin naturel", minoritaires voire marginaux, revendiquent de ne mettre dans leurs bouteilles que du raisin fermenté. Certains s'autorisent du sulfite (?) pour la conservation. L'association des vins SAINS (Sans Aucun Intrant Ni Sulfite), qui compte peut-être une quinzaine de producteurs, se veut encore plus intransigeante. Lors du film, nous assistons aux rencontres avec plusieurs paysans-vignerons, viti-viniculteurs, organisateurs ou -trices de salon professionnels, gérants de bar à vin... Chacun avec leurs personnalités et leurs parcours: beaucoup de barbus (baba cools) d'âge certain, mais aussi de jeunes "chefs d'entreprises" qui ont repris les vignes familiales pour les conduire et vinifier d'une manière différente des pratiques de leurs parents (ce qui n'est pas toujours simple). Tel ne touche pratiquement pas la terre ni les ceps, d'autres pratiquent le labour à traction chevaline, un autre rajoute du compost. La vinification se fait ici "en amphore" (cuve enterrée à côté des vignes), là en cuve de béton... Certains s'interdisent de vinifier d'autres raisins que ceux de leurs propres vignes, d'autres relèvent le "challenge" de chercher à faire quelque chose avec une "matière première" qui ne vient pas de leurs propres terres... ("négoce"). On assiste à plusieurs vendanges (événements festifs compris), à des dégustations (recrachées au seau!). Les producteurs peuvent être écoeurés de voir une bouteille qu'ils ont vendue 20 euros (oui, le vin naturel est plus cher que le "conventionnel" qu'on trouve en Grande Distribution!) revendue à 600 euros sur internet et devenue objet de spéculation au lieu d'être dégustée. La production est parfois confidentielle: 300 bouteilles pour une cuvée. Crève-coeur de refuser un carton de 6 bouteilles à un amateur qui s'est déplacé... Parfois, c'est plus de 75% de la production qui part à l'étranger. Chez certains revendeurs qui ont fait le choix de l'achat en fût et de la revente "à la tireuse", une bouteille peut par contre être vendue à moins de 10 euros aux amateurs peu fortunés. On peut en fin de film percevoir la crainte que cette notion de "vin naturel" finisse par être "récupérée", pour des raisons marketing, par des "marques" qui en feront une niche dans leurs ventes (comme cela s'est produit pour le commerce équitable ou pour le bio).

A l'issue de la projection, la petite trentaine de personnes (dont quelques professionnels!) s'est dirigée vers l'espace "restauration" de L'Entrepôt et a eu la possibilité de déguster telle ou telle production. C'est là que j'ai pu entendre la documentariste parler avec telle ou telle personne, et échanger moi-même durant quelques minutes avec elle. Elle appréciait ces toutes premières projections sur grand écran, dans une vraie salle de cinéma. Au départ, c'est une série qui était prévue, et il a fallu resserrer. Apparemment, par rapport à un montage précédent que certains avaient eu l'occasion de voir, 7 minutes avaient été retirées. Le film a été tourné en équipe très légère (2 ou 3 personnes), sauf pour les événements (salons ou vendanges) pour lesquels il fallait être en place avant, pendant et après, pour être sûr de capter tous imprévus. Je lui ai demandé si le documentaire passerait à la télé, si un DVD était prévu, si un livre serait publié en complément... Elle aimerait bien, mais dans l'immédiat, le film doit "vivre": sortir dans d'autres salles à Paris, puis tourner en province.

Le film devrait encore être visible cette semaine à L'Entrepôt. D'ici quelques semaines, si tout va bien, il devrait sortir dans quelques salles UGC (sauf s'il s'agissait d'une plaisanterie que je n'aurais pas comprise!) et dans quelques salles indépendantes, par exemple le Saint-André des Arts.

Pour ma part, j'apprécie de voir des documentaires et de pouvoir discuter avec l'équipe, même si cela ne donne pas toujours lieu à un billet: Bricks, Des bobines et des hommes (vus avec dasola). Il m'est aussi arrivé de me rendre à des projections-débats "militantes" organisées par telle ou telle association ou AMAP locale (voire d'y être "missionné" au titre  d'intervenant...), pour Traits de vie, Les petits gars de la campagne, La part des autres, ...

Je vais rajouter quelques éléments bibliographique "pour en savoir plus":

Plaidoyer pour le vin naturel, Eric Morain, éd. Nouriturfu, 2019 (que j'avais versé après lecture au système de prêt de livres de l'AMAP dont je fais partie). 
Deux livres de Christophe Beau, dans la collection "Pratiques utopiques" des éditions REPAS: La danse des ceps (1ère éd. 2003) et Pour quelques hectares en plus (2011).

Aline Geller m'a cité Valentin Morel, je pense qu'il s'agit de l'auteur du livre Un autre vin (Flammarion, 2023). Je ne l'ai pas (encore) lu.

13 mai 2023

A nous la terre ! - Collectif

Un billet express pour un petit recueil de nouvelles que j'ai (ta d loi du cine, "squatter "chez dasola) lu très rapidement!

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A nous la terre, 9 auteurs, 2021, Folio n°7003, 136 pages, 5 euros 

J'ai trouvé cet opuscule dans un bac de bouquinerie pour 20 centimes d'euros. le sous-titre "Les écrivains s'engagent pour demain", et certains des noms sur la couverture, m'ont fait m'en saisir. Je ne le regrette pas, même si (c'est le jeu de la diversité!) certaines nouvelles m'ont davantage "parlé", intéressé ou plu, que d'autres.

* Le côté gauche de la plage - Catherine Cusset (10 pages): souvenirs de baignade - nue, de l'enfance à l'âge mûr. Cela ne m'a pas trop parlé.

* J'ai été nature - Eric De Luca: deux pages, quasi-mystiques. Bof.

* Des coeurs battants - Jean-Baptiste Del Amo (10 pages). Je n'avais jamais entendu parler de l'auteur. j'ai bien apprécié cette nouvelle, qui retrace les évolutions écologiques sur quelques décennies.

*  Instinct - Sonja Delzongle (10 pages). Souvenirs éthologiques (fiction ou réalité?), qui ont fait joliment écho, pour moi, au livre de Jane Goodall chroniqué il y a quelques semaines. Bien.

* L'ordre des pierres - Luc Lang (14 pages): dans les Pyrénées, une randonneurs solitaire, en autonomie sac au dos, savoure sa balade. 

* Le sansonnet - Carole Martinez: 11 pages trop "poétiques" pour moi, où, entre les lignes, on sent l'emprise toxique et la déchéance d'un couple et de ses composantes... 

* Kephart - Ron Rash (17 pages - la nouvelle la plus longue): j'ignorais tout d'Horace Kephart, vu que la page wikipedia en anglais qui le concerne reste à traduire en français (consultée le 5 mai 2023)... Ron Rash tire de la vie de ce "naturaliste" américain une nouvelle intéressante. Un paragraphe m'a fait songer à Serena.

* Mont-Blanc, la mort lente - Jean-Christophe Ruffin (8 pages): j'y ai appris que des voies d'escalades ouvertes au XXe siècle dans les Massif des Drus, dans les Alpes, n'existent plus aujourd'hui, suite à des milliers de mètres cubes d'éboulements au XXIe, sans doute en lien avec l'accélération du réchauffement climatique d'origine humaine... On ne peut donc plus que rêver sur Premier de cordée (Roger Frison-Roche), qui nous parle d'un temps et d'escalades révolus.

* La pieuvre - Monica Sabolo (11 pages): de jolis souvenirs d'enfance, une initiation au "monde du silence" pour une fillette... 

Le livre est bien en vente sur le site de Folio (mise en avant des versions ".pdf" et ebook), mais l'opération ne semble pas avoir été renouvelée en 2022 ni 2023. Une recherche sur le site de Folio avec "WWF" ne ramène rien. Plus largement, via [moteur de recherche], une recherche sur les mots-clés "Partenariat Foliio et WWF" ramène surtout une foule d'entreprises dont on peine spontanément à imaginer le caractère "écologique", qui se seront offert ("à bon compte"?) un certificat de "greenwashing" grâce au WWF...

Les moteurs de recherche m'ont seulement ramené un billet sur le blog Au fil des pages

7 mai 2023

Pas complètement BÊTE... mais pas encore MÉCHANT (période bleue) - Cabu

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous présente, pour mon billet-hommage du jour, un album exhumé de ma PAC (pile à chroniquer). Je m'étais acheté dès février 2015 (quelques semaines après le massacre de Charlie Hebdo) ce recueil des dessins de jeunesse de Cabu, qu'il publiait alors dans une presse qui n'était pas encore très "contestataire", entre 1957 et 1960.

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Cabu, pas complètement BÊTE... mais pas encore MÉCHANT,
période bleue, Editions du Layeur, 2008, 162 pages

La préface de Cavanna, dans ses trois paragraphes percutants, évoque expressément Peynet et ses amoureux, pour vanter immédiatement le mouvement qu'a su insuffler Cabu à ses vignettes. 

Les près de 160 dessins de cet ouvrage mettent en scène de grands dadais dont certains ressemblent à Duduche, des jeunes filles timides évoquant Catherine... mais bien loin de Catherine saute au paf! et encore plus de Camille-le camé. On peut admirer dans ces pages force filles espiègles au sourire mutin et au regard en-dessous, avec parfois une petite fleur au coin des lèvres (laquelle n'a sans doute pas la même signification que le brin de paille de Lucky Luke?): pas encore de cigarette à remplacer? Parfois, ce sont les adultes qui sont tournés en dérision, parfois la jeunesse elle-même, innocente ou délurée, entreprenante ou trop timide... Fille affriolante ou garçon boutonneux, suis-moi, je te fuis / fuis-moi, je te suis! Et j'enfoncerai une porte ouverte en disant que cela reste très "fleur bleue" (comme le sous-titre le sous-entend).

L'ouvrage est subdivisé (plus ou moins arbitrairement?) en chapitres: l'ingénue (p.7), le flirt (p.33 - deux acteurs présents à l'image - sauf exception!), le lycée (p.75), le troufion (p.105), les autres (p.127), Châlons (p.153). Je vous en propose une courte sélection.  

P1150814 p.30: la couv' légendée, c'est mieux!  

P1150815 p.37: Paris, quelle image... 

P1150816 p53

P1150817 p.64 (c'est pas gentil, mais je rigole à chaque fois... CLAC!).

P1150824 p.87

P1150818 p.97

P1150820 p.102 (ça me parle, ça... Je porte toujours le même depuis 2016!)

 P1150821  p.134: le temps passe si vite... 

Dans le dernier chapitre, intitulé "Châlons", il est expliqué que le jeune Jean Cabut a envoyé à partir de 1953 des dessins à l'édition locale de L'Union de Reims, avec une collaboration épisodique qui se maintiendra jusqu'en 1958 et son appel sous les drapeaux, direction l'Algérie.  

P1150823 p.158. Dom Pérignon, dessiné par "K-bu" alors âgé de 17 ans: carrément de la préhistoire (1955)! 

Outre L'Union de Reims, la plupart des dessins du recueil sont paru dans Ici-Paris, Paris Flirt ou Paris-Match.

Le livre est sorti l'année des 70 ans de Cabu, dans une collection où deux ouvrages, l'un de Lefred-Thouron et l'autre de Willem (qui ont aussi dessiné pour Charlie), avaient été publiés avant le sien. Trois autres recueils de dessins de Cabu étaient aussi mentionnés chez le même éditeur. Aujourd'hui, le site des éditions du Layeur semble ignorer tous ces ouvrages (sans doute sont-ils épuisés de longue date?). 

Pour finir, de même que j'avais annoncé l'an dernier que je finirai par traiter cet ouvrage de Cabu, de même je peux à toutes fins utiles signaler que j'en ai encore bon nombre déjà en ma possession et à évoquer un mois ou l'autre! 

*** Je suis Charlie ***

29 avril 2023

Tromelin, ses naufragés, ses esclaves abandonnés - quatre livres

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous présente aujourd'hui quatre ouvrages différents (mais tous bleus!) autour d'un même thème.  

Tromelin_4_livres

Comme tout le monde, j'avais entendu parler de Tromelin il y a déjà quelques années, lorsqu'ont été médiatisés les résultats des fouilles archéologiques sur le campement des esclaves qui y ont survévu abandonnés durant plusieurs années. En croisant de temps en temps sur des blogs les chroniques de tel ou tel livre sur le sujet, j'ai fini par avoir envie de les lire! Grâce aux différentes bibliothèques de la Ville de Paris, c'est chose faite.

On connaît l'histoire: le 31 juillet 1761, de nuit, le vaisseau L'Utile (flûte!) fait naufrage sur les récifs d'un ilôt localisé trop approximativement sur les différentes cartes de l'époque. Il transporte quelque 142 marins et officiers, et quelque 160 esclaves embarqués clandestinement à Madagascar à destination de l'Ile Maurice (alors nommée Ile de France). Sous la conduite du lieutenant Barthelemy Castellan du Vernet, les survivants construiront un nouveau navire à partir des bois de L'Utile. Mais il ne peut les transporter tous. Devinez qui sera, le 27 septembre (au bout de deux mois d'efforts communs), abandonné sur l'île, avec promesse solennelle de revenir les chercher? Les derniers des esclaves vont survivre 15 ans. Quand le quatrième des vaisseaux envoyés parvient à les évacuer par pirogue vers le navire, le 29 novembre 1776, seules survivent sur l'ilôt sept femmes et un bébé.

J'ai donc lu trois oeuvres de fiction et un rapport archéologique. Les trois font preuve d'imagination à partir des mêmes éléments connus.

Tromelin_Civard-Racinais_BureauLes Robinsons de l'île Tromelin. L'histoire vraie de Tsimiavo - Alexandrine Civard-Racinais, illustrations d'Aline Bureau (Belin jeunesse, 2016).

Alexandrine Civard-Racinais est journaliste, auteure, vulgarisatrice de contenus scientifiques, Aline Bureau s'est spécialisée en illustration jeunesse. Ce livre de fiction se présente comme un témoignage, écrit à la première personne au jour le jour, celui de la maman du bébé (dont la mère figurait également parmi les rescapées). Très "identificatoire", cet ouvrage paraît destiné à un public jeunesse. Il compte une trentaine d'illustrations, en couleur ou en noir et blanc, au format allant du cul-de-lampe à l'illustration couleur pleine page sans texte. Détail: j'ai cru voir qu'il respecte la réalité historique avec certains esclaves aux cheveux crépus et d'autres aux cheveux lisses, témoignant du brassage réalisé par les trafiquants de "bois d'ébène". La fin du livre comporte quelques vignettes explicatives très pédagogiques.

P1150794 p.64-65 

P1150795 p.36-37 P1150796 p.38-39

Le blog de la dessinatrice Aline Bureau n'est plus alimenté depuis mars 2018. Le site internet de l'autrice Alexandrine Civard-Racinais annonce ses dates de conférences. 

Le pays des mots (4 billets!) l'avait chroniqué en 2017. 

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Tromelin_FrainLes naufragés de l'île Tromelin - Irène Frain (Michel Lafon, 2009 / J'ai lu n°9221, 2010).

Ce livre est classé comme un roman. Irène Frain a eu accès à la documentation rassemblée par l'archéologue Max Guérout et a elle-même séjourné sur l'île. Pour ma part, je lui reconnais surtout le mérite d'avoir fortement médiatisé cette histoire peu connue auparavant. Les naufragés de l'Île Tromelin est écrit "de l'extérieur" par une narratrice omnisciente (qui sait aussi ce que pensent les personnages), au présent de narration ou au passé composé, avec des phrases courtes et simples.

Toutes proportions gardées, son livre me fait songer à certains de ceux que j'ai pu lire jadis sur l'histoire du Bounty (par exemple celui de Sir John Barrow, classique paru en 1831, qui expose à la fois l'histoire de la mutinerie, puis tant la navigation du capitaine Blight que le sort ultérieur des mutins). 

Je n'ai pas l'impression que le "site officiel" "www.lesnaufragesdeliletromelin" indiqué en fin d'ouvrage soit toujours actif (si aucun ayant-droit n'a pris la peine de renouveler le nom de domaine, il a dû être racheté...)? Par contre, le site personnel d'Irène Frain est accessible et donne notamment des dates de rencontres avec les lecteurs.

Les blogs suivants (liste non exhaustive!) ont chroniqué le livre (parfois au moment de sa sortie, en 2009... à partir d'envois en service de presse ou en "partenariat"?): GrominouZofiaFumet de lecturesBettyBook22l'ancien blog d'Antigonel'ancien blog de Lucie, GangoueusKeisha (qui recense plusieurs autres liens), LaëlLeiloonaLouStephie, Hérisson (sur le blog délivrer des livres), Alicia, Géraldine (qui avait aussi publié un entretien avec Irène Frain). Cathulu n'a pas aimé, Gambadou non plus...

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Tromelin_SavoiaLes esclaves oubliés de Tromelin - Sylvain Savoia (Dupuis, coll. Aire libre, 2015).

Cette BD entrelace les passages d'époque, en présentation classique, avec des dialogues forcément fictifs, et les pages d'une sorte de "making off" de l'histoire du projet, dont j'ai trouvé la lecture nettement plus exigeante (pas de cases, beaucoup de texte à la première personne...).

Lorsque je suis rentré dedans dans un second temps, j'ai personnellement été captivé par "l'histoire de l'histoire" (ou plutôt la description de la vie de l'équipe d'archéologues là-bas, dans des conditions précaires). Il faut tout amener sur place, matériel et vivres, tout bien prévoir car les liaisons avion sont rares (il est bien sûr possible d'effectuer une évacuation médicale si indispensable)... et les équipements sont à la peine (éolienne qui ne marche plus, ordinateur qui tombe en panne, groupe électrogène principal aussi, tracteur...). Peut-on excuser l'erreur classique (p.47 et ailleurs): en archéologie, on ne met pas "à jour" des vestiges, on les met "au jour"? Les archéologues adorent le mot "perturber" (lorsque des vestiges en place ont été détruits par des constructions postérieures - ici p.82). Par contre, j'ai guetté en vain un "sol rubéfié" (témoignage d'incendie), ici remplacé par les "sols sablonneux" résultant d'épisodes cycloniques!

P1150798 p.20-21, le jour du naufrage. P1150797 p.82-83, les vestiges des cases de pierre mis au jour

Blog qui en ont parlé: MokaJeanJacques, Krol.

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Tromelin_Guerout_RomonTromelin. L'île aux esclaves oubliés - Max Guérout & Thomas Romon (CNRS éditions / INRAP, 2010)

Max Guérout, ancien officier de la Marine nationale, a mené quatre expéditions qui s'étalent entre 2006 et 2013 (cette dernière non couverte, donc, par le présent livre, mais bien par la BD précédente). Il consacre de nombreuses pages (fruit de sa recherche documentaire dans les archives) à resituer le contexte historique, maritime, commercial, en métropole comme dans l'Océan Indien, de l'époque du naufrage. Ce livre apparaît comme extrèmement complet, et s'appuie sur des faits documentés.

Je n'ai pas trouvé de chronique le concernant, mais Docbird cite un autre ouvrage de Max Guérout, Esclaves et négriers, qui contient un DVD Les esclaves oubliés de Tromelin.

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Au final, j'ai classé dans cet article les quatre ouvrages dans l'ordre croissant de mon intérêt personnel: ce que j'ai le plus apprécié est bien ce qui raconte la démarche historique et archéologique basée sur des faits. Je pense que les différents profils de lectrices ou lecteurs peuvent être plus ou moins attirés par l'un ou l'autre... 

7 avril 2023

Souriez, vous êtes français! - Bernard Maris

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) ne suis pas un auditeur de radio. Je n'ai donc jamais entendu Bernard Maris lors de ses chroniques et débats sur France Inter, contrairement à bon nombre des commentateurs sous mes billets précédents qui le concernaient. L'ouvrage que je présente aujourd'hui dans mes "Hommages du 7" compile un certain nombre de ces interventions radiodiffusées du vendredi matin. 

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Souriez, vous êtes français! Bernard Maris, collection Pluriel, 2017, 135 p. 
(édition originale parue chez Grasset en mai 2016, en coédition avec France Inter).  

Si j'ai bien compris l'introduction et ce qui est dit sur le site de Radio France, parmi les quelque 300 émissions que Bernard Maris a assuré chez France Inter, une trentaine ont été rediffusées en hommage durant l'été 2015 (sous le titre "La France au milieu du gué", dans un format de quatre minutes), et leur reprise a donné lieu à ce livre. On peut regretter l'absence de toute date (que ce soit celle de la diffusion d'origine ou celle de la reprise à l'été 2015), les textes doivent donc se suffire à eux-mêmes. Le titre donné au recueil apparaît p.125. 

J'avoue, j'ai quelquefois été frustré par ce format écrit (textes très courts et un peu "didactiques"), parce que je n'écoute pas la radio et n'y ai jamais entendu Bernard Maris de son vivant (on doit certainement pouvoir l'écouter sur internet). Les textes sont courts, percutants, au ton provocateur où, je crois, l'antiphrase et le second degré sont largement utilisés. Faut-il y suspecter de l'ironie, du second degré, du sous-entendu, de la démonstration par l'absurde? Lorsqu'on lit, par exemple, la version écrite des textes que Pierre Desproges passait à l'oral, au moins, on sait sur quel pied danser: il s'agissait d'humour caustique. Chez Maris, il s'agit je suppose d'interpeller pour faire réfléchir différemment. Chaque billet commence par une apostrophe adressée aux auditeurs ("bonjour..."), jamais identique à celle de la (semaine ou l'émission) précédente, mais y faisant souvent allusion pour aller plus loin en une sorte de chaînage. Les sujets, eux aussi, sont liés (introduits dans une rubrique, approfondis dans une autre). J'ai été frappé par la "règle des 80 /20", évoquée à plusieurs reprises (20% des agriculteurs touchent 80% des subventions; 80% du CIR [crédit d'impôt recherche] bénéficie à 20% des entreprises - effet d'aubaine!).

Une citation d'actualité (p.93) dans une chronique sur les Françaises au travail: "une bonne note tout de même: les retraites des femmes se sont rapprochées de celles des hommes, mais les femmes retraitées gagnent encore moitié moins... Surtout qu'elles vivent plus longtemps, qu'elles ne se remarient pas  tandis que les veufs, eux, se remarient. Ils ne supportent pas la solitude". Ce que cela m'inspire? Hé bien, pour parodier Brassens, que Bonhomme a besoin de Bobonne! Et une autre citation (p.42) - datant d'avant le Brexit, je le rappelle: "la France attire les vieux Anglais, l'Angleterre les jeunes Français".

Je n'en dirai pas davantage sur ces textes de Bernard Maris, dont je conseille la lecture à chacun. On peut regretter que le sommaire (personne ne l'a donc relu?) attribue la "postface" à sa fille, Gabrielle Maris-Victorin, auteur de la "préface", et non à son fils, Raphaël Maris, qui l'a en fait signée. Dominique Seux, qui a donné la réplique à Bernard Maris sur France Inter durant sept ans, signe un autre texte introductif.

J'ai pu trouver un seul blog qui parlait du livre, Le bien écrire (s'agissant d'un blog hautetfort, les commentaires en ont été fermés il y a déjà bien longtemps).

Je me permettrai quand même encore quelques remarques sur la forme matérielle de cette collection Pluriel (marque qui appartient à Fayard, Maison qui fait partie du groupe Hachette, en passe aujourd'hui d'être bientôt totalement contrôlé par Vincent Bolloré) où il prend place. Mon exemplaire tout neuf est excessivement fragile (reliure défectueuse, paquets de pages qui se décollent en fin d'ouvrage). En fin de livre, justement, vingt pages listent en petits caractères les titres aujourd'hui disponibles, classés en sous-collections thématiques, mêlant des essais contemporains avec des ouvrages "classiques" datant du XXe siècle voire de son début (les manuels Malet & Isaac en Histoire, par exemple). Le site internet de Pluriel ne contient aucun rédactionnel "historique" sur cette collection. Celui de Fayard donne à lire, sur l'histoire de la Maison, un texte datant de la toute fin du XXe siècle qui ne parle pas de Pluriel. Celui d'Hachette (consulté ce 7 avril 2023) est (sauf erreur de ma part) exclusivement orienté "business", promotionnel, qui donne à lire de la publicité, de la communication, et aucune information historique... 

*** Je suis Charlie ***

30 mars 2023

Le livre est-il écologique? - Collectif

J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) découvert le livre objet du présent billet chez la librairie de quartier que je fréquente principalement. Il y a quelques années, je partageais équitablement mon budget "livres neufs" chez une seconde librairie, mais j'ai un peu "laissé tomber" cette autre à l'occasion de son changement de propriétaires, lorsque l'ancienne libraire a pris sa retraite et a vendu son "fonds de commerce", même si je continue à recevoir les invitations pour toutes les dédicaces et autres conférences qui y sont organisées... et auxquelles je ne prends pas le temps de me rendre, alors que certains sujets pourraient m'intéresser. Bref. Je reviendrai sur ce sujet plus bas.

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Le livre est-il écologique? Matières, artisans, fictions, 2020, Wildproject (collectif), 103 p., 9 euros.

Le problème avec les livres collectifs, c'est que, même portant sur un thème précis, ils peuvent parfois sembler faits de bric et de broc, avec des parties qui éveilleront plus ou moins l'intérêt de chaque lecteur, et/ou des plumes plus ou moins étincelantes. J'ai bien sûr été attiré par le "post-it" signalant que ce livre (en présentoir) avait été co-rédigé par ma libraire, que je connais depuis 19 ans, à l'époque où la librairie qu'elle avait en tête de fonder n'était encore qu'un projet qui cherchait du financement solidaire (les plateformes de financement participatif n'existaient pas à ce moment-là). Mais je recommence à m'égarer!

Je l'ai donc réservé, en demandant une dédicace (la fondatrice n'est depuis longtemps plus seule contrairement à ses débuts (dans un local plus petit), elle a depuis plusieurs années embauché des salarié.e.s et ouvert son capital à au moins une associée). Lorsque je suis repassé, elle était elle-même présente et j'ai pu lui rafraîchir la mémoire. Après cette "mise en contexte", j'en viens enfin au livre lui-même.

Comme le dit la quatrième de couv', "cet ouvrage a été réalisé par l'Association pour l'écologie du livre, qui oeuvre de façon interprofessionnelle sur les questions d'éco-responsabilité et de bibliodiversité". Le livre comprend trois parties principales, titrées "Etat des lieux (entretiens)", "Horizons (écofictions de libraires)" et "Vers l'écologie du livre (manifestes)". Selon la page "Crédits" (p.101), les textes qui le composent ont, pour certains, été publiés dans la presse, sur internet, ou dans un ouvrage précédent. 

La partie "technique" sur la filière livre (l'entretien avec ma librairie, mais aussi ceux avec un éditeur et surtout avec un forestier) est celle qui a le plus éveillé mon intérêt, en évoquant les problématiques des différents composants de la filière livre. Pour la librairie, l'entretien porte sur l'adéquation entre un projet spécifique pour une librairie et les contraintes (organisation des rayons, économie fragile du secteur livre...). L'éditeur (une petite Maison basée en Belgique) explique qu'il réalise 80% de son chiffre d'affaires avec 120 librairies seulement, avec lesquelles il a construit des relations privilégiées. Le forestier nous donne une vision (que j'ai trouvée passionnante!) de la filière "papier" (mondialisé) et de l'inertie des éditeurs, où les "gros" (en France, en tout cas) décident davantage en fonction de leurs intérêts propres que de celui de la planète...

La partie consistant en écofictions de libraires présente quatre nouvelles se déroulant dans quelques années (2030 ou après) et imaginant ce qu'a pu devenir leur métier. Elles ont été réalisées dans le cadre d'un atelier d'écriture en 2019 (l'intégralité des nouvelles produites peut être trouvée en ligne sur le site de l'association, rubrique "ressources"). Là, j'ai commencé à être un peu moins convaincu: certaines sont plutôt dans l'utopie, à mon avis (ayant pour cadre une communauté idéalisée qui possède une impressionnante collection de livres...). Vers la fin de la dernière nouvelle (p.77-78), j'avoue avoir été interpellé par les phrases suivantes: "Eh bien, en fait, on a créé une usine à papier recyclé il y a trois ans. Elle est au fond du champ derrière la librairie. Donc on fait à la fois de la récupération de livres endommagés ou qui ont peu d'intérêt pour les membres de la communauté, mais aussi de pas mal de chiffons; Et c'est avec ça qu'on fait pour ainsi dire l'ensemble du papier de la commune ainsi que quelques dizaines de livres en auto-édition". Autant je trouve génial cette production autonome de papier et sa finalité, autant je suis heurté par ce "mépris" pour certains livres, exclus a priori et définitivement (sur décision irréversible) de toute chance de lecture future, ce qui s'apparente à une forme de censure et me déplait. J'aurais préféré lire "... endommagés ou de livres en nombreux exemplaires qui ont peu d'intérêt pour les membres de la communauté (en veillant bien sûr à en préserver un exemplaire aux fins de conservation), mais aussi (etc.)". Mais bon, chaque lecteur ou lectrice pourra avoir son propre avis je suppose.

Enfin, à la lecture des deux "manifestes" de la troisième partie, j'ai commencé à accentuer ma réticence. Ces manifestes sont vraiment trop "conceptuels" pour moi, et j'avoue que mettre en avant le décolonialisme ou les réunions non-mixtes n'est pas forcément le meilleur moyen de capter mon attention bienveillante. Les chercheur.euses cité.e.s dans ces manifestes contribuent chacun.e à la "déconstruction" de l'écologie, à renommer "humanités écologiques", où peuvent prendre place les oeuvres des philosophes écoféministes, les anthropologues du non-humain, les zoophilosophes, les penseurs biorégionalistes, ceux écodécoloniaux, sans parler des écopoéticiens... En parlant de la convergence de certains de ces thèmes vers des ouvrages trangenres, ils m'ont perdu comme lecteur, sans, je le crains, me donner pour le moment envie d'en découvrir davantage. Dans le second manifeste, titré "Les trois écologies du livre" (écologie matérielle, écologie sociale, écologie symbolique), le parti pris assumé est de partir du principe que, dans la chaine du livre, le féminin l'emporte (note p.90 - je n'ose demander si c'est de l'humour, de la provocation pour pousser à la réflexion, ou qui sait quoi d'autre).

A vous maintenant, lectrices et lecteurs, de vous forger votre propre opinion après lecture.

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Quelques réflexions sur mon propre rapport à la lecture ces dernières années

Finalement, ce billet m'a été l'occasion de m'introspecter sur mes modes de lecture. Qu'est-ce qui, désormais, me motive à ouvrir un livre?

D'abord, un aspect utilitariste. Il faut qu'il corresponde à une des thématiques sur lesquelles je suis "en veille": l'ESS (économie sociale et solidaire) en général, l'écologie ou l'agriculture bio ou de proximité en particulier. Une fois lu, je prendrai la peine de l'apporter en consultation aux membres de mon club d'investisseurs CIGALES, avant (selon le sujet) de le verser au système de prêt de livres au sein de l'AMAP dont je fais partie. Exceptionnellement, j'en aurai, auparavant, tiré un billet pour le présent blog.

Pour enrichir ma bibliothèque thématique personnelle, je m'astreins à lire quasiment un "essai" par semaine en moyenne. Certains font moins de cent pages là où d'autres en comptent plusieurs centaines, certains viennent de paraître tandis que j'en ai acheté d'occasion d'autres - parfois débris de bibliothèques rachetées en bloc par la bouquinerie avec une dédicace de l'auteur -  à quelques euros pièce.

D'autre part, côté littérature récréative, j'ai surtout tendance à relire des livres que je connais déjà. BD et manga figurent en bonne place dans mes lectures. En fait je lis bien davantage que je ne chronique. 

Pour que je rédige un billet, paresseux comme je suis, il me faut, là encore, une carotte: un "challenge" bloguesque de plus ou moins longue durée, même si rédiger un billet me demande un effort supplémentaire (sans parler des recherches pour trouver quelques liens vers des blogs en ayant déjà parlé - recherches de plus en plus ardues désormais).

Je lis en tout cas beaucoup plus de ce que j'appelle les livres "de stock" (déjà disponibles depuis des années, parfois même épuisés en neuf) que "de flux": je ne suis guère les parutions récentes, sauf s'il s'agit d'un ouvrage qui recoupe mes propres centres d'intérêt. Je sais que je ne pourrai jamais tout lire. Alors, autant me concentrer sur ce qui serait susceptible de m'intéresser, plutôt que de me lancer vers l'inconnu. Il ne me vient jamais à l'esprit de demander conseil à une libraire. Je trouve souvent mention de nouvelles parutions (essais) dans la presse, et vais alors les commander à ma librairie. C'est par contre sur les blogs que je détecterai un ouvrage que j'ignorais d'un auteur déjà connu de moi, ou, parfois, un billet attirant mon attention sur un ouvrage à côté duquel je serai passé autrement (et que je vais le plus souvent chercher à emprunter en bibliothèque).

Et vous?

20 mars 2023

Deux livres sur des canidés

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous présente deux vénérables livres au format poche chinés pour quelques dizaines de centimes d'euros (30 centimes pour l'un d'une part, 20 centimes pour l'autre mais cinquante centimes si on en achète trois - et j'en avais pris 9 pour ce lot-ci, d'autre part). J'ai décidé d'en faire un billet commun à cause du thème mis en titre: tous deux mettent en scène des canidés.

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Tueurs innocents, H. et J. van Lawick-Goodall, J'ai Lu documents N° D 19**, 1973, 308 p.
Dix chiens pour un rêve, François Varigas, Le livre de poche N°6051***, 1985, 254 p.

P1150751Le premier titre, Tueurs innocents, est un livre documentaire d'éthologie (observation des animaux). Jane Goodhall, alors mariée avec le photographe et cinéaste documentariste Hugo van Lawik, reste aujourd'hui beaucoup plus connue pour ses travaux sur les chimpanzés, à Gombe. Le présent livre a été publié en anglais en 1970, et traduit en français en 1971.

Son mari ayant été nommé photographe des parcs nationaux de Tanzanie, Jane l'accompagne dans ses missions d'études, avec leur enfant en jeune âge, Hugo junior, plus connu sous le nom de Grublin (p.36). Tous deux partagent équitablement couches et rédaction du livre. Les observations se déroulent dans le Parc du Serengeti et dans le cratère du Ngorongoro qui en est mitoyen. Les habitués des documentaires animaliers reconnaîtront toute la faune du Serengeti. Le livre s'intéresse en premier lieu aux carnivores, et par conséquence à leurs proies (herbivores). Proies parfois dévorées vivantes (en commençant par les entrailles), mais qui, nous dit-on, meurent plus rapidement que les herbivores étranglées durant 10 minutes par les lions... (et peut-être "anesthésiées" par le choc, comme un humain peut "réagir" en cas de blessure grave...). Il est aussi question des oiseaux (j'ai appris que les "vautours égyptiens" savent utiliser un outil: ils jettent une pierre contre les oeufs d'autruche pour en briser la coquille, trop dure pour leurs becs). Trois races d'animaux sont abordées (ont été étudiées, par le couple et ses assistants) successivement: les chiens sauvages (lycaons), chacals dorés (et argentés?), hyènes tachetées. A chaque fois, les chapitres, rédigées dans un style vivant (qui n'exclut nullement la précision scientifique) nous présentent plusieurs "clans" ou meutes". Sont décrits l'élevage des jeunes, la hiérarchie interne à chaque groupe, le mode de chasse, les relations avec les proies, les autres carnivores, ou les congénères. Le livre est entrecoupé d'anecdotes d'observations en véhicule ou de vie au bivouac avec leur jeune fils. Seuls quelques indices permettent alors de savoir qui est le "je" qui rédige. Les auteurs ont pu bénéficier d'un programme d'études pluriannuel, et de la bienveillance de leur éditeur (puisque la rédaction du livre a connu plus de six mois de retard par rapport à ce qui avait été convenu). Toutes ces observations vécues, racontées de manière très vivantes, aboutissent à un récit qui se lit comme un polar. Une belle lecture, à mettre en perspective, je le répète, avec les documentaires animaliers qui repassent inlassablement sur Arte.

En cherchant des informations complémentaires, j'ai appris que, contrairement à ce que je pensais au départ, les hyènes, selon les arbres phylogénétiques récents, ressortiraient plutôt de la même famille que les félins (comme les mangoustes par exemple) et non de celle qui contient les canidés (sous-ordre des féliformes plutôt que des caniformes, donc). Je pense que le second livre annoncé, Tueurs tranquilles, qui devait porter sur les félins du parc (lions, guépards et léopards) n'a jamais dû être écrit, car Jane et Hugo ont divorcé en 1974 (ils étaient mariés depuis 1964).

De Jane Goodall, donc, j'avais lu il y a quelques années Nous sommes ce que nous mangeons. Il faudrait que je le relise et que je le mette à disposition dans le système de prêt de livres de l'AMAP dont je fais partie

Eventuellement, je pourrais aussi y proposer le second livre que je vais vous présenter. 

P1150753Je ne comprends pas trop le titre Dix chiens pour un rêve: choisi par l'éditeur ou par l'auteur? Ce chiffre dix (vendeur, symbolique?) paraît être la moyenne entre les 11 chiens du départ et les neuf à l'arrivée... A l'arrivée d'un pari fou: traverser la Terre de Baffin en traîneau à chiens, puis poursuivre à travers le Canada jusqu'à la cité de Dawson. L'auteur, François Varigas, semble avoir bénéficié pour la rédaction de "l'aide" d'un journaliste ("propos recueillis par Jean-François Chaigneau"). Un Français a donc réussi à aller jusqu'au bout de ses rêves, en y gagnant le respect des hommes rudes qui vivent dans le "grand Nord": personnels de la ligne DEW, d'entretien des routes, Inuits, Amérindiens... Mais revenons à nos chiens. Ils sont évoqués, chacun avec leur caractère, tout au long de l'ouvrage. L'auteur les a parfois eu chiots et dressés comme chiens de traîneau, traîneau qu'il a lui-même construit pour son "raid". Il doit porter le matériel de bivouac dans la neige et la nourriture pour le conducteur comme pour les bêtes, pour des étapes en autonomie qui peuvent durer jusqu'à deux semaines sans voir quiconque. Nous avons droit à la présentation des deux types d'attelage: l'inuit (en arc de cercle) ou "indien" (en ligne), celui qui est le plus connu (je songe au livre Le grand silence blanc par exemple). Tout au long du périple, l'interaction avec les chiens est permanente. Nous les voyons se "mutiner" le deuxième jour: habitués à de courtes randonnées, ils veulent faire demi-tour pour le retour classique à la maison (p.30), ne pouvant anticiper la longueur de la randonnée. Au fil du voyage, nous assisterons à des rencontres avec un couple de loups, un ou deux ours, un renard des neiges... p.51-52, notre voyageur regrette sa solitude et surtout l'absence de spectateurs pour admirer la "belle ouvrage" que font les chiens (parfois en compétition pour être ou demeurer "chien de tête). Plus loin (p.75), tous les menbres de l'attelage nous sont présentés, à un moment où il envisage de devoir sacrifier un chien pour nourrir les autres (comme les explorateurs polaires de jadis). Conclusion p.82 de ce passage: "Je secouai la tête: mais quelle stupidité m'avait abruti à ce point? Je n'étais pas encore dans le réel besoin de nourriture et j'avais choisi comme inéluctable la solution la plus imbécile. J'avais planifié, comme un énarque, sans attendre la réalité. J'avais trop raisonné sur l'avenir". Les chiens, semble-t-il, lui sauvent quelquefois la mise sinon la vie: quand le mauvais temps l'amène à faire demi-tour au lieu d'aller au bout de l'étape prévue, à plusieurs reprises, ce sont les chiens (instinct? flair? intelligence?) qui savent le ramener à bon port.

Les étapes dans des lieux habités sont l'occasion de rencontres avec des "peuples premiers" sédentarisés et dont les jeunes gens, utilisateurs de skidoos, ne savent plus forcément utiliser un "simple" attelage de chiens. L'administration peut être plus ou moins compréhensive (un caribou tué parce que c'était ça ou mourir de faim, et l'amende menace...). La rencontre avec une famille de trappeurs m'a fait songer à la vie décrite dans La rivière des castors d'Eric Collier. François Varigas est en tout cas bien mis en scène dans son rôle d'explorateur et surtout de réalisateur d'exploit.

Au final, un livre dont j'ai lu les péripéties du quotidien d'un tel voyage avec intérêt et facilité. Je ne sais pas trop ce qu'a pu devenir son auteur au XXIe siècle. Je n'ai pas lu son autre livre, Une vie pour un rêve, mais je tacherai de me le procurer. 

Vérification faite, on peut facilement trouver sur internet les deux livres que ce billet vous a présenté. Même si chacun est ancien de plusieurs décennies, ils sont malgré tout trop récents pour pouvoir compter comme "classiques" dans un challenge... 

PS: de Jane Goodall, il faudra aussi que je lise (lorsque je l'aurai déniché d'occasion) Les chimpanzés et moi.

7 mars 2023

Les Russkoffs - Cavanna

Ça débute avec une histoire de pénurie d'obus pour lutter contre les Russes. Et "les provinces, ça va, ça vient, surtout les frontalières" (p.13).

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) commente ce mois-ci Les Russkoffs, où François Cavanna raconte la suite (durant la seconde guerre mondiale) de son célèbre premier volume autobiographique Les Ritals, que je chroniquerai un mois ou l'autre [chroniqué le 7 novembre 2023]

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(Le livre de poche N°5505 ****, 410 p., 3e trim. 1981)

Alors, pourquoi ce titre-là et pourquoi maintenant? Le numéro 1596 de Charlie Hebdo daté du 22 février 2023 se présentait comme un numéro spécial Cavanna, qui aurait eu 100 ans (né en février 1923). Du coup, j'ai sorti de ma liste d'idées d'articles-hommages "Charlie" puis de ma pochothèque personnelle le livre, redevenu d'actualité, Les Russkoffs. Il est construit avec quelques retours en arrière, et se termine abruptement. En exergue de ce livre figurent comme dédicataires d'abord "[à] Maria Rossipova Tatartchenko, où qu'elle puisse être", puis 24 autres prénoms slaves féminins, suivis d'une vingtaine de gars français. "(...) et aussi / à tous ceux et à toutes celles dont j'oublie le nom mais pas le visage, / à tous ceux et à toutes celles qui ramenèrent leur peau, / à tous ceux qui l'y laissèrent, / et, en général, à tous les bons cons qui ne furent ni des héros, ni des traitres, ni des bourreaux, ni des martyrs, mais simplement, comme moi, des bon cons, / et aussi / à la vieille dame allemande qui a pleuré dans le tramway et m'a donné des tickets de pain."

Les Russkoffs du titre, pour ce que j'en ai donc compris, ce sont en premier lieu les femmes "de l'Est" (slaves) elles aussi réquisitionnés pour le travail en usine d'armement, ensuite les prisonniers de guerre russes - plus mal nourris que les Français? -, et en dernier lieu les soldats de l'armée rouge victorieuse, croisés en fin d'ouvrage quand ils vainquent, pillent, violent, et aussi exécutent sommairement ceux qu'on leur désigne comme "fascistes". Mais procédons par ordre.

Le premier chapitre (sur 17), titré "le marché aux esclaves" nous pose le jeune François en train de travailler sur une presse pour fabriquer des ersatzs de pointe d'obus, chacun des "vingt petit[s] Français pâlichon[s] maigrichon[s] étant flanqué de deux bonnes femme", et nous narre comment il (en) est arrivé là. Prisonniers de guerre français croisés durant le voyage (ne pas parler mal de Pétain!), interprète belge (flamand) à l'arrivée... et mise au boulot (en trois-huit à l'usine d'armement) dès la première nuit d'installation au camp.

Maria, c'est l'une de ses deux assistantes, qu'il prend d'abord pour une Allemande avant de comprendre (p.46) qu'elle est, non pas russe, mais ukrainienne (d'un pays qu'il situe très vaguement sur la carte). Et notre François va se montrer très motivé pour apprendre sa langue... 

Le troisième chapitre, titré "Pour le tsar!" (à la Michel Strogoff), revient en arrière en une soixantaine de pages (53-114) pour narrer l'exode de juin 1940, vécu par notre jeune Cavanna de 17 ans. Après avoir vainement attendu le car promis par l'administration des PTT, notre jeune vacataire part à vélo en direction de Bordeaux où l'ordre est de se replier (sous peine de sanctions pouvant aller jusqu'au licenciement!). Un voyage initiatique bien qu'inutile puisque les Allemands motorisés allaient plus vite que des réfugiés à pied ou même en vélo (notre François était parti avec son vélo de course tout neuf mais aux boyaux fragiles). N'ayant pas l'âge militaire, les Allemands le laissent revenir en région parisienne. Finis les PTT: voici Cavanna tireur de chariot pour aller sur les marchés, maçon... (court chapitre titré "Ma banlieue à l'heure allemande", p.203-221). Avant de se faire "piéger" dans l'entreprise où il venait d'entrer après une offre alléchante: et paf, requis pour le STO!

En Allemagne, Cavanna travaille donc d'abord pour l'industrie d'armement, puis est muté (par mesure disciplinaire) dans un Kommando des gravats, pour déblayer, jour après jour, Berlin bombardé quotidiennement. C'est entre autres sous les bombes alliées sur Berlin en 1944-45 qu'il s'est construit son opinion sur la guerre, de même que Cabu s'était forgé son propre antimilitarisme en tant qu'appelé en Algérie (entre mars 1958 et juin 1960). Il l'a vécue à hauteur d'homme. Il nous raconte une vie quotidienne de préoccupations alimentaires (à un moment, Maria refuse de manger un steack de cheval, contrairement au jeune Français habitué par sa mère), encadrée par des gardiens plus ou moins "peau de vache" ou "complaisants", une fragile survie de couple, de groupe, pour une histoire individuelle mais pleine d'anecdotes. Par exemple, p. 300-301, il raconte par suite de quel concours de circonstance il a été amené à casser la gueule à un gestapiste dans un tramway (sans conséquences, grâce à l'humanité d'un simple flic allemand pas spécialement pro-Gestapo). Il évoque la camionnette qui exhortait par haut-parleur les requis français à rejoindre la Waffen-SS... (p.310).

Mais je ne veux pas tout raconter (lisez le livre, écrit d'une langue drue, truculente et pressée). Fin février 1945 (p.317), le camp est évacué en train vers la Poméranie, pour aller y creuser de dérisoires fossés antichars dans le sable local. Puis ordre est donné de se diriger (à pied) vers "ailleurs". Et Maria et lui quittent la colonne malgré les risques, avant de rencontrer les "libérateurs" russes. Après quelques bivouacs, arrive la fin, ou comment un homme et une femme se perdent... Pendant que François était parti "au ravitaillement", Maria s'est fait rafler par les Russes malgré ses protestations. Et jamais Cavanna n'est arrivé à la retrouver, ni avant ni après son propre retour en France, dit le livre publié en 1979. Alors même que d'autres ont réussi à préserver leur "couple de guerre": qui a ramené "sa" Russkoff" (p.303: évasion, engagement dans la 2e DB, pour revenir en Allemagne chercher sa Klavdia), qui sa jeune Berlinoise brune (Ursula, p.308), qui envisageait de rester sur place (600 hectares de terre et la veuve allemande en prime, pour quelqu'un qui, au pays, ne possédait rien que ses deux bras, p.364). Le STO, finalement, ça aura donné les premières chansons de Brassens, mais aussi ces mémoires de Cavanna.

Pour les lecteurs et lectrices de 2023, je souhaite insister sur le fait qu'il ne s'agit pas là d'un roman, mais d'un témoignage de première main sur le quotidien vécu en particulier à deux et en général en groupe, dans un pays étranger où l'auteur n'est pas venu de son plein gré mais où il a vécu les horreurs de la guerre (y compris en assistant à des morts violentes).

J'ai trouvé peu de blogs en ayant parlé: Les plumes baroques (dernier billet en juillet 2020), Aspirant auteur (dernier billet en juin 2017). Je ne m'interdirai pas d'en rajouter "au fil de l'eau".

Et dans le numéro "centenaire" de Charlie que j'évoquais plus haut? En 16 pages, on trouve plus d'une douzaine de citations choisies par d'actuels rédacteurs ou dessinateurs (dont tous ne l'ont peut-être pas connu?), et quelques phrases à sa mémoire par rapport à Charlie dans la plupart des chroniques régulières. Jacques Littauer, notamment, évoquait Les Russkoffs (p.5). 

*** Je suis Charlie ***

26 février 2023

Azincourt par temps de pluie - Jean Teulé

Profitant de son absence, j'ai (ta d loi du cine, "squatter") chipé ce livre sur la PAL de la maîtresse de blog (dasola). J'espère que cela ne la découragera pas de rédiger, le moment venu, son propre billet après lecture!

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Pour ma part, je n'avais encore jamais lu de romans de Jean Teulé (mais juste chroniqué une biographie de Charlie Schlingo dont il avait écrit le scénario pour Florence Cestac). Je ne sais donc pas comment il traite (de) la Grande Histoire ailleurs. Dans Azincourt par temps de pluie (éd. J'Ai lu n°13668, 220 p., imprimé en décembre 2022, pour l'édition que j'ai entre les mains), il nous la donne à voir sous un jour plutôt sanglant. 

Le livre se déroule sur deux ou trois jours (avant, pendant et près la bataille), du 24 au 26 octobre 1415. De manière très vivante (beaucoup de dialogues), Jean Teulé nous expose ces sacrés Français, grands seigneurs, en train de se disputer la peau du lion anglais avant de l'avoir tué, cependant que le souverrain anglais maintient une discipline de fer dans sa petite armée professionnelle. Il a fait le choix de nous présenter un rapport de 1 à 5 pour les forces en présence, alors que les chiffres varient y compris parmi les chroniqueurs de l'époque. Je n'oserai pas m'avancer sur le fait que la "fille à soldats" (surnommée "Fleur de Lys") qui se retrouve seule parmi les quelque 30 000 Français d'abord, parmi leurs cadavres ensuite est bien un personnage attesté sinon historique, ou non... mais elle sert de témoin (et, ma foi, si on l'avait écoutée - le bon sens féminin -, l'Histoire aurait pu en être changée). Mais Jean Teulé n'a pas écrit une uchronie. Il est amusant de noter que, plutôt que de présenter une bibliographie, il crédite avec humour ses "collaborateurs involontaires" (sic!) en fin de livre (de Michelet à Charles d'Orléans). Pour ma part, la description de l'entretien des arcs anglais p.26 m'a fait penser à l'Odyssée, lorsque les prétendants s'efforcent d'assouplir l'arc d'Ulysse avant que celui-ci les massacre... Ironie de l'Histoire: Jean Teulé n'a pas manqué de nous rappeler que l'armée anglaise était dans un sale état sanitaire (chiasse - même s'il parle courtoisement de dysenterie) pour avoir consommé des moules avariées en guise de pique-nique. Deux mille soldats anglais en étaient mort avant la bataille.

Comme dans La controverse de Valladolid ou dans La négociation, on a ici des antagonistes. Mais cette fois-ci, on finit par se battre, une fois le temps des échanges diplomatiques terminé. Et dans ce cas, le meilleur gagne. Jean Teulé et Wikipedia sont d'accord! Il nous a clairement été exposé les raisons pour lesquelles les faits se déroulent de telle manière. Le combat proprement dit débute p.119. C'est un massacre. En première ligne, les Français et leurs lourdes armures sont plantées dans la gadoue, reçoivent les flèches anglaises, n'y voient rien par les petits trous de leurs visières, et ne peuvent qu'attendre passivement de se faire massacrer lorsque les arcs sont abandonnés pour les haches et autres armes anti-armures. La première vague de prisonniers est éliminée: il faut bien continuer à se battre jusqu'à la déroute adverse.

Et, une fois que les combattants ont quitté les lieux, y abandonnant les monceaux de cadavres français, l'auteur n'oublie pas de nous montrer la récupération par la population locale des moindres bouts de tissu ou de métal dont ils auront l'usage, brut ou refondu... Ce roman de "vulgarisation historique" se lit vite et avec aisance.

J'ai trouvé plusieurs blogs qui en avaient parlé: A livre ouvertAu détour d'un livreLes lectures de Cannetille, PlumefilCanel

Philippe Dester n'a pas aimé. Nono a évoqué le livre pour rendre hommage à Jean Teulé (son blog cite encore un autre livre sur Azincourt). J'ai appris que Dominique Pinon lit la version audio grâce au blog Baz'Art.

Après coup, ce roman m'a fait penser au traitement que fait, en bande dessinée, Jean-Yves Delitte des grandes batailles navales. J'en ai lu quelques titres. Un billet à faire un mois ou l'autre?

7 février 2023

Le droit d'emmerder Dieu - Richard Malka

J'aurais pu (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) écrire qu'on m'avait offert pour Noël 2022 ce livre, Le droit d'emmerder Dieu, de Richard Malka. Mais il vaut mieux conserver mon éthique et ne pas enjoliver la réalité: je me le suis simplement offert (à) moi-même mi-janvier. Mon exemplaire provient d'un nouveau tirage, daté décembre 2022, alors que la première édition du livre remonte à octobre 2021. 

Cet ouvrage correspond à la plaidoirie rédigée par Richard Malka, avocat de Charlie Hebdo, pour la fin du procès des attentats de janvier 2015, procès qui a eu lieu devant la cour d'assises spéciale de Paris du 20 septembre au 16 décembre 2020, pour juger 14 personnes accusées d'avoir été complices des trois attentats ayant causé 17 morts du 7 au 9 janvier 2015. 

P1150696Au début de ce petit livre (93 pages, rappel chronologique compris), l'avocat Richard Malka explique qu'il a l'habitude d'écrire ses plaidoiries. Le 4 décembre 2020, port du masque dans la salle d'audience et épuisement après trois mois d'une audience parsemée d'attentats et de morts l'ont amené à écourter, à l'oral. L'éditeur et l'auteur ont choisi de livrer ce texte dans sa version écrite, plus longue que celle effectivement prononcée.

p. 10: "le sens de ce procès, c'est aussi de démontrer que le droit prime sur la force. (...) Les attentats de Charlie et de l'Hyper Cacher ne sont pas seulement des crimes. Ils ont une signification, une portée politique, philosophique, métaphysique". Richard Malka explique que ce procès est l'occasion de parler, non seulement des accusés, mais aussi des idées que l'on a voulu assassiner et enterrer. Il souhaite parler pour répondre aux terroristes qui demandent que nous renoncions à nos libertés.

À partir de la page 21, le livre retrace la chronologie des événements qui se sont achevés par le massacre perpétré contre la rédaction le 7 janvier 2015, des années après l'affaire des caricatures de M*h*m*t. Il décortique scrupuleusement la chronologie (Danemark), avant même la publication en France par France Soir en janvier 2006. Il rappelle que ce sont des imams danois ("de la mouvance des frères musulmans essentiellement, avec quelques salafistes") qui ont constitué un dossier à destination du "monde arabe", et ont affabulé en rajoutant, aux caricatures effectivement publiées au Danemark puis en Egypte, deux dessins tirés d'un site suprémaciste de blancs américains, et une photo n'ayant aucun rapport avec l'islam: un masque de cochon, que nos imams ont légendé en prétendant que c'était ainsi que leur prophète était représenté en Occident! "Cette falsification a fait descendre dans la rue des dizaines de milliers de personnes qui n'ont pas vu les véritables caricatures publiées" (p.28).

L'avocat qu'est Richard Malka ne se prive bien entendu pas de quelques effets rhétoriques en fustigeant entre autres le Président turc: massacrer des milliers de musulmans, ce n'est pas islamophobe mais publier des dessins, ce serait islamophobe? "Et puis j'ai un scoop pour le président Erdogan puisqu'il reproche à Emmanuel Macron d'avoir permis la publication de Charlie Hebdo [qui le caricaturait en octobre 2020]: nous ne soumettons pas nos caricatures au président de la République avant publication. Et même s'il voulait les empêcher, il ne le pourrait pas et il ne trouverait pas un tribunal pour le suivre. Cela s'appelle la liberté de la presse et l'indépendance de la justice (...)".

L'auteur retrace également l'histoire du blasphème en France, en remontant jusqu'aux Encyclopédistes du XVIIIème siècle, alors que le pape a mis L'Encyclopédie à l'index pour hérésie. Il rappelle que la Révolution française a abouti entre autre à ce que soit supprimé du code pénal, en 1791, le délit de blasphème. En 1881, lors des débats pour la grande loi sur la presse de la Troisième république, quand il est question de l'offense à la religion, Clemenceau répond, à l'Assemblée, à l'évêque Angers invoquant la blessure des catholiques outragés: "Dieu se défendra bien lui-même, il n'a pas besoin pour cela de la Chambre des députés". Formule que Richard Malka met en parallèle avec celle du mufti de la mosquée de Marseille à propos des caricatures: "un musulman qui croit que Dieu n'est pas assez grand pour se défendre tout seul est un musulman qui doute de la toute-puissance divine et n'est pas un bon croyant". Conclusion: "ce n'est pas compliqué à comprendre. Dieu peut se défendre tout seul contre les pauvres mortels que nous sommes, ce n'est pas la peine de supprimer ses créatures" (p.42). Richard Malka plaide donc, en toute logique, contre tout renoncement de l'esprit critique, du droit de caricaturer... Ce serait renoncer à ce merveilleux droit d'emmerder Dieu. "Et ça, Cabu, tout gentil qu'il était, hé bien il ne pouvait pas" (p.44). Il faudrait citer l'intégralité du texte, qui a l'unité d'un discours... Lorsqu'il retrace l'histoire de Charlie Hebdo (première puis seconde série), avant puis après l'affaire des caricatures, Richard Malka insiste sur la dégradation de la situation de Charlie Hebdo entre 2006 et 2015, qui a inexorablement conduit à l'attentat, en fustigeant la responsabilité des intellectuels et des politiques, pour lesquels il faudrait, au contraire, renoncer à tout ce qui peut "faire des vagues".

Pour ma part, j'ai lu cet opuscule très vite, en à peine plus d'une heure. Je vous invite à vous en imprégner.

J'ai trouvé quelques blogs qui ont eu aussi le courage d'en parler, bien avant moi: Vagabondageautourdesoi, Sin City, Lintervalle. Chacun donne aussi un ou plusieurs autres liens.

Le droit d'emmerder Dieu a reçu le Prix du livre politique en 2022. P1010613 

Je n'ai toujours pas chroniqué le livre Janvier 2015 - Le procès de Yannick Haenel (texte) et François Boucq (dessin), ouvrage paru en janvier 2021 aux éditions Les échappée. Pour le compte de Charlie Hebdo, ils ont suivi au quotidien le procès (près de deux mois et demi), avec des chroniques publiées sur le site internet et dans l'hebdomadaire. J'en parlerai certainement un mois ou l'autre.

************** 

En utile complément contemporain, je souhaite citer la conclusion d'une interview de Riss dans le Journal du Dimanche (22/01/2023, p.23) à propos du soutien apporté par Charlie Hebdo, avec ses moyens que sont articles et caricatures, à la révolte des jeunes iraniens et iraniennes contre le théocrate qui verrouille tout le pouvoir politique de leur pays: "À Charlie, quand on choisit un dessin, il ne s'agit pas d'insulter ou d'injurier. Notre critère, c'est que ça fasse réfléchir les gens."

*** Je suis Charlie ***

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