Claudine à l'école - Colette / Lucie Durbiano (BD)
J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) découvert seulement il y a quelques semaines l'existence d'une adaptation en bande dessinée du premier roman de Colette, Claudine à l'école, grâce au thème du mois dernier du challenge "Les classiques c'est fantastique" et plus particulièrement au billet de Fanny. Après mon propre billet sur le roman (qui participait aussi au challenge "2023 sera classique" co-organisé par Nathalie et Blandine), j'ai emprunté la fameuse BD en bibliothèque.
Claudine à l'école, Lucie Durbiano d'après l'oeuvre de Colette, Gallimard Bande Dessinée, 2018, 116 pages
L'adaptation en bande dessinée commence "dans le vif du sujet", avec dès la première page ene entrée matinale de Claudine à l'école (si, si). Evidemment, la traduction en image du livre avec ce que le dessin peut montrer d'une manière plus explicite que les mots sur le papier (même si cela reste fidèle au parti-pris du livre de suggérer plus que de montrer) nous épargne les longues pages de "récitatif" où notre "Claudine" parle d'elle-même et de sa vie "bourgeoise".
Dans cet album au dessin de style très "ligne claire", l'action s'enchaîne à toute allure et sans temps mort. Tout passe par les dialogues. Par moment, les vignettes peuvent faire songer aux "enfants" d'Hergé: Jo et Zette, ou Quick et Flupke... A d'autres, des passages plus adultes ou en tout cas plus "lestes" qu'Hergé n'aurait jamais publiés nous transcrivent crûment les sous-entendus de Colette. On a droit à quelques extraits de Pierre Louÿs illustrés très explicitement devant lesquels les gamines tombent en arrêt.
Nous voyons "de l'extérieur" Claudine agir et réagir, parfois via cette "communication non verbale" que permet le "croquage" de ses expressions corporelles... voire tel phylactère à pensée imagée. Mais il constitue une exception. On ne voit guère Claudine penser, la plus grande partie du texte du roman est transposé en dialogues. Du coup, on trouve dans l'album beaucoup de "bulles" [phylactères] (tout le texte doit y passer), car il n'y a aucun encadré narratif, et seulement de rares onomatopées ou bruitages, ou des signes conventionnels (chagrin et pleurs avec gouttes encadrant un visage, éclairs indiquant un regard furibond...).
La composition est, elle aussi, classique. Les planches sont le plus souvent composées de trois bandes horizontales de deux ou trois cases chacune. Certaines planches sont un peu plus "irrégulières", avec par-ci-par-là une subdivision horizontale en deux vignettes dans une ligne. On a aussi quelques planches avec un "gaufrier" de quatre lignes de trois cases presque carrées, je n'ai pas réussi à trouver selon quelle logique. Et, de loin en loin, quelques planches "pleine page", telle celle (le bal) qui conclut l'album. Voici quelques pages à titre de "citations".
p.13... ...et p.14. Des images licencieuses (bien avant youporn). Je n'ai jamais eu l'occasion de parcourir les oeuvres originales de Pierre Louÿs ou Albert Guillaume (?).
p.22-23. Un peu trop "tripoteur", le toubib belâtre. Et il y a pire quelques temps et pages après (cf. plus bas p.87). De nos jours, ce médecin des écoles se retrouverait certainement en prison.
p.24-25. On change radicalement de sujet. Notre Claudine apparaît très câline et tactile.
p.56. Elle ne lui a pourtant rien fait, cette porte fermée...
p.72. Notre Claudine apparaît parfois contradictoire, cyclothymique, ... et toujours gamine. Toujours ce décalage entre des dialogues qui peuvent être vifs (dans les "bulles" appelées phylactères) et la sagesse du trait.
p.87. Et pan! Ce n'est certes pas ce qui était attendu.
p.116. La fête continue... Le ridicule ne tue pas, mais fait rire.
Hein, en voilà une école différente de Poudlard (je suis encore en train de relire Harry Potter, mais chut!).
Plus sérieusement, Lucie Durbiano a déjà publié plusieurs oeuvres chez Gallimard depuis 2006, j'y jetterai un coup d'oeil si je les croise en bibliothèque.