J'ai (ta d loi du cine, squatter" chez dasola) demandé aux deux blogueuses avec qui je me suis engagé en LC à pouvoir publier le présent billet ce 21 juin (et non le 20), afin que je sois en mesure de l'inscrire au 13e Challenge Summer Star Wars - Obi-Wan Kenobi proposé par le RSF Blog du 21/06 au 23/09/2022. Bien entendu, mon présent billet participe aussi à notre "Mois Wells" (co-organisé avec Sibylline) ainsi qu'au Challenge "2022 en classiques" (co-organisé par Blandine et Nathalie) et au "10e challenge de l'Imaginaire" (de Ma lecturothèque).
Les vaisseaux du temps - Stephen Baxter / La machine à explorer le temps - H. G. Wells
Qu'est-ce donc que la LC dont je parlais plus haut? Dans le langage des blogs, une LC (pour "lecture commune") a pour objectif la rédaction de billets sur une même oeuvre dans la même "fenêtre de tir". Mais comme je voulais attendre le début officiel du Summer Challenge Star Wars cité ci-dessus, j'avais demandé à Keisha [Edit: billet publié le 23 juin] et A_girl_from_Earth [Edit: billet publié le 28 juin], lorsqu'il s'est avéré que nous pouvions prévoir une LC concernant Les Vaisseaux du Temps de Stephen Baxter, si je pouvais publier mon billet seulement aujourd'hui.
Les vaisseaux du temps a été rédigé comme une suite de La machine à explorer le temps d'H. G. Wells, suite imaginée par Stephen Baxter et publiée en 1995 (trad. française 1998). Ce roman rentre, à mon avis, dans le cadre du "planet opera" puisqu'il montre des "tranches de vies" sur notre planète terre en différents temps et lieux (et même davantage). Même si le présent billet porte principalement sur le livre de Mr Baxter que je n'avais encore jamais lu, je dirai quelques mots en fin de billet sur l'oeuvre d'origine, que j'ai relue en vitesse pour me remémorer les péripéties auxquelles le héros fait allusion. Après ces loooongs préliminaires, passons aux oeuvres elles-mêmes.
A peine de retour dans son siècle d'origine, le "voyageur du temps" (non nommé dans l'oeuvre d'H. G. Wells) prend juste le temps d'une courte "remise en condition" avant de se dépêcher de repartir vers l'avenir qu'il croit avoir déjà connu, afin d'y modifier l'issue de ses malheureuses aventures. Bien entendu, en 634 pages (édition Le Livre de poche), rien ne se passera comme prévu.
Les "êtres du futur" qu'il rencontre ne sont pas ceux qu'il a connus lors de son tout premier voyage. C'est accompagné de l'un d'eux qu'il entamera une longue errance à travers les paradoxes temporels jusqu'à leur résolution (non sans être quelque peu aidé pour cela).
Son contact avec un "érudit" de cette civilisation-là n'est pas sans rappeler le "reportage" du professeur Cavor sur les Sélénites (dans Les premiers hommes sur la lune d'H. G. Wells). Il m'a également évoqué tel ou tel des Voyages de Gulliver. Par ruse, notre "voyageur" arrive à sauter sur sa machine pour repartir... non sans embarquer, à l'insu de son plein gré, le malheureux Nebogipfel! Mais l'intelligence de celui-ci lui permet de comprendre que le simple fait de "voyager" dans le présent ou le futur a modifié ceux-ci (comme disait déjà le philosophe grec, "on ne se baigne jamais deux fois dans la même eau"). Tout le roman est donc axé sur différences étapes uchroniques en lien, en cherchant à résoudre ce paradoxe temporel initial. Parti de 1891 (paraît-il), le héros est retourné vers l'an 1873, afin de se rencontrer lui-même, jeune et avant d'avoir construit sa machine. Celui-ci lui raconte (ce qu'ignore le lecteur) comment il a réussi à faire fonctionner celle-ci, grâce à une substance mystérieuse (qui n'est pas sans rappeler la "cavorite" du professeur Cavor dont j'ai parlé ci-dessus).
Peu après, une "autre" machine temporelle vient les capturer (l'explorateur N°1, son lui-même jeune, l'érudit des siècles futurs...), pour les emmener en... 1938 (troisième étape!), dans un univers en pleine guerre, alors que l'ennemi, pense-t-on, va lui-même acquérir la maîtrise du voyage dans le temps et tout détruire... Ennemi qui fait la preuve de sa puissance, et les contraint à chercher refuge, avec quelques soldats de 1938 (mais sans son malheureux jeune double), aux temps préhistoriques, dans le Paléocène. Heureusement, cette armée est mixte. Car, durant plus d'une centaine de pages, nos "robinsons du temps" vont s'évertuer à "reconstruire l'humanité", à partir de leur groupe de quelques dizaines d'hommes et femmes... (une robinsonnade qui se lit agréablement en elle-même). Notre explorateur, nouvel Enée, s'en arrache pourtant - car tel est son destin! - pour un nouveau retour vers le futur. Là, il va croiser des êtres "parfaits" (à peu près comme les robots d'Asimov). Avec leur soutien, notre explorateur va pouvoir "boucler la boucle" pour remettre son monde dans le bon ordre, et - il est obstiné, le bougre! - mener à bien la mission qu'il s'était donnée à la fin du roman d'H. G. Wells.
J'ai relevé quelques "références" que Mr Baxter s'est manifestement amusé à glisser dans son livre. On entendu d'ailleurs parler d'un certain Orwell au détour d'une page, et tel ou tel univers n'est pas sans évoquer 1984. Plus subtilement, il est aussi question de "La guerre dans les airs", qui se serait déclenchée plus tard (en... 1914), et aurait tournée différemment en 1918. Notre explorateur du temps croise lors de son séjour en 1938 un ingénieur nommé Wallis (oui, celui qui a inventé les Tallboys et autres bombes classiques géantes "dans la vraie vie"), qui, ici, est très intéressé à découvrir, au profit de l'Angleterre impériale, le secret de la machine à voyager dans le temps, qui pourrait bouleverser le cours de cette guerre éternelle. Mais à quelles fins? Il ne semble pas afficher des idéaux très démocratiques (p.275). A se demander si Mr Baxter veut faire passer un message...
Pour finir, voici quelques liens vers des blogs qui avaient parlé des Vaisseaux du Temps bien avant que germe l'idée de notre Mois Wells:
Asmoderolle, Bardalyves (dernier billet en 2020), Bibiotrope (qui note assez sévèrement le livre), le blog Le chien critique, Faenor, Rachel17.
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Maintenant, je voudrais aussi dire quelques mots de l'oeuvre "originelle". Encore une occasion de re-parcourir le vieux "Poche" qui figure à "W" dans ma pochothèque depuis 1982.
J'avais déjà montré la couverture de ma vieille édition de La machine à explorer le temps dans un billet précédent. Notre roman du jour y couvre les pages 7 à 191 (sur 437). Dans ce court roman publié en volume en juin 1895 en Angleterre (après avoir été publiée en feuilleton de janvier à mai 1895) Wells se donnait sans doute le personnage de l'Ecrivain. Il semble que la première idée sue ce thème lui était venue en 1888, mais Wells a racheté pour les détruire tous les exemplaires disponibles de sa première version. Le livre est traduit en français dès 1895 pour Le Mercure de France, et devient un classique de la littérature d'anticipation, pessimiste comme presque toujours chez Wells.
Un hôte, après avoir régalé ses habituels convives, leur présente sa théorie sur ce qu'il nomme la quatrième dimension: le Temps. Puis, après les avoir "épatés", il les convie à un prochain rendez-vous chez lui, à Richmond. ils s'y retrouvent à 4 ou 5 le jeudi suivant (8 jours plus tard), mais doivent dîner sans leur hôte. Celui-ci ouvre soudain la porte... dans un état qui les étonne. Il leur promet de tout leur raconter une fois qu'il se sera changé et restauré. Le récit commence p.38.
Grâce à la machine qu'il a inventée, il a... exploré le temps. En fait, il a atterri en l'an huit cent deux mille sept cent un, dans le futur (il avait muni sa machine de cadrans susceptibles de lui fournir cette information). Et, "en ce temps-là", il a fait la connaissance des frêles et gentils Elois vivant à la surface de la terre, et des Morlocks, vivant sous terre, qui élèvent les précédents comme nous élevons du bétail... Après de tristes aventures, il a encore poursuivi sans véritable but son voyage vers le futur, avant de revenir vers "son" présent, à temps pour croiser ses convives. Mais... il repart (et le roman de Wells finit par un épilogue "philosophique" de deux pages, cependant que le chapitre qui le précède se finit comme suit: "L'explorateur du temps disparut il y a trois ans, et, comme tout le monde le sait maintenant, il n'est jamais reparu".
Je crois qu'on a dû déjà proposer une grille de lecture assimilant les gentils Eloïs à la bourgeoisie intellectuelle "parasite" et futile, et les Morlocks, tapis dans l'ombre, au prolétariat qui fait "fonctionner le système"...
Voici quelques blogs qui ont évoqué, plus ou moins récemment, ce roman d'H. G. Wells (liste non exhaustive, classement par ordre alphabétique):
A girl from Earth, Le blog l'Antre de la curiosité, Dona Swann, Faenor (encore), Keisha, Lorkhan, Marc, auteur des Chroniques du chroniqueur, Noctenbulle, Océane, Peluche0706 du blog Le temps de la lecture, Steven sur Maven Litterae, les Blablas de Tachan.
Edit du 9 juillet 2022: je rajoute rétrospectivement le logo du "11e Mois anglais 2022"... qui avait lieu en juin!