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Le blog de Dasola
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7 avril 2022

Lettre au futur locataire de l'Elysée - Riss / Elysée 2022 - Des candidats à croquer! (HS Charlie Hebdo N°27H)

Hé bien, cela n'arrive pas si souvent que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) rédige mon "hommage du sept" à Charlie Hebdo en lien avec l'actualité immédiate. Cette fois-ci, j'assume de focaliser sur deux ouvrages clairement "politiques" et orientés vers l'avenir tandis que mon billet d'il y a 5 ans l'était davantage vers le passé.

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Lettre au futur locataire de l'Elysée: ce petit ouvrage (15 x 24,5 cm, 5 euros pour 80 pages) de Riss paru en mars 2022 m'avait alléché par son titre. Il ne souscrit clairement pas à la mode de l'écriture inclusive - même s'il n'est pas inenvisageable qu'il s'agisse d'une locataire. Je m'attendais, a priori, à quelques pistes enthousiasmantes de conseils ou d'analyses "vous devriez / pourriez / voudriez": point! Mais 80 pages de pamphlet contenant force injonctions basées sur des constats fracassants. On en sort (c'est du moins mon cas) plus désabusé que soulevé par l'enthousiasme, avec à l'esprit: "hé ben, on n'est pas rendus!".

Passages choisis (hors contexte, bien évidemment: il faudrait que chacun de mes lecteurs prenne la peine de lire l'intégralité des 80 pages pour les resituer). La 4e de couv' ci-dessus s'inspire de l'introduction, mais de manière plus "soft" que celle-ci, qui dit (p.5): "Rassurez-vous, il n'est pas question ici de vous donner des solutions aux problèmes que connaît la France. C'est vous qui avez été élu, c'est à vous de les trouver tout seul. Chacun sa merde" (et le reste à l'avenant). Dans la partie I, sur la droite, p.11: "Flatter les idées reçues, entretenir les clichés, exciter les peurs, ça marche à tous les coups. C'est facile, c'est pas cher et ça rapporte gros aux élections." La gauche prend aussi son paquet, rassurez-vous (même si je ne peux pas tout citer). Plus généralement, cette diatribe ne souhaite ni "un président qui copie comme un cancre sur son voisin", ni "un président qui perde son temps à changer la Constitution". Citons la p.19: "Evidemment, un candidat à l'élection présidentielle ne peut espérer recueillir la majorité des suffrages des Français en leur expliquant qu'ils sont une bande de tocards. mais quelle personnalité, dans le secret de sa conscience, à l'abri du jugement public, n'a pas été, dans un moment de désillusion, tentée de le penser fortement?". Le génie créatif français existe-t-il donc encore? "On est en droit d'en douter, à la lecture des programmes politiques des uns et des autres, qui se résument à des empilements de propositions dont la première qualité est de séduire plutôt que de créer" (p.29). La partie II (p.37) liste "trois problèmes inédits à traiter par le prochain locataire de l'Elysée". Toujours dans le même style rageur, ça commence par "Nous voulons un président qui fasse rendre gorge aux Gafam", mais aussi "... plus fort que la fin du monde" (p.47), et enfin "... plus fort que Dieu" (p.61). Citation: "(...) c'est un fait constant dans l'Histoire: les religions évoluent rarement de l'intérieur mais le plus souvent sous la pression de forces venues de l'extérieur. Jamais elles ne font le premier pas vers la modernité et, pour leur indiquer aimablement la direction à suivre, quelques coups de pied au cul s'avèrent indispensables". Je reviens en arrière pour quelques autres citations, évoquant capitalisme, industrie et société de consommation (p.50): "satisfaire nos besoins vitaux ne suffit pas à cette société industrialisée, car ses marges bénéficiaires ne seraient pas assez élevées". Et sur la destruction des écosystèmes [, qui] atteint des niveaux irréversibles (p.52): "aujourd'hui, les destructions ne sont plus artisanales comme autrefois, elles sont désormais industrielles". Avec la bonne grille d'analyse concernant le capitalisme, bien évidemment (p.54): "en matière d'écologie et de protection de la vie sur terre, il n'y a rien, mais absolument rien à espérer du marché". La conclusion débute p.70. Extrait: "Vous croyez avoir été élu président de la République. En réalité, vous avez été élu président du bonheur des Français. Sur vos épaules repose la mission écrasante et inédite dans l'histoire de ce pays - et peut-être de l'humanité - de rendre heureux la totalité de vos sujets" (p.71). Et maintenant, au boulot... (pourrait-on dire avec amertume).

Au final, cet opuscule n'est pas vraiment une "feuille de route de circonstance" (contrairement à ce que j'imaginais), mais davantage fait pour "prendre date" et être relu dans 10 ans. Je ne sais pas si c'est le cas des programmes des 12 candidats (si la plupart font au moins quelques dizaines de pages, certains sont plus courts, d'autres plus longs que 80 pages!). Qui donc, aujourd'hui, a pris la peine de relire les programmes d'il y a 10 ans des cinq candidats qui se présentent en 2022 pour la troisième fois devant nous, leurs électeurs, qui devrions nous en souvenir?

...Bon, comme tout ça me paraissait manquer un peu de "grands dessins" (livre quelque peu austère si je compare, disais-je, avec mon billet d'il y a 5 ans), j'ai rajouté sur le présent billet le HS de Charlie Hebdo.

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Ce Hors-série Elysée 2022: des candidats à croquer est, lui, paru le 1er mars 2022. Du coup, sa préparation a bien dû être lancée à un moment où les candidats définitifs n'étaient pas plus "cristallisés" que ne le sont, à trois jours du premier tour, les intentions d'un paquet de millions d'électeurs (entre les abstentionnistes potentiels et ceux qui ne sont pas encore certains de voter pour un candidat précis), et son "bouclage" est intervenu largement avant la publication de la liste officielle des candidats par le Conseil constitutionnel. On pourrait supposer, à la lecture des signataires des articles choisis, que chaque membre de la rédaction a (plus ou moins) "ses têtes", et c'est la somme qui fait que tout le monde en prend pour son grade. Tout le monde? Non. La rédaction avait prévu Taubira et Thouy (qui ont reçu respectivement 274 et 139 parrainages validés), mais ni Lassalle, ni Arthaud, ni Dupont-Aignan n'ont été "traités". Chaque candidat retenu "bénéficie" d'un dossier avec une page introductive sur fond rouge, suivi d'un nombre variable d'articles et de dessins. On peut relever 5 articles sur Macron, 4 sur Mélenchon, 4 sur Marine Le Pen. On a un peu l'impression que Thouy (octobre 2021) et Roussel (janvier 2022) ne sont là que par raccroc (un unique article chacun). Il s'agit souvent de "reprises" (je crois que la plus ancienne, du 3 mai 2017, concerne Marine Le Pen, avant celle du 7 mai 2017 dont la cible est Macron). 

L'édito de Riss titré "Bonne dégustation!" formule des griefs comparables à ceux contenus dans son livre, avec des mots plus savoureux: "Cette campagne a des airs de quinzaine commerciale où chaque commerçant vous accueille dans sa boutique pour faire connaître ses produits du terroir. Et celui qui vous offrira le meilleur pot-au-feu, le plus beau cassoulet, la plus belle raclette, aura gagné et dirigera la France pour cinq ans."

Dans le Hors-série, j'ai compté plus de 80 dessins dans les 64 pages intérieures (en comptant pour "un" les nombreuses vignettes des "reportages dessinés" (lors de meetings) même si ces derniers se prolongent parfois sur 2 pages). Mais malgré tout, j'ai dû faire une sélection drastique pour ne pas trop dépasser les 10% de citations (ci-dessous) et vous en laisser à découvrir, tout en prenant un dessin par "dossier" (de candidat)! Je précise à chaque fois la page et le dossier concernés, et vous laisse déguster mes choix!

P1140272 p.7 (Emmanuel Macron) P1140273 p.18 (Jean-Luc Mélenchon)

P1140274 p.22 (Marine Le Pen)  P1140275 p.39 (Eric Zemour)

P1140276 p.43 (Anne Hidalgo)  P1140277 p.44 (Christiane Taubira)

P1140279 p.51 (Valérie Pécresse)  P1140280 p.53 (Yannick Jadot)

P1140281 p.57 (Philippe Poutou)   P1140282 p.61 (Hélène Thouy)

P1140283 p.64 (Fabien Roussel)

PS: pour l'anecdote, je signalerai que j'ai dû réécrire intégralement mon billet, l'ayant malencontreusement effacé avant publication. Bref.

*** Je suis Charlie ***

16 mai 2022

Mois H. G. Wells en juin 2022 (jusqu'à fin juillet!)

== Ne cherchez pas pourquoi on parlerait spécialement d'Herbert George Wells (H. G. Wells) en juin 2022. Notre auteur est né le 21 septembre 1866 et mort le 13 août 1946, il n'y a donc aucune raison de calendrier. Juste, faites-le! ==

Sibylline, du blog La petite liste et moi-même (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous proposons, sur toute la durée de ce mois de juin 2022 (non seulement dès à présent, mais jusqu'au 22 jusqu'à fin juillet en fait...), un "Mois Wells", occasion de lire ou relire son oeuvre (y compris les titres moins connus que la demi-douzaine des plus emblématiques) ou de visionner les adaptations de celle-ci au cinéma, et de rédiger un billet sur vos blogs respectifs. C'est La petite liste qui prendra en charge la centralisation de vos billets sur l'oeuvre écrite (romans de Wells, biographies de l'auteur, etc.) sur son billet dédié

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Dessin créé par Sibylline pour l'événement sur son blog

== Pour ma part, je m'occuperai de prendre en compte vos billets sur les adaptations en films, ou en bandes dessinées, qui en ont été tirées (ou qui mettent en scène H. G. Wells lui-même). Il vous suffit de m'informer de votre intention de rédiger un billet, et/ou de m'en indiquer le lien lorsque cela est fait, via un commentaire sous le présent billet. ==

Vous pourrez trouver quelques idées sur les pages wikipedia consultées le 14 mai 2022, les films tirés d'une oeuvre d'H. G Wells (la page est-elle exhaustive?) ou plus largement la liste de ses oeuvres sur la page qui lui est consacrée. Et si vous voulez aussi lire l'oeuvre romanesque, j'empiète sur les platebandes de la co-organisatrice en référençant ce qui est aujourd'hui disponible en "Folio" ;-)

Nous n'avons pas encore décidé qui s'occuperait de recenser les chroniques sur les "suites" et "continuateurs" des livres de Wells. Je suppose qu'on verra à l'usage (quitte à les référencer sur nos deux blogs!). On vous tiendra au courant *.

Pour ma part, c'est sous le présent billet que j'ajouterai durant toute la période les participations qui me seront signalées dans le cadre ci-dessus.

A vos claviers!

* (Edit du 16/05/2022) Pour les "suites", nous avons adopté la même logique: La petite liste prend les romans, je prends ce qui est films et BDs.

Edit du 31/05/2022: merci à Pativore pour sa présentation relayant le Mois Wells.

Bilan final (au 01/08/2022)

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 Films: 

* dasola (20/05/2022) : Nicholas Meyer - C'était demain (Time after time)

* ta d loi du cine (10/06/2022): Don Taylor - L'Île du Docteur Moreau (1977)

Télévision:

* Pativore (31/05/2022) : adaptation TV de la nouvelle L'oeuf de cristal

* ta d loi du cine (05/07/2022): Futur imparfait (Les enquêtes de Murdoch, saison 3, épisode 8)

Bande dessinée:

* ta d loi du cine : (01/07/2022) Pontarolo - L'Homme invisible (bande dessinée) - (15/07/2022) L'Ile du docteur Moreau (volume 1) - Tamaillon / Legars (bande dessinée d'après H. G. Wells)

7 juillet 2023

Retraites: le casse du siècle - Gilles Raveaud

J'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) acheté l'opuscule que je vous présente aujourd'hui dans un kiosque à journaux, fin janvier 2023, et à peu près en même temps qu'un autre, que je vous présenterai sans doute aussi un mois ou l'autre. 

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Retraites. Le casse du siècle. Pourquoi Macron veut nous faire bosser à mort, Gilles Raveaud, Hors-série N°3H

Je crois que c'est quelques mois après la parution de cet ouvrage, en avril 2023, que les articles de la rubrique "Economie" dans Charlie Hebdo ont cessé d'être signés "Jacques Littauer" pour être publiés sous la signature "Gilles Raveaud". Oui, le même que celui qui a signé cet opuscule. En fait, les deux ne faisaient qu'un, comme il l'avait signalé à l'époque (début 2023?) sur son propre blog. Je ne sais pas trop s'il l'avait déjà annoncé dès 2019 en ligne, ou bien si le "titulaire du compte" (planqué derrière les portes et fenêtres blindées) a été plus récemment modifié... 

J'en viens maintenant à l'opuscule. Il défend la thèse que la France aurait pu faire l'économie de l'épisode picrocholin (le qualificatif est de moi) DES votes à rallonge sur les retraites. Tout d'abord, le motif de cette réforme est, selon lui, ni plus ni moins que d'aboutir à une baisse globale des pensions, en remontant le niveau d'exigences à satisfaire pour bénéficier d'une pension à "taux plein", alors même que le taux d'emploi des "seniors" est faible en France. Il met aussi en question les "projections à 2050" dont un camp comme l'autre nous ont rebattu les oreilles. Il rappelle l'existence de différents "fonds de prévoyance" amassés par différents organismes (dont les différents régimes de retraites complémentaires), qui constituant une "cagnotte" sans doute suffisante pour faire face, globalement parlant, à une dizaine d'années de déficits. Mettant en cause le "refus" des salariés de travailler, il suggère de "renverser l'obligation" en contraignant plutôt les entreprises et autres employeurs... à employer (ce qui génèrerait des cotisations sociales). Il déconstruit fort bien (à mon humble avis) le système américain des "fonds de pension"... qui a très bien su ruiner certains retraités qui rêvaient d'une épargne pour leurs vieux jours, laquelle a disparu dans les sables mouvants de la Bourse [cf. aussi, sur ce sujet, tel ou tel des livres de Maris et Labarde que j'avais chroniqués il y a quelque temps]. La retraite par point, c'est très joli aussi: cela permet surtout, et encore, de baisser équitablement les retraites pour tous... en diminuant chaque année la valeur des points. Plus globalement, ce qui est mis en cause par Emmanuel Macron et l'idéologie qu'il incarne, c'est notre système basé sur la solidarité entre tous, et non soumis exclusivement à la loi du libéralisme économique: une autre vision politique. Concernant les "régimes spéciaux (RATP, SNCF), qui comptent aujourd'hui davantage de retraités que de cotisants, Gilles Raveaud rappelle utilement que les distributeurs automatiques de billets ne payent pas de cotisations sociales, contrairement aux anciennes guichetières qu'ils ont remplacées... Il rappelle aussi que tous les métiers ne sont pas logés à la même enseigne en terme de pénibilité, de début d'entrée dans l'activité professionnelle (après de longues études ou non), ni même en terme d'espérance de vie après l'âge de la retraite. Et il conclut, comme vous pouvez vous en douter, sur l'inégalité de répartition de la richesse produite et accumulée, chaque année, dans notre pays (l'argent allant à l'argent).

Je conclurai pour ma part en avouant que je n'ai pas vérifié si ce "Hors-série Charlie Hebdo" était constitué de chroniques hebdomadaires mises bout à bout, éventuellement retravaillées en "chapitres" réécrits, ou bien si l'ouvrage était intégralement, ou en partie, inédit... J'en recommande la lecture en tout cas, même maintenant que l'effervescence est quelque peu retombée cependant que l'actualité chaude a embrayé sur d'autres sujets. Il est toujours disponible sur la boutique en ligne du journal (5 euros).

PS: je profite de ce billet pour signaler que dasola avait reçu par la poste, il y a quelques mois, un exemplaire gratuit de l'hebdomadaire accompagné d'une proposition d'abonnement signée Riss (différente de celle qui était publié à la même époque dans celui que j'achète en kiosque). On ne sait pas comment Charlie a eu son adresse, elle pense que c'est via une des associations loi 1901 auxquelles elle fait un don...?

*** Je suis Charlie ***

7 février 2024

Le procès Papon - Riss (livre & exposition)

Une exposition sur la couverture par Riss du procès Papon en 1997-1998 est en cours au Mémorial de la Shoah (jusqu'au 3 mars 2024). Il est encore temps que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous parle aujourd'hui de ce "reportage dessiné" et du livre que Riss en avait tiré. 

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La plaquette de présentation de l'exposition en cours, et le livre
Riss, Le procès Papon, un fonctionnaire de Vichy au service de la Shoah, éd. Les échappés, 1ère édition 2017, 144 pages (relié), 26 euros

On connaît les faits (et sinon, on trouve facilement sur internet l'histoire de Maurice Papon et de son procès), que je résume en quelques mots : durant la seconde guerre mondiale, sous l'occupation allemande, Maurice Papon (1910-2007) a exercé des responsabilités en Gironde en qualité de secrétaire général de la préfecture de Bordeaux. Après la Libération, il a poursuivi sa carrière de haut fonctionnaire, notamment en Algérie ou au Maroc sous la Quatrième République, jusqu'à devenir Préfet de Police à Paris, puis ministre, sous la Cinquième République, de 1978 à 1981 (troisième gouvernement Barre). En mai 1981, entre les deux tours de l'élection présidentielle, Le canard enchaîné publie un article mettant en lumière son rôle dans la déportation des Juifs bordelais. Maurice Papon est inculpé le 19 janvier 1983 de crimes contre l'humanité. Après des années de guerilla judiciaire, le procès Papon se tient du 8 octobre 1997 au 2 avril 1998. Riss est présenté comme le seul journaliste à avoir suivi l'intégralité des débats (98 séances). Sa demande d'accréditation pour le procès mentionnait son statut de dessinateur de presse (souligné par lui, voir photo du courrier ci-dessous).

Demande_accreditation_dessinateur-de-pressePour ma part, je suis passé visiter l'exposition il y a quelques semaines (une soixantaine de dessins y sont présentés, sur + de 400 réalisés par Riss). N'ayant pas pris de photos, je remercie mon collègue pour la transmission de celles qu'il avait prises lors de sa propre visite en décembre 2023.

Par ailleurs, ne possédant pas les numéros de Charlie Hebdo de 1997-1998 dans lesquels paraissaient chaque semaine les "reportages dessinés" de Riss durant les six mois du procès, je ne suis pas retourné en bibliothèque aux fins de les consulter. Je ne possède pas non plus le Hors-série (N°6, broché) publié en 1998 et qui comportait 144 pages (dont j'ignore si elles reprenaient purement et simplement les chroniques hebdomadaires, ou si elles en différaient). Mais je disposais, lors de la rédaction du présent article, du livre ci-dessus, dont la première édition date de septembre 2017. Laurent Joly, collaborateur régulier de Charlie Hebdo de 2009 à 2015 et commissaire de la présente exposition (2023-2024), en signe aussi la préface (mais ce n'est pas le catalogue de l'exposition). J'en ai compté les pages moi-même, car elles ne sont pas numérotées.

L'exposition est située au troisième étage du mémorial, dans les mêmes salles où j'avais visité l'exposition des dessins de Cabu sur la rafle du Vél d'Hiv en 2022. Au-delà des dessins de Riss ou des documents bruts (tapuscrits d'époque, documents administratifs, ...), de grands panneaux explicatifs contextualisent, expliquent et commentent ce qui est exposé. 

Le livre, lui, est organisé par "chapitres" retraçant chronologiquement le déroulé du procès:

  • Le curriculum vitae de Papon; les témoins de moralité; les historiens;
  • Les organisateurs des persécutions anti-juives à Bordeaux;
  • Papon au service des questions juives de la préfecture de Bordeaux;
  • Les crimes contre l'humanité reprochés à Papon (déportation de Léon Librach; huit convois, depuis celui du 18 juillet 1942 jusqu'à celui du 13 mai 1944);
  • Papon et la résistance; Papon et l'épuration; les associations parties civiles;
  • Les plaidoiries des avocats des parties civiles; le réquisitoire du parquet; les plaidoiries de la défense; le verdict.

Il est essentiellement en noir et blanc, même si quelques touches de couleur (rouge, vert, mauve...) rappellent ça et là dans quelle "partie" on se trouve, s'il est question de l'accusation, de la défense, des parties civiles (24 avocats défendaient 27 parties civiles)...

En ce qui concerne le travail de Riss, j'ai été intéressé par cette "mise en lumière" du processus créatif, puisqu'on a, accrochés sur les murs, des pages "brutes", des crayonnés, des esquisses d'attitudes, les mots griffonnés à la volée. On a aussi quelques pages "montées": mise en place des dessins, découpés et collés sur une grande feuille, avec des textes lettrés lisiblement. Et enfin, le livre permet d'en apprécier le résultat une fois imprimé. 

Barre_a_la_barre  P1160906 Intervention de Raymond Barre (ancien Premier ministre et dont Papon a été ministre): à gauche la page du croquis avec les notes prises lors son intervention, à droite la page imprimée (avec phylactères). 

HS_6_avril_98_pp2-3 La page "montée" en noir et blanc... P1160911 ... et la version imprimée (avec quelques touches de couleur). 

Au risque de me répéter, je ne puis dire si ces "pages" ont été imprimées à chaque fois sans retouche (sur le papier "grand format" [environ 31,5 x 40 cm] de l'hebdo, puis sur le format plus petit du Hors-série de 1998, enfin sur du beau papier épais pour la version reliée que j'ai entre les mains), ou s'il y a eu plusieurs versions plus ou moins complètes. 

Certains dessins exposés sont de très grande dimension (plus d'un mètre de côté), notamment des "panoramiques" de la salle d'audience. Je n'ai pas distingué si le papier d'origine était d'un seul tenant, ou constitué de plusieurs feuilles collées bout à bout (que ce soit sur place ou a posteriori).

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Riss dessine avec respect les parties civiles, tandis que l'accusé ou les témoins de la défense ne sont pas dessinés sous leur meilleur angle. Dans le livre, ses multiples dessins de Papon (j'en ai compté plus de 120 au total) campent en tout cas un personnage agité, avec des expressions de visage et de corps extrèmement variées (esquisse, dessin en pied, de face, de profil, de dos, écoutant (ou pas) ou s'exprimant, immobile ou en mouvement...). 

P1160910  Avocat_gesticulant  Papon  Papon_gesticulant

Encore quelques photos de l'exposition... Papon-face-procureur_5fevrier98  HS_6_avril_98_pp22-23

Condamné à 10 ans de prison et 10 ans de privation de ses droits civiques, civils et de famille, libéré pour raison de santé le 18 septembre 2002, Maurice Papon est mort le 17 février 2007, à l'âge de 96 ans. 

Avocat

Je n'ai pas assisté à la conférence inaugurale de l'exposition le 19 octobre 2023 (on peut la retrouver sur la chaîne youtube du Mémorial). J'ai écouté un extrait de Riss parlant de son travail de captation sur Apple Podcasts: présentation de l'exposition. Il y évoque notamment son souhait de donner au lecteur la matière la plus brute possible. Les dessinateurs étaient dans le prétoire, au plus proche de l'accusé et des témoins (ce qui permet de mieux observer le comportement des gens, les attitudes), alors que les journalistes étaient dans une mezzanine, parfois dans une autre salle à suivre l'audience en vidéo... Dans un procès, ce qui est important c'est la parole (oralité des débats), il mettait donc autant de temps pour noter ce qui se disait que pour dessiner (avec un "compte-rendu" à produire chaque semaine pour publication dans Charlie Hebdo...). Il fallait toujours rester vigilant (on ne sait pas à l'avance l'importance de ce qui va être dit, l'analyse se fait a posteriori sur tout ce qu'on a noté). "Il faut capter très vite les traits d'un témoin, pour garder trace de son passage. Ce qu'ils disent aide à comprendre à qui on a affaire. Parfois, c'est un peu caricatural... Certains ne sont restés que 2 minutes parce qu'il n'arrivaient même plus à parler". Riss constate aujourd'hui (fin 2023) que les acteurs de l'époque qui sont venus témoigner en 1997 ont aujourd'hui disparu: ce procès était le dernier moment où l'on pouvait les faire parler en public. On trouve une présentation par Riss du Hors-série de Charlie aux étudiants de l'IEP de Bordeaux en 1998 sur la plateforme de l'INA

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Le "Hors-série" de Charlie Hebdo paru en 1998 avait connu un second tirage, une fois le premier écoulé à 250 000 exemplaires (vendu 35 F à l'époque). 

L'entrée de l'exposition (qui dure encore quelques semaines) est gratuite. Le livre de 2017 (relié) est disponible sur la boutique des éditions Les échappés

Je ne sais pas si beaucoup de blogs ont publié des billets sur le livre ou l'exposition, une recherche sur G**gle avec "blog le procès papon riss" ramène à plusieurs reprises "Certains résultats peuvent avoir été supprimés conformément à la loi européenne sur la protection des données." J'ai cependant constaté que le blog Notre jardin des livres a évoqué livre et exposition. Je rajouterai d'autres liens si j'en ai connaissance. 

*** Je suis Charlie ***

2 novembre 2011

Romans lus et non commentés (automne 2011)

J'ai lu pas mal de romans policiers depuis l'été qui m'ont laissé plus ou moins de souvenirs. Mais ce furent des lectures agréables sur l'instant.

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Je commence par La bibliothèque du géographe de Jon Fasman (Points Seuil) qui est un roman intriguant mêlant passé et présent et qui nous présente des objets (fictifs) dotés de pouvoirs magiques et/ou alchimiques que des hommes sans scrupules essayent de s'approprier depuis des siècles. Le géographe du titre se réfère à al-Idrisi qui vécut au XIIème siècle et fut le cartographe du roi Roger II de Sicile. Parallèlement, Paul Tomm, un jeune journaliste, essaye d'élucider la mort inexpliquée d'un professeur d'histoire. Par ailleurs, le médecin légiste qui a pratiqué l'autopsie meurt peu après renversé par une voiture. Quand on arrive à la fin de l'histoire, on n'est pas très avancé. Toutes les clés ne nous sont pas données. Mais j'ai passé un excellent moment de lecture.

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Nature morte de Louise Penny (Actes Sud Noirs) se passe dans la province de Québec au Canada. Près d'un village où elle habitait, une institutrice à la retraite, Jane Neal, 76 ans, est retrouvée morte à l'orée d'un bois. Il semble qu'elle ait été tuée d'une flèche tirée par un arc. Accident? Meurtre? L'inspecteur-chef Armand Gamache de la sûreté de Montréal, marié depuis 32 ans, est chargé de l'enquête. Jane Neal était aussi peintre à ses heures. Il semble qu'elle ait peint quelque chose qu'elle n'aurait pas dû. C'est un roman qui m'a quelque peu déçue car il manque de vrais rebondissements. Ce roman de 300 pages est un peu "plan plan". Je pense que 200 pages auraient suffi. C'est semble-t-il le premier volet des enquêtes de l'inspecteur Gamache. Attendons les tomes suivants.

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Seul demeure son parfum de Feng Hua (Picquier Poche) est un roman policier chinois dans lequel de nos jours, en Chine, un tueur étrangle ses victimes (des femmes) après leur avoir fait l'amour. Un jeune inspecteur, Pu Ke, aidé d'une jeune femme, Mi Duo, rencontrée à une fête chez des amis communs, mène une enquête sur plusieurs mois. Ces crimes ne sont pas les premiers perpertrés par le tueur. J'ai deviné assez vite de qui il s'agissait. Le plus dur pour Pu Ke est de découvrir le mobile. L'auteur prend son temps pour dérouler l'histoire. Il nous montre qu'il n'est pas aisé d'enquêter en Chine quand certaines personnes comme des cadres administratifs sont impliqués. Ils ne peuvent pas être interrogés facilement. C'est toute une affaire de hiérarchie et de préséance. Roman pas désagréable même s'il m'a paru un peu lent.

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La maison où je suis mort autrefois de Keigo Higashino (Actes Sud Noirs) constitue un roman policier japonais à la limite du fantastique. Une jeune femme demande à son ancien petit ami de l'accompagner dans une demeure reculée et isolée à flanc de montagne. A la mort de son père, elle a reçu une clé à tête de lion qui semble ouvrir une porte de cette bâtisse, qui ressemble à un tombeau et où le temps s'est arrêté un jour à 11H10. Sayaka n'a aucun souvenir d'avant l'âge de 5 ans. Elle veut découvrir pourquoi. Cette maison permettra peut-être de lui faire recouvrir la mémoire et d'exorciser ses démons. En effet, elle a fait plusieurs tentatives de suicide et est séparée de sa petite fille qu'elle maltraite. Ce roman tient en haleine jusqu'à la fin. Lire le billet d'Ys.

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Le roman de Ken Bruen, Calibre (Série Noire Gallimard), se lit vite, mais l'auteur ne s'est cette fois-ci vraiment pas foulé. L'histoire qui se passe à Londres rappelle celle de Mort aux cons de Carl Ayerhold mais en nettemement moins drôle. Un tueur qui a comme roman de chevet Le démon dans ma peau de Jim Thompson tue des personnes qu'il considère mal élevées. Les flics qui se mettent à sa recherche ne valent pas mieux que lui. A vous de voir.

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15 janvier 2012

Flétrissure - Nele Neuhaus / Dernière caresse - Catherine Guillebaud

Voici deux romans que j'ai lus coup sur coup avec plaisir.

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Flétrissure de Nele Neuhaus (Actes sud actes noirs, 358 pages) est une sombre histoire pleine de meurtres et de fureur. En 2007, six personnes dont trois personnes très âgées sont assassinées en l'espace d'une semaine dans la région de Francfort en Allemagne. Le premier lien entre certains de ces meurtres est le nombre 16145 tracé avec du sang sur un mur. Les Kaltensee, grande famille richissime de la région, se trouvent impliqués. L'enquête menée tambour battant par le commissaire Oliver von Bodenstein et sa collègue Pia Kirchhoff nous fait remonter le temps jusqu'à la seconde guerre mondiale et en particulier à une date, le 16 janvier 1945, où 5 personnes furent exécutées. Les protagonistes sont nombreux. Le dénouement de l'histoire se situe en Pologne, dans l'ancienne Prusse orientale. Les nombreux rebondissements nous tiennent en haleine jusqu'au bout, mais le défaut que je trouve à ce roman, c'est qu'il comporte un peu trop de péripéties à mon goût, surtout vers la fin. C'est le premier roman traduit en français de cette auteure née en 1967, elle en a écrit d'autres.

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Dernière caresse de Catherine Guillebaud (Folio, 125 pages) nous présente Mastic des Feux mignons, setter anglais de 14 ans qui nous narre sa vie de chien avec "Elle", sa maîtresse qu'il a tendrement aimée dans une belle demeure entourée d'un parc. On est touché par ce chien qui sait que sa vie arrive à sa fin. D'ailleurs, Opium, le chat (du même âge que lui) sent que quelque chose ne va plus. Mastic est un chien bien élevé, tolérant envers les autres animaux même les chats qu'il trouve abrutis. Il a vécu avec deux compagnes dont Elsa, une setter comme lui. Il eut quelques ennuis avec les brebis du voisin mais tout rentra dans l'ordre. La fin est bien entendu bien triste mais pas larmoyante du tout. Catherine Guillebaud a su rendre son récit très léger et souvent drôle. Un petit roman que je vous recommande.

PS: mon ami me fait remarquer que c'est le 3ème livre, sur mon blog, où le narrateur est un chien!

7 avril 2017

Plaidoyer (impossible) pour les socialistes - Bernard Maris

J'ai [Ta d loi du cine, "squatteur" chez Dasola] mis plus de deux ans à rédiger le présent billet. En fait, je viens tout juste de relire ce livre, Plaidoyer (impossible) pour les socialistes, acheté en janvier 2015 et terminé deux mois plus tard - sans que j'aie à l'époque réussi à rédiger quelque chose dessus. Il s'agit du 2ème livre de Bernard Maris que je chronique dans la série de mes "hommages" aux tués du 7 janvier 2015 à Charlie Hebdo. Bien évidemment, on pourra critiquer mon choix de parler ce mois-ci de ce livre-là. Il faut avoir l'honnêteté intellectuelle de reconnaître que Bernard Maris a publié ce livre il y a déjà 5 ans, en 2012 (imprimé en novembre, j'ignore quand il en avait commencé la rédaction). Il contient quelques rares allusions à Hollande Président, à Ayrault premier ministre, ou même à Benoit Hamon ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire (par exemple, p.39: "étonnez-moi, Benoit"). Soyons conscients que, si Bernard Maris avait eu la chance de ne pas s'être fait assassiner, il aurait peut-être écrit autre chose aujourd'hui (ou pas). J'ignore évidemment ce que notre "Oncle Bernard" aurait bien pu dire sur les projets de nos candidats (primaires, secondaires, supérieurs...) aux élections présidentielles de 2017. Passons donc au livre tel que j'ai pu le lire.

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Plaidoyer (impossible) pour les socialistes ne perd pas son temps à chasser tel ou tel éléphant ou tel ou tel courant de notre Parti Socialiste contemporain. Il ne s'agit pas non plus de démolir une doctrine qui apparaîtrait figée par opposition à quelque autre parti politique. Quitte à enfoncer une porte ouverte, j'insisterai sur le fait que le titre mentionne bien "les" socialistes, mais ni "le parti socialiste" ni "le socialisme" (faire l'amalgame relèverait d'un abus de langage, si ce n'est même d'une mauvaise foi partisane). Cependant, dans le livre, Bernard Maris passe en revue (cartographie) toutes les fausses pistes où l'utopie du XIXème siècle s'est fourvoyée voire dévoyée: différents courants liés aux personnalités fondatrices au XIXe siècle, la SFIO (Jaurès est longuement cité), la IIème guerre mondiale (avant: Front Populaire et guerre d'Espagne; après: guerre d'Algérie...) jusqu'à ce qui est devenu en 1971 l'actuel Parti Socialiste: selon les éclairages qu'il donne, à certains moments de l'existence du parti, sous certains dirigeants, le Parti n'a pas vraiment été glorieux.

Bernard Maris nous a donné un ouvrage de philosophie historique, une remise en perspective de ce qu'a pu jadis recouvrir le vocable de "socialisme" depuis les années 1830 où il était connoté différemment, en passant par les tendances diverses chez les socialistes de la seconde moitié du XIXème siècle, jusqu'à ce que nous connaissons, en France, sous le Président Hollande, ancien premier secrétaire du Parti socialiste. Il n'omet pas de décrire le cheminement familial ou personnel qui l'a amené jusqu'à sa rédaction. Il a fréquenté dès sa jeunesse la section SFIO de Muret (qui fait partie des dédicataires) et y a croisé des militants "historiques" auxquels il rend hommage pour la construction de sa "conscience politique". Il nous offre une lecture plutôt convaincante (désabusée?), tout le contraire d'un ouvrage barbant ou rébarbatif. C'est bien écrit, il faut tout lire (3 heures et demie... - pour moi), et c'est malaisé à résumer. L'ayant lu avec profit, je vais tâcher d'extraire quelques pépites de ce pactole et de les coudre bout-à-bout en quête de sens (si ça apparaît décousu, la faute n'incombera qu'à moi!).

Avant de parler du capitalisme en brossant à gros traits ses évolutions historiques, le prologue (p.12) commence par relever que "l'accumulation, l'enrichissement, les inégalités ne sont remises en cause par aucun dirigeant" (p.12). Bernard Maris parle bien des "dirigeants" (ceux qui exercent effectivement le pouvoir), et non des candidats... "L'homme socialiste est celui que le pouvoir indiffère" (p.183). Mais (p.176) "le peuple ne vote pas socialiste parce que le discours du progrès, du changement, de l'ouverture, de la mondialisation, de la transformation, du nouveau, de la prise de risque, de l'aventure sociale, de la mobilité, du changement (sic!), de la réforme ne l'a jamais intéressé. Il voit bien ce qu'il a à perdre dans le changement, pas ce qu'il a à gagner, car en général il n'a rien à gagner." Pourtant, "la limitation des fortunes reste un objectif socialiste" (p.202). "Pas de socialisme sans remise en cause de la propriété privée" (p.68). "Aujourd'hui, le "mur de l'argent" s'appelle "les marchés" et "Marx n'avait pas prévu que le capitalisme s'adapterait" (p.145). "Disons la vérité: non seulement le socialisme ne veut plus détruire le capitalisme, mais il a été contaminé par lui jusqu'aux os et souffre d'économisme, cette maladie grise. Il se croit obligé d'apporter quelque chose de plus efficace, de plus gestionnaire." (p.76). Résultat: on en est arrivé aux "travers du socialisme moderne: technocratique, statistique, étatique et non démocratique, globaliste, mondialiste, libre-échangiste, oubliant la morale au nom de l'efficacité et de la gestion, refusant le passé au nom du progrès et de la modernité" (p.141). Alors que parallèlement on a connu depuis 1945 "une explosion financière, tendance à l'individualisation, au narcissisme, à l'isolement et aux rapports dominants d'égalité monétaire permis par l'échange marchand" (p.15). "Les rêves finissent par s'évanouir, comme le socialisme" (p.103).

Certains "possibles" du socialisme ont été éliminés par le marxisme (dès le XIXème siècle: des socialismes utopiques contemporains du marxisme mais minoritaires face à lui). Maris n'omet cependant pas de rappeler que, "du point de vue des capitalistes, le communisme est une "hérésie", qui doit être combattue voire exterminée". Mais cela ne semble pas suffire à le rendre sympathique. Ah, si Jean Jaurès n'avait pas été assassiné, que n'aurait-il pu se passer? Jaurès, qui, d'un voyage en Algérie, avait ramené la conscience que la politique coloniale menée à l'époque en Algérie serait "le levain de l'extrémisme islamique" (p.129). Jaurès aussi qui, dès 1898, défend ce qui deviendra la Sécurité Sociale en 1945: occasion pour Maris d'introduire (p.135) la notion de "propriété sociale" qui dépasserait la propriété individuelle et (même) collective .

Et si, au final, un vrai "programme socialiste", c'était d'arriver à faire en sorte (à mettre en place les conditions pour que) chacun dans la société se sente heureux d'être là où il est? "On reconnaît le bonheur au bruit qu'il fait en partant" (p.187). Mettre en place, enfin, la [République] sociale, axée sur la fraternité. J'en conclus donc que l'étalon de mesure à utiliser ne devrait plus être économique, mais deviendrait un indice du bonheur, en quelque sorte. Brut, mondial, relatif... Il y a le choix! Et encore faudrait-il arriver à convaincre que le vrai but de l'humanité est que chacun soit heureux dans sa vie. Mais ceci est une autre histoire. Un autre plaidoyer?

En attendant, lisez donc vous-même celui-ci.

*** Je suis Charlie ***
10 novembre 2016

La double vie de Jesús - Enrique Serna / L'échange - Eugenia Almeida

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Comme annoncé dans mon billet du 14 septembre 2016, je voudrais d'abord évoquer L'échange d'Eugénia Almeida (Editions Métailié, 250 pages) que j'aurais voulu apprécier autant que la jeune libraire qui l'avait recommandé. Et bien, non... car je n'ai rien compris à cette histoire. Il y a de nombreux dialogues mais on ne sait pas qui parle. Cela m'a beaucoup gênée. Quand le roman débute à Buenos Aires en Argentine, une jeune femme vient de se suicider en se tirant une balle de revolver en pleine rue. Guyot, un journaliste, décide d'enquêter pour comprendre pourquoi cette femme a mis fin à ses jours. Des policiers font tout pour que le journaliste ne découvrent pas la vérité, dont l'origine remonte au temps de la dictature militaire. Je ne peux rien écrire d'autre.

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Je passe maintenant au roman mexicain La double vie de Jesús d'Enrique Serna. Jesùs Pastrana vit à Cuernavaca. Marié (son couple bat de l'aile), il est le père de deux enfants (qu'il adore). Membre du parti PAD (Parti d'action démocratique - c'est une invention de l'écrivain) depuis 20 ans, c'est un fonctionnaire qui exerce comme Commissaire aux comptes à la mairie. Il brigue la fonction de maire qui lui permettrait (peut-être) de combattre le crime organisé et les cartels de trafiquants qui gangrènent la ville, car Jesùs est un homme intègre. En revanche, il a un secret: il prèfère les hommes aux femmes. Ainsi, il rencontre, et tombe follement amoureux de, Leslie, un travesti qui est le frère jumeau d'un dangereux narco-trafiquant. Le rythme du roman est trépidant avec des péripéties d'une page à l'autre. Jesùs a du mal à mener de front cette liaison "scandaleuse" et sa campagne électorale dans un pays "macho" comme le Mexique. Je pense qu'ailleurs, cela ne serait pas plus simple. Quand le roman se termine (j'ai trouvé la fin abrupte), on est triste de quitter Jesùs qui a vécu en quelques mois une passion hors norme faite de sexe, de tendresse, de fureur et de beaucoup d'amour avec un zeste d'humour. Les seuls bémols que je fais sont pour la fin un peu rapide et sur le fait que l''écrivain se concentre exclusivement sur Jesùs, au détriment peut-être des autres personnage. Un roman que je conseille, tout comme Simone.

7 avril 2019

L'avenir du capitalisme - Bernard Maris

Avec L'avenir du capitalisme, voici une quatrième chronique concernant Oncle Bernard dans le cadre des hommages que je (ta d loi du cine, squatter chez dasola) rends aux morts de Charlie Hebdo.

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Ce petit ouvrage (67 pages) est paru à titre posthume aux éditions LLL (Les Liens qui Libèrent) en 2016. Le texte de Bernard Maris commence p.15. Le livre reprend le texte d'une conférence prononcée par Bernard Maris, à Paris, le 11 janvier 2010, à l'Institut Diderot. Dominique Lecourt, qui dirige ce laboratoire d'idées français lancé le 19 octobre 2009, explique dans une émouvante préface les circonstances de la rédaction de ces quelques dizaines de pages. J'y relève une citation: "En l'écoutant [Bernard Maris] sur France Inter, on était frappé de ce qu'il ne coupait jamais la parole à ceux dont il ne partageait pas les opinions".

Concernant ce questionnement sur l'avenir du capitalisme, la réponse qu'il tente ici d'y apporter (comme on "tente" une performance, dirais-je) se place d'abord d'un point de vue économique, bien sûr, - puisqu'il était économiste -, mais aussi avec des références historiques, sociologiques et peut-être un petit peu philosophiques. Il en appelle à Karl Marx évidemment, mais aussi à Max Weber, et à [John Maynard] Keynes...

L'ouvrage est divisé en deux parties. D'abord, "le capitalisme est-il moderne"? Pour parler de l'avenir, il commence bien entendu par évoquer le passé et l'apparition de longue date d'éléments isolés (grand commerce [à longue distance], prédation, comptabilité...). Si j'ai bien compris, le capitalisme apparaît quand les "travailleurs" l'emportent sur les "guerriers" et les "prêtres"(pour reprendre les trois fonctions dont parle Georges Dumézil pour les épopées des sociétés indo-européennes), et lorsque apparaît la notion de "surplus" et d'accumulation.

Bernard Maris égrène et expose quatre éléments qui manquaient aux époques pré-capitalistiques et que ce "jeune homme" (le capitalisme) va amener. Puis sa démonstration respectera ces quatre parties annoncées p.23: le travail (et le marché du travail); le crédit (la taille des marchés et la production de masse); le machinisme (et la soumission de la technique à la science); le rapport au temps (le temps linéaire qui se substitue au temps cyclique). Je cite (p.24): "le capitalisme naît lorsque l'esprit du capitalisme habite la majorité des dirigeants, et bientôt la société tout entière, à travers le travail et la techno-science." Je mentionnerai que le sous-entendu que les paysans travaillaient moins, en 1914, qu'aujourd'hui, m'a d'abord fait sauter au plafond (p.45)... avant que je comprenne mon malentendu: Bernard Maris parlait bien de prise en compte du travail "marchand" (rémunéré), et non du travail en autarcie.

Pour ma part, autant j'adhère aux explications historiques, autant les explications du capitalisme en lien avec la psychanalyse (le bourgeois qui refuse de jouir...) me paraissent personnellement superflues (comme on le sait, ce n'est pas ma tasse de thé). Il me suffit que soit énoncé que le capitalisme est un système qui fonctionne sur la frustration et la servitude. Ne vaut-il pas mieux que les entrepreneurs capitalistes exercent leur tyrannie sur leur compte en banque que sur leurs compatriotes? La réponse ne me semble pas si évidente. Le capitalisme se présente aussi avec le masque d'un jeu où tout le monde serait gagnant: l'échange créant davantage de richesse(s) qu'il n'y en avait au départ. Le problème est que cette "richesse" est devenue, exclusivement, financière. La violence du capitalisme s'est aussi (re)portée sur l'environnement. Comment l'Homme s'en sortira-t-il?

Et l'avenir du capitalisme (abordé en seconde partie, p.49)? j'ai trouvé qu'aucune des différentes possibilités qu'il balaie n'incite à l'optimisme... Le verrons-nous avoir tort? Par exemple, la Chine verrait bien, d'un côté, les salaires de ses travailleurs augmenter; mais de l'autre, l'immensité de son propre marché intérieur lui garantirait des économies d'échelle, "ce qui fait qu'on [l'Europe?] est mal barrés". Le progrès technique n'est sans doute pas une solution en raison de l'impossibilité de la croissance dans un monde fini. La solution (en conclusion) pourrait venir de l'économie de l'altruisme, l'économie sociale et solidaire (j'adhère!).

Un rapide coup d'oeil sur la blogosphère ne m'a pas permis de trouver beaucoup de mentions de cet ouvrage, à part sur des blogs de librairies. Mention spéciale pour le blog de Ludovic (sous-titré "une opinion parmi d'autres"), qui a à la fois parlé du livre et mis en ligne la vidéo de la conférence

Au final, la version rédigée, construite, condensée, du livre, est bien évidemment différente de la version improvisée, semble-t-il, d'après quelques notes jetées sur des feuilles (improvisations touffues sur un sujet sur lequel il travaillait depuis des décennies, bien entendu). J'ai été un peu dérouté par le décalage entre le son et les mouvements des lèvres? Mais j'ai pioché des éléments pour le présent billet indifféremment dans l'un et dans l'autre, même s'il est difficile de résumer 56 minutes ou 52 pages en quelques lignes. Je vous invite donc à consulter les deux! En ce qui me concerne, j'ai apprécié le sens de la formule de Bernard Maris. Bizarrement, j'ai eu l'impression de connaître isolément beaucoup des éléments épars qu'il cite, mais sans jamais en avoir auparavant fait la synthèse, la "mise en relation", pour arriver à la démonstration qu'il apporte avec sa pensée construite. N'est-ce pas ce que l'on attend d'un érudit, d'un intellectuel, d'un "spécialiste" ou d'un "expert"?

Pour la suite, je pense que ma prochaine chronique d'un ouvrage d'Oncle Bernard portera, d'ici quelques mois, sur sa Lettre ouverte aux gourous de l'économie qui nous prennent pour des imbéciles [chroniqué le 07/08/2019].

*** Je suis Charlie ***

7 septembre 2018

Petit traité d'intolérance / Nouveau petit traité d'intolérance - Charb

Charb n'était pas seulement dessinateur, il rédigeait aussi des chroniques régulières, titrées "Charb n'aime pas les gens", dans Charlie Hebdo. En son temps, il a aussi tenu une chronique mensuelle dans Fluide Glacial, "La fatwa de l'Ayatollah Charb". Mais si les deux livres que je (ta d loi du cine, squatter chez dasola) présente ce mois-ci sont sous-titré "Les fatwas de Charb", il n'y figure aucune indication de date ou de lieu de publication de chacun des textes y figurant.

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Quatrième de couv' pour l'un ou couverture pour l'autre annoncent respectivement 50 et 40 chroniques, or j'en ai compté en fait 59 et 47: ne sous-estimons donc pas Charb! Avant Librio (collection Idées), les deux titres avaient été publiées aux éditions Les Echappés (créées en 2008 par Riss pour éditer les auteurs de Charlie), en 2009 et 2014 (textes choisis par l'auteur, donc, sans doute parmi un "corpus" publié plus vaste?). Puis Librio a édité le premier Petit traité... en octobre 2012 (coll. Idées, N°1050, réédité en mai 2015), et le second en septembre 2016 (N°1216).

Toutes les chroniques du 1er volume sont précédées d'un dessin (j'en ai choisi deux pour illuster le présent billet), mais aucune de celles du second. Il s'agit de textes courts, le plus souvent sur 2 pages, sauf exception ("Mort aux bonnets de père Noël", qui en fait 3), et se terminant par la ritournelle "Je crois que vous en serez d'accord, il faut [ultime châtiment absolument horrifique]... Amen".

Dans ses chroniques percutantes, Charb témoigne d'une vision plutôt amère que rigolotte. Au premier abord, l'humoriste pourrait passer pour un abominable guide suprême intimant d'exterminer les cibles de sa vindicte, qu'il s'agisse d'objets, de personnes, de tendances ou d'idéologies. Mais je suppose qu'il avait foi en l'intelligence de ses lecteurs. Il les provoque, p.31, dans "Mort au vote utile", qui vise (à quel degré? Au premier, second, ...n ?) les "cons" qui le prônent ou le pratiquent sans réfléchir plus loin. C'est par contre comme un militant qu'on peut le pressentir dans la chronique révolutionnaire titrée Mort à "On lâche rien" (p.49 dans le Nouveau...): "On lâche rien!" me fout le moral à zéro. C'est "On conquiert tout" qu'il faut gueuler! (...) "On lâche rien" est un slogan qui fait totalement l'impasse sur ce qu'on a déjà lâché. C'est un slogan qui entérine le fait que, ce qu'on a perdu, on ne le retrouvera jamais. 

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Voici quelques citation choisies. Je commence par un extrait de "Mort aux lecteurs de journaux gratuits" (p.21 du 1er opus): "Faut pas laisser perdre! On serait bien con de ne pas profiter de ce qui est gratuit, même si on n'en a pas besoin. On distribuerait des coups de pied au cul à l'entrée du métro qu'ils en réclameraient tous plusieurs s'ils ont la certitude que c'est gratuit." Ou, p.63, dans "Mort aux binoclards « Tendance »": "Evidemment, le marché ne s'est pas adapté à la demande, comme trop de gens le croient encore, les gens ne demandent rien. Le seul talent du marché consiste à faire croire aux consommateurs que ce sont eux qui ont désiré les produits qu'on leur impose. Vous imaginez l'humanité se lever un jour en hurlant d'une seule voix "On veut des lunettes rectangulaires"?

Bon, il faut que j'en laisse à découvrir. P.87 du Petit..., la totalité de la chronique "Mort à la business class" vaudrait à mon avis son pesant de caviar phantasmé.

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C'est vrai que c'est difficile de choisir, mais dans "Mort aux concepteurs de portables" p.89, à propos de la multitude de fonctionnalités proposées par les [téléphones] portables sans permettre cependant les cédilles ou les accents circonflexes, je relèverais la phrase profonde: "On nous offre le futile pour nous confisquer l'essentiel".

Pour ma part, je regrette un peu l'absence de toutes autres informations que les textes eux-mêmes. Du coup, il manque les dates des chroniques, le contexte... ("les années Hollande", pour l'une d'elles [p.68 du Nouveau petit traité...], indique juste qu'on est entre mai 2012 et la date de 1ère publication, en 2014). Je me demande ce que les historiens de 2075 trouveront comme informations sur la vie quotidienne en France au début du XXe siècle dans ces opuscules. J'espère en tout cas qu'ils auront conservé la capacité d'en rire. Sur les blogs, Keisha avait parlé du Traité... en 2014, Virginie dès 2013, Petite noisette après l'attentat en 2015.

Et si je devais vraiment retenir une seule chronique sur plus de 100? Je pense que ce serait celle p.71 (Nouveau...): "Mort aux dévots incroyants". Au final, je placerais bien ce texte, en termes opératoires, à peu près au niveau du "Pari" de Pascal. Mais l'ensemble est à lire, et chacun pourra y piocher ce qui lui parlera personnellement.

Je crois que vous en serez d'accord, à partir de cette rentrée 2018, il faut introduire des morceaux choisis (par roulement) de ces Traités d'intolérance au programme du collège et du lycée. Amen.

*** Je suis Charlie ***

7 octobre 2018

Pétillon et Charlie Hebdo

Ce mois-ci, dans mon hommage mensuel aux disparus de Charlie Hebdo, je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vais effectuer un petit pas de côté pour inclure un dessinateur de presse (et bédéiste) qui vient de mourir le 30/09/2018 (des suites d'une longue maladie, comme on dit). J'avais noté il y a déjà des mois qu'il ne dessinait plus dans Le Canard Enchaîné, mais j'ignorais qu'il fût malade, et j'attendais avec impatience le prochain "Jack Palmer" (dasola avait chroniqué le dernier paru ici). Sur son lit d'hôpital, semble-t-il, il a pu feuilleter la biographie de Cabu que vient de rédiger Jean-Luc Porquet (journaliste au Canard), un ouvrage dont j'aurai probablement l'occasion de reparler.

A l'époque de l'attentat du 7 janvier 2015, Pétillon ne dessinait pas pour Charlie. Il envoyait, si j'ai bien compris, entre autres, 8 dessins chaque lundi soir au Canard Enchaîné (pour publication en noir et blanc), et illustrait aussi les Dossiers du Canard. Mais, comme d'autres confrères dessinateurs, il a dessiné dans quelques numéros juste postérieurs à l'attentat de janvier 2015. Je me suis plongé dans ma "série complète" de Charlie Hebdo post-attentat. Sauf erreur de ma part, un total de 7 dessins de Pétillon a été publié (en couleur, dans trois numéros), dont j'extrais ceux qui suivent (il avait, semble-t-il, liberté des thèmes sur lesquels dessiner). 

Petillon_P1100451  Petillon_P1100450 n°1179 du 25/02/2015 p. 8 & 12.

Petillon_P1100449  Petillon_P1100448 n°1180 du 04/03/2015 p. 4 & 10.

Petillon_P1100447 n°1181 du 11/03/2015.

Un an plus tard, quinze de ses dessins (en couleurs aussi) illustrent le Hors-série Dossiers du Canard Enchaîné sur la liberté d'expression paru en avril 2016, dont il faisait même la couverture. 

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Le Canard Enchaîné lui a rendu hommage dans son numéro paru mercredi 3 octobre 2018 (en couv' et en p.5)

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Charlie aussi (p.4). Petillon_P1100453

Pétillon laisse une vingtaine de recueils de ses dessins de presse (j'en possède plusieurs) et quinze albums des aventures de Jack Palmer, son détective maladroit. Après L'Enquête corse paru en 2000, dont tout le monde parle aujourd'hui, René Pétillon avait aussi dessiné L'Affaire du voile, dévoilé en 2006 mais moins connu (?). Il ne me reste plus qu'à apporter l'un et l'autre à dasola (qui ne les a encore jamais lus!) pour qu'elle fasse une de ses prochaines chroniques sur l'un ou l'autre selon ses préférences...

Son trait va me manquer.

*** Je suis Charlie ***

7 novembre 2023

Bête et méchant / Les Ritals - Cavanna

Deux livres, ce mois-ci, dans le cadre de mes "Hommages du 7". Après Les Russkoff (le deuxième volet de l'autobiographie de François Cavanna, sur la Seconde guerre mondiale), j'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) lu le troisième, Bête et méchant (les débuts dans la carrière), avant de me replonger dans le premier, Les Ritals (l'enfance). 

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Bête et méchant, 1ère parution en 1981, Le livre de Poche N°5755, 1983, 346 pages
Les Ritals, 1ère parution en 1978, Le livre de Poche N°5383, 1986, 377 pages

De votre côté, rien ne vous empêche de les lire dans l'ordre... Pour ma part, il ne s'agissait pas d'une première lecture. 

P1160792Ce volume reprend donc la suite de la vie du jeune François Cavanna revenu d'Allemagne. Il dépeint les années d'auto-formation à l'entrée dans la carrière, avant d'arriver à gagner sa vie par le pinceau et par la plume, jusqu'à Hara-Kiri inclus (journal Bête et méchant). Cavanna a commencé par publier une bande dessinée dans le journal Le déporté du travail. Mais difficile de renverser de l'encre sur la table familiale, en s'échinant le soir et le dimanche, alors qu'il travaille comme ouvrier puis employé en semaine. Alors, il trouve une piaule, toujours en banlieue, pour dessiner d'autres travaux. Et, pour en partager le loyer, une colocataire... Et le voici en ménage (platonique d'abord) avec une jeune femme revenue traumatisée (physiquement comme mentalement) des camps nazis. Puis mariage... qui ne dure que quelques dizaines de pages. Mais l'élan est donné. Citation (p.74): "Liliane me disait: on ne fait bien les choses que si l'on est un professiuonnel. Un professionnel, c'est un type qui ne fait que ça, son métier, même s'il ne gagne pas un sou, même s'il n'a pas un client, il est un professionnel. Il consacre son temps et ses meilleures forces à son métier. Si tu travailles dans la journée pour un patron et que tu fais ce que tu aimes le soir ou le dimanche, tu es un amateur. Ca peut ne pas être trop mal, ça ne sera jamais un travail de professionnel. Un professionnel a le dos au mur et la trouille au cul". Cavanna nous raconte la tournée des rédactions de journaux (la presse d'après-guerre) où l'on laisse les dessins de la semaine, qui seront acceptés - ou non,  les rencontres avec d'autres dessinateurs (Dubout l'avait prévenu: "tu vas en baver, il faut de la te-na-ci-té"), notamment Fred. Pour vivre encore des petits boulots, à droite ou à gauche (intéressant décryptage du milieu des dessinateurs de presse d'après-guerre.). J'en retiens une autre citation attrapée au vol (p.117): "dans cette anarchie qu'est notre société mercantile, si un mode de production anachronique et même nuisible assure de gros revenus à une catégorie suffisamment puissante, le jeu du progrès est faussé". En 1954, c'est l'achat du premier numéro d'un journal vendu par colportage, Zéro, qui lui permet de croiser le couple Novi, qui l'a créé (avec des dessins déjà publiés ailleurs). Puis de rédiger des "jeux" bouche-trou. Puis ses premiers textes (écrire plutôt que dessiner?) ... avant de découvrir l'imprimerie et le maquettage du journal. Et puis l'on assiste à la rencontre chez Zéro avec le futur professeur Choron, retour d'Indochine, grande gueule et vendeur émérite. Zéro devient Cordées, Cavanna continue à se former sur le tas. Novi meut subitement, et en 1960 Cavanna, Choron et Fred lancent le journal mensuel dont ils rêvaient, avec l'afflux de talents (Cabu, Wolinski, Gébé, le jeune Reiser)... Hara Kiri commence, avec ses aventures et mésaventures: équipe de colporteurs emmenée au commissariat, journal interdit d'affichage (en toute subtilité: voir chapitre "Il n'y a pas de censure en France", pp.262-296). La phrase-culte "L'humour est un coup de poing dans la gueule" est écrite p.232. Bête et méchant se termine en 1967, juste avant la reprise après une nouvelle interdiction de Hara Kiri, qui ne sera pas la dernière... 

Voir les billet des blogs Au détour d'un livre, Les plumes baroques, "Me, myself and I". 

Je m'étais acheté mon exemplaire de Bête et méchant le 14 octobre 2023. Mais à la relecture du chapitre titré "Néo" sur "la mort du père" (1953-1954), je me suis persuadé que je l'avais déjà lu, il y a plusieurs décennies... Je suppose que j'avais déjà dû croiser ce livre ici ou là, mais sans l'acquérir pour ma pochothèque. Je signale pour finir qu'il comporte 11 chapitres, avec chronologie indiquée mais avec des retours en arrière. 

P1160791Mon exemplaire du titre Les Ritals, lui, porte comme date d'acquisition le 13 mars 2014. Pour être plus exact, il s'agit de la date où je l'ai sauvé d'un don que ma mère s'apprêtait à en faire à une boutique Emmaüs, quand elle se débarrassait de livres qu'elle avait parfois achetés en double ou triple (pour l'une ou l'autre de ses résidences), avant de migrer d'un grand appartement à un studio plus modeste à l'étage "chambre de bonnes"... C'était quelques années avant qu'elle parte en EHPAD. Bref. 

Dans Les Ritals, son premier livre de "souvenirs", Cavanna nous présente son enfance à Nogent, d'un père maçon italien illettré et d'une mère morvandelle (née dans la Nièvre, à quelques kilomètres d'Imphy). Il a été élévé aux pâtes et à la viande de cheval. Les chapitres nous présentent ses copains tout aussi fils de Ritals avec qui il fait les 400 coups dans la rue ou le voisinage, la découverte des filles (gamines du coin ou professionnelles de Paris), le cinéma, la bibliothèque, la première muffée, ou une grande fugue à vélo... avec bien de la verve. Il y a aussi les histoires du père, beaucoup: en fait, il transparaît dans chaque chapitre, le Vidgeon (diminutif gentil de Luigi, en "dialetto"). p.122, il habille pour l'hiver ceux qui se sont amusés, un jour, à soûler son père. Mais le chapitre suivant expose avec tendresse la "main verte" du père, et son habitude de planter un noyau de pêche sur chacun des chantiers où il travaillait. Et puis la crise économique et le chômage, la peur du renvoi au pays, qui amènent Vidgeon à demander la naturalisation française... obtenue au tout début de la Seconde Guerre mondiale. Les 29 courts chapitres qui composent le livre (avec des titres très courts aussi) m'ont amené à me poser la question de savoir si le livre Les Ritals n'aurait pas d'abord été publié en "feuilleton", sous forme de "chroniques" séparées... ?

Je retiens en tout cas de ce livre qu'à l'époque, le rejet par les "Français de souche" (comme on ne disait pas encore? Si?) de certains métiers, ce qui amenait de la main-d'oeuvre étrangère à les occuper (en espérant pour leurs enfants un destin de petit fonctionnaire), existait déjà. Un siècle plus tard, remplacez "Ritals" par "personnes racisées" et "maçons" par "services à la personne", et la messe est dite. 

Voir aussi le billet du blog Au détour d'un livre.

Le récit de la création et des premiers temps, de Charlie Hebdo (l'histoire en est déjà bien connue!), lui, ce sera sans doute pour le tome suivant immédiatement (Les yeux plus gros que le ventre)... Je signale pour finir que j'ai découvert d'occasion cette semaine Lune de miel (Folio). Ayant lu sur la 4ème de couv' que c'était aussi un "tableau réjouissant de souvenirs, réflexions et anecdotes", je me le suis offert. J'en parlerai certainement un mois ou l'autre.  

*** Je suis Charlie ***

2 décembre 2012

L'embellie - Audur Ava Olafsdottir / Le dévouement du suspect X - Keijo Higashino

Voici deux romans qui n'ont rien en commun. Le premier faisait partie des romans que j'avais emportés pendant mes grandes vacances. L'autre est un emprunt à la bibliothèque loisirs dont je m'occupe et qui m'a beaucoup plu.

 

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Autant j'avais été emballée par Rosa Candida, autant L'embellie d'Audur Ava Olafsdottir (Edition Zulma, 400 pages) m'a un peu déçue. Il ne se passe pas grand-chose dans ce roman. La narratrice est correctrice de tout document écrit (livres, articles, lettres, etc) et traductrice de l'Islandais en onze langues. Son mari vient de la quitter pour une autre (enceinte de ses oeuvres). Grâce à un gros gain de loterie, elle entame un périple en compagnie d'un petit garçon d'environ cinq ans, Tumi, le fils d'une amie (enceinte). Tumi, souffrant d'une déficience auditive et somnambule, est un garçon intelligent et attachant. Ce "road novel" est agréable à lire mais l'ensemble reste superficiel. Il n'y a  pas vraiment d'histoire, ni de rebondissements marquants. Et je n'ai pas  bien compris l'ajout des recettes à la fin de l'ouvrage (40 pages). Pas indispensable.

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Le Dévouement du suspect X (Editions Actes noirs Actes Sud, 310 pages) est le deuxième roman que je lis de Keijo Higashino (après La maison où je suis mort autrefois). Je vous le recommande vivement car l'intrigue criminelle assez originale est bien menée. A Tokyo, Ishigami, un professeur de mathématiques remarquablement intelligent doublé d'un chercheur très doué, se retrouve impliqué dans le meurtre de l'ex-mari de sa voisine (dont il est tombé amoureux). L'inspecteur chargé de l'enquête consulte Yukagawa, un ancien collègue d'université d'Ishigami. Ces deux hommes s'étaient passionnés par cette question mathématique (qui joue un rôle capital dans la résolution de l'intrigue): "Est-il plus difficile de chercher la solution d'un problème que de vérifier sa solution?" Le résumé de la 4ème de couv' révèle beaucoup de l'histoire sauf le "twist" ("coup de théâtre", NDSR) final que je n'avais pas deviné. Vraiment très bon roman. Lire l'avis de A_girl_from_eart.

7 mars 2020

Caricature mode d'emploi - Charlie Hebdo Hors série N°20H (novembre/décembre 2019 - janvier 2020)

Il m'est déjà arrivé, dans mes hommages mensuels à Charlie Hebdo, de parler d'un de leurs "Hors-série". Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) réitère aujourd'hui en présentant l'avant-dernier paru, en novembre 2019, sur les caricatures.

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Caricature mode d'emploi, Hors série N°20H, novembre 2019 à janvier 2020, 64 pages

Ce Hors-série thématique fait bien sûr la part belle à la production de l'équipe: j'ai compté au fil des pages 25 couv' de Charlie Hebdo, de différentes époques. Il est divisé en 17 chapitres intéressants par la variété de leurs angles (pour citer en exemples certains de leurs titres: "Censure sans frontières [trop politiquement correct, trop politiquement nul]", "Purgatoire [caricaturer les religions]", "Peut-on rire de trous [caricaturer... le sexe]" - qui m'a fait pouffer!, "Rire pour toujours [caricaturer... la mort]"), sans compter l'édito que signe Riss. Dans le chapitre "Dépucelage: mon premier dessin satirique", les actuels collaborateurs de Charlie (dessinateurs ou non, 14 témoignages) évoquent chacun un dessin satirique qui les a marqués enfants et qui est peut-être à l'origine de leur vocation. J'ai particulièrement savouré celui mis en avant par Gérard Biard (p.9), ci-dessous.

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Le numéro plonge assez loin dans l'histoire de la caricature (alors moyen anonyme d'attaquer les puissants: Marie-Antoinette par exemple, victime de pamphlets érotico-obscènes). L'incontournable Daumier est cité, avec un dessin moins connu que celui de Louis-Philippe en poire. On y trouve aussi la célèbre dernière couv' de L'Hebdo Hara-Kiri (sans dessin, mais non sans graphisme!). 

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En ce qui me concerne, la lecture de ce numéro m'a fourni l'occasion d'en apprendre davantage sur L'Assiette au beurre, abondamment cité (via 8 dessins d'époque) dans ce Hors-série, alors que je ne ne connaissais guère que de nom ce titre de presse du début du XXe siècle, et de me renseigner notamment sur le dessinateur Jossot (3 dessins sur les 8, de 5 dessinateurs différents). Je vais donc faire un peu mon cuistre: L'assiette au beurre, comme Charlie Hebdo, a connu deux séries successives, l'une, hebdomadaire, de 1901 à 1912 (tirant à 25 000 exemplaires en moyenne), puis, à périodicité mensuelle, une seconde de 1921 à 1936 (disparition définitive). Au total, il aura publié près de 10 000 dessins produits par environ 200 dessinateurs. Je me demande pourquoi ceux cités sont tous datés d'entre 1901 et 1904. Peut-être parce que ces dessins-ci de ces années-là étaient disponibles au moment de la rédaction du Hors-série...

Quant à Jossot, je vais rapprocher de celui publié par Charlie un autre de ses dessins (celui en noir et blanc), en guise de rime d'image: selon le site Goutte à goutte de Henri Viltar sur Jossot d'où je l'ai extraite, "Cette image au cynisme savoureux, à la fois antimilitariste et anticléricale, est parue en avril 1903, dans l'Action quotidienne, anticléricale, républicaine et socialiste, organe de la libre-pensée militante."

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Mais je ne crois pas avoir lu dans Charlie la précision que le dessinateur Jossot avait été renvoyé en 1904 de L'Assiette au beurre parce que certains des numéros qu'il avait conçus avaient été "mal reçus", avant d'y revenir plus tard, pour un total de 300 dessins publiés entre 1901 et 1907 (selon Wikipedia, consulté le 1er mars 2020). Au final, L'Assiette au beurre était sans doute un titre dont les propriétaires étaient davantage mus par le souci de publier un périodique ayant une bonne rentabilité financière que de publier un journal d'idées.

J'ai encore trouvé intéressant le chapitre intitulé "Caricature et démocratie, un vieux couple agité qui ne s'est jamais résolu à divorcer", de par sa conception. Charlie a "demandé à plusieurs responsables politiques de nous faire part de leur point de vue sur la caricature en démocratie, à travers parfois l'expérience qu'ils purent en faire eux-mêmes". Parmi les dix témoignages d'hommes ou de femmes politiques qui expriment leur position personnelle sur le dessin de presse, je relève celle de Nicolas Sarkozy (par ailleurs dessiné ou évoqué en tout quatre fois dans des dessins du Hors-série). Dans le contexte de la préparation des élections présidentiellles de 2007, il avait rédigé le 6 février 2007 un courrier de 15 lignes lu par l'avocat de Charlie lors du procès sur les caricatures publiées en 2006, et était déjà intervenu à ce sujet sur LCI le 2 février 2006. Dans sa réponse en 2019, il brode autour de ses formules successives: "je préfère l'excès de caricature à l'excès de censure" (2006) / "je préfère l'excès de caricature à l'absence de caricature" (2007), pour finir par: "Tirer sur le caricaturiste c'est en réalité tourner une arme contre soi car le rire est au coeur même de la condition humaine" (et hop, dans la poche, Rabelais et Malraux!).

Dans l'avant-dernier chapitre, une double page signée Riss présente une association via laquelle une ancienne journaliste de Charlie Hebdo mène des actions d'éducation au dessin de presse et à la caricature, dans différents milieux parfois hermétiques: établissements scolaires (de la primaire à l'université), bien sûr, mais aussi centres sociaux et prisons. L'association Dessinez Créez Liberté a été cofondéée en 2015 par Charlie Hebdo et SOS Racisme, pour débattre du fanatisme, de la liberté d'expression et de tous les sujets de société contemporains. Je pense, j'espère, que le chapeau de l'article peut servir de conclusion à chacune de ses interventions: "On se sent moins con lorsqu'on comprend une caricature!". 

P1110642 Il faut être capable de comprendre au moins le "second degré": par exemple, ici, un singe en caricature un autre, et cela donne... Trump (comique de répétition: peut-on rire de Trump?). Ensuite, on attend de pied ferme la plainte de la SPA.

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Je vais enfin revenir sur quelques-uns des chiffres que j'ai relevés: ceux des dessins des dessinateurs décédés. Honoré, un seul. Wolinski, une couv'. Charb, 3 couv' et 6 autres dessins. Cabu, 6 couv et 5 autres dessins (tous étant © V. CABUT bien sûr). Si l'on en trouve aussi de Reiser ou de Gébé, il n'y en a aucun de Tignous: cela m'a frappé?

On peut toujours, bien sûr, se procurer ce Hors-série sur la boutique en ligne de Charlie Hebdo (ou une vingtaine de titres - certains déjà bien anciens - sont proposés à l'achat). Peut-être reviendrai-je un jour sur l'un ou l'autre parmi les six Hors-série qui figurent en p.4: Profs; Spécial jeux; C'était Calais; Cavanna raconte Cavanna; La laïcité, c'est par où? Enfin, je précise que l'hebdomadaire mettait en couverture le Hors-série, lorsqu'il était disponible en kiosque. Ainsi, la couv' du numéro ci-dessous. Si, si, regardez bien: propulsez votre regard en haut, à droite...

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*** Je suis Charlie ***

7 octobre 2020

Et si on aimait la France - Bernard Maris

Ce mois-ci, en hommage aux tués de Charlie Hebdo, c'est un essai de Bernard Maris que j'ai décidé d'aller piocher dans ma bibliothèque, l'ayant acheté et lu (et apprécié) en mai 2015. A l'époque, je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) n'étais pas encore entré dans le rythme d'une chronique mensuelle. Je le relis 5 ans après, pour rédiger le présent billet, alors que notre Président a fini par rendre sa copie sur le "séparatisme" attendue depuis plusieurs années. Nous avons, nous (quelle chance!), la connaissance des événements des 5 ans écoulés. 

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La "note de l'éditeur" (signée Christophe Bataille) donne le contexte de cette oeuvre posthume que Bernard Maris était venu présenter à Grasset le 16 décembre 2014. L'auteur avait insisté pour que le titre sur lequel ils s'étaient mis d'accord ne comporte ni point d'exclamation ni point d'interrogation. Il s'agit bien d'un "livre inachevé" puisque Bernard Maris en envisageait, le 2 janvier 2015 quand il en a faxé ces pages à son éditeur, la parution pour avril 2015 (ce qui lui laissait encore du temps pour travailler dessus). Mais comme on sait, il a été assassiné cinq jours plus tard. La décision de publier l'ouvrage tel quel a été prise avec ses enfants.

Cet essai écrit avec verve commence par une citation de Michelet datant de 1846 mise en exergue: "La situation de la France est si grave qu'il n'y a pas moyen d'hésiter". Comme quoi, pas grand-chose de nouveau sous le soleil (même si celui-ci tape plus dur qu'avant). Bernard Maris balaie ensuite tant la grande Histoire que sa propre jeunesse. Comme souvent, il critique la droite et engueule la gauche. Il nous ouvre aux approches de plusieurs disciplines: la démographie (en évoquant à plusieurs reprises l'approche de Philippe Ariès à propos de la régulation volontaire des naissances en France dès l'Ancien Régime), l'histoire (BM rappelle au détour d'une phase que lui-même a "décroché la timbale" de l'agrégation d'Histoire à la quatrième tentative), la géographie (Christophe Guilluy et ses analyses sociologiques sont présentées dans le dernier quart de l'ouvrage).

L'économiste qu'est Oncle Bernard nous rappelle utilement que l'insistance mise sur le séparatisme en France peut permettre d'occulter avec habileté la question sociale. J'ai retenu la distinction (dont il crédite Christophe Guilluy) entre la France des banlieues et la France périurbaine. Dans la banlieue jadis communiste, celle où aujourd'hui se succèdent des populations essentiellement immigrées, cette banlieue irriguée depuis des décennies par les "politiques de la ville" successives, l'ascenseur social fonctionne... mais, dès qu'ils le peuvent, les individus les plus diplômés, les plus "intégrables", fuient ce terreau. Cependant que les populations que la politique du "regroupement familial" y a reléguées s'y succèdent et se replient, précisément, sur un fonctionnement où se construit un attachement faisant primer "la famille" (au sens mafieux) sur l'amour de la France ou de la République. Est-ce que les "jeunes" qui effrayent le bourgeois peuvent s'améliorer en vieillissant? Petite citation (p.120-121): "Avec beaucoup d'humour, Christophe Guilluy fait remarquer que les jeunes qui ont pris part aux émeutes de Vaulx-en-Velin [en 1990] ont aujourd'hui une bonne cinquantaine d'années... Evoquent-ils avec nostalgie leur guéguerre avec les CRS, comme l'évoquèrent longtemps les soixante-huitards, eux aussi brûleurs de voitures?". Quant à la France périurbaine, j'ai été frappé de voir, lors de ma relecture, que Bernard Maris avait en quelque sorte annoncé dans ses pages, avec 4 ou 5 ans d'avance, le mouvement des "gilets jaunes". La France pavillonnaire n'est pas celle des "classes moyennes", mais celle d'une population "morose, plutôt aigre, plutôt pauvre... et anti-immigrée". "Cette France périurbaine est méprisée. (...) Allez faire des barricades autour du rond-point, votre horizon indépassable..." (p.106).

Je vais encore citer quelques lignes que Maris a consacrées aux racines de cette France qu'il aimerait aimable et à son rapport au religieux (p.69): "Il faut aussi admettre que la France est un pays profondément chrétien, profondément marqué par le catholicisme - on ne canonise pas une Jeanne d'Arc pour rien -, même s'il n'a plus grand-chose à voir avec sa haute tradition, et que, précisément, la distance prise avec cette tradition peut lui rendre insupportable l'arrivée d'une religion, l'islam, dont les adeptes n'ont pas encore pris cette même distance".

Je pourrai encore citer des pages et des pages (je n'ai guère insisté sur les bouffées d'optimisme respirées, tout de même, dans le livre). Evoquons encore une jolie gauloiserie visant une (ancienne) dirigeante écologiste, qui ne serait sans doute plus "politiquement correcte" à écrire aujourd'hui. Je ne résiste pas à la citer (p. 75). "Prenons Cécile Duflot. Supposons que les Français vivent comme elle, qu'ils pratiquent le tri sélectif et le vélo, votent écolo et fassent quatre enfants. Dans 100 ans, la France compterait 960 millions d'habitants. Allez, un milliard. Est-ce vivable? Difficilement. (...)". Le paragraphe suivant commence par "Plus sérieusement, ...". Bien entendu, je ne peux pas savoir si l'attaque ad feminam serait restée ou non après un BAT donné par l'auteur. On glissera aussi sur la loi Neuwirth retardée de 1967 à 1969 (p.64) - il est vrai que les décrets d'application se sont fait attendre quelques années.

Pour finir, la plupart des blogs ci-après, trouvés après recherche sur internet comme ayant évoqué ce livre en 2015 ou 2016, sont plutôt ceux d'écrivains professionnels: Anne Bert, Thierry Savatier, quelques citations sur le blog de Thomas Roger Devismes. Mais on a aussi l'opinion parmi d'autres de Ludovic.

Bref, si ce n'est pas déjà fait, je vous engage à découvrir (enfin) ce livre. Et ce que j'aimerais bien savoir, c'est si Macron a lu Maris, ou bien Guilluy.

*** Je suis Charlie ***

18 décembre 2011

Une mort esthétique - P.D. James / Bettý - Arnaldur Indridason

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Une mort esthétique (Edition Le Livre de poche) est le dernier roman en date de Phillis Dorothy (P. D.) James, 91 ans cette année. On retrouve le trio formé par le commandant Adam Dalgliesh (qui va se marier) et ses deux collaborateurs, Kate Miskin et Francis Benton-Smith. L'instrigue se passe entre un 14 décembre et un 21 décembre avec un prologue le 21 novembre et un épilogue. Pendant 600 pages, on suit une enquête qui se passe dans une clinique privée du Dorset (un beau manoir Tudor). Rhoda Gradwyn, 47 ans, une journaliste d'investigation de qualité (mais qui a donc des ennemis), est étranglée dans la nuit qui suit son opération esthétique (elle s'est fait enlever une vilaine cicatrice à la joue qu'elle avait depuis l'enfance). Les suspects se trouvent parmi le personnel de la clinique, le chirurgien (et propriétaire du manoir) en tête. Comme dans les autres romans de P. D. James, la résolution du crime nous est révélée assez rapidement dans les dernières pages. C'est toute l'enquête et les révélations sur les personnages qui sont passionnantes. Voici le genre de roman qui se déguste en prenant son thé et des muffins. Un bon moment de lecture.

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Je viens de terminer Bettý (Edition Metailié noir, 200 pages) d'Arnaldur Indridason (connu pour la série des aventures du commissaire Erlandur) qui a dû s'inspirer des classiques de la littérature américaine, en particulier Le facteur sonne toujours deux fois de James M. Cain, pour écrire ce roman qui date de 2003. La Bettý du titre est une femme fatale, une garce de la plus belle eau. Le roman est écrit à la première personne par un narrateur qui est en fait une narratrice (on le comprend à la page 108 du roman). Sara nous raconte son histoire depuis sa rencontre avec Bettý dont elle est tombée amoureuse. Elle va se retrouver complice du meurtre du mari de Bettý. Je ne vous en dis pas plus. Lecture plaisante mais pas aussi enthousiasmante que d'autres romans d'Indridason.

7 juillet 2015

Le trou - Jacques Becker / Valley of Love - Guillaume Nicloux / Le monde de Nathan - Morgan Matthews

J'aurais pu écrire un billet sur Valley of Love, de Guillaume Nicloux, avec Depardieu et Huppert, mais je n'ai pas grand-chose à en dire si ce n'est que Depardieu qui déborde de partout est touchant face à Huppert qui semble physiquement bien frêle. J'ai compris que dans la Vallée de la mort en Californie, il fait très très chaud. C'est un film qui parle de la difficulté de faire son deuil d'un être cher. Ici, il s'agit de faire celui du fils du couple formé par Depardieu et Huppert. J'ai été un peu perplexe sur le côté surnaturel vers la fin. Je mets en lien Tinalakiller et ffred qui parlent très bien de ce film.

J'aurais pu aussi écrire un billet sur Le Monde de Nathan (X + Y en VO) de Morgan Matthews, qui raconte l'histoire de Nathan, un jeune autiste surdoué en mathématiques. Il écrit des maths à longueur de journée et se sent très proche de son père. Malheureusement, ce dernier meurt dans un accident de voiture (Nathan était sur le siège passager). L'existence de Nathan est chamboulée car il tolère tout juste sa mère qu'il trouve nulle en maths. J'ai trouvé que Nathan n'était pas gentil avec sa mère. Cette dernière est une brave femme qui fait tout pour lui. Grâce à une olympiade internationale en mathématiques, Nathan va s'ouvrir aux autres et se lier d'amitié et certainement plus avec une jeune Chinoise. Le film m'avait été conseillé par une collègue que je remercie. J'ai moins été emballée qu'elle.

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J'en arrive au film de Jacques Becker (revu en DVD) dont j'avais déjà fait un billet (commenté seulement 3 fois) il y a plus de 7 ans et demi (je l'avais pratiquement oublié). Le trou, dont le tournage s'est terminé début 1960, fut le dernier du réalisateur qui mourut peu de temps après d'une crise cardiaque. Pendant les 2H12 passionnantes que dure le film qui ressemble à un documentaire, on fait la connaissance de cinq détenus dans une cellule spartiate dans la prison de la Santé à Paris. Nous sommes en 1947. Ils s'apprêtent à creuser un trou dans le plancher de leur cellule afin de s'évader. Parmi les cinq, quatre d'entre eux en détention préventive, se connaissent bien (ils risquent chacun une lourde peine). Quant au cinquième, Claude Gaspard, il vient d'être transféré dans leur cellule. Il est vite mis au parfum sur l'évasion et accepte de participer à l'opération. Aucune musique ne trouble l'action que l'on suit avec grand intérêt. C'est du grand cinéma avec une réalisation remarquable. Plus de la moitié du film se passe dans la cellule. On espère qu'ils vont arriver à s'évader. On admire les ressources de Roland (Jean Keraudy) pour arriver à ses fins, c'est du grand art. Il se sert de tout ce qu'il trouve pour fabriquer une clé passe-partout, scier un barreau, fabriquer un sablier, etc. Il ne perd jamais son sang-froid. Il n'y aucune violence. Le scénario est tiré d'un roman de José Giovanni qui a été co-détenu avec Jean Keraudy (pseudonyme de Roland Barbat). Cet homme, le cerveau du plan d'évasion dans le film, fut réellement impliqué dans la tentative d'évasion de 1947, et c'est lui qui introduit le film au tout début avant le générique. Un film à voir et à revoir.

7 juillet 2017

Murs murs - Tignous

Encore un livre de Tignous (pour le second mois consécutif), me direz-vous? Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola] pense qu'on n'en parlera jamais assez. Je viens pour ma part tout juste de me procurer Murs murs, sous-titré "La vie plus forte que les barreaux" (Glénat, 2015, 119 pages). 

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Alors que la presse va bientôt commercer à nous parler de la montée en température estivale au sein des prisons françaises, avec surpopulation carcérale, absence de perspective pour les détenus (le temps de la grâce présidentielle du 14 juillet est loin!), et grogne des personnels pénitenciaires, ce peut être le moment de mettre à l'honneur cet ouvrage - posthume - de Tignous. Ce livre était encore en cours de mise en forme quand notre dessinateur a été assassiné avec ses collègues et amis de Charlie Hebdo. L'avant-propos de la compagne de Tignous et la préface de Christiane Taubira (alors Ministre de la justice) en contextualisent la réalisation.

Cabu, jadis, effectuait des "reportages dessinés" avec beaucoup de dessins et du texte. Aujourd'hui, dans Charlie Hebdo, Riss, Juin, Foolz, ... ont repris le flambeau. Le présent album de Tignous s'inscrit dans cette veine: du dessin illustratif, comme support aux phrases rapportées, et non du dessin de presse ou du dessin d'humour. Il est bâti autour de cinq "reportages dessinés - documentaires", concernant le centre pénitenciaire de Lannemezan, celui pour femmes de Rennes, l'établissement pénitenciaire pour mineurs de Porcheville, les maisons d'arrêt de Douai et de Fleury-Mérogis. On y voit des détenus, des "surveillants", des directeurs... (hommes ou femmes), qui s'expriment, plus ou moins librement... ainsi que leur cadre de vie tel que le dessinateur l'a capté.

Je ne vais "citer" qu'une dizaine de planches. En voici deux qui donnent juste un aperçu d'ambiance à Fleury Mérogis.

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Mais surtout, pour ma part, dans cet album, ce qui m'a frappé, c'est le témoignage sur les jeunes en prison (et je ne parle pas des bébés qu'on laisse à leurs mères jusqu'à 18 mois, mais bien des mineurs incarcérés à l'EPM de Porcheville): c'est quelque peu désespérant à mon avis (impression d'un autre univers)... Je vous laisse vous faire votre propre opinion d'après les extraits ci-dessous.

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A noter pour finir que, lorsque l'album est paru en novembre 2015, plusieurs blogs en ont parlé. Entre autres, vous pouvez lire les chroniques de Sabeli, Livrelibre, Bado, Jean-Luc Truc et même un blog "juridique", Sine lege.

Décidément, je ne serais sans doute pas capable de m'engager dans une association intervenant en prison, comme certains de mes proches avaient su le faire en leur temps. Tignous était vraiment bien plus courageux que moi!

*** Je suis Charlie ***

23 février 2018

Offshore - Petros Markaris / Prendre les loups pour des chiens - Hervé Le Corre

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J'ai été ravie de retrouver le commissaire Costas Charitos, sa femme Adriani (cuisinière hors-pair), sa fille Katérina et son gendre Phanis. Petros Markaris continue de situer ses intrigues policières dans le contexte de la Grèce en pleine crise financière. Mais dans Offshore (Editions du Seuil, 297 pages), la Grèce qui a désormais à sa tête un nouveau parti ni-de-droite-ni-de-gauche (suivez mon regard) est en train de sortir de cette crise grâce à une manne financière tombée du ciel. Mais d'où vient l'argent, se demandent certaines personnes comme Adriani? Les fonctionnaires vont à à nouveau recevoir leur salaire, tandis que les magasins d'alimentation sont à nouveau achalandés. Les affaires reprennent, les crimes aussi. Charitos et ses collègues enquêtent sur trois meurtres commis à peu de temps d'intervalle: un armateur, un cadre supérieur de l'office du tourisme et enfin un journaliste à la retrraite. Charitos connaissait bien ce dernier (voir les romans précédents). Les coupables tous différents mais issus de minorités sont rapidement appréhendés et ils avouent tout de suite. Charitos comprend que quelque chose "cloche". Je vous laisse découvrir qui sont les vrais coupables et surtout "d'où vient l'argent". Un bon moment de lecture. Il n'est pas forcément nécessaire d'avoir lu les quatre romans précédents avec la crise grecque comme toile de fond. Mais lisez-les pour le plaisir. Offshore est le 10ème roman avec le commissaire Charitos. J'espère que M. Markaris ne va pas s'arrêter en si bon chemin.

 

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Je passe maintenant à un roman noir, très noir, Prendre les loups pour des chiens d'Hervé Le Corre (Editions Rivages/Seuil, 317 pages). J'ai été tentée grâce au billet de Jérôme qui l'a choisi comme son roman de l'année 2017. Je n'irai pas jusque là, peut-être parce que j'ai déviné qui était le "méchant" de l'histoire. Franck sort de prison où il vient de purger une peine de 5 ans pour braquage. Il s'attendait à ce que Fabien, son frère aîné (c'est lui avait gardé l'argent) vienne le chercher. A la place, se présente Jessica, moins de trente ans, une jeune femme à la sexualité exarcerbée qui vit avec sa fille Rachel, mutique (elle a 8 ans, presque 9). Toutes les deux vivent dans une maison isolée avec Roland et Maryse, les parents de Jessica. Il y a un énorme molosse noir qui répond au nom de Goliat. La maison est située en Gironde dans la région de Langon / Bazas (personnellement, je connais bien). Roland et Maryse sont usés, flétris et pas très sociables. Lui maquille des voitures volées qu'il vend à un gitan, et elle fait des ménages dans une maison de retraite où il n'y a que "des vieux". Franck tombe immédiatement sous le charme de Jessica. Il est "accro" et il la suit presque partout et en particulier quand elle rencontre des gens peu recommandables. Quant à Rachel, elle voit, elle observe, ne se plaint jamais même quand Jessica lui donne des coups. L'absence de Fabien parti en Espagne soit-disant pour affaires rend Franck un peu inquiet. En effet, Fabien ne donne aucun signe de vie...

A la différence de Jerôme, l'écriture de Le Corre ne m'a pas marquée plus que cela. C'est un polar noir de bonne facture mais pas exceptionnel. Je trouve que l'ensemble manque une peu de légèreté, d'humour, même si l'histoire ne s'y prête pas vraiment.

Lire le billet de Claude Le Nocher.

8 mai 2012

Livres lus et non commentés depuis le 04/01/12

Voici trois romans que j'ai lu récemment et que je n'avais pas encore eu le temps de chroniquer. Je vous les conseille vivement.

 

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J'ai trouvé ce court roman, Les liaisons culinaires (145 pages, Editions Babel), très plaisant, même si je soupçonne l'écrivain grec, dramaturge et traducteur de Molière, Marivaux Laclos et Labiche, d'être quelque peu misogyne. Nana est une femme qui mène les hommes par le bout du nez (pour ne pas dire autre chose). Dimitris et Damoclès sont deux représentants de la gente masculine assez nigauds. Où il est démontré que  les relations entre homme et femme ne sont pas simples! Dans les Liaisons culinaires, en 17 chapitres, on suit la liaison torride qu'entretient Nana  avec deux hommes en même temps, Dimitris et Damoclès qui sont tous les deux fins cuisiniers et amants très corrects. Chaque fin de chapitre nous propose des recettes de plats grecs assez appétissantes dont il est question dans le récit. La fin m'a laissé un peu sur ma faim mais conclut le roman de manière logique. Lire aussi le billet de A_girl_from_eart.

 

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Dans Code 1879 (Editions Babel noir, 360 pages), l'écrivain Dan Waddel nous fait partager sa passion pour la généalogie (qu'il a étudiée à titre personnel). De nos jours, des cadavres horriblement mutilés sont retrouvés dans le quartier de Notting Hill à Londres, un inspecteur de police, Grant Foster, mène l'enquête grâce à l'aide d'un généalogiste (qui ne laisse pas indifférent Heather, une charmante inspectrice de police). Ces crimes nous permettent de remonter le temps et nous font nous retrouver dans les bas-fonds de l'ère victorienne où les conditions de vie étaient dures pour beaucoup et où des innocents étaient condamnés à mort à la place des vrais coupables. Ce roman haletant se lit d'une traite et l'on apprend pas mal de choses sur la recherche généalogique grâce aux recensements et divers autres documents de ce genre (actes de décès, naissance, mariage). Un deuxième tome des enquêtes du généalogiste vient de paraître aux Editions du Rouergue avec les mêmes protagonistes principaux. Je ne manquerai pas de le lire.

 

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Voici enfin un roman étonnant, Le retour d'Elsa Champion de Joe Keenan, paru il y a 20 ans et qui a été réédité en collection 10/18 (380 pages). J'ai été attirée par la couverture. Je qualifierai cette histoire de vaudeville à l'américaine. Dans les années 80, à Manhattan, on assiste à une rivalité entre deux colosses de la société new-yorkaise. Le premier, Peter Champion, a fait fortune dans l'immobilier (mais il est aussi patron de presse). Le second, Boyd Larkin, s'occupe essentiellement de son groupe de presse. Il se trouve qu'Elsa Champion, l'épouse de Peter, veut remonter sur scène après quelques années d'absence, et elle engage un parolier, Philip Cavanaugh (qui est le narrateur du récit), et une pianiste, Claire. Vous aurez deviné qu'Elsa n'a pas une voix exceptionnelle. L'histoire pleine de rebondissements est souvent très drôle. Je ne me suis pas ennuyée en compagnie de ces personnages hauts en couleur qui arrivent à se sortir des situations les plus invraisemblables. La mécanique est très bien huilée. Je vous le conseille.

19 juillet 2012

Petite stridulation cigalière

Je (ta d loi du cine, squatter) profite sournoisement d'un "creux" estival pour "repasser" sur le blog de Dasola un article que j'avais rédigé (bénévolement!) il y a près de 2 ans pour la Lettre d'un "mouvement" d'épargne solidaire dont je fais partie, celui des CIGALES (Clubs d'Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l'Epargne Solidaire) (1).

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Elles entendent "Culture": les CIGALES sortent leur portefeuille (de leur poche révolver?)

Ce mois-ci [novembre 2010], la Feuille des CIGALES s’intéresse à la thématique de la culture. Ce secteur fait partie de ceux qui sont présentés comme «de prédilection» de nos Clubs d'Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l'Epargne Solidaire (CIGALES), - avec le bio, le commerce équitable, les énergies renouvelables, les entreprises d’insertion, les coopératives... Pour rappel, les porteurs de projets que nous finançons, en général, sont très rarement cigaliers eux-mêmes. Avec ce terme de "Culture", on pense spontanément davantage aux subventions du Ministère du même nom qu'à des entreprises qui s'inscriraient dans le marché. Regardons-y de plus près. En creusant un peu ce secteur «culturel», et notamment en examinant les entreprises déjà aidées en plus de 25 ans, on s’aperçoit que le spectre est large: Maison d’édition, librairie de quartier, société de presse éditant un magazine, production audiovisuelle, plusieurs lieux comportant de la programmation culturelle, fabrication de bijoux, et bien d'autres encore (notamment des projets issus de divers milieux artistiques). Quelques exemples non exhaustifs:

Dans le réseau de librairies «Folies d’encre», le site de Saint-Ouen a été cigalée il y a déjà quelques années. C’est un lieu de rencontres et de partage. Vernissages, expositions et lectures s'y enchaînent, faisant de la librairie un véritable lieu de sociabilité autour du livre. Citons également, à Paris, la librairie Mots et merveilles (livres audio, 13ème arrondissement), ou La Terrasse de Gutenberg (dans le 12ème). Certains projets de librairie ont même été développés par des anciens salariés de l'une ou l'autre, ce qui sous-entend un rôle de formation et  de transmission d'expérience.

Plusieurs entreprises, sinon de presse, du moins éditant des magazines, ont été cigalées: jadis, L'Agrandi était un journal reprenant, en gros caractères, des articles parus ailleurs, à l'intention des malvoyants. Sa publication s'est arrêtée il y a quelques années. Les magazines De l'air (photos) et Le Tigre, eux, continuent à paraître. La Maison d'édition Le temps des cerises continue également à sortir de nouveaux titres "hors des sentiers battus de la pensée dominante."

En ce qui concerne le spectacle ou la musique, le théâtre «La comédie Saint-Michel» (Paris 5ème) a sollicité les CIGALES et Garrigue (2) sur un quiproquo («La Passerelle» qu’avaient naguère financée les CIGALES et Garrigue n’était pas, comme le pensaient les porteurs de projet, le Théâtre de La Passerelle !). Toujours dans le milieu théâtral, une jolie histoire: Avec des Ailes. La porteuse de projet a créé sa compagnie théâtrale sous forme de SARL (là où la plupart des compagnies fonctionnent sous forme associative). Elle a pu bénéficier d’un co-financement par une CIGALES parisienne (qui assurait le suivi local) et une CIGALES de la région du Nord-Pas-de-Calais, dont elle est originaire.

L'association Musiques au pluriel (qui a cessé ses activités il y a quelques années) mélangeait dans ses concerts les traditions andalouses et arabes. Toujours vivace, la boutique de réparation d'accordéons "Accord Deléon" développe même la fabrication de nouveaux instruments.

Les CIGALES soutiennent aussi les activités audiovisuelles. La Cathode continue ses activités de vidéo engagée, après avoir hésité sur son modèle économique. De l’autre côté du périphérique (DACP) et récemment la SARL SCOP Inflammable productions ont également été financées.

La convivialité est au rendez-vous chez Cafézoïde (café culturel pour les jeunes). On peut aussi allier restauration et animation: je pense aux Saveurs d’Atabri (où la CIGALES qui soutenait le projet s’est longtemps occupée de la programmation culturelle), ou à Saraaba (financé plus récemment). J'arrête là pour cet inventaire à la Prévert (et les bijoux d'Ikken / Art Kem, que j'oubliais!).

Pour ce qui concerne les aspects plus artistiques, aucune CIGALES Artistes ne s'est créée à ce jour malgré les efforts déployés. Ce que je trouve en tout cas encourageant, c'est que la culture n’est pas forcément condamnée au statut associatif (qui vise, entre autres, à être éligible à des subventions publiques, et ne peut par définition dégager de bénéfices financiers à redistribuer). Créer une société dans le secteur culturel où l’on a envie de travailler, c’est toujours possible. Avoir la prétention, en plus, d’en vivre avec un salaire «décent», ... c’est nettement plus difficile, mais certaines entreprises cigalées y arrivent ! Ce n’est pas toujours sans mal, les entrepreneurs qui parviennent à dégager des bénéfices ne sont sans doute pas économes de leur temps ni de leurs efforts. Comme dans tout autre secteur (3).

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(1) Association régionale des CIGALES d'IDF: www.cigales-idf.asso.fr
(2) Société coopérative de capital-risque solidaire Garrigue: www.garrigue.net
(3) Annuaire des entreprises cigalées en IDF en téléchargement à partir du blog des CIGALES d'IDF.

2 septembre 2012

Nos voisins du dessous - Bill Bryson / Silex and the City (3. Le néolithique, c'est pas automatique) - Jul

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Je viens de terminer "mon" deuxième Bill Bryson, Nos voisins du dessous (Chroniques australiennes), un régal de lecture (Petite bibliothèque Payot, 445 pages, 1ère éd. 2000). Merci Mr Bryson de nous donner envie de faire 35 heures d'avion pour aller visiter ce pays qui est d'abord un continent méconnu dont les premiers habitants blancs furent des marins hollandais, ainsi que des forçats et autres prisonniers de droit commun relégués là par l'Angleterre. Cette terre aride à plus de 80% abrite le plus grand nombre d'espèces animales connues du monde, des végétaux rares, des paysages saisissants et la grande barrière de corail. Pour donner une idée de l'étendue de l'Australie qui fut d'abord peuplée d'aborigènes depuis plus de 50000 ans, Bill Bryson ne cesse de nous communiquer les distances phénoménales en milliers de kilomètres qui séparent les grandes villes comme Melbourne, Sidney, Cairns, Canberra, Darwin, Adélaïde, etc., où vit la majorité de la population (sur ce continent, il y avait à l'époque environ 20 milllons d'Australiens). Au détour des pages, il narre des anecdotes sur l'histoire de ce pays, sur ce dont il a été témoin, j'ai éclaté de rire de nombreuses fois. Une fois le livre terminé, je me suis dit qu'il faudrait que j'aille visiter l'Australie.

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Si vous avez aimé Silex and the City I et II (voir le billet de ta d loi du cine), je vous conseille ce troisième tome (sous-titré "Le paléolitique, c'est pas automatique") où l'on retrouve la famille Dotcom avec Blog, Spam, Web et Url qui font la découverte en 40 000 avant J.C. de "flèche book", de l'éruption d'une centrale nucléaire - pardon d'un volcan EDF, de l'évolution légale et non de l'évolution clandestine, etc. C'est très drôle, bourré de références à l'actualité contemporaine. Un bon cru.

11 novembre 2012

Le jour des corneilles - Jean-Christophe Dessaint / Une famille respectable - Massoud Bakhshi / Augustine - Alice Winocour

Chaudement recommandé par Alex, Le jour des corneilles de Jean-Christophe Dessaint est un film d'animation français visuellement très beau qui parle d'amour, d'une histoire en particulier, celle de Courge qui a perdu sa bien-aimée (morte en couches). Vivant comme un ermite dans la forêt, cet homme fort comme un bûcheron élève son fils à la dure. Le fils de Courge vit presque comme un enfant sauvage. Avec trois poils sur le caillou, il découvre néanmoins un jour, avec l'aide des esprits de la forêt, que la vie existe ailleurs. Il va se frotter à la civilisation en la personne de la jeune Manon, la fille d'un docteur, et aussi à des gens hostiles. La période où se passe l'histoire est assez indéfinie. Dans le village pas loin de la forêt, on voit des soldats blessés, et des poteaux électriques font partie du paysage. Les corneilles du titre sont capables de prononcer deux mots et jouent un rôle important vers la fin de l'histoire. Je ne suis pas sûre que le film soit compris par les tout-petits mais je le conseille à tous les autres.

Une famille respectable de Massoud Bakhshi est un film iranien très noir que l'on pourrait sous-titrer "Laisse l'oseille et tire-toi". C'est une histoire de captation d'héritage (une grosse somme est en jeu) au sein d'une famille iranienne plutôt ordinaire. Un professeur d'université (c'est lui qui doit hériter), parti depuis plus de 20 ans à l'étranger (conséquence de la révolution islamique de Khomeyni ) et revenu à Chiraz afin de donner des cours, attend qu'on lui délivre son passeport pour qu'il puisse repartir. Il retrouve sa mère qui reste inconsolable de la mort de son autre fils mort adolescent et martyr de la révolution. Le réalisateur brosse un portrait peu reluisant de cette famille où les femmes portent le foulard et les gants même chez elles. Cela n'empêche pas la jeune génération de vivre avec son temps: le portable et internet. Le neveu du professeur, personnage avide, cache bien son jeu. Ce cinéma ne ressemble pas du tout à celui d'Asghar Farhadi. On ne ressent aucune sympathie pour aucun des personnages.

Augustine d'Alice Winocour commence bien, car j'ai été tout de suite prise par cette histoire qui se déroule pour une grande part à l'hôpital de La Salpétrière à Paris dans le service du docteur Jean-Martin Charcot dans les années 1880. Une jeune femme de 19 ans, employée de maison, souffre de crises nerveuses (elle souffre d'hystérie) qui la laissent paralysée de l'oeil droit (sa paupière ne s'ouvre plus) et plus tard de la main gauche qui se rétracte. Le docteur pratique l'hypnose et elle fait partie des malades auscultées lors de séances presque publiques. J'ai été interloquée que le docteur fasse un diagnostic sans jamais ni regarder ni s'adresser à ses patientes (comme si elles n'étaient pas douées de raison). Il ne considère que le cas clinique. Vincent Lindon dans le rôle du docteur et Soko dans le rôle d'Augustine sont très bien ainsi que Chiara Mastroianni qui joue la femme du docteur (que l'on voit assez peu). J'ai été un peu déçue par la fin. Le docteur n'aurait pas dû agir comme il le fait. Sinon, il faut quand même dire que ce n'est pas du grand cinéma du point de vue de la réalisation. Un film que je conseille pour ce qu'il raconte et pour la prestation de la jeune Soko.

La réalisatrice a dû s'inspirer d'un tableau, semble-t-il assez célèbre, qui montre Charcot et une de ses patientes hystériques. Cette scène ressemble assez à une de celles du film.

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PS : Sinon, n'allez pas voir Paperboy de Lee Daniels, un film épouvantable à tout point de vue (et je n'ai rien d'autre à dire). J'ai souffert pendant la projection.

2 décembre 2015

Poison City (1er tome) - Tetsuya Tsutsui

Je (ta d loi du cine, squatter chez dasola) me glisse entre deux de ses billets pour présenter un manga dont le 1er tome m'a accroché et amené à "essayer" la chroniquette ci-dessous. Le second volume doit paraître demain 3 décembre: je tâcherai de le lire et de le chroniquer à son tour avant la mi-décembre!

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Dresser la chronologie du "seinen manga" Poison City (éditions Ki-oon) n'est pas simple. Dessinateur et scénariste, Tetsuya Tsutsui a mis en abyme fiction, réalisme et réalité dans cette oeuvre qui s'intéresse au milieu du manga au Japon. Sur 400 propositions qu'y reçoit chaque année une Maison d'édition, seules une vingtaine aboutiront à la publication d'une oeuvre, d'abord en magazine, puis, si le succès s'installe, en albums brochés (dont les royalties constitueront le gros de la rémunération de l'auteur, peu payé pour les planches originales publiées en magazines). Et si les droits sont achetés pour une publication à l'étranger, cela peut constituer le jackpot. Pas de droit à l'erreur, donc. Tetsuya Tsutsui a souhaité attirer l'attention du lecteur sur le risque que la liberté artistique se voie brider par des considérations morales, avec des "experts" qui s'arrogeraient un jour le droit de décider ce qui peut être vendu au public ou non. En 2019 (c'est demain!), le Japon s'apprête à accueillir le monde pour les Jeux olympiques, avec souci d'image à la clé. Cinq ans plus tôt, dans l'univers fictionnel, Mikio Hibino, jeune assistant mangaka, s'apprête à publier ses premières propres planches dans le mensuel (fictif) Young Junk (jeune bric-à-brac ?). Juste avant la parution, souci pour lui et son éditeur: un fait divers risquant d'être lié à l'histoire qu'il a dessinée, il doit la corriger. L'univers du manga commence donc à s'autocensurer. Retour dans le présent (fictif): pour être visible en librairie, les mangas passent sous les fourches caudines d'une commission animée par un puritain, ancien Ministre de la culture. Sans son visa, l'oeuvre est classée comme "déconseillée" ou même "nocive pour la jeunesse"... "Dans la vraie vie", Tetsuya Tsutsui avait appris par hasard, en 2013, que son manga Manhole avait été classé en 2009 comme "oeuvre nocive pour la jeunesse" dans le département de Nagasaki. Prépublié à partir du 10 avril 2014 dans le magazine Jump Kai, Poison City doit être transféré à partir d'octobre 2014 sur internet. Le 3 juillet 2015, l'oeuvre est distinguée en France par l'association des critiques de bande dessinée. Tetsuya Tsutsui a calligraphié ses remerciements pour ses "lecteurs français qui ont toujours soutenu son travail" le 10 juillet. Poison City nous montre différents échanges entre l'auteur, son responsable éditorial, les patrons de la Maison d'édition: un décryptage passionnant des dessous réels (notamment économiques) de l'univers du manga, et des contraintes qui pèseront peut-être demain sur la créativité: il faudrait la mobilisation des fans pour que le report reste minoritaire. A la fin du T.1 de Poison City, un éditeur américain (et pourquoi pas français?! NDLR) arrivait pourtant avec une proposition alléchante. Le dernier chapitre du second tome a été livré au Japon le 9 octobre. Ici, on l'attend avec impatience: rappelons qu'en France, la loi du 16 juillet 1949 avait instauré une Commission de surveillance et de contrôle pour les publications destinées à la jeunesse. Et aux Etats-Unis, dans les années 1950, le psychiatre Fredric Wertham a été à l'origine de la faillite de la plupart des éditeurs de "comics" américains, suite à la publication d'un livre liant lecture de comics et délinquance juvénile. Ne laissons pas Anastasie réaffuter ses ciseaux...

PS: merci à dasola pour les photos.
PS2: chronique du T. 2 le 21/12/2015.

6 août 2013

La couleur de la peau - Ramon Diaz-Eterovic

Voici un roman policier chilien que je vous recommande.

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Dans La couleur de la peau de Ramon Diaz-Eterovic (Edition Métailié), j'ai fait la connaissance du détective Hérédia et de son chat Simenon (avec qui il dialogue souvent). A Santiago du Chili, Hérédia travaille comme détective privé. Amoureux de la littérature, il apprécie aussi Mahler et le tango. Héridia est souvent aidé dans ses enquêtes par Campbell, un journaliste, par Seron, un flic à le retraite et par Anselmo, un kiosquier. Ce dernier va même loger un temps chez Hérédia. Dans ce cinquième roman paru en français - il faut que je lise les quatre précédents -, Hérédia est chargé de retrouver Alberto Coiro, un Péruvien de Lima, venu chercher du travail à Santiago et qui a brutalement disparu. C'est après avoir découvert dans une vieille maison abandonnée le corps pendu de Coiro qu'Hérédia devra enquêter dans les trafics de jeux clandestins et autre. Sans dévoiler la fin, Coiro s'est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Il ne sera pas le seul. Je suis content d'avoir découvert Ramon Diaz-Eterovic qui sait nous raconter des histoires où l'humain prime sur le reste. Il fait preuve de beaucoup d'empathie dans la description de ses personnages humains. J'ai hâte de retrouver Simenon, un chat de bon conseil. Lire le billet très complet de Noëlle.  

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