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Le blog de Dasola

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26 mars 2024

L'aube est bleue sur Mars - Florence Hinckel

C'est grâce à la première contribution de ClaudiaLucia au "challenge marsien" que je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) vous présente à mon tour L'aube est bleue sur Mars. Je l'avais déjà noté parmi ce que je prévoyais de lire ou voir d'ici au 31 mars de l'an prochain (2025), mais son billet m'a amené à regarder s'il était disponible en bibliothèque: deux exemplaires sur Paris, dont l'un emprunté... je me suis rué vers l'autre! Voici donc ma deuxième participation au challenge, et mon premier livre. Attention, hein, je ne vais pas m'engager à lire tous les livres chroniqués par les participant(e)s: j'espère bien qu'ils seront en trop grand nombre pour cela! ;-)

L'aube est bleue sur Mars, Florence Hinckel, éd. Nathan, 2022. 17,95 euros.

 

J'ai donc lu ce pavé léger (504 pages avec les "sources") en moins d'un week-end. "Imprimé en juin 2022" mais avec un copyright indiquant "août 2022", L'Aube est bleue sur Mars tire pourtant davantage du côté de la dystopie que de l'anticipation de par son contenu rédactionnel. En effet, aucune allusion n'y est faite au conflit russo-ukrainien, et les Russes y sont présentés comme coopérant activement avec les Occidentaux dans le secteur spatial - au contraire des Chinois.

 

De quoi s'agit-il? De la première expédition humaine vers la planète Mars, dans une coopération internationale impulsée par la Nasa qui, pour des raisons de communication, a souhaité embarquer, aux côtés de quatre astronautes "professionnel(le)s", trois "astronautes stagiaires" chargé(e)s de commenter l'expédition afin d'intéresser à l'aventure toute la jeunesse... Le "récit à la première personne" nous est raconté par Esther, jeune Française de 22 ans au départ, qui a pu être sélectionnée parmi les "happy fews".

 

Très maligne, à l'inverse des datations qui jalonnent les Chroniques martiennes (par exemple), l'autrice ne donne strictement aucune indication de date (d'année). Tout au plus peut-on spéculer, ce à quoi je me suis essayé, bien entendu. La covid-19 est encore un souvenir relativement récent lorsque survient un nouveau fléau, et puis 10 ans passent... avant que (re)commence véritablement l'action, ce qui amène la suite de l'histoire, je dirais, dans les années 2040, mais sans qu'aient eu lieu de véritables "ruptures" géopolitiques, technologiques ni sociétales, juste le "prolongement" de notre société du début des années 2020. Un univers très classique, donc, un peu comme Seul sur Mars auquel il est plusieurs fois fait allusion.

 

Avant son départ, Esther a eu une histoire avec un prénommé Hugo (j'ai beaucoup aimé l'histoire du "petit pas en arrière" lors de leur cheminement amoureux, p.77). J'ai apprécié à sa juste valeur une réflexion d'Esther qui se présente comme "athée" (p.281-282): "les Américains sont ainsi. Ils parlent pour tout le monde, mais en imposant leur point de vue. Et même leur dieu. On ne peut rien objecter, sur une mission à moitié financée par les Américains, mais je ne peux pas m'empêcher de penser que le dieu le plus puissant, dans une mission comme la nôtre, est celui de l'argent." [ce qui se confirmera d'ailleurs plus tard!]. p.407, on a une vision de ce qui aurait pu être un autre titre de l'ouvrage: "un coucher de soleil martien est bleu. Presque violet. Le bleu se disperse plus vite du fait de ses longueurs d'onde plus grandes. C'est pour cette raison que l'atmosphère martienne, composée de particules très fines, laisse passer la lumière bleue plus facilement que les autres couleurs".

 

À la différence de la plupart de ses "collègues", Esther revient sur terre après bien des péripéties (500 pages, même écrites gros et avec un large interligne, cela en permet). Elle nous a exposé son vécu mais aussi ses états d'âme durant l'expédition, y compris un moment plutôt gore - brrr! - qui m'a fait songer au massacre d'astronautes dans le film Life - Origine inconnue. Mais je ne veux surtout pas tout vous dévoiler (ce qui se passe sur terre "pendant ce temps-là n'est pas non plus trop réjouissant...).

 

Pour moi, ce roman se situe dans la catégorie du "Young adult", avec une jeune héroïne peut-être identificatoire pour certaines lectrices? J'avais déjà lu et chroniqué de la 'littérature jeunesse" à l'occasion de la première édition ("challenge de la planète Mars"), mais les ouvrages que j'avais alors dénichés étaient nettement plus anciens... d'autant que L'aube... n'avait pas encore paru lors de sa clôture. Ca se laisse lire! L'histoire appellera-t-il une suite? La fin est quelque peu abrupte, et on aimerait connaître la suite tant du "vécu" d'Esther que de l'aventure martienne... et de la vie sur terre aussi, tout simplement! Il y a encore de quoi écrire.

 

Changeons de sujet: d'un point de vue matériel, je voudrais préciser que j'ai fait le constat, sur l'exemplaire que j'ai eu entre les mains, d'une "couture", pour renforcer la solidité du "dos collé" et éviter que les pages de cet ouvrage de bibliothèque se détachent. C'était la première fois que je remarquais cela. L'opération semble avoir été pratiqué à titre préventif et non curatif (sous la couverture plastifié autocollante). Je ne sais pas si cela a été fait avec ce qui pourrait être une grosse "machine à coudre" ou bien à la main. Je n'avais jamais vu cela je crois bien (ou n'y avais-je jamais prêté attention?). Ci-dessous, on peut apercevoir la "couture" côté 4e de couverture sur la droite. 

Outre le billet de ClaudiaLucia, d'autres blogs en avaient parlé avant même le début du challenge, essentiellement au moment de la sortie du livre: Judith (du blog Les chasseuses de livres), Tampopo24 (Les blablas de Tachan), Joy Halt-Roen, Le nocher des livres, Ororia, Mylène, Tchatcho (Les lectures de Ju) - liste non exhaustive. À noter que l'auteure en répertorie la plupart sur son propre site internet. Depuis L'aube est bleue sur Mars, elle a déjà publié, ou s'apprête à publier, plusieurs ouvrages... 

 

Edit du 28/03/2024: en ce qui concerne la couture de cet exemplaire, je me suis renseigné en le rendant à la bibliothèque. Voici ce que j'en ai retenu: ils ont un budget "réparation de livres", mais celui-ci est insuffisant. Du coup, ils font du "préventif" (et non du "curatif"), notamment pour les livres "jeunesse" qui "sortent" beaucoup, en interne. "Des collègues" ont été formées, elles ont un outil (une machine?) qui leur permet de faire les trous, puis elles passent le fil... 

 

PS: et bien entendu, ce billet rentre aussi dans le cadre du 12e Challenge de l'Imaginaire repris en 2024 par Tornade

 

23 mars 2024

Le café sans nom - Robert Seethaler

Après Le tabac Tresniek, Une vie entière et Le champ, je viens de terminer Le café sans nom de Robert Seethaler (Edition Sabine Wespieser, 246 pages, 2023). L'histoire se passe en 1966 à Vienne, Autriche. Robert Simon, 31 ans, travaille comme livreur dans les stands du marché dans le quartier du Prater. C'est son dernier jour de travail car il va réaliser son rêve de devenir gérant d'un café poussiéreux et à l'abandon depuis quelque temps. Ce café situé à côté du Prater n'aura pas d'enseigne, c'est un café sans nom mais pas sans clients. En effet, les commerçants et les passants prennent l'habitude de s'attabler pour manger (des tartines au saindoux, des oignons et des cornichons) ou pour boire de la bière. Robert s'adjoint l'aide de Mila, une jeune couturière récemment licenciée de l'usine où elle travaillait. Ils forment une bonne équipe. Cette aventure va durer 10 ans. Mila se mariera avec un boxeur. Robert, lui, perd trois doigts dans un accident et  continuera sa vie solitaire. En attendant, pendant 10 ans, ils noueront des liens plus ou moins amicaux avec des habitués comme un boucher ou un artiste peintre. C'est un roman qui se lit assez vite et très agréablement mais il faudrait un plan de Vienne pour se repérer avec tous les noms de rues que Robert Seethaler énumère. Pour ceux qui ne connaissent pas la capitale de l'Autriche, on s'y perd un peu mais ce n'est pas très grave. Toujours est-il que pour moi, Le tabac Tresniek et Une vie entière restent mes deux romans préférés de l'écrivain. 

20 mars 2024

Chroniques martiennes (série TV) - Michael Anderson & Richard Matheson (d'après Ray Bradbury)

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) remercie le même collègue qui m'avait créé le logo de ce "challenge marsien (autour de la planète Mars) - 2e édition", pour m'avoir aussi fait connaître le DVD de la série TV tirée des Chroniques martiennes de Ray Bradbury, par lequel j'entame mes propres contributions à ce challenge réitéré. 

Cette série en trois épisodes date de 1979-1980, du vivant de Ray Bradbury donc, et avant même la parution de l'édition ré-actualisée (avec recul des dates) des Chroniques martiennes (le livre). Je l'ai regardée avec intérêt. J'ai trouvé par moment le traitement de son "univers" quelque peu "kitsch" et proche de celui de la célèbre série TV Star Trek, mais la série lorgne aussi (à mon avis), par moment, vers Les envahisseurs. Le "livret" qui accompagne le DVD ne parle que du recueil de nouvelles et non de l'histoire de son adaptation à la télévision. 

 

Les trois épisodes, qui durent une heure et demi chacun, condensent (ou font appel à) plusieurs nouvelles du recueil à chaque fois, et sont articulés autour du personnage qui ouvre et clôt le livre (mais que l'on n'y retrouve que dans deux ou trois nouvelles au total), qui apparaît ici à la fois comme témoin et "acteur", le colonel Wilder. C'est Rock Hudson qui incarne ce militaire que l'on apprécie pour l'humanisme (l'humanité?) dont il fait preuve. 

 

L'introduction du premier épisode (titré Les expéditions) est astucieuse (1976 est déjà passé, à l'époque du tournage de cette série...). L'action commence véritablement en "janvier 1999" (comme dans l'édition de 1954 des Chroniques de Bradbury) avec des images d'un décollage de fusée plus authentiques que celles des films de James Bond. Bon, je n'en dirais pas autant des rendez-vous orbitaux. On peut apprécier à sa juste valeur le mélange de réalisme, et d'irréalisme, avec des opérations spatiales traitées sous forme quasi-poétique (durée du voyage vers Mars non précisé, communications radio qui semblent instantanées...). Les Martiens "dans leur état de nature" sont longilignes, chauves et évanescents. Ils ont des yeux impressionnants, et le même genre de relations de couple que les terriens. Et le sort de la première expédition est scellé à la 28e minute, cependant que le colonel Wilder et la salle de contrôle sur terre s'époumonent comme à la fin d'Objectif lune... Autre touche de réalisme "à l'américaine", entre deux expéditions, les dialogues entre officiers généraux, supérieurs ou subalternes sur le bien-fondé de leur mission (coloniser Mars)... Bref, nous sommes maintenant en avril 2000, et c'est au tour de la "deuxième" expédition de se poser... pour connaître la destinée de la troisième (dans le recueil de nouvelles), astucieusement traitée. A cette occasion, un Martien prend la parole, revendique la télépathie des siens et expose leur point de vue. Sans transition, nous sommes sur terre, à la veille de la troisième expédition (de la série), qui sera commandée par Wilder cette fois-ci. Lui et sa femme donnent d'ailleurs une soirée (on pense au "milieu" des astronautes américains d'Apollo, dont les familles se fréquentaient entre elles). En juin 2001, l'odyssée de la quatrième expédition (dans le livre) est donc transposée à cette expédition définitivement "victorieuse". Jeff Spender revient d'une exploration en autogyre et annonce "cette planète est morte, désormais" (varicelle, une maladie qui ne tue personne, sur terre). Même si quelques Martiens ont pu survivre en s'enfuyant dans les montagnes, leur civilisation qui avait évoluée durant un million d'années est anéantie. Et la lune luit toujours (selon le titre de la nouvelle originale, publiée en 1948). "Les Terriens sont doués pour détruire les choses"... Une ville martienne, même inhabitée, est impressionnante (très minérale). Spender (joué par Bernie Casey) prend parti contre les colonisateurs, jusqu'à la mort... au prix d'un petit western, et de débats philosophiques. 

 

Le deuxième épisode est titré (en version française) Les colons. Nous sommes en février 2004, trois ans après l'expédition Wilder, c'est l'envol de la colonisation de masse en direction de Mars. Une voix off nous annonce que le colonel Wilder a été nommé coordinateur de la planète, pour sauver ce qui peut l'être de l'antique civilisation martienne face à l'avancée inexorable des humains, quelques mots condensent aussi une nouvelle (qui traite du renommage des lieux). Chacun des colons a sa propre motivation. En fait, cet épisode "entrecroise" plusieurs nouvelles, au lieu de les faire se succéder. Septembre 2006: un couple accueille sur Mars leur fils disparu sur Terre... mais ils ne sont pas les seuls à l'espérer. Dans le même temps, des missionnaires arrivent sur la planète, dont le Père Peregrine (Fritz Weaver), en quête de Dieu lui-même. Lui et son acolyte Stone ("Pierre"!) sont accueillis chez la famille Wilder, qui remarque que leurs 12 (!) communautés ont grand besoin de guides spirituels (c'est ici la nouvelle "Les ballons de feu" qui va être développée). Cet aspect "mysticisme-religieux", les tourments existentiels du Père Peregrine et leur traitement sont peut-être plus "corrosifs" pour la mentalité américaine que pour un mécréant comme moi. Les "anciens" qu'il rencontre (âmes? anges?) sont sans doute plus sages que lui - pour autant que son "dialogue" avec eux ne soit pas le seul produit de son imagination. Dans le même temps, on apprend incidemment, lors d'une visioconférence avec le général qui est le supérieur de Wilder sur terre, que la situation s'y aggrave, au point que les candidats à l'exil martien sont de plus en plus nombreux. Nous revenons ensuite chez le couple qui fête le retour de l'enfant prodigue. La mère ne saura malheureusement pas écouter celui-ci qui lui dit qu'il n'a pas envie d'aller en ville (lieu de perdition, comme chacun sait)... Celui qui a toutes les apparences de leur fils ne veut pas s'y faire "attraper"... Il s'y évapore pourtant très vite, cependant que le Père Peregrine rencontre le Christ dans son église (mieux que Don Camillo! - ou que l'oeuvre originale de Bradbury, pauvre Martien martyr!). L'aventure s'achève par un drame provoqué par la foule, sous les yeux de Wilder. Pendant ce temps-là, la guerre est prête à éclater sur terre. Les colons vont être évacués de Mars... au plus mauvais moment, pour certains (nouvelle "La morte saison"). On assiste à une sorte de course de chars à voile, assez onirique (et la musique est dans le ton). Puis la terre s'illumine... 

 

Dans le troisième et dernier épisode (Les Martiens), fin 2006, "la terre est morte" dès le prologue. Wilder y fait un passage à la recherche de son frère, avec ce qui m'a paru des citations de Docteur Folamour comme du Prisonnier... Ensuite, le scénario s'appuie sur plusieurs des nouvelles les plus connues (j'ai été amusé de voir qu'il s'agissait de celles adaptées en BD). Dans "Les villes muettes", Dan Driscoll, qui pensait être seul sur Mars (depuis combien d'années?), entend le téléphone sonner dans une ville humaine désertée... ce qui l'amène à se lancer dans un long voyage en autogyre. Dans le même temps, alors que nous sommes dans "Les longues années", Peter Hathaway scrute le ciel. Il aperçoit une fusée dans le ciel étoilé, et entreprend de lui faire signe (La guerre des étoiles est passée par là!), en vain. De son côté, arrivé à destination, Driscoll a les yeux qui brillent autant que ceux d'un Martien. Puis il déchantera, jurant, mais un peu tard, que Geneviève Selsor ne l'y prendrait plus. Cependant, la fusée revient se poser à proximité de la maison d'Hathaway, à la grande joie de celui-ci. Wilder et le Père Stone en descendent. Mais quand ils font connaissance de la femme et de la fille d'Hathaway, quelque chose cloche... Mais tout est bien qui finit bien: Driscoll arrive! Nous sommes maintenant en mars 2007, et on revoit la belle "camionnette martienne" utilisée par Wilder dans les épisodes précédents. Il va enfin réussir à parler à un "véritable" Martien (comme dans la nouvelle "Rencontre nocturne"). Celui-ci lui donne une leçon de philosophie de vie, en lui parlant de sa propre planète, qu'il appelle non pas Mars, mais Tir... Finalement, Wilder emmène sa propre petite famille (femme et enfants) en pique-nique sur le canal (nouvelle "Pique-nique dans un million d'années"). A cette occasion, il entame un feu de joie en brûlant des paperasses inutiles (renvoyant ainsi dos à dos Le Capital et - il faut être très vigilant! - La richesse des Nations [d'Adam Smith]) et enfin "ses" (ou plutôt son) vaisseau(x).

 

Le troisième DVD contient un "bonus" de 28 minutes fort instructif. J'ai globalement bien apprécié ces visionnages. 

De son côté, Rock07 s'était montré très critique, en 2015, sur cette série (édition DVD précédente).

19 mars 2024

Scandaleusement vôtre - Thea Scharrock

Juste après Chroniques de Téhéran, j'ai enchaîné avec Scandaleusement vôtre de Thea Scharrock, un film délicieusement british qui se passe à Littlehampton, une petite ville d'Angleterre dans les années 20. Quand l'histoire commence (tirée de faits qui se sont vraiment déroulés), Edith Swan reçoit sa énième lettre anonyme d'injures. Edith est une "vieille fille" qui vit encore avec ses parents. Elle leur sert de factotum. Les lettres ont commencé à arriver juste après qu'Edith se soit brouillée avec Rose Gooding, leur jeune voisine, veuve de guerre et mère d'une petite fille appelée Nancy. Rose, une Irlandaise, parle dans un langage de charretier et bien entendu elle est suspectée d'avoir écrit ces lettres. Elle nie tout en bloc mais rien n'y fait. Pourtant, Gladys Moss, une femme, agent de police de la petite ville, est convaincue que Rose est innocente grâce à la graphologie qui n'est pourtant pas reconnue pour confondre un coupable. Je ne vous dirai pas qui est le "corbeau" mais on l'apprend sans surprise aux deux tiers du film. C'est très bien interprété par Olivia Colman (qui est co-productrice du film) et Jessie Buckley. On passe vraiment un bon moment. Je note avec plaisir que les spectateurs sont revenus dans les salles. Les derniers films que j'ai vus étaient projetés dans des salles presque pleines.

16 mars 2024

Chroniques de Téhéran - Ali Asgari et Alireza Khatami

Voici un film que je vous conseille absolument : Chroniques de Téhéran d'Ali Asgari et Alireza Khatami qui est sorti le mercredi 13 mars 2024. Il s'agit de neuf saynètes avec des hommes et des femmes dans différentes situations à Téhéran aujourd'hui. 

Le film commence avec un plan fixe de Téhéran, immense mégalopole et il se termine par un tremblement de terre qui fait s'écrouler des bâtiments

Un homme déclare la naissance de son fils David, un prénom occidental qui est proscrit en Iran.

Une mère dans un magasin habille sa fille pour la rentrée. Il faut voir la gamine Selena qui, au départ, danse avec un casque sur les oreilles et qui se retrouve presque voilée.

Une élève est convoquée par la directrice. Cette lycéenne a réponse à tout et surtout elle nie être venue sur une moto conduite par un jeune homme. 

Une jeune femme chauffeur de taxi au crâne presque rasé conteste une contravention car son hijab aurait glissé pendant qu'elle conduisait.

Une jeune femme de trente ans pas encore mariée se présente à un entretien d'embauche dans une société privée dans le domaine du béton. Cette jeune femme a du courage et ne se laisse pas faire face à quelqu'un de très entreprenant et qui a la fin l'injurie.

Un homme tatoué sur les bras et le corps avec les vers d'un poème, vient retirer son permis de conduire. Il est délirant de constater que du fait d'être tatoué, on peut ne pas obtenir son permis.

Un homme au chômage depuis cinq mois qui vend des chaussettes sur un marché pour vivre, répond à une annonce. L'entretien est surréaliste puisque, étant musulman chiite, on lui demande des choses comme quels sont les piliers de l'Islam, ou s'il connaît par coeur des sourates. Et en fin de compte, il doit mimer sa manière de faire ses ablutions.

Un réalisateur demande une autorisation de tournage devant un fonctionnaire qui fait des remarques sur le scénario, c'est génial et d'une tristesse infinie car à la fin, il n'y a plus de scénario.

Une femme cherche à retrouver son chien (animal impur en Iran).

Il y a neuf saynètes pendant 1H15, j'en aurais voulu au moins neuf de plus. 

Lire les billets d'Henri Golant et Pascale

14 mars 2024

Les routes oubliées - S.A. Cosby

Après La colère qui m'avait emballée cet été, et avant Le sang des innocents que je ne manquerai pas de lire [chroniqué le 22/04/2024], j'ai terminé Les routes oubliées de S. A. Cosby (Edition Sonatine, 342 pages). S. A. Cosby est un écrivain qui monte, qui monte et c'est justifié. Dans Les routes oubliées dont l'histoire se passe en VirginieBeauregard Montage (un nom qui ne s'invente pas) est un ancien jeune délinquant afro-américain qui a réussi à s'en sortir grâce à sa grande habilité dans la conduite de voitures et autres pick-up. Désormais, il dirige un garage avec son cousin Kelvin. Marié à Kia, il a deux garçons, une mère en maison de retraite qui coûte cher et une fille d'un premier lit qui voudrait faire des études universitaires en comptabilité. Il vit dans un mobile home avec sa femme et ses fils. Sa femme rêve d'habiter un jour une maison en "dur". Quand le roman commence, force est de constater que les affaires du garage ne vont pas fort car un concurrent qui s'est installé pas loin prend moins cher pour les révisions et réparations. Beauregard commence à avoir du mal à joindre les deux bouts et il accepte de participer en tant que chauffeur à un braquage d'une bijouterie, afin de régler les différentes dettes accumulées. Bien entendu, l'affaire tourne mal car la bijouterie appartient à un gangster nommé Lazy qui est entouré de vraies brutes. La tension monte rapidement et on se demande comme Beauregard va s'en sortir. Un roman très bien mené que je vous recommande. 

Lire le billet de Jérôme.

12 mars 2024

Un chemin de tables - Maylis de Kerangal

Je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) participe avec ma chronique du jour au challenge "Monde ouvrier & mondes du travail" proposé par Ingannmic. C'est dasola qui m'a procuré mon dix-huitième livre de la collection "Raconter la vie" que j'avais présentée naguère. Il s'agit d'un texte de Maylis de Karangal, auteure connue pour ses romans, mais dont je n'avais encore jamais lu aucune oeuvre.

Maylis de Kerangal, Un chemin de tables, Seuil (Coll. Raconter la vie), 2016, 102 p.

Dans ce livre, la romancière nous croque le parcours d'un certain Mauro, dont le lecteur ne saura jamais, faute de patronyme associé à ce prénom, s'il s'agit d'une personne réelle ou d'un personnage de fiction. L'auteure nous fait découvrir Mauro, jeune étudiant fraîchement diplômé (il possède un Master de sciences économiques) dans un train en route vers Berlin en 2005. On sait qu'il a fait un séjour Erasmus à Lisbonne durant ses années d'études et y a croisé une demoiselle Mia. Après une année de Master, il a séjourné chez une cousine par alliance à lui qui l'a initié aux produits bio et à leur cuisine. Retour en arrière: enfance, traditions familiales du bien-manger, début du plaisir à réaliser des gâteaux (grâce aux livres de recettes) dès l'âge de 10 ans, puis rôle de préposé à cuisiner pour sa bande de copains de collège puis de lycée... En 2004, c'est un un job d'été dans un restaurant - par relation - qui l'initie à la cuisine professionnelle. Mais en 2006, stagiaire atypique (pour un stage non rémunéré!), Mauro se montre moins enclin que les jeunes "alternants" en études professionnelles qu'il côtoie en cuisine à supporter d'éventuelles brimades, quand la "brigade" doit exécuter sans la moindre erreur les plats demandés, en répliquant "oui chef!" comme chez les Marine (Yes Sir! - ça fait songer à la scène de la cuisine des Tontons Flingueurs) sous peine de se prendre le plat rejeté en travers de la figure... Il tient seulement trois semaines. Immédiatement embauché en CDI dans un autre restaurant, il y découvre une bonne ambiance mais des horaires dingues pour un SMIC qui ne l'est pas (parfois 70 à 80 heures réellement travaillées par semaine, de 07 h du matin à pas d'heure le soir, dans la restauration?). Un autre restaurant encore, et c'est l'inscription au CAP (certificat d'aptitude professionnelle) "Cuisine", en candidat libre [bon, ici, je me dis que l'épreuve pratique a l'air infiniment plus difficile que les écrits ou oraux qu'il m'a juste fallu passer pour obtenir mes quatre Bac Pro...]. L'année 2008 voit Mauro se lancer dans son propre restaurant. Au bout de quatre ans, il s'aperçoit qu'il travaille comme un damné et que toute sa vie est désormais happée par son activité, alors même que gagner beaucoup l'argent n'est pas sa préoccupation première. Il part visiter les "cuisines du monde" (Bangkok, la Birmanie...), avant de revenir en France vagabonder dans d'autres métiers de la restauration. A la fin du livre, il annonce à la narratrice vouloir de nouveau ouvrir un restaurant... Car tout au long du livre, la narratrice croise régulièrement Mauro, dont l'âge le rend à peu près contemporain des propres enfants de l'autrice? 

Le livre a été réédité en Folio en 2019, après l'arrêt de la collection "Raconter la vie". Je ne suis pas persuadé que cela ait pu être le cas de la totalité des titres de la collection (mais cela l'avait été pour Regarde les lumières mon amour écrit par Annie Ernaux). 

Quelques blogs ayant chroniqué ce livre (dans l'une ou l'autre de ses éditions - liste non exhaustive): Philisine CaveGilles Pudlowski, Maggie, l'ancien blog d'Une comète, CeciBon, les blogs Gout de food, Onarretetout aussi, Guy (plutôt déçu), Au bout de mes souliers (dernier billet en 2019), A propos de livres, Géraldine, Piplo. 

Edit pour répondre à celles qui se demandent si j'ai aimé ce livre: j'ai été intéressé par l'aspect sociologique qui nous est exposé, mais je ne raisonnerai pas en terme de "j'ai aimé" ou "je n'ai pas aimé". Le style (ou l'absence de style?) n'est pas un paramètre que je sais prendre en compte (j'étais nul en "commentaire composé"!). 

9 mars 2024

Inchallah un fils - Amjad Al Rasheed

Je vous conseille d'aller voir Inchallah un fils, un film (du réalisateur Amjad Al Rasheed) venu de Jordanie. L'histoire se passe de nos jours, à Amman la capitale. Un matin, Nawal, une femme dans la trentaine, prépare le petit déjeuner. Elle est mariée et a une fille, Noura. Le mari semble encore dormir. En réalité, il est décédé dans son sommeil. La vie de Nawal est chamboulée, elle a perdu un mari, un amant et elle n'est plus grand-chose. Tout de suite, la famille se manifeste, en particulier le frère de Nawal et son beau-frère. Ce dernier lui réclame assez vite la fin des paiements d'un pick-up appartenant au mari décédé et surtout, comme Nawal n'a pas de garçon, elle devra vendre l'appartement où elle habite et le montant obtenu sera partagé entre elle et la famille du beau-frère. Et elle risque de perdre la garde de sa fille Noura qui serait confiée à l'oncle Rifqi qui régente tout. Nawal travaille sans être déclarée comme aide-soignante dans une famille chrétienne. Elle s'occupe d'une femme impotente qui souffre de démence. Elle gagne très peu et ne peut évidemment pas rembourser les traites du pick-up, qu'elle ne veut pas vendre, même si elle ne sait pas conduire. Pour retarder l'inévitable, Nawal déclare qu'elle est enceinte. La tension monte de plus en plus. Le réalisateur ne perd jamais Nawal de vue. Elle est de tous les plans. Mouna Hawa qui interprète Nawal est formidable. Le réalisateur décrit bien la condition féminine dans un pays régi par le patriarcat. J'ai vu ce film le jour de la journée de la femme. Lire le billet de Pascale et celui de Selenie.

8 mars 2024

A man - Kei Ishikawa

J'avais vu A man de Kei Ishikawa l'année dernière dans le cadre d'une semaine de cinéma japonais dans un grand multiplex parisien que je fréquente. J'avoue que l'histoire ne m'avait pas emballée, je n'avais pas compris les tenants et les aboutissants. Je pense que j'étais fatiguée à l'époque. Après avoir lu le billet de Pascale, je me suis décidée à le revoir cinq semaines après sa sortie en 2024. Bien m'en a pris. J'ai mieux apprécié cette histoire d'échange d'identité entre le fils d'un aubergiste et le fils d'un meurtrier et tout ce qui s'ensuit et les réactions des proches ainsi que l'enquête menée par un avocat tenace engagé par l'épouse d'un des protagonistes pour avoir la fin mot de l'histoire. Les spectateurs, dans la salle où je me trouvais, étaient plus attentifs que d'habitude. Un beau film avec des comédiens inspirés. Je recommande. Lire le billet de Carole Nipette.

7 mars 2024

Traité sur l'intolérance - Richard Malka

Lorsque j'avais (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) rédigé mon billet sur Le droit d'emmerder Dieu de Richard Malka (billet paru il y a plus d'un an), j'avais prévu de publier à la suite de la première chronique le présent Traité sur l'intolérance, du même auteur. On avait renâclé. Depuis, une nouvelle guerre a éclaté au Moyen Orient... et on reparle antisémitisme en France. Voici donc ma chronique. Ce second livre est paru en janvier 2023, et je l'ai acquis début février 2023. Il reprend sa plaidoirie pour le procès en appel concernant les condamnations prononcées à l'issue de celui en première instance sur les attentats de janvier 2015, procès en appel qui s'est déroulé du 12 au 20 octobre 2022 (deux des 14 condamnés ayant fait appel).

P1150694
Traité sur l'intolérance, Richard Malka, 96 pages, 2023 

Bien sûr, comme les titres de ces livres, les extraits que j'ai choisi d'en citer sont provocateurs. Mais avant d'enfourcher de grands chevaux de bataille, lisez vous-même ces deux ouvrages. 

P1150697Le second titre compte pratiquement le même nombre de pages que le premier, mais il est imprimé plus gros. La plaidoirie qui en représente la plus grande partie a été prononcée le 17 octobre 2022 au nom de Charlie Hebdo. Le texte rentre tout de suite dans le vif du sujet, en réagissant sur le fait que le procès en appel se déroule dans la salle Voltaire de la Cour d'assises au Palais de justice de Paris (sur l'île de la Cité). "Voltaire... Le pourfendeur des religions, l'esprit libre, révolutionnaire (...). Celui qui n'hésitait pas à affirmer, en un temps où cela entraînait la mort, l'enfermement ou l'exil, plus certainement qu'aujourd'hui, que le christianisme était la religion "la plus ridicule, la plus absurde et la plus sanguinaire qui ait jamais infecté le monde", ou encore "la superstition la plus infâme qui ait jamais abruti les hommes et désolé la terre".
Ainsi osait-on parler des religions au XVIIIe siècle. Il est de ceux auxquels nous devons de vivre libres. Mais nous ne le savons plus, nous l'avons oublié."

Richard Malka ne souhaitait pas plaider "contre" les accusés, mais plutôt s'attaquer à l'essentiel: les causes des tueries perpétrées. 

p.13: "l'action de ces terroristes est motivée par l'islam - ils le disent - et plus précisément, par une vision de l'islam.
Je parle d'une croyance, pas des croyants. Je parle d'une vision de l'islam, pas des musulmans (...). 

Bien sûr, il y en a d'autres, que partagent des centaines de millions de musulmans à travers le monde, qui aimeraient bien vivre tranquillement leur religion sans qu'on les renvoie toujours à la vision des Kouachi et surtout, sans les privations de liberté qu'elle induit.
Mais ce n'est pas une vision marginale. C'est la plus militante, la plus organisée, la plus conquérante, la plus communicante, la plus opulente aussi grâce à ses bailleurs de fonds (...) (p.15).

(...) Il faut combattre cette vision car il en va de l'intérêt de tous et parce que, pour citer une dernière fois Voltaire, "il est honteux que les fanatiques aient du zèle et que les sages n'en aient pas" (p.16). 

Richard Malka balaie ensuite longuement l'histoire de l'islam, expliquant les débats qui l'ont traversé aors qu'il avait à peine quelques siècles d'existence, entre l'école de pensée des mutazilites, qui considéraient la raison comme le premier fondement de l'islam, et les hanbalites, qui considéraient le Coran comme incréé, c'est-à-dire directement issu de Dieu.

Du coup, sur plus de 50 pages, l'avocat nous fait un magistral cours d'histoire de la religion musulmane, entrecoupée d'exemples d'excès liés à la vision de l'islam "littéral", tout en remettant dans leur contexte historique et sociologique tant le contenu des sourates que les "hadiths, c'est-à-dire des paroles ou des actes attribués au Prophète et rapportés par des chaînes de transmetteurs sur plusieurs siècles" (p.40). "Certains de ces hadiths légitiment effectivement la violence et sont largement invoqués par les fanatiques" (p.41). Mais il en existe 500 ou 600 000... "Chaque courant de l'islam a les siens et rejette ceux des autres" (p.42). Et surtout, le blasphème n'a pas toujours été puni de mort. Dans le livre, il est aussi question des rapports entre Mahomet et les Juifs. Ainsi que de la manière dont les siècles ont adouci tant le christianisme que le judaïsme. "Quant au judaïsme, il n'a heureusement plus grand-chose à voir avec celui des origines parce que la Torah est un texte bien plus guerrier encore que le Coran et souvent beaucoup plus clair et expéditif sur les châtiments, ce qui est normal puisqu'elle a été écrite mille ans plus tôt" (p.51). "Heureusement, ces textes ont été interprétés mille fois, en particulier dans le Talmud qui est une réécriture de la Torah.
L'interprétation, la critique et même l'humour grinçant de Charlie Hebdo, sont une nécessité vitale pour les religions elles-mêmes et surtout pour les hommes" (p.52-53).

La partie finale du Traité sur l'intolérance, titrée "Pour aller plus loin", consiste en quatre pages, qui précèdent la chronologie des événements et une bibliographie citant les ouvrages utilisés par Richard Malka. A mon avis, ces quatre pages auraient pu figurer en début d'ouvrage: elles expliquent pourquoi ce plaidoyer-là, dont la religion est le sujet, a été prononcé à cette occasion-ci (2022), et ni lors du procès des caricatures en 2007, ni lors du procès de 2020. 

Les blogs La bibliothécaire, Voyages au fil des pages, Notre jardin des livres et Sin City en ont parlé, ainsi que Matatoune. Le blog Je lis donc je suis aussi (mais celui-ci n'accepte pas les commentaires). 

*** Je suis Charlie ***

3 mars 2024

Les nuits de la peur bleue - Eric Fouassier / Le loup des ardents - Noémie Adenis

Voici deux romans "historiques" qui se lisent agréablement et très vite.

Je commence par le troisième tome de la série Le bureau des affaires occultes sous-titré "Les nuits de la peur bleue" d'Eric Fouassier (Edition Albin Michel, 373 pages), dans lequel on retrouve l'inspecteur Valentin Verne et la femme dont il est épris, Aglaé Marceau, une ancienne actrice qui est devenue policière auprès de Valentin. Ils forment désormais une équipe avec un dénommé L'entourloupe, escroc repenti, et Tafik, ancien mamelouk des armées napoléoniennes, au sein du bureau des affaires occultes. Ils sont sous les ordres de Vidocq, le nouveau chef de la brigade de sûreté. L'histoire se passe en 1832. Louis Philippe, premier roi des Français est au pouvoir et le choléra (la mort bleue) commence à faire des ravages à Paris. C'est dans ce contexte que des hommes sont retrouvés morts du choléra mais surtout mutilés d'un organe: foie, poumon, rein. D'autres hommes, des scientifiques, vont être enlevés puis retrouvés morts, victimes du choléra et de la peste pulmonaire. Valentin suit des pistes qui ne sont pas les bonnes. Le mobile du ou des meurtriers ne nous sera révélé qu'à la toute fin. L'histoire est très bien menée. Un bon moment de lecture...

... Tout comme Le loup des ardents de Noémie Adenis (coll. La bête noire, Robert Laffont, 293 pages) qui nous ramène plus loin dans le temps, en 1561 (sous Charles IX) en Sologne à Ardeloup (village qui existait encore au XVIIème siècle mais qui est aujourd'hui disparu). On fait la connaissance de quelques-uns des 45 habitants du village solognot dont Guy le laboureur, sa femme Antoinette, leurs trois enfants, et Loïse, une petite fille de 10 ans que la famille a recueillie mais qui n'est pas aimée. Telle Cosette, elle est la laissée-pour-compte de la famille (on apprendra pourquoi par la suite). Il y a aussi Jehan, le couvreur et trésorier de la paroisse, Silvain le charretier, Gaston le boulanger, Léon le pêcheur et Eudes le potier. Peu de temps après l'arrivée d'un médecin, Aymar de Noilat, dans le village, un mal étrange se met à frapper les habitants, d'abord Sylvain et puis d'autres. Soit ils se mettent à avoir des hallucinations, soit ils se plaignent d'avoir les jambes qui brûlent alors que leurs membres sont glacés. Il fait très froid, il neige, il y a de la brume. Les habitants, sans être dans la misère, se restreignent pour la nourriture. Les terres ne sont pas bonnes pour les récoltes. Au fil des pages, on nous décrit l'évolution de la maladie, en particulier l'apparition de la gangrène aux membres inférieurs. ll s'agit du mal des ardents ou ergotisme. Je vous laisse chercher dans Wi**pe**a. A l'époque, on ne savait pas ce que c'était et on accusait (à tort) des sorcières de cette maladie et de tant d'autres choses. Il n'y a pas vraiment d'enquête mais un récit à propos d'une vengeance qui a attendu sept ans avant de se réaliser.

 

2 mars 2024

Cocon - Machiko Kyô

C'est grâce à Audrey (du blog Light And Smell) que j'ai (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) eu connaissance du challenge "Mars au féminin - édition 2024" créé par l'instagrameuse Floandbox, qui invite à "ne lire que des autrices, sous toutes les formes de livres, roman, essai mais aussi graphiques, manga etc.". Son ancien blog paraît ne plus être alimenté depuis décembre 2023. N'étant pas sur Instagram, je n'ai pu consulter le règlement complet pour 2024. J'espère que cet intéressant challenge de "mise à l'honneur" d'autrices n'est pas exclusif mais bien inclusif (offrant la possibilité que des blogueurs, et pas seulement des blogueuses, participent; et acceptant que des blogs qui rédigent aussi, durant ce mois, des articles sur des auteurs, puissent participer...)! Je me rappelle avoir participé naguère au challenge "Chick Litt for men" organisé par Calepin en 2008-2009: si celui-ci était "réservé aux hommes", il était plaisamment ouvert aux "supportrices officielles"... mais je pense qu'on était moins chatouilleux sur "l'inclusion", à l'époque.

Bref, cela tombe bien: je souhaitais rédiger un petit article sur un manga (et on sait que beaucoup de "mangaka" sont des femmes) que le hasard m'a mis entre les mains. Il s'agit cette fois-ci non pas d'un tome d'une série mais de ce qu'on appelle un "one shot", de parution récente, Cocon

Cocon (dessin & scénario: Machiko Kyô), Imho, janvier 2024, 210 pages

Vers la fin de la Seconde guerre mondiale, à Okinawa, les élèves de "la meilleure école pour filles" de l'île sont réquisitionnées comme équipières d'un hôpital de campagne. Nous suivons San et ses camarades, dont l'insouciance initiale s'effrite au fur et à mesure de leurs confrontations à la violence. Mayu, aussi ambiguë que ses sentiments pour San, apparaît comme la personnalité la plus forte, en lui suggérant de se construire un "cocon mental" protecteur, tel celui d'où surgira finalement le papillon qu'est devenu la chenille initiale, "après". 

Ici, pas de surnaturel, de monstres infernaux ni de meurtriers démoniaques à affronter en d'épiques combats. Juste la guerre qui touche désormais le territoire national du Japon, les bombes et les tirs de l'ennemi que la propagande leur a tellement appris à redouter que le suicide est la solution prévue en dernier recours. Horrible, non? Hé bien, le talent sensible de Machiko Kyô consiste à montrer comment cohabitent moments de douceur (retours dans le passé insouciant) et événements traumatisants. Mais le dessin suggère, plutôt que de montrer ceux-ci. Les jeunes héroïnes sont engagées corps et âmes dans la "protection civile". Les hommes (les soldats des deux camps) sont esquissés en silhouettes fantomatiques. Des pages entières peuvent rester muettes. Le style peut rappeler à certains moments le Myasaki de Nausicaa de la Vallée du Vent, à d'autres certains dessins de mouvement "au trait" tels qu'Hugo Pratt pouvait les pratiquer. 

Je vous cite quelques pages, en espérant vous donner envie de découvrir cette oeuvre.

p.6-7 (ci-dessus) & 8 (ci-dessous): le cocon imaginé.

p.46 (ci-dessus) et p.29 (ci-dessous)

Ci-dessous (p.98-99 & 100), une scène terrible, et son explication. Est-ce que cela vous fait aussi songer à Hugo Pratt?

Edit du 10/03/2024: Tampopo24 (du blog "Les blablas de Tachan") en a aussi parlé. Et même une chronique en espagnol (de l'édition parue en cette langue en 2020) sur le blog de Rebecca (mais à part Colo, je ne connais aucun blog bilingue...).

29 février 2024

Challenge marsien (autour de la planète Mars) - 2ème édition

Pour la seconde fois (mais j'espère que ce sera la deuxième!), je (ta d loi du cine, "squatter" chez dasola) lance un nouveau challenge marsien (autour de la planète Mars), à partir de demain 1er mars 2024 et jusqu'au 31 mars 2025 (13 mois). La première édition avait eu lieu du 1er mars 2021 au 31 mars 2022, et contenait plein d'idées...

 

... Mais commençons par recadrer le challenge. Je reprends à l'identique les règles que j'avais énoncées lors de la première édition: peut être répertorié pour ce Challenge tout billet de blog publié dans la période et ayant un lien avec la planète Mars. Mon billet de 2021 comporte aussi une liste appréciable d'idées en tout genre (SF, romans, BD, films, séries TV, articles scientifiques...). Lors de cette première édition, j'avais comptabilisé une quinzaine de participant(e)s, moi compris, pour une quarantaine de billets au total. Mais il s'agissait du tout premier challenge que j'organisais! Peut-être que, en treize mois, et si je m'y applique correctement dès le départ, on fera mieux?

 

Si donc durant cette longue période, votre curiosité vous mène vers des oeuvres ayant un lien avec la planète Mars, n'hésitez pas! La seule menace que vous pourriez affronter sera celle des correcteurs orthographiques, qui insisteront pour corriger en "martien" mon "marsien" ("forme vieillie" utilisée au début du XXe siècle). Après, si certaines veulent jouer avec le gentilice de quelques communes françaises, le jury décidera s'il accepte...

Avec le logo, voici le "crédit" à mentionner: "Challenge marsien (autour de la planète Mars) - 2ème édition, lancé par Ta d loi du cine sur le blog de dasola, jusqu'au 31 mars 2025"

 

En tout cas, cette année, j'aurai eu un jour de plus pour préparer le présent billet (février bissextile).

 

Edit du 11/03/2024: en réponse à la question de Pativore, je précise que, oui, les participations sont ouvertes à tous types d'oeuvres: livres comme films, séries ou d’autres œuvres artistiques comme les chansons, opéras, théâtres, spectacles, et même non-fiction, ouvrages scientifiques, revues, documentaires, etc.!

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Pour vous inscrire, merci de mettre un commentaire sous ce billet dans un premier temps, puis de revenir signaler la parution de votre chronique (avec son lien). Le challenge restera signalé dans la colonne de droite du blog de dasola (et le récapitulatif sera mis à jour ci-dessous au fur et à mesure des inscriptions et parutions). 

Participations:

* Ta d loi du cine (inscrit le 01/03/2024) : Michael Anderson & Richard Matheson - Chroniques martiennes (série TV, d'après Ray Bradbury) / Florence Hinckel - L'aube est bleue sur Mars / Fredric Brown - Une étoile m'a dit / Red Team - Ces guerres qui nous attendent (2030-2060), saison 3(prévisions challenge: deux articles par mois...) René Cothias & Antonio Parras - Le lièvre de Mars (série BD) / Robert Heinlein - En terre étrangère / Ben Bova - Mars & Retour sur Mars / Romain Benassaya - Les naufragés de Velloa / Alix Alex - Le château des étoiles (série BD) / Brian Aldiss - Mars blanche / Arthur C. Clarke - Le marteau de Dieu / Philip K. Dick - Des nuées de martiens / Philip K. Dick - Le dieu venu du Centaure / Kim Stanley Robinson - La trilogie de Mars (Mars la rouge + Mars la verte + Mars la bleue) / Gustave Le Rouge - Le prisonnier de la planète Mars / Lavie Tidhar - Central Station / Gil Bartholeyns - L'occupation du ciel / Octavia E. Butler - L'initiation & Imago (respectivement T.2 & T.3 de la trilogie Xenogenesis) / Vincente Cifuentes (dessin) & Dobbs (scénario) - La guerre des mondes (BD en 2 tomes d'après H. G. Wells) / Thilo Krapp - La guerre des mondes (BD d'après H. G. Wells) / Mary Robinette Kowal - Lady Astronaute (série de trois livres et de diverses nouvelles) / Mary Robinette Kowal - L'Homme superflu / Laurent Genefort - Les temps ultramodernes / Laurent Genefort - La croisière bleue / Alastair Reynolds - De l'espace et du temps / Mizu Sahara (dessin) & Makoto Shinkai (scénario) - The Voices of a distant Star (manga) / ... 

 

* The Killer inside Me (inscription le 06/03/2024) Gil Bartholeyns - L'occupation du ciel 

 

* Claudialucia (inscrite le 02/03/2024) : Florence Hinckel - L'aube est bleue sur Mars / René Cothias & Antonio Parras - Le lièvre de Mars (trois premiers tomes d'une série BD qui en compte 9) / (prévisions) Ray Bradbury - Chroniques martiennes 

 

* Le nocher des livres (inscrit le 30/03/2024) : Lavie Tidhar - Central station / Laurent Genefort - La croisière bleue (nouvelles) / Mary Robinette Kowal - L'Homme superflu 

 

* Sunalee (inscrite le 02/03/2024) : Erin Swan - Walk the Vanished Earth [Parcourir la terre disparue] 

 

* Enna (inscrite le 05/05/2024)Florence Hinckel - L'aube est bleue sur Mars 

 

Inscriptions:

* Audrey [Light and Smell] (inscrite le 01/03/2024, prévisions) : John Brown - Simulacres martiens / Florence Hinckel - L'aube est bleue sur Mars 

* Je lis je blogue [Doudoumatous] (inscrite le 01/03/2024) 

* Jojoenherbe (inscrite le 02/03/2024, prévisions) : Alix Alex - Le château des étoiles (série BD - T.3) / Ethan Chatagnier - L'affaire Crystal Singer / ...

* Pativore (billet d'annonce, inscrite le 11/03/2024) : Gil Bartholeyns - L'occupation du ciel / Cédric Degottex - Mars Express TEM  

* Erwelyn (billet d'annonce le 02/04/2024

* Sacha (annonce dans billet du 19/04/2024

28 février 2024

Sans jamais nous connaître - Andrew Haigh

Après avoir lu le billet de Pascale et sur les conseils d'un collègue, je suis allée voir Sans jamais nous connaître (All of us Strangers) du britannique Andrew Haigh. Le scénario est adapté d'un roman d'un romancier japonais Taichi Yamada décédé en novembre dernier qui est intitulé Présences d'un été. C'est le seul roman de l'auteur qui a été publié en français en 1988. Pour en venir au film, il m'a paru silencieux à part une scène dans une boîte de nuit. Il y a quatre personnages; d'une part, Adam (écrivain et scénariste) et Harry qui vivent dans une tour d'immeuble à Londres et ils semblent en être les seuls occupants et d'autre part, les parents d'Adam qui vivent dans une maison dans une banlieue éloignée de Londres. Il se trouve que les parents sont décédés des années plus tôt dans un accident de voiture alors qu'Adam avait 12 ans. Cela n'empêche pas Adam d'aller les voir. Ces visites à des fantômes lui font du bien. Il a désormais le même âge qu'eux mais il reste le petit garçon de ses parents. Quant à la relation homosexuelle entre Adam et Harry, elle évolue un peu mais cela reste distant sauf à la fin. Après avoir lu les commentaires chez Pascale, je n'avais pas forcément tout compris mais ce n'est pas grave. C'est une histoire d'amour filial, de deuil et peut-être d'amour tout court. Un beau film.

PS : depuis lundi après-midi, je suis dans le plus grand désarroi car canalblog a basculé chez overblog sans prévenir (surtout les blogueurs), des articles avaient disparu mais plus tard ont réapparu mais surtout surtout des commentaires ont disparu. La plateforme est différente, j'ai du mal à m'y retrouver surtout après 17 ans de canalblog. Je sais que Ta d loi du cine ne manquera pas d'écrire sur cet événement.

25 février 2024

La ferme des Bertrand - Gilles Perret

Mon ami Ta d loi du cine m'a emmenée voir La ferme des Bertrand de Gilles Perret le 10 février dernier et je l'en remercie. A l'heure où le monde paysan est en émoi et revendique à juste raison, le film montre une certaine réalité sur le monde paysan depuis 50 ans. C’est un film documentaire sur la transmission de génération en génération. La ferme s'est concentrée sur l'élevage d'une centaine de vaches laitières. Elle se situe en Haute-Savoie et le lait sert à la fabrication du reblochon.

Ta d loi du cine: j'ai retenu que la filière de valorisation du lait s'est organisée après la guerre (AOC Roblochon en 1958), sous forme de coopérative qui achète le lait et le transforme (avec des statuts faisant qu'aucun acteur de la filière ne puisse à lui seul peser trop lourd aujourd'hui). 

Il y cinq générations: le grand-père, trois de ses fils (André, Joseph et Jean), leur neveu Patrick (et sa femme Hélène qui en 2022, va partir à la retraite), les trois enfants du couple (seul le fils, Marc, travaille à la ferme avec le gendre, Alex) et les petits-enfants. Pour illustrer ces diverses époques, il y a trois films en un. Les images sont en format carré ou format rectangulaire selon que le tournage date de 2022, 1997 (le premier documentaire du réalisateur qui est voisin des Bertrand) ou 1972 (des extraits d’un film réalisé par Marcel Trillat). Les intervenants principaux sont donc, en 1972 et 1997, les trois oncles, des frères restés célibataires. Deux des oncles connaissaient le prénom de chaque vache (presque une centaine). Le troisième qui a fait la guerre d’Algérie pendant son service militaire réparait les clôtures et faisait d’autres travaux (réparations mécaniques...).

Ta d loi du cine: d'une ferme familiale, les trois frères, par leur travail acharné, ont développé leur exploitation agricole. Dans le reportage de 1972, on les voir construire de leurs mains, cassant des cailloux comme des forçats, une grande étable neuve. Ils ont pu récupérer les terres d'autres fermiers qui, eux, partaient à la retraite sans reprise familiale derrière eux. 

Même s'ils ne se plaignent pas, André, celui qui parle le plus, révèle que leur vie (celle des trois oncles) a été difficile. Les trois frères ont les souvenirs de l'Occupation et de la vie en autarcie, quand leur fratrie (ils étaient sept enfants) vivait de rien. Dans tout le film, il est peu question du côté financier ou des relations avec les industriels comme Lactalis. On ne parle pas de chiffre. Ils ne se payent pas vraiment de salaire mais ils vivent correctement sans faire de folie. L’argent qu’ils gagnent sert à investir (dans la terre ou dans l'outillage indispensable). À l'époque, le travail était harassant: les vieillards ont les épaules et les mains abimées. André, l’oncle survivant est tout courbé, les deux autres sont morts relativement jeunes.

Ta d loi du cine: c'est touchant de voir comme la jeune génération prend soin de mettre des copeaux sur la pente enneigée qui conduit à l'étable pour qu'il puisse, ensuite, grimper tout seul (sans qu'on ait à lui tenir le bras) mais sans risque. Le côté financier est abordé sous l'angle de la valeur du "patrimoine foncier" accumulé et conservé au fil des décennies, malgré les pressions financières liées à la spéculation sur ces terres aujourd'hui agricoles en Haute-Savoie.

Il considère que ce n’est pas un travail pour les femmes même s’ils ont bien accepté que la femme de Patrick les aide pour les veaux. En 2022, il est question de traite avec des robots mais Hélène continue le nourrissage des veaux au biberon avec le lait de leur mère. On garde les génisses mais les veaux partent pour l’abattoir. Dans la partie filmée en 2022, André, l’un de trois oncles, le seul survivant, n’aime pas regarder en arrière. Désormais, il s’occupe de ses poules, et il admire la nouvelle génération. Ils ont repris à leur compte le fait de ne pas abîmer le paysage. 

Ta d loi du cine: j'ai noté la reprise de gestes similaires, d'une génération à l'autre, mais avec des outils différents: le "fauchage-débroussaillage" autour des pieds des arbres au milieu des pâturages, à la faux pour les premières générations, avec une débroussailleuse à fil ensuite. Mais on retrouve le même geste de l'outil porté par-dessus l'épaule pendant la marche. Ou bien, le foin fané au râteau et à la fourche d'abord, de manière mécanisée ensuite. 

L’entretien des pâturages avec le tracteur est aussi important que la traite des vaches. On ne voit pas les femmes de la famille, elles doivent travailler ailleurs. On voit un peu la ferme sous la neige avec les vaches mais surtout au printemps et en été. Pendant l’hiver (plus de 4 mois), les bêtes sont confinées dans un immense hangar. À certaines périodes, il faut se lever à 5h du matin. A l’heure actuelle, les fermiers peuvent s'accorder une semaine de vacances dans l’année maximum. Dommage que l’on ne voit pas assez les filles du neveu (mort à 50 ans) même si elles interviennent deux fois, en 1997 et 25 ans plus tard. En tout cas, la 5ème génération fera ce qu’elle veut: continuer ou arrêter. 

Ta d loi du cine: j'aimerais vraiment qu'il y ait un quatrième volet, en 2047. Je ne suis pas certain d'être encore là pour le voir... Parmi les critères pour le maintien de l'intérêt pour ce métier, il y aura sans doute l'assurance d'un revenu décent, et la possibilité de passer à une vie avec moins de contraintes (et davantage de congés possibles qu'une seule semaine par an?). 

D'autres billets sur le film: Pascale, Henri Golant, Chris, ou Wilyrah (chez qui, depuis bien longtemps, on ne peut plus mettre de commentaires). Et sinon, le lien à propos du film avec en particulier le dossier de presse. 

Et voici le logo de l'activité chez Ingannmic sur le monde ouvrier et les mondes du travail
(lire, mais aussi voir, donc):
 
LOGO_MONDE_OUVRIER_&_MONDES_DU_TRAVAIL

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

23 février 2024

Ce que je sais de toi - Eric Chacour

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Je remercie à nouveau Luocine pour avoir donné un très bon conseil de lecture avec Ce que je sais de toi d'Eric Chacour, un premier roman (Edition Philippe Rey, 300 pages magnifiques). Le récit se divise en trois : Toi, Moi et un épilogue appelé Nous. En 1974, Tarek, un homme de 25 ans issu d'une famille chrétienne du Caire, vient de perdre son père qui était médecin. Tarek est devenu aussi médecin. Il vit entouré de femmes : sa mère, sa soeur de deux ans plus jeune et une domestique, Fatheya, une sacrée personnalité et la confidente des secrets de famille. Et puis, il va se marier avec Mira, une jeune femme de bonne famille. En 1981, Tarek va développer un dispensaire à l'abandon dans un quartier défavorisé, le Moquattam. Il reçoit beaucoup de patients et en particulier, un, Ali, 16 ans dont la mère souffre d'un mal incurable. Il ne va pas tarder à découvrir la profession du jeune homme mais Tarek n'y attache pas trop d'importance car il est très attiré par ce garçon. Et malgré les quolibets, Tarek va engager Ali pour l'aider avant ce dernier ne disparaisse. On le dit mort. Tarek, désespéré, émigre au Canada en laissant tout derrière lui, mère, soeur et épouse. J'ai été sensible à la très belle écriture et à l'histoire. Je vous laisse découvrir qui est le narrateur, le "Moi". Le récit se termine en 2001. Un très beau roman que je vous conseille. Tout comme GambadouBernie et Mademoisellelit ainsi que Ritournelle.

20 février 2024

Nuit noire en Anatolie - Özcan Alper

La bande-annonce m'avait paru prometteuse et en effet, je n'ai pas été déçue par Nuit noire en Anatolie de Özcan Alper. Le film se déroule de nos jours (avec un retour en arrière) en Anatolie. Ishak, les cheveux hirsutes, est un joueur de luth qui joue de son instrument à l'occasion de mariages ou dans des boîtes de nuit. Un jour, on l'appelle pour qu'il revienne assister sa mère mourante. Il a quitté son village natal sept ans plus tôt et on apprend pourquoi au fur et à mesure du déroulement de l'histoire. La disparition suspecte d'Ali, un jeune garde forestier, est en effet survenue à cette époque. Ali venait d'Istanbul, il avait dans l'idée de croiser un caracal, un félin pratiquement disparu dans la région. Il s'est mis presque tout de suite les hommes du village à dos car il enlève les pièges à ours et arrête sans ménagement les contrevenants. Par ailleurs, plutôt beau garçon, il séduit Sultan, la jolie fille à marier du village, en lui donnant des leçons de maths. Les rumeurs circulent dans le village sur le fait qu'Ali "en est" d'autant plus qu'un jour lui et Ishak se baignent ensemble dans un point d'eau. Je vous laisse découvrir les péripéties de ce film qui aborde le sujet de l'homosexualité avec délicatesse et plein de non-dits. Les images sont magnifiques. Il faut dire que le paysage pentu est extraordinaire. Il est escarpé avec des gouffres abyssaux. Les pierres et les conifères se côtoient. On sent le danger en permanence. Un très beau film qui m'a fait penser à Burning days dans le traitement du sujet. Lire le billet de Mymp qui a aimé autant que moi.

17 février 2024

Daaaaaali! - Quentin Dupieux

Autant je n'ai pas trop apprécié Yannick, autant j'ai souvent souri en visionnant Daaaaaali! *, le nouveau film du réalisateur Quentin Dupieux qui a aussi écrit, monté et éclairé le film qui dure 1H19. Judith (Anaïs Demoustiers), une jeune journaliste travaillant pour un magazine, est arrivée à obtenir un interview de Salvador Dali qui a accepté. La première séquence est irrésistible car Judith attend le maître dans une chambre d'hôtel. Le couloir est interminable pour parvenir à la chambre. Et l'on voit Salvador Dali marcher et avancer mais il n'approche pas vraiment, d'un plan à l'autre, on le voit toujours au fond du couloir. La séquence dure plus de cinq minutes et c'est très amusant. C'est le premier Dali interprété par Edouard Baer (très bien). Il y en a trois autres (interprétés par Pio Marmaï, Jonathan Cohen et Gilles Lellouche) et un Dali âgé (d'où certainement les 6 "a" du titre). Dali s'attendant à être filmé repart comme il est venu laissant la pauvre Judith désemparée. Dans ce film surréaliste, on assiste au déroulement d'un cauchemar qui débute en enfer, on voit un cow-boy tirer sur un évêque et d'autres péripéties. En parallèle, Judith arrive à obtenir un nouvel entretien cette fois-ci filmé, mais rien ne se déroule comme prévu. Sous son aspect brouillon, le scénario tient la route. Le film est réjouissant. Un bon moment de cinéma où l'on voit Romain Duris manger des pâtes comme un cochon et jouer un producteur de film assez détestable en traitant Judith de boulangère (une insulte dans sa bouche) alors qu'elle a été pharmacienne pendant quatre ans avant de changer de voie.

Lire les billets de Pascale, Selenie et Princecranoir et je n'oublie pas Henri Golant.

* avec six "a" [Edit du 22/02/2024]

14 février 2024

Proust, roman familial - Laure Murat

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Grâce à Luocine que je remercie encore, j'ai lu Proust, Roman familial de Laure Murat (Edition Robert Laffont, 219 pages, plus 18 pages de notes et 10 pages d'index de personnes et personnages) qui a été récompensé à juste titre du prix Médicis essai en 2023. Laure Murat née en 1967 vit à Los Angeles depuis plusieurs années. Elle a rompu ses relations avec sa famille depuis plusieurs années. Homosexuelle, elle vit avec une femme et n'a pas d'enfant, elle est féministe, vote à gauche et elle est professeur à l'université de Los Angeles. "Pour le milieu d'où je viens, c'est excéder de beaucoup le délit de cumul des mandats" (p.14). Ce comportement était une chose inconcevable dans la famille dont elle est issue. En effet, Laure Murat appartient à la famille du duc de Luynes (favori de Louis XIII) par sa mère et est descendante d'un beau-frère de Napoléon, Joachim Murat, par son père. Laure est une princesse Murat. Et Proust dans tout ça? Laure Murat le déclare à la fin de l'ouvrage: Proust l'a sauvée. Elle a découvert Proust quand elle avait une vingtaine d'années avec La recherche du temps perdu où elle a retrouvé le monde révolu dans lequel elle a évolué quand elle était jeune. "L'aristocratie, royaume du signifiant pur et de la performance sans objet, est un monde de forme vides" (p.20). A priori, les arrière-grands-parents de Laure ont connu Proust. Ce dernier s'est inspirée de ses rencontres avec ces aristocrates pour décrire certains personnages de La Recherche. Laure Murat* alterne dans son récit l'histoire de sa famille du côté maternel et du côté paternel en remontant dans le temps tout en analysant en parallèle l'oeuvre majeure de l'écrivain, c'est absolument passionnant et pas du tout rebutant. Elle évoque les relations houleuses qu'elle a eues avec ses parents. Cet essai a la grande qualité, enfin j'espère, de donner envie de se (re)plonger dans La Recherche du temps perdu. Elle nous dit bien que ce n'est pas un roman difficile à lire (je suis d'accord). Il est intéressant de savoir que le nombre d'exemplaires des différents volumes vendus depuis 1913 n'est pas énorme par rapport au fait que l'oeuvre est dans le peloton de tête des chefs-d'oeuvre de tous les temps. On parle pas mal de cette oeuvre mais combien l'ont lue? (p.110-112). Un essai que je vous recommande car je pense que vous allez apprendre plein de choses. Lire le billet de Dominique

*et non Proust comme Anne me l'a fait gentiment remarquer

12 février 2024

Lettre à un Inuit de 2022 - Jean Malaurie

Je (ta d loi du cine, « squatter » chez dasola) présente un livre qui, à deux mois près, aurait pu figurer au "challenge sur les minorités ethniques" proposé par Ingannmic en 2023 (vérification faite, aucun blog ne l’y a proposé). Mais ce qui m’a pour ma part amené à le lire seulement maintenant, c’est le décès de son auteur, Jean Malaurie, à 101 ans révolus (22/12/1922-05/02/2024). J'ai emprunté l'ouvrage au système de prêt de livres de l'AMAP dont je fais partie.

Lettre_a-un-Inuit-de-2022
Jean Malaurie, Lettre à un Inuit de 2022, récit, Fayard, octobre 2015, 160 pages
(un regard angoissé sur le destin d’un peuple)

Je cite les premières lignes du livre : « C’est à toi, Inuit, que je m’adresse. Debout ! Peuple du Groenland, réveille-toi ! Ne renonce pas à ton avenir ! L’Arctique est à la veille d’un désastre. Le pétrole, l’uranium suscitent des projets inconsidérés et l’ombre d’un conflit nucléaire avec des sous-marins au pôle se profile. »

Jean-Malaurie_2001

Dans cette "lettre-testament", c’est surtout au "peuple premier" du Groenland qu’il a étudié durant plus de 70 ans que Malaurie s’adresse, au long de la vingtaine de courts chapitres que comporte l’ouvrage (quelques titres: «L’homme a su plus qu’il ne sait»; Une écriture orale; L’animiste, en survie chrétienne; «Lève-toi et marche!»). Je suppose que le millésime choisi ne l'était pas au hasard, puisqu'il correspondait à son propre centenaire (dont rien ne lui assurait, en 2015, qu'il l'atteindrait et même le dépasserait!). Le livre en gros caractères comporte huit pages de photos en cahier central [photo : Jean Malaurie, 3 mai 2001], ainsi que plusieurs cartes en début et en fin d’ouvrage.

Au fil des pages, l’auteur revient sur son parcours, sa carrière, ses rencontres, en tant qu’ethnologue « de terrain » (et non « de bibliothèque »). 

Entre autres, j’ai été frappé par l’exemple qu’il donne (p.48-49) : alors qu’il enregistrait au magnétophone un groupe, dans un igloo, le doyen, en écoutant la bande au bout de 20 minutes, lui dit avec colère : « cet appareil est mauvais. Je n’ai jamais prononcé ces mots ». L’appareil était réducteur : il ne « captait » rien de la gestuelle, des efforts de langage simplifié pour se mettre « au niveau » d’un blanc inculte, de l’approbation silencieuse de l’auditoire qui « validait » ce qui était dit… « Le seul enregistrement est mensonger parce que fragmentaire ».

Pour ma part, je l’avoue, je suis beaucoup plus sensible à ce genre d’exemple purement sociologique (comme l’information que 40% de la population active au Groenland est constituée de fonctionnaires ou de para-fonctionnaires travaillant pour le gouvernement, que la quasi-totalité des échanges s’effectue avec le Danemark, que les Danois représentent 11% de la population mais la majorité des cadres…) qu’à d’autres aspects plus « mystiques » du livre, portant sur le chamanisme, le rapport au monde, les perceptions extra-sensorielle, l’animisme, ou la croyance que proclame Malaurie en l’entité Gaia (la planète terre sur laquelle nous vivons et dont nous faisons partie)…

Jean Malaurie a par ailleurs été le fondateur de la collection Terre humaine en 1954 chez Plon, collection qui compte aujourd’hui une centaine de titres, dont trois ou quatre lui sont dûs (elle en est aujourd’hui à son troisième directeur de collection). J’ai pu, comme tout le monde, lire quelques-uns de ces titres au cours des quatre dernières décennies. Selon ce que j’en comprends, le projet était nettement plus ambitieux que la collection Raconter la vie que j’ai évoquée il y a quelque temps. Il s’agissait ici davantage de faire rédiger « à la première personne » des ouvrages dont chacun ferait sens mais aussi mémoire pour la recherche ethnologique présente ou future.

Jean Malaurie déplore d’ailleurs, en 2015, qu’il n’existe pas une Maison d’édition spécifiquement groenlandaise pour traduire certains titres, ceux concernant le pays. Il signale aussi le manque d’établissements d’enseignement supérieur, qui amène les jeunes souhaitant faire des études à s’exiler à l’étranger, d’où ils hésitent, ensuite, à revenir. J'ai noté l'anecdote qu'il rapporte (pp.114-115): lors de l'inauguration du Musée des Arts premiers, quai Branly, un premier ministre d'un Etat d'Afrique de l'Ouest lui a demandé de dire de sa part à Jacques Chirac qu'il ne se retrouvait pas beaucoup dans ces peuples racines. "(...) Nous avons de grandes universités en Afrique noire. Où sont-elles représentées dans ce musée parisien de l'histoire des peuples?".

Le livre se conclut sur une exhortation à la jeunesse inuite à prendre son destin en main, pour créer une nation groenlandaise. 

********************

Pagedemandeenexistepas_12-02-2024-10h10Je change totalement de sujet pour signaler que, durant tout le week-end dernier et jusqu'à ce lundi 12 février, dasola et moi n'avons pu accéder à la partie "administrateur" du blog, cependant que nous constations avec chagrin que, même si le blog restait consultable, il était rigoureusement impossible d'y enregistrer le moindre commentaire (un message en rouge s'affichait, signalant cette impossibilité et invitant à réessayer "d'ici quelques minutes"...). 

Selon les informations disponibles, la plateforme canalblog est en pleine migration sur de nouveaux serveurs, d'où les "couacs" ces derniers temps...

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